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August, 2021

Les carabes, des insectes auxiliaires bien utiles au jardin
Le Soi, le Moi, la conscience, le Je , l'Ego

MOI, SOI, CONSCIENCE, JE.....

En psychologie, le problème essentiel est de déterminer quelle est la nature du Soi.

A quoi faisons-nous référence quand nous disons moi?

Quelle est la différence entre le moi et le Soi?

Pourquoi parle-t-on d'un Moi universel et d'un Moi personnel?

Qu'entend-on exactement par sujet et par conscience?

Les réponses données par différents psychothérapeutes et analystes et autres ( spiritualistes, gnostiques, ...etc) diffèrent beaucoup entre elle.

Elles vont de Freud , à Assagioli, le transcendantaliste. Tous observent le même phénomène et se sont donnés pour mission de soigner, de soulager, voire de guérir ; mais chacun voit son travail dans une clarté différente, car, à chacun, le Moi apparaît très différemment.

On ne peut discuter le concept de sujet sans prendre en considération le concept opposé qu'est celui d'objet.

La conscience, telle qu'elle est connue actuellement, est la relation entre le sujet et l'objet, entre le Je et le monde.

Notre expérience, cependant, ne se limite pas seulement au monde dit extérieur, à ce que l'on voit, a ce que l'on touche, à ce que l'on entend, aux choses auxquelles on se heurte, auxquelles on prend plaisir ou qui nous blessent.

Même si nous fermons les portes de nos sens et nous nous retirons dans une solitude complète et sans activité musculaire, nous n'en faisons pas moins l'expérience d'un «monde dit intérieur» fait d'un flot ininterrompu de sensations et de pensées ou images mentales.

Que nous vivions dans un monde intérieur ou que nous soyons touchés par des éléments extérieurs, ce sont toujours des objets dont le sujet devient conscient.

Le sujet est ce que nous appelons le Je. Toutes les expériences sont dues au fait que le sujet remarque des changements dans la nature, la position et les activités des objets auxquels il est relié. Que ce soient des objets physiques ou des images psycho-mentales provenant de son monde intérieur et qui sont les plus dangereuses si non intégrées à la réalité ou non comprises, non élucidées.

Mais le Je peut-il en fait remarquer que son monde change si lui-même est constamment changeant ?

Dit simplement, la conscience est la relation entre des objets qui changent et un sujet qui ne change pas, donc qui a une individualité et une identité distinctes et caractéristiques.

Le sujet (ou le Je) ne peut rester dans cet état de permanence, s'il est pris dans la roue du changement et perd son identité caractéristique et particulière, il ne peut y avoir conscience, mais inconscience.

Le Je est submergé par le monde; l'immuable est donc vaincu par le changement.

Si l'on veut que le monde ne submerge pas le Je, il est évident que le Je doit avoir une nature fondamentalement différente de celle du monde. Il doit être dans le monde mais non de ce monde. Roc de permanence dans la mer du changement, la PIERRE Alchimique.

Mais ce que l'on appelle le Je est en réalité de la même nature que le monde. Il est, lui aussi, affecté (donc changé et transformé) par les changements et modifications parfois violentes ou persistantes qui traversent une société ou les valeurs religieuses et culturelles.

Dans les périodes de bouleversement social, le Moi de chaque individu ne peut maintenir son identité spécifique, parce qu'il est enraciné dans un type particulier de société et conditionné par des structures socioculturelles particulières.

Le Moi est avant tout l'expression de la place et de la fonction que la personne occupe dans la société.

En cosmo-psychologie, le caractère de ce Moi est déterminé essentiellement par Saturne (la pierre), et la nature de sa participation à la société, par Jupiter.

Ces deux archétypes planètaires sont essentiellement représentatifs des fonctions collectives et sociales, la manière dont la personne se différencie du plus grand tout dont elle sait qu'elle fait partie, et au sein duquel elle trouve, ou tente de trouver, une place stable.

Si la société est dotée d'une économie stable, d'une structure sociale et même pour ceux qui le souhaite d'une structure religieuse bien établie, le Moi de l'individu va en refléter l'aspect le plus constant.

Les changements qui interviennent dans la vie de cette personne et qui affectent son développement organique, ses capacités, peuvent être expliqués par l'adhésion à une religion ou les traditions de sa culture autant que par les structures cycliques qui le touchent. Elle est donc fermement établi dans sa position, sa fonction sociale et sa relation aux autres, elles-mêmes stables et bien enracinées.

Mais si la personne vit dans une société secouée par les bouleversements et les crises, où les valeurs dites religieuses, morales et sociales se désintègrent, son Je est pris à son tour dans ce tourbillon de changements et de transformations.

Les changements continuels et imprévisibles qui se manifestent dans le "monde intérieur" ou de l'intériorité comme dans l'aspect extérieur de la personne, ne rencontrent pas de centre permanent ou cadre de référence auquel se relier.

La conscience disparaît et l'inconscient, avec ses forces destructrices et sombres, envahit le Je. La Pierre au milieu de l'océan du changement est érodée et risque de se dissoudre dans cet océan dont les forces sont déchaînées.

Quand l’angoisse entre en action, le Je se cristallise ou à l'inverse il vole en éclats. Dans les 2 cas il débute une forme de désintègration, et la personne sombre dans des pathologies différentes en rapport avec l'archétype zodiacal inné et rattaché au corps (à la personne). Certains diront même qu'il est possédé par des forces maléfiques et qu'un exorcisme pourrait remettre tout cela en place... ben voyons!

Il est assez exceptionnel que le Je éclate ainsi durant les périodes de calme familial, social, économique.

Lorsque, par contre, la société et les traditions religieuses ou les croyances se désintègrent, l'éclatement du Je est un phénomène assez fréquent. Cela signifie que le moment est venu de reconsidérer la nature du Moi. C'est pourquoi, alchimiquement il convient de dé-lier plutôt que de lier car à ce moment là nous restons accrocher à nos croyances ou a des nouvelles, mais nous ne changeons rien à notre équilibre, à notre structure.

La psychologie ne semble pas disposer véritablement d'outil pour arrêter la désintégration de la société et de sa culture ni pour les reconstruire. Elle propose bien d'essayer d'aider quelques individus afin de tenter de reconstruire un Moi un peu plus rigide ou stabilisé et à recoller les morceaux éclatés en essayant de donner au Moi une force plus grande pour affronter la tempête.

Mais ce travail ne donne pas forcément des résultats toujours durables, et certainement pas lumineux.

Il convient peut être alors d'admettre que le Je n'est pas le vrai sujet en encore moins le centre de référence et qu'il n'est pas, par nature, de ce fait permanent et stable. Mais qu'il est stable quand son environnement est ordonné d'une certaine manière tout au moins. Ceci se rencontre tous les jours dans nos relations.

Il faut donc découvrir ou retrouver le véritable sujet, le vrai centre. Le "Je" peut être alors appelé Ego (Moi inférieur pour certains) par opposition au Soi qui serait une sorte de Moi supérieur pour d'autres.

Les psychologues tel que Jung et Assagioli et d'autres encore, ont fait cette distinction et ont défini les deux éléments, chacun à leur manière.

Pour Carl G. Jung, l'Ego est seulement le centre du champ du conscient et non pas le centre du conscient lui même. Il est un cadre de référence qui permet à notre vécu immédiat de devenir conscient.

Le Soi étant le sujet ou considéré comme le centre de la totalité de la personnalité et comprend non seulement le conscient mais aussi la partie inconsciente de la psyché.

Voir schéma ci-dessous.

En généralité les processus inconscients agissent dans une relation compensatoire par rapport au conscient, et ces deux parties de la psyché sont complémentaires au niveau du Soi.

Sous cette hypothèse le Soi n'est pas uniquement le centre de la totalité de la personnalité, mais aussi la circonférence qui englobe les activités à la fois du conscient et de l'inconscient. Le Soi ne pourra jamais être pleinement connu et reconnu par l'Ego, vu qu'il est impossible qu'une partie limitée puisse connaître et décrire la totalité.

Cependant, pour l'Ego, le Soi pourrai constituer un but de développement comme un contenant universel dans lequel des expériences d'une autre dimension que celle de l'ego sont stockées ; une sorte de centre ou de lieu permanent ( la coupe, le graal) puisqu'il est en lien avec l'archétype zodiacal méconnu de l'Ego le plus souvent.

L'Ego criant son droit au libre arbitre, ne supportant rien de supérieur à sa nature car il a tendance à vivre par lui-même, comme un objet autonome et assez rigide et surtout hyper contrôlant lorsqu'il est en danger plus que chez d'autres personnes. C'est surtout sa suprématie et ses croyances religieuses et fantasmatiques qui sont en danger.

Il est aussi l'endroit, le lieu dans la psyché, où I'image de "Dieu" (un et globalité) s'exprime le plus parfaitement et en faire l'expérience nous apprend à connaître le sens et la nature de notre véritable identité que certains qualifie de "divine", mais qui est surtout liée à l'archétype zodiacal de notre naissance.

Pour d'autres l'ego n'est qu'un faux centre de la personnalité, en tout cas quelque chose de temporaire; le Soi étant içi aussi le centre dit éternel ou divin.

Cet ego est la somme totale de ce que nous connaissons, ou croyons connaître, de nous-mêmes... un système d'affirmations sur nos buts et nos moyens, nos capacités et nos limites... un portrait inadéquat que nous nous faisons de notre vrai Moi, mais le plus grave c'est qu'il a tendance à vivre par lui-même, comme un objet autonome et assez rigide. C'est la souplesse qui permet de vérifier que l'Ego abdique, à ce niveau là les rêves sont un excellent incateur d'un "sur-moi" rigide ou pas.

Le Soi , quant à lui, fait émerger d'autres qualités et une maturité sans cesse plus grande. Dans de nombreuses circonstances, le Soi et l'Ego se développent dans des directions très opposées et ils en deviennent forcément complémentaires, parfois ces opposés sont comme des "âmes soeurs", la personne recherchant inconsciemment cette complémentarité chez l'autre, mais ceci est un mirage bien entendu.

A travers nos attitudes et nos décisions, nous servons le plus souvent le règne l'Ego et non du Soi, c'est ce que l'on appelle l'égocentrisme; mais, lorsque nos actes et nos pensées proviennent du vrai centre qu'est le Soi, ils en deviennent très créatifs.

il n'y a pas en fait de pensée négative, ce qui est négatif pour les uns peut très bien être positif pour les autres mais c'est l'influence de l'ego qui est souvent dite négative car l'égocentrisme commence dans l'enfance et c'est ainsi que, tout naturellement, l'enfant répond à l'égocentrisme de son environnement pour pouvoir s'y adapter.

Le psychologe Kunkel précise (c'est sa vision des choses) que l'essence même du "péché", si péché il y a (!) serait d'avoir substitué à notre vrai centre qu'est le Soi, un centre apparent qu'est l'Ego.

Delà a penser qu'il peut y avoir un retour au paradis, ou une réintégration dans un centre universel il n'y a qu'un pas. Pour Kunkel, l'Ego serait donc un facteur qui empêche une vie créative alors que pour C.G pour Jung, il représente plutôt une première étape dans le développement de la personnalité, où seuls les processus conscients sont pris en considération.

Cette deuxième version paraissant plus acceptable que celles trop spiritualistes ou religieuses qui nous font aborder des chemins d'égarement remplis de croyances souvent surnaturelles et ésotériques mal interprétées.

La vision de Roberto Assagioli, psychologue italien, est quelque peu différente car il n'utilise pas le terme Ego, mais "Moi conscient normal" ou Je par opposition à un Moi dit spirituel (peut être le Soi ?). Dans son diagramme de la constitution globale de l'homme, il place le Soi au sommet d'un dessin ovoïde, l'ego se trouvant au centre du dessin.

Le Moi conscient serait pour d'autres une projection du Moi spirituel, auquel il est relié. Un certain nombre d'idées exposées par Assagioli sont caractéristiques de l'approche de la psychologie platonicienne/chrétienne ou Occulte. La projection du vrai Moi serait la source de Lumière a un niveau de la personnalité (perceptible dans des états de conscience modifiée, mort apparente et autres expériences).

Si une personne souhaite donc "transcender" son aspect humain, il lui faut unir ce que nous appellerons, pour faire plaisir au plus grand nombre, un Moi inférieur et le Moi supérieur.

Ce processus alchimique est long et difficile car Le Moi dit supérieur (le soi) devient un nouveau centre unificateur autour duquel se construit une personnalité nouvelle suite à une verticalisation (voir l'alchimie et les clefs de Basile valentin).

Dans les approches du Soi et de l'Ego mentionnées par les psychologes et psychothérapeutes, la définition de Centre est confuse car la différence réside dans l'incapacité à faire la différence entre structure et contenu qui est bien la différence essentielle qu'il y a entre eux.

Les choses s'éclaircissent si nous reprenons l'approche du Je comme facteur permanent en fonction duquel les éléments des expériences vécues qui sont de façon constante changeants (dans la psyché comme dans le monde extérieur) deviennent conscients et signifiants.

Généralement et quelque soit l'approche ou la vision des choses, 2 éléments sont pris en considération comme des éléments permanents de référence :

  • l'Ego qui est une structure établie

  • le Soi qui est une sorte de tonalité différente relativement constante.

Cette représentation permet de visualiser, de se faire une idée des composantes de la psyché.

Il ne faut pas prendre cette illustration trop littéralement, car les choses sont beaucoup Plus complexe.

Vous y percevez les 4 fonctions de C.G YUNG en relation à l'Ego:

  • Sensation

  • pensée

  • Intuition

  • Emotion (jugement induit par..)

Le Soi enveloppe et participe à la réalité objective, matérielle, dont la personna et la réalité sociale au niveau du conscient, ainsi que la réalité psychique ou subjective avec l' inconscient et ses contenu (dont l'anima, l'animus).

L'Ego est donc le produit de conditions familiales, culturelles et sociales en rapport à l'environnement et lorsqu'une société est assez stable dans ses structures collectives, alors les structures égotiques de ses membres sont également stables et(en fait sûres permanentes).

Ce collectif (la société) est en crise de bouleversement, l'Ego qui en est un produit différencié est remis en cause dans toute sa structure. Les réponses de cet Ego aux bouleversements chaotiques n'auront plus de cadre de référence stable et calme. ces réponses vont glisser sous le seuil du conscient, donc d'une forme de compréhension plus proche de l'inconscient.

La personne risque de se rattacher à une méthode ou tradition dite ancestrale (cela dans ce cas devient une référence de secours), parfois simplement familiale (c'est plus modeste, au moins) et se cristalliser dans un égocentrisme insensible ou qualifié de dur, se figeant dans les souvenirs d'une tradition ancienne.

Et c'est précisément là que l'on repère tous les problèmes des individus qui se réfèrent à des soi-disantes traditions hermétiques, gnostiques et autres ou pas (qui n'en n'ont que le nom et pas le contenu). Le monde des apparences ou monde de surface.
Ce n'est qu'après examen approfondi et analytique que l'on constate que c'est la réponse à un simple mal-être ou malaise.

Réponse qui dépend de la formation ou de la structure de l'archétype zodiacal évidemment, vous vous en doutez à présent.

Mais d'autres solutions s'offrent à ces personnes car elles peuvent :

1)- participer à l'émergence d'une nouvelle organisation du collectif dans lequel elles vivent, ce qui impliquera une révolution pour imposer de nouvelles structures sociales.

Cette solution implique la construction d'un nouvel Ego, généralement sous la pression d'une nouvelle société, d'une nouvelle religion, d'un nouveau chef ou d'une nouvelle idole. La nouvelle structure de l'Ego peut être plus vaste et plus universelle mais elle peut aussi régresser et dépendre uniquement d'un groupe particulier auquel il faut jurer obéissance.

Et oui !...obéissance et service ne sont des attitudes salutaires qui permettent de restaurer l'Ego et de redéfinir une structure. C'est tout simplement un nouveau mode d'expression de la fonction Saturne/Jupiter.

Vous comprenez à présent que tous les ordres de toutes natures qui demande à leurs membres (adhérents) de se plier à la règle commune ne redonnent que de la puissance à l'Ego. En parlant de puissance on devrait parler d'une forme d'équilibre et de restructuration.

Ce qui n'est absolument pas le but de l'initiation, donc des chemins de l'intériorité. C'est ainsi que dans divers de ces mouvements on assiste assez souvent à des guerres d'Ego et d'idées toutes faîtes mais surtout de croyances nouvelles.

2)- dépasser la dépendance à l'égard de toutes structures égotiques ou "patterns", en se tournant ou se retournant (une sorte de métanoïa) vers la source réellement créative de tous progrès individuels et collectifs vrais, le Soi.

Cette autre solution implique de traverser la crise en tant qu'individu, et d'établir un lien de tous les aspects de la personnalité et de l'organisme avec la source de créativité qu'est le Soi, ce soit-disant Dieu pour certains d'entre-nous.

D'un point de vue cosmo-psychologique, il est souhaitable que les fonctions liées à la métamorphose intérieure soient éveillées, fonctions qui seront forcément représentées par les forces archétypales planétaires dites de la transcendance:

  • Uranus,

  • Neptune,

  • Pluton.

Si l'archétype planétaire Saturnien met en place les structures, celui de la Lune en énergétise le contenu et ce que nous appelons aujourd'hui l'orbite de la Lune, était pour une ancienne astrologie géocentrique, mais aussi pour l'alchimie des premiers temps, et pour d'autres visions plus ou moins occultes, la sphère dite subluaire. En astrologie traditionnelle, la Lune représente aussi la mère et Saturne le père (pour d'autres c'est le soleil le père mais sur ce point il y a bien des choses à dire....) et les raisons de cette approche symbolique sont assez claires.

La Lune est notre satellite qui semble tourner constamment autour de nous comme notre mère était (dans la majorité des cas) constamment présente auprès de son enfant (bébé) et l'entourait continuellement. Pour l'astrologie d'aujourd'hui sa fonction première est de permettre l'adaptation à notre quotidien quotidien. Elle représentera également les humeurs et les ressentis, le mondes des images, de la sensibilité etc..., qui sont, il faut l'affirmer, d'attitudes et réponses plus ou moins passives, aux situations rencontrées.

Saturne a été considéré pendant très longtemps de notre histoire la planète la plus éloignée de notre Soleil. Aujourd'hui encore,il peut encore être considéré comme la limite réelle du système solaire puisque Saturne marque la limite des planètes individuelles et que les planètes transaturniennes sont dites collectives.

Saturne représente le père réel ou son imago, mais d'une manière plus générale, tout ce qui définit notre structure permanente et notre place dans un cadre d'existence. Il symbolise aussi le squelette qui est la forme stable à notre organisme.

Sur un plan plus intellectuel, il est la logique et psychologiquement il représente l'Ego avec ses attitudes bien définies face aux impacts sociaux. L'un dans l'autre Saturne exprime notre place dans quelque chose de plus grand.

Si dans les "années 2000", même si les pères n'ont plus le même impact social sur leurs enfants, ils leurs transmettent tout au moins encore leur nom. Saturne est donc la structure et ce qui peut s’intégrer dans une structure plus large.

Saturne précise la place qui nous convient et ce qui est juste dans tout ce qui nous arrive. Mais ne nous guide pas car il nous donne la carte de tout ce qu'il est possible de faire compte tenu de ce que nous sommes ou avons comme dispositions et capacités.

Saturne (suivant sa position symbolique au niveau de l'archétype zodiacal) représente, en partie, la structure de l'Ego et la Lune la substance vitale animant le contenu de l'ego.

Cette énergie lunaire née sans cesse du Soleil, sa luminosité est le reflet du soleil (faîtes le rapport à l'alchimie pour ceux qui ont quelques connaissances des symboles utilisés), elle est donc l'énergie solaire filtrée, colorée, limitée par la fonction saturnienne. Ce dernier point est un principe alchimique fondamental.

La lumière est la force (et quelle soit avec toi...), à la fois constructive et destructive, du Soleil et est l'expression de l'énergie qui éveille et anime en rayonnant indifféremment sur toute chose. Elle est porteuse de la vie mais aussi parfois de la mort.

N'oublions pas que c'est la source de ce que les Hindous appellent le prana.

Mais vous vous doutez que notre Soleil n'est pas le Soi. Nous ne pouvons concevoir le Soi que si notre propre mouvement permet la libération de sa force créatrice qui est perçue à travers les bouleversements qu'elle provoque par l'intermédiaire des archétypes d'Uranus, Neptune et Pluton au sein même de notre sécurité rigidité égocentrique, culturelle et évidemment religieuse.

Il ne nous est possible de connaître le Soi, au début de l'oeuvre alchimique, qu'à travers les crises. On entend déjà certains crier: "ah, mais c'est négatif, alors !...". Comprenez bien que tout aspect dit négatif détient en pleine puissance un positionnement plus que positif (hyper positif... c'est la loi...)

Friedrich Engels
Xavier Renou, des Désobéissants, jugé pour refus du fichage génétique
Réseau Sortir du nucléaire
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Mouvement pour une Alternative Non-violente
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Financer des projets à caractère non-violent et promouvoir la culture de la non-violence

Confédération Paysanne
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BDS France – Boycott Désinvestissement Sanctions, la réponse citoyenne et non-violente à l'impunité d'Israël
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Tutoiement ou vouvoiement ?
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D’où vient le vouvoiement (ou le voussoiement) ?

« La distance, c’est la civilisation » dit Charles Consigny, voilà qui donne matière à réfléchir !
Mais venons-en tout de même à ce qui nous occupe, à ce débat, tout sauf anodin, entre partisans du tutoiement et partisans du vouvoiement. D’ailleurs, avant toute chose, faut-il dire vouvoiement ou voussoiement ?
Dans un billet, intitulé « Éloge du vouvoiement », datant de 2013, publié sur le site de l’Académie française, l’écrivain, critique et académicien Frédéric Vitoux considère que les deux se valent. Bien que le terme « voussoiement » soit plus ancien, le terme « vouvoiement » paraît plus euphonique et compréhensible et il est, par ailleurs, lui aussi, d’un usage très ancien. Frédéric Vitoux en profite également pour rappeler que l’invention du vouvoiement est souvent attribuée à l’époque du règne de l’empereur romain Dioclétien qui divisa l’Empire romain entre Orient et Occident, mettant à la tête de chaque un Auguste assisté lui-même d’un César. Ainsi, quand l’un des souverains prenait la parole, il ne le faisait pas qu’en son nom propre, mais aussi au nom des trois autres. Il disait donc « nous » et on lui répondait « vous ». Le médiéviste Philippe Wolff, lui, considère, que le vouvoiement est antérieur, puisqu’il est déjà présent, même si ça n’est que de manière épisodique, dans des lettres de Pline Le Jeune, au I er siècle de notre ère, avant de devenir, de manière systématique cette fois, une politesse obligée à l’époque carolingienne.

Le vouvoiement, une histoire en dents de scie

Bref ! Le vouvoiement a fini par s’imposer dans la langue française comme dans la majorité des langues indo-européennes, à l’exception de l’Anglais moderne qui ne le connaît plus et quelques langues nordiques où il est tombé en désuétude. Le vouvoiement devient même rapidement l’une des manifestations les plus audibles de la politesse qui marque le respect, la fameuse distance dont parle Charles Consigny, la séparation hiérarchique, la séparation générationnelle, la séparation aussi entre ceux que l’on connaît et ceux que l’on rencontre tout juste.
Pourtant l’histoire du vouvoiement, au moins en France, n’a rien de linéaire, bien au contraire ! Dans son ouvrage Dictionnaire nostalgique de la politesse, dont je vous recommande vivement la lecture, Frédéric Rouvillois raconte le rejet, au moment de la Révolution française, des « bonnes manières » imposée par l’Ancien Régime. Le tutoiement devient obligatoire, le vouvoiement interdit. Ceux qui ne respectent pas cette règle apparaissent, dès 1791 et surtout 1792, comme suspects et peuvent être poursuivis, emprisonnés et, pourquoi pas, guillotinés. Du coup, la prudence est de rigueur.

Il faudra attendre Napoléon Bonaparte pour que le vouvoiement soit restauré avec le passage d’une politesse aristocratique décontractée à une politesse bourgeoise beaucoup plus rigide. Mais le vouvoiement a connu d’autres crises. Il a, par exemple, fortement reculé, comme le rappelle Frédéric Vitoux, consécutivement à l’esprit de Mai 68, je le cite, « quand on s’est efforcé de bannir toute hiérarchie, toute barrière entre les individus, leurs âges, leurs fonctions, entre les élèves et les professeurs. » Roland Barthes ne dit pas autre chose, lorsqu’il écrit dans Le Bruissement de la langue : « Il arrive parfois, ruine de Mai, qu’un étudiant tutoie un professeur. C’est là un signe fort, un signe plein, qui renvoie au plus psychologique des signifiés : la volonté de contestation ou de copinage. »

Nostalgie de la politesse

Frédéric Rouvillois l’analyse et l’explique. Dans notre histoire, la politesse connaît des hauts et des bas. Il souligne d’ailleurs qu’après les années 60-70, période de forte contestation où les bonnes manières étaient perçues comme archaïques et ringardes, nous vivons aujourd’hui dans une période plus propice à la politesse. Pour le juriste, il y a un rapport certain entre la crise économique et sociale, la montée du chômage, le sentiment que la vie est de plus en plus difficile et la prise de conscience de l’utilité de la politesse. C’est ce qu’il confiait, il y a deux ans, dans un entretien au FigaroVox. Je le cite : « Quand tout va bien, la politesse est juste la cerise sur le gâteau. Quand les choses deviennent plus difficiles, elle reprend toute sa force et son utilité s'impose. Les gestes quotidiens de la politesse deviennent le liant de ce fameux vivre ensemble. » La messe est dite !

La loi du plus fort – Subjectivité adolescente hors l'école
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Dès que l’on parle de « loi du plus fort », ce que nous pouvons initialement avoir en tête c’est le fonctionnement du règne animal dans lequel le plus fort est tout simplement celui qui mange et le plus faible celui qui se fait manger. La « loi » qui établit le plus fort lui donne le droit de dévorer l’autre. Il est fort probable que vous aviez une certaine histoire ou une fable en tête, voire des images des documentaires que vous avez regardé sur le comportement animal et la vie sauvage. Ici la fable de La Fontaine, célèbre pour l’affirmation d’après laquelle « la raison du plus fort est toujours la meilleure » Jean de la fontaine, fables (1668).

Mais est-ce que la raison du plus fort est toujours la meilleure? Imaginez cette situation. Vous arrivez dans un nouveau quartier ou dans un nouveau lycée et le plus costaux (ou plus musclé) cherche à s’imposer face à vous afin que vous lui soyez soumis et obéissant. Quelque part dans son attitude, regard ou paroles il y a une menace, la menace qu’il pourrait vous « emporter » et « dévorer sans autre forme de procès ». Quoi faire? Quelle attitude assumer, quelle posture adopter? Défier, chercher à ne pas se laisser faire? Être carrément téméraire pour ne pas montrer des signes de faiblesse?

La solution à cette énigme n’est pas donnée, surtout si l’on songe à son intégrité physique. Dès que l’on parle du plus fort, alors la question à se poser c’est la suivante : qu’est-ce que la force ? Si la force c’est la capacité d’un individu à s’imposer face à un autre par la force de pression de ses dentiers alors le plus fort c’est le loup. Et c’est ainsi que le montre La Fontaine : la force consiste dans la capacité physique de s’imposer face à autrui.

Mais posons nous la question, qu’est-ce que la force? est-ce le plus fort celui qui s’impose face à autrui? Voyons cela de plus près, car la force peut aussi être une sorte de capacité d’espèce.

Si la force revient à la capacité d’une espèce à se perpétuer, tout comme les tortues que sortant de leurs nids doivent gagner la mer et dont leur survie est déjà calculée dans la perte possible d’individus, alors les plus forts sont les tortues qui arrivent à survivre. L’espèce faible semble le remporter face à l’espèce forte car leur force consiste dans la capacité de l’espèce de calculer les dégâts nécessaires à sa survie.

Mais quelqu’un pourra nous dire que le plus fort est sans doute l’être humain, car il possède l’outil, la capacité de construire des outils afin d’accroître sa force, sa vitesse, sa protection, etc. En fait, les grecs anciens avaient un mythe qui racontait comment l’homme avait eu la technique, c’est-à-dire cette capacité de créer des outils et de allumer le feu.

Dans cette histoire, l’homme reçoit le feu et la technique, ce qui ne va pas seulement finir par équilibrer le désavantage du départ de l’homme face aux griffes d’autres capacités et qualités des animaux, mais cela va surtout le positionner « comme maître et possesseur de la nature » dira Descartes au XVI ème siècle. Ainsi donc le plus fort c’est celui qui possède la technique, la capacité d’inventer des outils afin de surpasser sa faiblesse physique.

Alors, la force c’est donc la technique, donc sa connaissance et sa raison qui lui rendent capable de s’imposer face aux créatures et face aux (certains) phénomènes de la nature. L’homme s’assure une place dominante à la surface de sa planète: l’espèce humaine est donc la plus forte.

Mais pourtant, il semblerait que malgré tout, cet argument de la technique et la raison n’est pas déterminant. L’homme n’est qu’insignifiant.

Ainsi, la supposée supériorité de l’espèce humaine ne serait qu’une fiction. Toute notre technique et notre savoir ne seraient finalement qu’une imitation facile des autres espèces qui nous entourent. Comme le montre déjà la situation pandémique, même un virus pourrait non seulement mettre à mal l’ensemble des activités humaines, mais même nous anéantir.

Alors c’est quoi la force et ce qui le plus fort? Notre question reste en suspens. Quand nous observons également la destruction qui a été rendue possible grâce à notre technique met en question la supposée force (technique) de l’espèce humaine.

Qui est donc le plus fort? Qu’est-ce que la force? La force est-elle vraiment la présentation d’une domination (susceptible même de l’autodestruction)? Fort est celui qui anéanti les autres jusqu’au point de s’anéantir à lui-même?

Afin de résoudre notre question, je vous propose de lire cet extrait. Ici, la force se rapprochera d’une autre notion jusqu’ici inattendue:

Il est juste que ce qui est juste soit suivi. Il est nécessaire que ce qui est le plus fort soit suivi. La justice sans la force est impuissante. La force sans la justice est tyrannique. La justice sans force est contredite parce qu’il y a toujours des méchants. La force sans la justice est accusée. Il faut donc mettre ensemble la justice et la force, et pour cela faire que ce qui est juste soit fort ou que ce qui est fort soit juste. La justice est sujette à dispute. La force est très reconnaissable et sans dispute. Ainsi on n’a pu donner la force à la justice, parce que la force a contredit la justice, et a dit qu’elle était injuste, et a dit que c’était elle qui était juste. Et ainsi ne pouvant faire que ce qui est juste fût fort, on a fait que ce qui est fort fût juste.
Pascal, Pensées – n° 298, 299

Pour Pascal, la force se rapporte à la justice. Justice et force doivent se mettre ensemble car finalement c’est l’exercice de la justice ce qui rend vraiment fort :

la justice sans force est impuissante et la force sans justice est tyrannique
Pascal

La réflexion de Pascal nous met en lumière au moins deux choses:

Que la véritable force c’est la justice
Qu’il nous faut nous assurer que le juste soit fort et que ce qui est fort soit juste

Nous pourrions dès maintenant comprendre le deuxième point de cette réflexion sur la force comme une possible introduction sur la nécessité des institutions sociales capables d’assurer la justice. Le défi qui ouvre ce rapprochement entre force et justice indique la nécessité d’accorder force à la justice.

le plus fort est celui qui est le plus juste

Et alors c’est quoi la véritable force ? Jusqu’ici nous avons vu que la véritable force c’est la capacité de mettre en place un exercice légitime de la justice. La force n’est pas une question des muscles ni de dentiers. La force n’est pas la vitesse ni la stratégie du calcul rationnel. La véritable force chez l’humain est sa capacité d’agir en justice et de s’ouvrir à la nécessité d’assurer l’exercice de la justice.

Le rôle de la coopération dans la nature — BIBLIOTHÈQUE EN LIGNE Watchtower

Le rôle de la coopération dans la nature

Dans la nature, “ la survie relève autant des liens qu’on crée avec ses voisins que du fait de croître et de se reproduire ”. — “ Les liaisons de la vie ” (angl.).

L’OCÉAN est calme. Seul le vacarme des oiseaux marins trouble le silence. Leur excitation indique que quelque chose se trame sous l’eau. Soudain, des bulles apparaissent et forment petit à petit un cercle d’écume à la surface. Quelques secondes plus tard, deux immenses silhouettes sombres se dessinent dans les eaux claires, à l’intérieur du cercle. Ce sont deux baleines à bosse qui remontent des profondeurs, la bouche grande ouverte. Arrivées à la surface, elles referment leur mâchoire bordée de fanons, soufflent par leurs évents et replongent.

Ces deux baleines travaillent en équipe pour rassembler le krill, des crustacés qui ont l’aspect des crevettes, dont elles se nourrissent goulûment. Dans une sorte de ballet aquatique, ces mammifères de 40 tonnes plongent sous les crustacés et exécutent un cercle étroit tout en expulsant de l’air par leurs évents. Grâce à cette manœuvre ingénieuse, elles entourent le krill d’un “ filet ” de bulles. Puis elles remontent à la verticale au milieu de leur piège et se régalent de leurs proies.

Dans les plaines d’Afrique, impalas et babouins collaborent souvent. “ Les deux espèces se donnent mutuellement l’alarme ”, lit-​on dans la revue Pour la science. Les impalas associent leur excellent odorat à la vue perçante des babouins. Bien rares sont les prédateurs qui parviennent à s’approcher sans être détectés. Une collaboration du même genre existe entre les autruches, qui ont de très bons yeux, et les zèbres, qui ont l’ouïe fine.

Ce ne sont là que quelques-uns des innombrables exemples de coopération dans le monde vivant. En effet, l’entraide existe chez toutes les formes de vie, depuis le micro-organisme jusqu’à l’homme, entre animaux de la même espèce ou d’espèces différentes. Il y a des milliers d’années, le roi Salomon, qui avait étudié la nature, a observé l’humble fourmi. Voici ce qu’il a écrit : “ Va vers la fourmi, paresseux ; considère ses voies et deviens sage. Bien qu’elle n’ait ni commandant, ni préposé, ni chef, elle prépare sa nourriture durant l’été ; elle a amassé ses vivres pendant la moisson. ” — Proverbes 6:6-8.

Les fourmis sont un modèle de coopération, d’assiduité et d’ordre. Elles unissent souvent leurs efforts pour ramener au nid des objets beaucoup plus gros qu’elles. Certaines fourmis aident même des congénères blessés ou épuisés à regagner la fourmilière. Il n’est donc guère étonnant que Salomon nous ait proposé cet insecte comme modèle.

Dans les articles suivants, nous verrons à quel point la coopération est un thème récurrent dans le “ livre de la nature ” et comment elle rend la vie, et notamment la nôtre, possible. Nous verrons également comment les humains ont exploité la planète, l’ont polluée et ont conduit ses créatures au bord de l’extinction. Le Créateur tolérera-​t-​il cela indéfiniment ?

Coopérer dans la nature : un pour tous, tous pour un ! | Energy Observer
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Dans la nature, la coopération est un principe fondateur de diversité, complexité et résilience, qu’il s’agisse de collaboration entre les membres d’une même espèce ou entre des individus d’espèces différentes. Explications avec Katia Nicolet, docteure en biologie marine, tandis que nous nous trouvons aux Galápagos !

Notre navire est actuellement sur l’archipel des Galápagos, un chapelet d’îles volcaniques à 1000 km du continent sud-américain, qui sont sorties de l’eau il y a environ 5 millions d’années. La vie a colonisé ces terres via la dispersion de graines grâce au vent ou bien avec l’arrivée accidentelle d’animaux par l’air ou par radeaux naturels de végétaux. Très peu d’espèces ont survécu à ce périple, pouvant parfois durer des semaines sans eau ni nourriture et sous un soleil de plomb.

Ceci explique la sur-représentation de certains groupes d’animaux plus tolérants à la dessiccation, comme les reptiles, alors que d’autres groupes, comme les insectes et les amphibiens, sont sous-représentés. Mais si on pouvait s’attendre à ce que les espèces d’un même groupe entrent en concurrence pour l’accès à ces nouvelles ressources, on observe plutôt le phénomène inverse. Et si la coopération était au cœur même de la vie sur ces îles ?
Sur les traces de Darwin

L’archipel des Galápagos fait apparaitre à l'esprit le voyage légendaire de Charles Darwin, naturaliste de génie et co-inventeur de la théorie de l’évolution par voie de sélection naturelle. Darwin visita ces îles en 1835, lors de son tour du monde à bord du Beagle. Il y observa de nombreuses espèces et réalisa que beaucoup étaient très similaires, avec seulement quelques différences par rapport aux espèces du continent.

Les moqueurs des Galápagos, tout particulièrement, ont inspiré Darwin, qui était convaincu que les quatre espèces présentes sur les îles avaient un ancêtre commun très récent. Nous avons eu l’opportunité de rencontrer Gustavo Jiménez, curateur à la fondation Charles Darwin sur l’île de Santa Cruz.

Retour aux sources

Tout d’abord, retournons aux fondamentaux de la théorie de l’évolution de Darwin. L’évolution par sélection naturelle, d’après Darwin, dépend majoritairement de la “réussite à engendrer des progénitures”. Cette phrase a été souvent simplifiée par “la survie du plus apte”, le plus apte devenant synonyme du plus fort et du plus compétitif. Pourtant, les individus bénéficient souvent d’un travail collaboratif.

La coopération, donc, est parfois la clé.

Pendant longtemps, la coopération était perçue comme non-viable, puisque les tricheurs pourraient abuser d’un individu coopératif (prendre sans donner) jusqu’à ce que la relation se brise. Cependant, la coopération est véritablement partout dans la nature : les plantes transmettent leurs nutriments aux autres, les poissons se débarrassant entre eux des parasites sur leurs écailles, les fourmis construisent leur fourmilière ensemble, les prédateurs chassant en meute et les abeilles sacrifient même leur propre vie au profit de la ruche.

Dans la nature, la coopération est un principe fondateur de diversité, complexité et résilience, qu’il s’agisse de collaboration entre les membres d’une même espèce ou entre des individus d’espèces différentes.
Troquer plutôt que pirater

Pour pallier le manque d’insectes pollinisateurs, les plantes des Galápagos ont co-évolué avec les oiseaux pour disperser leurs gamètes. D’une unique espèce de pinson qui colonisa les îles il y a 2 millions d’années, 13 espèces se sont développées, chacune avec un type de bec spécifique, spécialisé dans la collecte de différentes sources d’aliments : les graines de cactus, le nectar de fleurs et les insectes néfastes pour la plante. Les oiseaux bénéficient d’une source d’alimentation, les plantes d’un nouveau pollinisateur : ensemble, ils ont permis de créer petit à petit les écosystèmes que nous connaissons aujourd’hui.

Un autre exemple de coopération est celui des reptiles avec les oiseaux. Aux Galápagos, il n’est pas inhabituel de voir un pinson sautiller sur le dos d’un iguane ou d’une tortue géante, l’inspecter de près et lui retirer les cellules mortes et parasites de la peau. Encore une fois, chaque espèce trouve des bénéfices dans cette interaction : l’oiseau y gagne un repas facile, tandis que cela permet au reptile de rester propre et en bonne santé.

Dans cet exemple comme dans le précédent, les individus d’espèces différentes dépendent les uns des autres, et les interactions sont fréquentes, ce qui permet une coopération basée sur la réciprocité - du troc plutôt que de la piraterie.

Toujours ensemble

À travers l’histoire de la terre, la coopération a permis de changer le cours de l’évolution de la vie, lui faisant atteindre de plus hauts niveaux de complexité et d’organisation. Un des premiers exemples majeurs est l’origine de la multicellularité. Nos cellules descendent toutes d’organismes unicellulaires, qui ont un jour basculé de la compétition entre elles à la coopération dans le but de fonctionner en tant qu’unité cohérente. De manière similaire, les mitochondries présentes dans les eucaryotes et les chloroplastes dans les cellules des végétaux descendent de bactéries autonomes, qui ont abandonné leur autonomie au profit d’une existence coopérative.

Quand on y pense, notre propre vie dépend de la collaboration de millions, de milliards ou même de billions de cellules travaillant ensemble à la formation de nos tissus et organes, mais aussi à la coopération de milliers de bactéries présentes sur notre peau et dans notre estomac qui nous permettent de digérer les aliments ou de combattre les pathogènes extérieurs.

Tout ce que l’on mange, boit, construit ou utilise provient de la nature et dépend des propriétés spécifiques d’autres organismes. Les plantes, par exemple, produisent de la matière organique et émettent de l’oxygène par un processus appelé photosynthèse. Sans elles, nous ne pourrions pas respirer ou nous alimenter. Sans en avoir conscience, nous dépendons de la survie de milliards d’organismes, chacun d’entre nous interconnecté dans la matrice de la vie.

Peut-être est-il temps de changer notre façon de regarder la nature et de ne plus se concentrer uniquement sur le lion qui tue l’antilope, mais aussi de voir le pinson sur le dos de la tortue. Tout comme eux, nous avons tout à gagner à favoriser la coopération plutôt que la compétition.

L'autogestion ou quand les salariés deviennent leurs propres patrons - Entreprises - Trends-Tendances
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Quand les patrons décident d'abandonner leur entreprise, c'est souvent le signe d'une faillite. Dans certains cas pourtant, cette mauvaise nouvelle peut se transformer en formidable aventure: celle de l'autogestion.

Selon le Gresea (Groupe de Recherche pour une Stratégie Economique Alternative), la pratique serait "plutôt mal connue en Belgique". On peut toutefois noter l'initiative des Maisons Médicales. En mai 1968, naît en effet la première Maison Médicale autogérée du pays. Depuis, plusieurs lui ont emboîté le pas. Plus démocratique et équitable, responsabilisant, ce mode de fonctionnement ne présenterait à première vue que des avantages. Il ne faut pourtant pas oublier qu'il peut aussi comporter sa part d'ombre, entre conflits d'intérêts et lenteurs dues au processus décisionnel.

  • Des projets viables ?

L'autogestion fait en tout cas recette en France. D'après le Gresea, une trentaine d'entreprises y seraient concernées chaque année. De 1998 à 2008, cela aurait permis de sauver 6.500 emplois de manière pérenne. Toujours d'après cette même étude, 60% des projets de récupération des entreprises par leurs salariés auraient une viabilité de 5 à 10 ans. Un chiffre plutôt prometteur, qui prouve que la délocalisation systématique n'est peut-être pas la seule solution pour sauver une entreprise.

Cette roue de secours, certains salariés s'y sont accrochés, souvent avec succès. C'est le cas de la petite société Sol é Vie, située à Perpignan. En juillet dernier, les employés de cette entreprise d'aide à la personne ont décidé de se lancer dans l'aventure, après l'annonce de la suppression de leurs postes. Une idée, raconte L'Indépendant, qui leur viendrait d'un simple entretien avec l'administrateur judiciaire chargé de la liquidation. Stéphanie Dell'utri, employée, l'interroge alors sur les solutions envisageables pour sauver leurs emplois. "Rachetez l'actif de l'entreprise !" répond ce dernier.

Il n'en fallait pas plus pour la convaincre. Avec le soutien de 25 fidèles collègues, Stéphanie Dell'utri fonde en septembre dernier une "Scop", à savoir, une Société Coopérative de Production. Chacun investit 20.000€. Et depuis, l'entreprise tient le coup.

D'autres exemples d'autogestion montrent une flambante réussite, comme celui de Fibrosud, aujourd'hui rebaptisée Sofi Groupe. Parce qu'ils refusent d'aller "à l'abattoir sans relever la tête", expliquent six employés de l'entreprise au Monde, ils rachètent leur entreprise. Pendant un an, ils travaillent bénévolement, pour toucher en parallèle les allocations chômage. À force de persévérance, ils parviennent à remettre la société de réparation de matériel électronique sur les rails. Mieux, celle-ci connaît une croissance à faire pâlir d'envie les chefs d'entreprise. Chiffre d'affaires en hausse, embauche: il semblerait que l'histoire de cette PME connaisse un dénouement des plus heureux.

  • L'Uruguay, paradis de l'autogestion

Si les succès se multiplient, ce type d'initiative est encore restreint en Europe. De l'autre côté de l'Atlantique, en revanche, des pays regorgent d'entreprises autogérées. C'est le cas de l'Uruguay. Selon un rapport rédigé par Pablo Guerra, 37 sociétés auraient été récupérées par leurs employés durant l'année 2014.

Parmi elles, ABC, renommée ABC Coop. C'est en 2001 que les salariés de cette entreprise d'autocars ont failli tout perdre, leurs patrons, endettés, ayant tout bonnement laissé entrepôts et véhicules à l'abandon. L'association Autogestion raconte que les employés ont alors commencé à organiser des assemblées, jusqu'au jour où ils ont décidé de reprendre les rênes. Avant de faire leurs preuves, ils ont dû se frotter aux réticences de leurs anciens patrons, pas vraiment ravis de la perspective que de simples chauffeurs d'autocars puissent se sentir plus aptes à diriger une entreprise qu'eux, explique Luis Rivas. Ce secrétaire général de la coopérative en est pourtant convaincu, ils peuvent "faire mieux".

  • Une entreprise sociale

Les entreprises de transport concurrentes ne voient pas non plus d'un très bon oeil cette reprise. Et ce, d'autant plus qu'ABC Coop refuse systématiquement la hausse des prix des tickets de transport, pour ne pas pénaliser la population locale. Manquant de compétitivité par rapport à ABC Coop, certaines sociétés mettent même la clé sous la porte.

Les liens étroits avec la mairie de la ville mettent l'entreprise autogérée en péril. La commune leur refuse en effet toute tentative de développement, parfois sans même présenter de raison valable. En dépit de ces obstacles, ABC Coop se porte bien. D'un point de vue économique d'abord, elle a embauché plusieurs chauffeurs. Tous ont vu leurs salaires augmenter et atteindre un très bon niveau, à hauteur d'environ "50% au-dessus de la moyenne nationale". Et puisque cette entreprise est gérée par des locaux, ces derniers font tout pour préserver leurs "tarifs populaires". ABC Coop a même récemment créé un centre culturel, et une radio communautaire.

L'autogestion, née au 19e siècle et longtemps considérée comme une pure utopie, semble donc bel et bien avoir de beaux jours devant elle.

Un pour tous et tous pour un : portrait des entreprises autogérées - Commission Justice & Paix - Belgique francophone
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Actuellement, le mode de gestion du travail se caractérise par un système hiérarchique, une mauvaise répartition du travail et des salaires inégaux. Face à ce constat, certains citoyens sont à bout de souffle et rêvent d’autre chose. Cet « autre chose » certains d’entre eux tentent de l’atteindre via la construction d’entreprises guidées par le concept de l’autogestion. Bien que séduisant pour de multiples raisons, le système autogéré est également traversé par des limites qui font de lui un système questionable.
Est-ce un concept « en vogue » ou une tendance qui pourrait être amenée à se généraliser ?

L’autogestion : une gestion participative et identitaire Pouvant s’incarner tant au sein d’une maison médicale, d’un centre culturel, d’une coopérative, d’un territoire, d’une communauté, d’une organisation ou d’une entreprise, le concept d’autogestion peut s’interpréter de plusieurs façons. Toutes s’accordent cependant autour de la valeur étymologique commune « gestion par et pour soi-même ». Dans cette direction, l’autogestion peut se définir comme étant : « Cette idée-force apparemment simple qui désigne une société qui se gérerait d’elle-même, c’est-à-dire dans laquelle le pouvoir serait devenu une fonction assumée par la société dans son ensemble et non plus incarnée par l’Etat comme appareil qui, issu de la société, la domine, la surplombe comme de l’extérieur, institutionnalisant la domination politique [1]» . Les entreprises autogérées L’autogestion invite ainsi à un renversement et à un regard critique des valeurs qui prédominent dans un système économique libéral et capitaliste comme par exemple la rentabilité, la concurrence ou encore la subordination. [(La « Bees Coop » : un triple engagement Imaginée par un groupe de jeunes belges, cette coopérative entend repenser la manière de consommer en créant un supermarché coopératif et participatif. En effet, se voulant une alternative à la grande distribution, ce projet fonctionne grâce à la mobilisation et à la participation active de ses membres dits « coopérateurs ». Chaque coopérateur joue 3 rôles : celui de propriétaire (achat de parts dans le projet), celui de travailleur (via un investissement d’au minimum 3 heures/mois au sein du magasin) et celui de client du magasin. )] L’enjeu des défenseurs d’un modèle autogéré étant d’accorder plus de place au principe démocratique de base qu’est l’égalité, voici quelques grandes caractéristiques de l’autogestion dans le monde de l’entreprise.

  • Une égalité salariale à tout prix

Qui dit autogestion, dit rémunération salariale égale et proportionnelle entre tous les travailleurs. Ceux-ci fixent unanimement et en toute transparence le salaire qu’ils recevront en fonction de leur régime de temps de travail. Ce souci d’équité part du constat que les inégalités salariales et la recherche d’enrichissement financier personnel renforcent l’aspect hiérarchique et influencent la nature des comportements et des relations entre les travailleurs. L’objectif d’une telle entreprise n’est donc pas systématiquement de faire du profit, ni de combler un intérêt purement individuel, mais plutôt de mettre tout en œuvre pour atteindre la finalité sociale qui fait sens aux yeux de tous les travailleurs. [(Brasserie de la Lesse: une finalité solidaire et locale Dans la région de Rochefort, cette coopérative autogérée à finalité dite « sociale » produit et commercialise sa bière locale en ayant pour principaux objectifs de : créer des emplois en milieu rural, relocaliser l’économie et promouvoir les activités participatives. L’aspect social de la finalité de la brasserie se traduit donc ici par une volonté des travailleurs, non pas de recevoir le salaire le plus élevé possible, mais plutôt de réinvestir cet argent au sein de la société. )]

  • Diviser pour mieux travailler, rassembler pour mieux régner

Une autre caractéristique de l’autogestion est la prise de connaissance et la participation de chaque membre de l’équipe aux multiples tâches qui s’effectuent au sein de l’entreprise. Cette rotation du travail et cette polyvalence permettent de renforcer le caractère collectif du projet autogéré et d’éviter qu’une hiérarchie de compétences ne s’installe. Concrètement, cette préoccupation se traduit par la mise en place de petites formations abordant des thèmes tels que la comptabilité, l’informatique, la prise de parole, la communication ou encore l’administration. Ces dernières permettent de compléter la formation de base des travailleurs. Dans un esprit démocratique, les dispositifs d’autogestion visent l’atteinte d’objectifs communs de bien-être social et sociétal en se basant sur des rapports humains égalitaires et sur l’épanouissement de l’individu. En proposant un système de gouvernance horizontale plutôt que hiérarchique, tout travailleur participe à la prise de décision et donc à la construction du projet autogéré. Ce partage du pouvoir renforce sa responsabilité tant individuelle que collective et le pousse à se positionner, à développer son sens critique et analytique pour finalement devenir acteur de son propre changement et de la vie professionnelle qu’il souhaite mener. [(CECOSESOLA : une organisation communautaire à 1200 Au Nord-Est du Venezuela, Cecosesola est une coopérative de services à prix accessibles. Chaque secteur s’auto-organise et se concerte hebdomadairement pour gérer son activité. Les réunions étant perçues comme une nécessité et non une obligation, chaque travailleur passe 20% de son temps de travail en réunion. Plusieurs fois par an, tous les secteurs se réunissent pour analyser la dynamique de la coopérative. Afin d’éviter les rapports de pouvoir, les postes sont rotatifs et tous les travailleurs se définissent comme « multifonctionnels ». Au sein de Cecosesola, l’objectif est d’apprendre et de se développer tant individuellement que collectivement. )] L’autogestion comporte toutefois quelques faiblesses que ne manquent pas de souligner ceux qui la qualifient de projet utopique pour deux raisons principales.

  • La difficulté à regarder ensemble dans la même direction

Dans une entreprise autogérée, les intérêts des travailleurs et de l’entreprise tout entière sont communs. Cela signifie que l’intérêt collectif et le bien-être du groupe se situent à la même échelle que l’intérêt personnel et le bien-être à soi. Dans une société individualiste, ce mode de travail peut se révéler très exigeant tant il n’est pas tâche facile de penser en “je “ et en “nous” dans un même temps. L’investissement au sein d’une organisation autogérée se fait sur base volontaire et ne s’adresse pas à des personnes qui ne savent pas ou ne désirent pas travailler en concertation et en communauté. A ce stade, une question fondamentale se pose : est-il réellement possible de baser le fonctionnement d’une entreprise autour du dialogue, de l’intelligence collective et de la gouvernance horizontale ? Certains détracteurs du modèle autogéré affirment qu’il est très complexe de faire avancer démocratiquement, efficacement et sans hiérarchie un projet composé de 100 personnes. En effet, un tel partage des responsabilités dans la prise de décisions peut faire place à des tensions, des rapports de force ou des conflits d’intérêts entre les travailleurs. [(Scarabée Biocoop: une gouvernance partagée qui mitige En 2015, cette coopérative regroupant des restaurants, des magasins, un snack et un traiteur bio décide de mettre en place une organisation horizontale sans hiérarchie. Plus de 1000 rôles sont attribués à l’ensemble des 160 salariés de la coopérative. Interviewés par le quotidien “Reporterre” , certains membres de l’équipe expriment leur scepticisme par rapport à ce mode de gouvernance: trop de réunions, flottement dans l’organisation, difficulté à s’autonomiser et à s’adapter au changement ou encore manque d’accompagnement. )]

  • Une course sans fin aux financements

Inévitablement, lors de la création d’entreprises autogérées, la question se pose de savoir où trouver les fonds nécessaires à leur financement. En toute logique, elles refuseront les financements issus d’investisseurs ou d’actionnaires capitalistes traditionnels susceptibles de mettre à mal leur finalité sociale et leur autonomie ainsi que leur volonté à ce que la propriété soit collective et égalitaire. Ainsi, elles se tourneront vers des modes de financement alternatifs. L’autofinancement c.-à-d. le financement de l’entreprise par les travailleurs eux-mêmes est une piste régulièrement empruntée. Malheureusement, et à long terme, elle ne suffit pas à garder l’entreprise debout. Souvent, cette dernière choisit donc également de faire appel à des dons, à contracter des emprunts auprès de banques publiques ou coopératives ou encore se tourne vers le « crowdfunding ». [(Qu’est-ce que le crowdfunding » ? Via la mise en place d’une récolte de fonds, le plus souvent en ligne, il s’agit d’un financement participatif qui consiste à faire appel à un grand nombre de citoyens afin qu’ils financent un projet spécifique qui leur tient à cœur. Ce mode de financement peut prendre plusieurs formes : le don sans contrepartie ; la récompense où, suite à sa participation financière, le citoyen reçoit une contrepartie en nature ; l’investissement participatif où il achète des parts du projet ; et le prêt auprès de particuliers ou d’un crédit public. )] Le risque dans cette recherche aux financements est non seulement de ne pas trouver de fonds suffisants mais aussi de déclencher une forme de concurrence qui éloignerait les entreprises autogérées de leurs grands principes de base. Quel avenir pour une économie autogestionnaire ? La généralisation d’un système autogéré permettrait de sortir le travailleur d’un système socio-économique au sein duquel la loi du profit maximum et du privilège des revenus de l’argent est roi. Actuellement, on observe d’ailleurs dans certains pays, un phénomène croissant de « récupération » des entreprises par leurs travailleurs. Les entreprises n’ayant plus suffisamment de capital pour éviter les licenciements ou pour survivre, sont littéralement rachetées par leurs travailleurs qui instaurent alors un mode autogestionnaire. [(Argentine : de chômeurs à salariés autonomes En 2001, l’Argentine a connu une crise économique provoquant la fermeture de nombreuses entreprises et élevant le taux de chômage à près de 18%. Pour faire face à cette catastrophe, des milliers de travailleurs ont décidé de reprendre les rênes de leur entreprise en les rachetant. A l’origine de ces initiatives de reprise et d’autogestion, le mouvement des « piqueteros » fut l’un des mouvements de chômeurs le plus emblématique de cette crise. Aujourd’hui, plus de 200 entreprises récupérées par les travailleurs sont autogérées. Et le mouvement progresse. )] En théorie et vu sous cet angle, l’autogestion a tout pour plaire. En pratique, nous l’avons vu, les choses sont pourtant moins évidentes. Premièrement, travailler dans des conditions égalitaires et dans l’esprit que propose l’autogestion a un prix. Si on suit la recette, il faut savoir mettre de côté la perspective d’un enrichissement personnel, d’une autonomie complète, d’une hiérarchie, etc. Ce qui n’est ni accessible ni au goût de tous. Deuxièmement, trouver des fonds pour mettre sur pied et pour faire vivre une entreprise autogérée et ses travailleurs, demande à ses fondateurs de recourir à des modes de financements différents et plus rares que ceux empruntés traditionnellement par les entreprises. Dans un moyen terme, l’autogestion pourrait plutôt être perçue comme une alternative pour les citoyens désireux de travailler autrement que sous le modèle de travail actuel. Ce n’est certes pas un modèle parfait, mais les échanges d’expériences et les réflexions sur ses forces et ses faiblesses peuvent l’amener à évoluer. Ses caractéristiques techniques lui permettent de vivre à côté d’autres structures de type capitaliste, y compris au niveau de l’accès aux marchés. En cette période de crise profonde de notre système capitaliste, le modèle pourrait montrer sa pertinence et devenir, comme le souligne Michel Laserre, « un mot d’ordre syndical porteur de réelle alternative » . Les gouvernements devraient alors accepter voire soutenir la transformation d’entreprises de type capitaliste en entreprises de type autogéré. [(« Poder sin poder : l’autogestion au quotidien » Durant une année, Johan Verhoeven et Edith Wustefeld sont partis à la découverte d’expériences autogérées en Amérique latine et en Espagne. Au sein d’un territoire, d’une école, d’un centre culturel, d’une radio ou encore d’une coopérative, ce webdocumentaire explore douze espaces qui ont décidé de s’organiser en autogestion. Il démontre ainsi que les domaines d’activités de l’autogestion ne se limitent pas qu’aux entreprises mais peuvent prendre forme un peu partout. )] On dit souvent qu’il faut travailler pour vivre et non vivre pour travailler. L’autogestion semble s’inscrire dans cette ère nouvelle où le bien-être occupe une place prépondérante et où s’il faut travailler pour vivre autant le faire dans les conditions qui correspondent au mode de fonctionnement de chacun.

Coraline Brodkom

-FIN DE VIE: Les 5 grands regrets des mourants- - TROMMENSCHLAGER FRANCK - PSYCHANALYSTE ET PSYCHOSOCIOLOGUE A LUXEUIL LES BAINS (70) LURE VESOUL SAULX SAINT-LOUP SUR SEMOUSE SAINT-SAUVEUR - AU CABINET DE PSYCHOLOGUES 70 HAUTE SAONE
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Bronnie Ware accompagne depuis de nombreuses années les malades en fin de vie. En travaillant, elle s’est rendue compte que les patients exprimaient souvent les mêmes regrets alors qu’ils approchaient de la fin. Elle en a tiré de sages enseignements qu’elle a consigné dans un livre intitulé « Les regrets des personnes mourantes ». The Guardian rapporte son analyse.

-1 : J’aurais aimé avoir le courage de vivre ma vie comme je l’entendais, et non la vie que les autres voulaient pour moi

"C’était le regret le plus courant. Quand les gens réalisent que leur vie est presque finie, ils portent un regard clairvoyant sur leur passé, et ils voient alors combien de rêves ils n’ont finalement pas réalisé. La plupart des gens n'ont pas accompli la moitié de leurs rêves, et sont morts en sachant que cela était dû aux choix qu’ils avaient fait ou non. La santé est une liberté dont bien peu de gens ont conscience jusqu’à ce qu’ils n’en disposent plus ».

-2 : J’aurais aimé ne pas m’acharner autant dans le travail

"Ce souhait a émané de tous les patients masculins que j’ai soignés. Ils regrettent de ne pas avoir étés plus là durant la jeunesse de leurs enfants ou auprès de leur conjoint. Les femmes évoquent aussi ce regret, mais pour une bonne partie de la vieille génération, beaucoup de mes patientes étaient encore à la maison ».

-3 : J’aurais aimé avoir le courage de dire mes sentiments

" Beaucoup de gens taisent leurs sentiments afin d’éviter le conflit avec les autres. En résulte qu’ils s’installent dans une existence médiocre et ne deviennent jamais ce qu’ils auraient pu être. A cause de cela, beaucoup d’entre eux développent des maladies liées à leur amertume et leurs ressentiments. »

-4 : J’aurais aimé rester en contact avec mes amis

" Souvent, les patients ne réalisent pas tout ce que peuvent leur apporter leurs vieux amis jusqu’aux dernières semaines de leur existence. Quand ils s’en rendent compte, il est souvent trop tard pour retrouver leur trace. Souvent, certains sont tellement pris par leur propre existence qu’ils ont laissé filer de précieux amis au fil des années. Beaucoup regrettent de ne pas avoir donné à leurs amis le temps qu’ils méritaient ».

-5 : J’aurais aimé m’autoriser à être plus heureux

"C’est un regret étrangement récurrent. Beaucoup ne se sont pas rendus compte durant leur vie que la joie est un choix. Ils sont restés rivés à leur comportement habituel et leurs habitudes. Ce que l’on appelle « le confort » de la familiarité a éteint leurs émotions et leur vie physique. La peur du changement leur a fait prétendre qu’ils étaient heureux ainsi, alors qu’au fond, ils rêveraient de pouvoir encore rire ou faire des bêtises dans leurs vies ».

Les cinq plus grands regrets des mourants | Le Huffington Post LIFE
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J'ai toujours éprouvé de l'intérêt pour la sagesse de nos aînés et voici un exercice que je fais souvent avec les étudiants et les clients, quand ils semblent se détourner de ce qui compte vraiment dans leur vie. Je leur demande de se projeter bien des années en avant et d'imaginer ce qu'ils auraient fait s'ils revenaient à cet instant précis. Bronnie Ware est une infirmière australienne qui a passé de nombreuses années à travailler en soins palliatifs. Elle a fini par publier un livre intitulé The Top Five Regrets of the Dying (Les 5 plus grands regrets des mourants).

Les regrets peuvent être bénéfiques s'ils nous aident à comprendre ce que nous pouvons changer aujourd'hui pour améliorer les choses. En voici donc un "top 5". Utilisez-les comme l'étoile du Nord devant guider vos actes pour les années à venir vers une vie plus épanouissante. Bien que nous dévions parfois du droit chemin, voir cette étoile nous permet toujours de revenir sur la bonne voie.

Voici donc les 5 plus grands regrets des mourants:

1 - J'aurais aimé avoir eu le courage de vivre la vie que je voulais vraiment, pas celle que les autres attendaient de moi. 

Dès la naissance, nous nous sommes tournés vers nos parents pour qu'ils nous apprennent la marche du monde et nous guident sur la façon dont nous devrions -ou ne devrions pas- agir. Il est très courant que l'on se base sur notre culture ou sur les autres gens pour savoir comment s'habiller, parler, agir, et même quel métier exercer. Qu'est-ce que cela donnerait si vous vous écoutiez et que vous viviez enfin une vie authentique, qui vous convienne?

2 - J'aurais dû travailler moins.

Comme on dit, rater un jour de travail ne vous tuera pas. Le fait de travailler trop vient parfois d'une habitude, d'attentes excessives d'autres personnes, ou bien d'un comportement addictif permettant de ne pas penser à autre chose.Mais n'y a-t-il vraiment pas d'autres choses plus nourrissantes que le travail auxquelles consacrer un peu plus de temps?

3 - J'aurais aimé avoir le courage d'exprimer mes sentiments.

Que ce soit au travail, en amitié ou en amour, on décide souvent un peu trop vite de se mordre la langue plutôt que de s'exprimer franchement. Vivre une existence sincère signifie prendre conscience de ses sentiments et les exprimer. On peut par exemple rater l'occasion de dire aux autres qu'on les aime, ce qui pourrait pourtant renforcer les liens; ou bien parfois quelqu'un nous fait mal, et on se tait par peur. Apprendre à prendre conscience de nos émotions et à les exprimer avec pertinence peut nous aider à nous sentir plus connecté, plus indépendant et plus heureux.

4 - J'aurais aimé garder le contact avec mes amis.

Cela ne fait aucun doute: pour se sentir heureux et épanoui dans la vie, il est essentiel d'avoir des relations enrichissantes. De nos jours, il y a tant de façons de rester connectés à travers les sms, les chat, les mails, les réseaux sociaux, le téléphone, et bien sûr, les rendez-vous en face à face! A vous de réfléchir à la façon dont vous pourriez vous y prendre pour faire des relations avec les autres une partie intégrante de votre quotidien.

5 - J'aurais aimé m'accorder un peu plus de bonheur.

Bronnie Ware explique que bien des gens ne se sont pas rendus compte avant la fin de leur vie que le bonheur était un choix. Si on en est conscient, on peut faire de véritables choix entre ce qui nous nourrit et ce qui nous vide. Entre les convictions dans lesquelles on a envie de s'investir et celles dans lesquelles on ne le souhaite pas. Il nous arrivera peut-être d'être gagné par le stress, l'anxiété, la dépression ou même d'éprouver des réactions traumatiques, mais on a la possibilité à un moment donné de choisir l'impact de ces sentiments sur nous, et grâce à cela, de mieux s'en débarrasser. Peut-être est-il temps de prendre plus de risques: qu'est-ce qui vous rend heureux?

Prenez un moment pour vous retourner une fois encore sur ces cinq regrets qu'éprouvent les gens, et essayez de voir comment vous pouvez commencer à les appliquer dés maintenant dans votre vie.

Comme toujours, partagez s'il vous plaît vos idées, vos histoires et vos questions ci-dessous. Ce sont vos réactions qui créent une vivante sagesse dont nous pouvons tous bénéficier.

En 2017, la moitié des Français sont heureux au travail, l’autre pas…
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Le Baromètre National du Bonheur au travail relève un phénomène étonnant : il semblerait qu’une partie des Français soit très heureux au travail et l’autre partie, plutôt « très » insatisfaite. Ce qui baisse la note moyenne de satisfaction à seulement 5,3 sur 10. Pourquoi un tel clivage ? Selon les auteurs du Baromètre, la France se divise littéralement en 2 : ceux pour qui parler de bonheur au travail est une utopie, voire une provocation, et ceux qui sont satisfaits dans leur vie professionnelle. Ainsi, 23 % des actifs se disent « très satisfaits » et 18 % « très insatisfaits ».

Le travail occupe une place très forte dans la vie des Français. Pourtant, 34 % d’actifs sont insatisfaits, et 13 % à mi-chemin (notant leur satisfaction à 5) et prêts à basculer vers un mal être professionnel. Et le ressenti négatif globale est plutôt alarmant puisque selon La Fabrique Spinoza, 1 salarié sur 2 (51 %) est stressé, fatigué ou s’ennuie au travail. 26 % sont en effet en bore out ; 44 % en brown out (ne trouvent pas de sens à leur mission), et 24 % en burn out. Un mal être qui a une incidence sur la vie personnelle des salariés puisque le surmenage peut avoir un effet négatif sur la vie personnelle.

Le manque de reconnaissance tue

Il existe une dizaine de facteurs déterminants pour le bonheur au travail selon La Fabrique Spinoza. Management, conditions de travail, environnement, rémunération, organisation… Aucune ne donne a priori réellement satisfaction aux salariés, sauf l’affirmation « j’ai un bon ami au travail » qui donne satisfaction à 51 % selon la Baromètre du Bonheur au Travail. L’argent reste une profonde source d’insatisfaction (57 %) tout comme la gouvernance (58 %) et les relations entre collègues (56 %). La reconnaissance récolte également de mauvais résultats : la moitié des actifs ne se sentent pas reconnus pour leur travail (49 %).
De la nécessité d’une transformation profonde des organisations

De même, près d’1 sur 2 ne se sent pas libre « de changer d’organisation ou de mode de travail », soit par le biais de la formation, soit en créant son entreprise. L’émergence de nouveaux modèles d’organisation comme l’entreprise libérée n’est pas anodine face aux faibles scores relevés sur les critères de gouvernance, les relations humaines et le management et rappelle la nécessité d’une transformation profonde des organisations.

Car la crise économique n’explique pas entièrement l’insatisfaction de la moitié des Français. D’ailleurs, 39 % des sondés déclarent ne pas en ressentir l’impact négatif. De plus, l’embellie sur le marché du travail se confirme, même si le taux de chômage reste élevé. Dans son baromètre de l’emploi, RegionsJob note en effet une hausse de + 42 % des offres d’emploi au 3e trimestre 2017. La reprise se poursuit donc, et les salariés semblent refuser de laisser les employeurs se saisir du prétexte de la crise économique pour ne pas agir en faveur du bonheur au travail, aussi utopiste qu’il soit…

Baromètre national du bonheur au travail : les 2 France au travail :La Fabrique Spinoza
Pourquoi les Français n’aiment pas leur travail ?
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VOTRE CHOIX D’ACTU DU 20 NOVEMBRE – 60% des Français disent ne pas aimer leur travail. Décryptage avec une DRH.

Chaque jour avec « Votre choix d’actu », Europe 1 vous propose de définir un thème qui sera approfondi dans Europe midi – Votre Journal animé par Wendy Bouchard.

Dès 9h, rendez-vous sur la page d’accueil d’Europe1.fr pour voter. Vous pouvez le retrouver sur www.europe1.fr/Info/Votrechoixdactu

Mercredi 20 novembre, vous avez été 70% à faire « Votre choix d’actu » sur le désamour des Français pour leur travail. 60% des personnes interrogées dans le cadre d'un sondage GFK pour Monster.com disent en effet ne pas aimer leur travail. Un sur dix le détesterait même.

Catherine Carradot, secrétaire générale de l’Association Nationale des DRH, se veut rassurante, il ne s’agit pas d’une "sinistrose" mais plutôt d’une remise en question des Français sur leurs conditions de vie. Le plus souvent, ce rejet est lié "à des problématiques d’environnement au travail, de relation avec l’équipe".

Un mal franco-français ? Catherine Carradot reconnaît que les Français sont "ronchons culturellement", ce qui peut expliquer ce résultat. Leurs homologues anglais ou allemands seraient plus conscients que les conditions de travail et les salaires ne peuvent évoluer, et arriveraient à se satisfaire davantage de cette situation. Les clés pour aimer son travail sont selon elle "l’envie et l’épanouissement".

Moins de la moitié des Français aiment leur travail
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Selon un sondage publié lundi, seulement 42,7% des Français aiment leur emploi. Mais 11,5% d'entre eux se dit prêt à travailler gratuitement.

Les Français malheureux au travail? Seuls 42,7% d’entre eux affirment en tout cas aimer leur emploi selon un sondage GFK pour le site Monster.fr, que révèle ce lundi Le Parisien (article payant). C’est certes plus que les Allemands (34,5%), mais moins que les Canadiens (63,7%) ou encore les Britanniques (46%). La France est même classée avant dernière de ce classement qui compte 6 pays (Canada, Pays-Bas, Inde, Royaume-Uni, France, Allemagne).

Une perception différente selon les revenus

Par ailleurs, selon ce sondage, 8,8% des salariés français n’aiment pas du tout ou détestent leur emploi. La proportion est de 14,5% chez les 18-24 ans. Par ailleurs, 48,4% des sondés considèrent leur travail comme étant satisfaisant mais sans plus.

Mais tout le monde ne subit pas sa situation professionnelle. 11,5% des salariés français seraient prêts à travailler gratuitement! Cet amour du travail varie, sans surprise, en fonction du niveau de rémunération. Selon le sondage, 45% des salariés situés dans la tranche de revenus la plus élevée adorent ou apprécient leur travail, contre 22% pour les moins bien rémunérés.
M.K. avec AFP

Insatisfaits de leur travail, les Français souhaitent majoritairement se reconvertir
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Un sondage du groupe AEF révèle que neuf Français sur dix souhaiteraient se reconvertir ou se sont déjà reconvertis professionnellement. Une envie qui n'attend pas les années puisque 69% des moins de 30 ans y pensent déjà.

Alors que s'ouvre le salon de la reconversion professionnelle ce jeudi à Paris, un sondage* réalisé par le groupe AEF dévoile que 28% des Français se sont déjà reconvertis, soit plus d'un Français sur quatre. Ce changement d'horizon est généralement motivé par une des trois raisons suivantes: se rapprocher de ses valeurs, rebondir après un licenciement ou encore changer de poste par lassitude.

Deux tiers d'entre eux ont ainsi totalement changé de métier et 14% ont fait le choix de devenir indépendant. Autre enseignement à tirer de ce sondage, il apparaît que les cadres passent plus facilement à l'action quand il s'agit de reconversion. Un tiers d'entre eux s'est lancé, contre 23% de non-cadres.

Pour les sondés, être déterminé est indispensable pour aller au bout de sa reconversion. Viennent ensuite la «solidité du projet», l'accompagnement et la formation. Globalement, les résultats de ces reconversions sont positifs, le sondage indique que 85% des sondés se sentent plus épanouis ou ont un meilleur équilibre de vie depuis leur changement radical de vie professionnelle.

64% n'osent toujours pas franchir le pas, 8% n'y ont même jamais pensé

Il existe un cap majeur entre souhaiter se reconvertir et le faire vraiment. Prétextant souvent ne pas savoir par où commencer, 64% des Français envisageant une reconversion n'arrivent pas à se lancer. Les jeunes de moins de 30 ans sont les plus concernés par cette catégorie. Peu de temps après leur entrée dans le monde du travail, 69% d'entre eux souhaitent déjà réorienter leur carrière... sans pour autant s'en donner les moyens.

Enfin, seulement 8% des Français n'ont jamais songé à se reconvertir. Si 27% d'entre eux se sentent tout simplement épanouis dans leur métier, 49% sont immobilisés par manque d'imagination. Ils n'ont pas la moindre idée de la direction à prendre. D'autres encore estiment que le risque est trop élevé et que les démarches, notamment d'inscription à une formation professionnelle, sont trop compliquées.

L'acte II de la révolution sociale de la présidence Macron - la réforme de la formation professionnelle - vise notamment à simplifier ces procédures. En guise d'exemple, le congé individuel de formation (CIF) qui permet au salarié de s'absenter longuement de son travail pour suivre une formation tout en étant rémunéré, sera pleinement remplacé par le compte personnel de formation (CPF). Ce dernier, mis en place en 2015, simplifie le dispositif et crédite en nombre d'heures par année chaque employé souhaitant bénéficier d'une formation qualifiante ou diplômante.

  • L'étude est menée sur un échantillon représentatif de 1000 actifs français, âgés de 18 ans et plus, dont: 689 personnes en emploi ; 51% de cadres, 45% de non-cadres et 4% d'autres statuts (autoentrepreneurs, artisans...) ; 70% de femmes et 30% d'hommes ; 80% du secteur privé, 20% du secteur public.
92 % des salariés français estiment que le bienêtre au travail dépend avant tout d’une ambiance bienveillante et conviviale - Hub One
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Quelle place le travail occupe-t-il dans la vie des Français par rapport aux Européens ? | Cairn.info

Les Français sont-ils davantage attachés au travail que les autres Européens ? L’exploitation des enquêtes valeurs le laisserait penser. Or une étude comparée avec d’autres enquêtes tend à montrer que cet attachement s’accompagne d’un vif souhait que le travail occupe moins de place dans leur vie. Comment expliquer cet apparent paradoxe ?

Stress et surcharge de travail, principales causes d’insatisfaction dans l’entreprise, selon Qualtrics - La Vie éco
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Seulement 54% des employés français sont impliqués dans leur travail, selon les dernières conclusions du rapport Qualtrics® Employee Pulse, leader de la gestion des données et de l’«experience management».

L’enquête Qualtrics Pulse a été réalisée en octobre 2017 auprès de 4 696 employés dans le monde et 506 employés français à l’aide de la plate-forme Qualtrics Employee Experience.

  • Un employé sur cinq n’est pas satisfait de son travail

Selon le rapport, 22% des employés français ne sont pas satisfaits de leur travail. L’Australie et la Nouvelle-Zélande étant les pays avec le moins d’employés insatisfaits (15%).

Parmi les employés les plus heureux au travail, on trouve les employés du secteur de l’IT et de l’industrie (68 et 66%). A l’inverse, les employés des services publics sont les moins heureux, avec 1 employé sur 3 insatisfait.

Autre résultat alarmant : seul 1 employé sur 2 (54%) recommanderait son entreprise à une connaissance, et seulement 2 employés sur 3 (68%) affirment qu’ils travailleront encore probablement ou certainement dans leur emploi actuel au cours des deux prochaines années ; les secteurs de la finance, de la distribution, de l’IT et de la santé comptent les employés les plus fidèles, avec un taux supérieur à 70%.

Des résultats qui peuvent s’expliquer par la charge de travail ou le stress subi au travail. 1 employé sur 5 affirme être stressé en permanence (8%) ou la plupart du temps (14%).

  • Le salaire, premier facteur de motivation

Les résultats de l’étude, réalisée en octobre 2017, indiquent également que le salaire est l’élément le plus important pour un collaborateur lorsqu’il intègre une entreprise (36%). En revanche, ils sont 21% à estimer que leur salaire n’est pas juste.

L’équilibre entre vie privée et vie pro (18%) arrive en deuxième position des préoccupations des collaborateurs qui souhaitent trouver le bon équilibre de leur temps de travail. Ensuite, les missions du poste (11%) ainsi que les perspectives d’évolution (10%) sont essentielles.

La qualité des locaux, souvent mise en avant par les entreprises comme un point prioritaire et un investissement pour le bien-être de leurs équipes, arrive en bas du classement, suivi par l’équipe avec laquelle ils travaillent.

  • L’équilibre entre vie privée et vie professionnelle pas encore au top

Seulement 2 employés sur 3 (65%) affirment être assez ou très satisfaits de leur équilibre vie professionnelle / vie privée, et seulement 40% des personnes interrogées affirment que leur entreprise les soutient dans leur quête d’équilibre du temps de travail.

Alors que le droit à la déconnexion est entré dans le code du travail, 20% des employés affirment consulter leurs mails professionnels la plupart du temps, voire les week-ends, et 1 employé sur 3 affirme travailler en dehors des heures contractuelles au moins 50% du temps.

  • Les retours d’expérience employés plébiscités par 61 % des employés

L’étude révèle que seulement 1 employé sur 2 (53%) a l’occasion de s’exprimer dans le cadre d’un programme de retour d’expérience employé, résultat le plus bas parmi les pays interrogés, avec par exemple 69% au Royaume-Uni. Quant à la récurrence, de nombreuses entreprises se contentent encore d’un sondage annuel (47%) ou semestriel (22%).

Bien que 61% des personnes interrogées affirment qu’il est très important pour eux que l’entreprise prenne en compte leur retour, seulement 48% estiment que leur entreprise prend en compte leur opinion pour améliorer leur expérience en tant qu’employé.

  • Un employé sur cinq en manque de confiance vis-à-vis des pairs

Un employé sur cinq affirme ne pas avoir ou avoir peu confiance en son équipe de direction, et seulement 37% estiment obtenir régulièrement la reconnaissance de leur manager pour le travail effectué.

Par ailleurs, seulement 27% des employés interrogés affirment avoir des opportunités de progression de carrière au sein de leur entreprise, et seulement 1 employé sur 3 (31%) affirme avoir la possibilité de tester des choses nouvelles qui les intéressent dans le cadre de leur travail.

Abolition du travail salarié — Wikipédia

L'abolition du travail salarié est une revendication révolutionnaire issue des courants marxistes et anarchistes. Il s'agit d'une nouvelle répartition des richesses par la mise en commun de ces dernières, que chacun puisse obtenir suffisamment pour subvenir à ses besoins à condition qu'il contribue sa force de travail pour le bien de l'humanité.

Bien que l'abolition du travail salarié soit un concept important de la pensée marxienne, elle n'a jamais fait l'objet de mise en pratique, sauf dans quelques collectivités libertaires espagnoles en 1936 et au début de 19371,2. Durant la révolution russe de 1917, le parti Bolchevik a employé l'argumentation marxiste contre la petite propriété, mais n'a pas aboli le salariat.

Quel avenir pour le salariat ? | Melchior

I - La construction progressive de la société salariale

A - D’un salariat « indigne »

L’ expression « indigne salariat » est utilisée par Robert Castel dans Les métamorphoses de la question sociale (1995). Sous l’Ancien Régime, les métiers jugés « dignes » étaient réglementés par les corporations qui traçaient une ligne de partage entre les « gens de métier » (professions libérales, hommes de loi, médecins, charpentiers, armuriers, etc.) et les « gens de peine » (journaliers, domestiques, manœuvres,...). Tous les membres des corporations, qu’ils soient maîtres, compagnons ou apprentis, bénéficiaient d’une protection, alors que les seconds n’avaient aucun statut.

Avec la révolution industrielle, la critique du salariat s’amplifie. Sismondi (1773-1842) montre dans les années 1820 qu’avec le salariat, c’est la société toute entière qui se soumet au principe de rentabilisation du capital. Cette critique est amplifiée par Marx (1818-1883) : pour lui, le salariat est une forme atténuée d’esclavage puisque, en vendant sa force de travail, le salarié perd tout droit sur le produit de son travail ainsi que la maîtrise des conditions d’exécution. Théoriquement, le rapport salarial suppose la liberté du travailleur et l'égalité juridique entre l’employeur et le salarié. En réalité, cette égalité et cette liberté sur le marché du travail ne sont que des fictions, puisque les prolétaires n'ont que leurs bras pour subsister et n'ont aucune liberté. Au moment de la révolution industrielle, il existe des contrats de louage de service quand le travail est payé au temps et des contrats de louage d'ouvrage quand le travail est payé à la pièce. Mais les salariés ne bénéficient d'aucune protection sociale, en cas de maladie ou de privation de leur capacité de travail. Par ailleurs, en raison du déséquilibre fondamental entre le travail et le capital, les salaires sont proches du minimum de subsistance, permettant tout juste comme son nom l'indique la reproduction du travailleur et de sa famille. Dans les faits, les salariés n'étaient pas totalement démunis, puisqu'ils faisaient preuve de mobilité entre les sites de production, toujours à la recherche de meilleurs salaires. Mais les employeurs n'avaient de cesse de réduire cette mobilité du travail, par l'intermédiaire du « livret ouvrier », et aussi par l'institution du patronage.
B - A la création de la société salariale

C'est avec l'apparition du contrat de travail et le développement des droits sociaux que le salariat change de signification. Le premier droit social est obtenu par la loi du 09 avril 1898, qui concerne les accidents du travail dont sont victimes les ouvriers. C'est la naissance du « risque professionnel » qui attribue aux ouvriers une indemnité de compensation par l’employeur en cas de diminution ou de perte de capacité de travail suite à un accident, et qui reconnaît aussi de fait le principe de subordination de l'employé à l'employeur. La loi de 1898 modifie le modèle juridique qui règle la relation de travail en établissant la responsabilité du chef d'entreprise. Par l'affirmation de l'inégalité de la relation contractuelle de travail, on reconnaît en même temps la responsabilité des employeurs à l'égard de leurs salariés, et on ouvre ainsi la porte au financement des droits sociaux qui vont s'étendre tout au long du XXème siècle avec les lois d'assurance sociale (retraites, maladie, chômage,...). Avec le salariat né de la reconnaissance juridique de la subordination de l'employé à l'employeur, le statut de chômeur peut par exemple apparaître (chômage comme rupture du contrat de travail).

Progressivement, au cours du XXème siècle, le salariat devient le centre de la société et le pilier de l'intégration sociale. En 1975, les salariés représentent déjà 82% de la population active. En 2006, cette proportion est de 89%. Aujourd'hui encore, en 2015, la France compte plus de 24 millions de salariés, contre seulement 2,6 millions de travailleurs non salariés. C'est grâce au travail salarié que beaucoup de personnes se protègent des aléas de la vie et construisent leur avenir. Le travail, au-delà de sa fonction de production des richesses, assure une fonction de protection sociale par le biais des cotisations sociales assises sur celui-ci. Par ailleurs, le salariat a été un facteur important du changement social. Il a permis de dépasser l'opposition entre le travail et le capital qui caractérisait le XIXème siècle, puisque de nos jours le salariat peut procurer des revenus élevés, des positions de pouvoir et de prestige. Il a été aussi à l'origine de ce que Henri Mendras (1927-2003) a appelé « La Seconde révolution française » (1988) , c'est-à-dire d'un renouvellement profond des valeurs et des normes dans toutes les sphères de la vie sociale comme la famille, le travail, ou encore l'éducation (valeurs de permissivité, de tolérance, de respect de la différence,..). Ces valeurs sont généralement portées par la « constellation centrale », essentiellement composée des salariés moyens, qui sont dans le second XXème siècle un foyer d'innovation sociale et morale qui influence profondément l'ensemble de la société.
II - La remise en cause du salariat

A - Une nouvelle réalité du travail

La désaffection croissante pour le travail salarié s'explique d'abord parce-que le salariat ne correspond plus tout à fait au système productif actuel. Alors que le modèle fordiste impliquait la grande taille synonyme d'économies d'échelle, la stabilité et la durée dans le temps, le nouveau modèle productif exige au contraire vitesse et adaptabilité. Cela a pour conséquence une recherche de la flexibilité de la part des entreprises. Dans ce contexte, le cadre protecteur du salariat ne semble plus adéquat. Une relation durable entre un salarié et une entreprise ne correspond plus au fonctionnement des marchés caractérisé par la concurrence, la compétition et le changement permanent. Pour éviter des pertes, l'entreprise doit pouvoir adapter sa masse salariale dans un délai très court (externalisations, restructurations, suppressions de postes). De plus, le cadre protecteur du salariat n'est pas propice à l'engagement professionnel, entraînant plutôt des réflexes de repli catégoriel et de résistance au changement. Or, l'économie tertiarisée exige plutôt initiative, agilité et autonomie. Il n'est plus demandé au salarié d'effectuer des tâches standardisées et répétitives, mais de mettre à la disposition de son employeur sa créativité, sa réactivité, et aussi sa personnalité. Le lien de subordination fait d'obéissance et de contrôle devient alors totalement contre-productif.

Dans cette nouvelle donne, le contrat classique de travail devient obsolète. Robert Castel a parfaitement résumé cette évolution avec les expressions « effritement de la condition salariale » on encore « déstabilisation des stables ». Depuis les années 1980, les formes particulières d'emploi (contrats à durée déterminée, travail intérimaire, travail à temps partiel, emplois aidés) ne cessent de se développer. Alors que ces formes particulières d'emploi ne représentaient en 1983 que 2,6% des emplois salariés, dès 2006 elles rassemblent environ 3 millions de personnes, soit 12% de la population active occupée.Aujourd'hui, le contrat à durée indéterminée n'occupe plus que 70% du salariat, soit 16,8 millions de personnes. Et l'emploi « classique » ne se superpose pas à ces chiffres, car en toute logique il faudrait décompter de ces 16,8 millions le nombre élevé de salariés qui tout en étant en contrat à durée indéterminée télétravaillent ou ont des horaires atypiques. Au-delà de ces formes particulières d'emploi, on peut considérer que c'est le pacte sous-jacent qui liait un employeur à un salarié qui est devenu léonin. De nos jours, le contrat à durée indéterminée ne protège plus les salariés puisque dans un environnement, économique où la durée de vie des entreprises ne cesse de se raccourcir, détenir un tel contrat ne garantit plus un emploi à vie . De plus, ce contrat à durée indéterminée a perdu nombre de ses avantages. La hausse des cotisations s'affirme alors que les prestations sociales ont tendance à diminuer. Les carrières ne se déroulent plus au rythme de l'ancienneté. Et bien souvent, l'emploi salarié est désormais associé à une certaine souffrance au travail : cadences élevées, management par le stress, voire burn-out......
B - Un regain de l'activité non salariée

Le déclin du salariat peut aussi se voir dans le revirement d'une tendance lourde à la régression des effectifs non salariés. Les non salariés regroupent les travailleurs indépendants (artisans, professions libérales, agriculteurs), les employeurs, les aides familiaux. Le non salariat est défini par les caractéristiques inverses à celles du salariat, à savoir la non subordination hiérarchique du travailleur et la possession d'une clientèle propre. En 1970, on comptait 4,3 millions de non salariés. En 2006, ce chiffre est de 2,2 millions, soit une division par deux. Cette diminution s'arrête en 2002 et le nombre de non salariés a tendance à augmenter depuis, surtout que la baisse du nombre des non salariés depuis les années 1970 s'expliquait avant tout par la diminution du nombre d'agriculteurs et de petits commerçants (notamment dans l'alimentation en raison de l'apparition des grandes surfaces). Ainsi la part de l'emploi non salarié des secteurs marchands non agricoles avait déjà augmenté de 1989 à 1998 (de 7,8% à 9,2% de la population active). Aujourd'hui, en 2015, il y a 2,6 millions de travailleurs indépendants qui représentent environ 10%de la population active. Parmi ceux-ci, l'essor du nombre d'auto-entrepreneurs depuis la création du statut (en 2009) a été spectaculaire, atteignant près d'un million de personnes.

La montée des travailleurs non salariés dans la population active correspond à la fois aux besoins de l'appareil productif et aux besoins de l'individu. Du côté de l'appareil productif, on observe en effet que la relation contractuelle entre un travailleur et un employeur devient de plus en plus complexe puisqu'une personne peut maintenant occuper plusieurs emplois à la fois (à travers la multiactivité), et aussi parce-que le développement de l'externalisation et de la sous-traitance font que de plus en plus de personnes travaillent dans un lieu distinct de celui de leur employeur légal. La déspatialisation du travail, rendue possible par la diffusion des nouvelles technologies, affecte bon nombre de métiers, comme ceux de consultants, d'auditeurs, d'informaticiens, détachés de leur entreprise pour intervenir chez des clients. Du côté des besoins de l'individu, l'extension du travail hors salariat correspond aussi à des choix assumés : l'individu veut pouvoir maintenant définir le cadre de sa relation d'emploi et personnaliser ses conditions de travail. Selon le rapport Le travail à temps partiel en 2011 (Ministère du travail, janvier 2013), 52% des Français voudraient pouvoir travailler de chez eux et 68% des salariés à temps partiel déclarent avoir choisi ce mode de travail, le plus souvent pour concilier vie familiale et vie professionnelle. Désormais, sur les lieux de travail, la dimension « épanouissement personnel » devient aussi importante que la dimension instrumentale. (« gagner sa vie »). Ceci accroît considérablement l'attractivité du travail non salarié, notamment chez les jeunes : 43% des 16 à 19 ans souhaitent être indépendants.

Ces mutations structurelles ont déjà commencé à bouleverser les parcours professionnels qui deviennent discontinus. Le parcours typique d'un travailleur du XXIème siècle sera de commencer à travailler en intérim ou en contrat à durée déterminée, puis en contrat à durée indéterminée, avec ensuite des phases de chômage, de formation, de reclassement, et peut-être aussi de travailleur indépendant pour s' assurer des revenus complémentaires. En tout cas, ces carrières protéiformes obligeront à repenser les modes d'accès à la Sécurité sociale et aux caisses de retraite, car cette souplesse accrue des individus au cours de leur vie professionnelle ne doit pas se faire à leur détriment.
Conclusion

Pour certains, le développement du travail hors salariat est une régression historique, un retour à la période antérieure aux Trente Glorieuses. Il est vrai que l'essor de ce type d'emploi fait craindre le danger de revenir à une marchandisation du travail sous la forme d'un labeur à la demande payé en fonction des tâches effectuées, ce qui serait une sorte de retour au statut de « travailleur journalier ». Il est vrai aussi que le travail indépendant juridiquement peut être en fait un travail économiquement très dépendant. C'est le cas ce ceux qui travaillent sous l'autorité d'un seul client et sous sa supervision directe. Dans certains secteurs d'activités, le risque de dépendance est véritable, et notamment dans les secteurs de la construction, de la santé, des services à la personne, des activités culturelles.

Toutefois, on peut aussi considérer avec Denis Pennel (Vers la fin du salariat, Sociétal, 2015) qu'au contraire c'est la généralisation du salariat au XXème siècle qui a constitué une anomalie dans l'histoire économique et sociale. En effet , jusqu'en 1930 en France mais aussi dans bon nombre de pays développés , la forme d'emploi dominante était le travail indépendant. C'est la raison pour laquelle il faut accepter la remise en cause du salariat à laquelle nous assistons de nos jours. Le salariat ne disparaîtra pas, mais il va s'intégrer à une diversification de la relation de travail entre travail subordonné et travail indépendant. Il y aura toujours des salariés classiques, mais aussi des salariés indirects (intérim, sous-traitance,...), des travailleurs indépendants (auto-entrepreneurs, chefs d'entreprise, professions libérales,..), et aussi des « contrats de service », sans compter des formes d'hybridation comme la pluriactivité (cumul d'un emploi salarié et d'une activuté indépendante), des emplois qui s'inscrivent dans le champ du salariat et qui se rapprochent cependant du travail indépendant (portage salarial par exemple), ou inversement des formes de travail indépendant qui maintiennent un lien de subordination (gérants non salariés de succursales de commerce de détail par exemple).

Quoiqu’il en soit, il est nécessaire d'évoluer vers de nouvelles formes de sécurité qui protègent les personnes plus que les emplois, afin de faciliter les transitions professionnelles. C'est ce que proposait déjà Jean Boissonnat il y a 20 ans avec son « contrat d'activité » (Le travail dans 20 ans, Commissariat général du plan, octobre 1995). Dans le cadre de cette sécurisation du parcours professionnel, il faut donner à l'individu des droits lui procurant une maîtrise sur l'évolution de sa carrière et sur les accidents de parcours. Cela signifie que les droits en question ne s'envisagent pas seulement dans le cadre du contrat de travail, mais peuvent être transférables, organisés sous la forme de comptes individuels de formation, de droits de tirage sociaux...

Pour conclure avec Denis Pennel, on peut dire que « face à la fin de l'unité de temps, de lieu et d'action du travail, il est urgent de construire un nouveau contrat social qui ne repose plus sur le salariat mais sur la citoyenneté ».

Le salariat est-il menacé ?
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Entre 2006 et 2011, les non-salariés ont progressé en France de 26 % pour atteindre 2,8 millions de personnes, note l'Insee

ENQUÊTE - S'il reste encore ultradominant, il est confronté depuis 2006 à une montée du travail indépendant, nourrie par les nouvelles technologies, le chômage de masse, et le rêve d'autonomie des jeunes générations.

Né à la fin du XIXe siècle en pleine révolution industrielle autour de l'usine et de la mine, le salariat forge depuis près de deux siècles le Code du travail, façonne le dialogue social et sous-tend tout notre système de protection sociale. Mais ce modèle est aujourd'hui confronté à une onde de choc. Une révolution silencieuse est en cours, résultant à la fois du chômage massif et d'une soif d'entreprendre inédite. L'ubérisation de l'économie, la création des plateformes collaboratives, la montée des autoentrepreneurs encouragent le développement de nouvelles formes d'emplois s'éloignant chaque jour un peu plus du cadre traditionnel. Adieu «métro, boulot, dodo»: le salariat est-il en train de vivre ses derniers instants?

  • De plus en plus de non-salariés

C'est un fait: depuis une dizaine d'années, on assiste à une augmentation progressive du travail non salarié en France, même si cette tendance reste moins marquée qu'en Allemagne ou au Royaume-Uni. Entre 2006 et 2011, les non-salariés ont progressé en France de 26 % pour atteindre 2,8 millions de personnes, note l'Insee. Ce dynamisme s'explique en partie par le succès du statut d'autoentrepreneur, créé en 2008, qui encourage l'initiative et l'entrepreneuriat individuel. Résultat, le nombre d'autoentrepreneurs a presque doublé entre 2010 et 2014, date à laquelle il a franchi le cap du million.

Ce dynamisme correspond aussi à un changement des mentalités: en janvier 2016, 37 % des Français déclaraient avoir envie de se mettre un jour à leur compte, selon un sondage OpinionWay. Un record jamais atteint! «Le sacro-saint modèle du salariat s'égratigne un peu plus chaque année. Il ne fait plus rêver les Français et encore moins les jeunes», observe François Hurel, président de l'Union des autoentrepreneurs. C'est un changement culturel massif chez les 18-34 ans, cette fameuse génération Y aspirant à plus d'autonomie et d'épanouissement personnel, qui rêve davantage de créer sa start-up que de rentrer dans un grand groupe.

  • Ubérisation et chômage de masse

Comme dans la tragédie classique, le salariat a imposé la règle des trois unités: unité de lieu (tous dans l'entreprise), unité de temps (tous aux 35 heures), unité d'action (tous placés dans un système hiérarchique). Or, la révolution numérique ébranle ce système en permettant avec un ordinateur ou un smartphone de travailler où que l'on soit, à n'importe quelle heure, pour des services de plus en plus individualisés.

Sur les 10.000 emplois de chauffeurs créés par Uber en France en trois ans, 25 % étaient auparavant au chômage et 12,5 % en chômage de longue durée, selon une étude Ifop pour le site américain

Force est de reconnaître que ce mouvement prend aussi sa source dans le chômage de masse. On ne compte plus les cadres seniors qui, après une carrière bien remplie, ne retrouvant pas de poste à l'issue d'un plan social, se lancent comme free lance ou consultant.

C'est aussi le chômage de masse qui, touchant de plein fouet les moins qualifiés, les pousse à créer leur propre «job» faute d'en trouver un. Ce qui fait dire à Emmanuel Macron que, par les temps qui courent, «il est plus facile de trouver un client qu'un employeur». L'exemple d'Uber est à cet égard emblématique: sur les 10 000 emplois de chauffeurs créés en France en trois ans, 25 % étaient auparavant au chômage et 12,5 % en chômage de longue durée, selon une étude Ifop pour le site américain.

À côté des jeunes diplômés créant leur start-up, les non-salariés regroupent ainsi toute une population vivant de débrouille, de petits boulots pour joindre les deux bouts. Ils forment ce nouveau prolétariat décrit par Damien Menascé, professeur à HEC, dans La France du Bon Coin.

  • Un manque de protection sociale

Certes, on arguera que le travail indépendant n'a rien de nouveau. Depuis des lustres, professions libérales, commerçants, artisans, agriculteurs exercent leur activité loin du salariat. Un état d'esprit qui conduit à préférer l'indépendance et l'autonomie au salariat, qui certes protège et rassure mais enferme dans un lien de subordination avec l'employeur.

Les autoentrepreneurs dégagent des revenus dix fois inférieurs en moyenne aux autres non-salariés (460 euros par mois)

Ce qui est nouveau, en revanche, c'est l'arrivée à côté de ces non-salariés classiques vivant plutôt bien (3100 euros de revenu en moyenne), disposant souvent d'un haut niveau de qualification et d'un patrimoine professionnel (fonds de commerce) qu'ils pourront céder au moment de leur départ en retraite, de formes plus récentes de travail indépendant, concentrées dans des activités à faible valeur ajoutée. Les autoentrepreneurs dégagent ainsi des revenus dix fois inférieurs en moyenne aux autres non-salariés (460 euros par mois).

Résultat, si les nouvelles formes d'emploi non salarié sont potentiellement un formidable levier permettant de contribuer à l'intégration de groupes spécifiques de travailleurs dans l'emploi, elles portent aussi le risque d'une polarisation accrue du marché du travail. Avec d'un côté des travailleurs très qualifiés indépendants et autonomes, de l'autre des travailleurs peu qualifiés, multi-employeurs et exerçant leur activité selon plusieurs statuts.

Accusées de contribuer à la précarisation du travail, ces nouvelles formes d'emploi font craindre une paupérisation et une fragilisation d'une partie de la population, exclue de l'entreprise et privée du précieux contrat de travail, ce sésame protecteur et rassurant, contrepartie du lien de subordination avec l'employeur. Inquiets, les syndicats mettent en garde contre une évolution qui risque de transformer «chaque salarié en petit entrepreneur», faisant exploser les standards sociaux et la protection du travail.

  • Le CDI reste le sésame vers la vie active

Encore largement dominant, bien ancré dans nos sociétés occidentales, le salariat a des atouts et ne semble pas près de disparaître. L'accès à la sécurité sociale, aux mutuelles, au logement, aux prêts bancaires reste largement conditionné à l'obtention d'un CDI à temps plein. Résultat, même s'il est en hausse, l'emploi non salarié reste limité, à peine 10 % de l'emploi total en France. Et aux États-Unis, laboratoire avancé de l'Europe, le nombre de travailleurs indépendants diminue même légèrement depuis le début des années 2000, de 11 à 10 % de l'emploi total.

«L'étape ultime de ce mouvement serait l'entreprise libérée», estime Raymond Soubie, grand spécialiste des relations sociales. C'est-à-dire une entreprise où il n'y aurait plus de pouvoir de commandement, plus de liens hiérarchiques, où les salariés fonctionneraient en autogestion. Or, à ce jour, les expériences sont peu convaincantes et ce modèle reste très limité.

La fin du salariat n'est pas pour demain. Pour autant, une évolution profonde est en cours. «Le nouveau paradigme, c'est la pluriactivité, l'entrepreneuriat en complément du salariat», expliquent Augustin Landier, professeur de finance à la Toulouse School of Economics, et David Thesmar, professeur à HEC. Et de citer le prof de fac qui fait du conseil en plus de ses cours, le livreur faisant le taxi le week-end, et tous ceux qui rentabilisent leur voiture ou leur maison via les plates-formes collaboratives, sans en faire pour autant leur source de revenus principale. «Demain, l'emploi sera fragmenté, individualisé, à la carte, moins subordonné et plus collaboratif», explique Denis Pennel, directeur général de la Confédération mondiale des services privés pour l'emploi (Ciett), dans son livre Travailler pour soi. Quel avenir pour le travail à l'heure de la révolution individualiste?.

  • Une évolution qu'il faut accompagner

Alors que les parcours professionnels sont de moins en moins linéaires, il semble nécessaire de faciliter le passage d'un statut à un autre et de sécuriser ces nouvelles formes d'emploi. Il faut inventer de nouvelles formes de protection pour combiner flexibilité et sécurité. Le gouvernement réfléchit, après avoir reçu du DRH d'Orange, Bruno Mettling, un rapport sur la transformation numérique, et du député Pascal Terrasse une série de propositions pour mieux encadrer l'économie collaborative. François Hollande a annoncé le compte personnel d'activité, qui doit garantir à partir de 2017 les droits du travailleur tout au long de sa vie, quel que soit son statut. Nathalie Kosciusko-Morizet prône, elle, la création d'un droit de l'actif et une protection sociale nouvelle pour ces travailleurs 2.0.

Les réseaux d'entrepreneurs, eux, réclament quelques mesures simples. Par exemple, de sécuriser les relations entre les entrepreneurs individuels et leurs donneurs d'ordres afin de limiter au maximum les risques de requalification en salariat déguisé. «Ce sont au moins 1 million de nouveaux travailleurs indépendants qui pourraient se lancer», estime François Hurel. Le recours aux autoentrepreneurs reste en effet peu développé au sein des entreprises du fait de ce risque de requalification et des sanctions lourdes qu'il implique: 45 000 euros d'amende, jusqu'à 3 ans d'emprisonnement pour l'employeur et la régularisation du paiement des cotisations sociales.

Les réseaux proposent aussi d'élargir le recours au portage salarial, solution hybride qui réunit la liberté de l'indépendant tout en offrant la protection du salariat. Adapté au salarié qui recherche un complément d'activité, à l'étudiant, au cadre en transition, le portage permet de facturer un client sans créer d'entreprise. Les honoraires sont versés à un intermédiaire - la société de portage - qui calcule les cotisations, gère le versant administratif et reverse un salaire au travailleur, en prélevant au passage son propre pourcentage.

Une solution encore méconnue, mais qui concerne plus de 50.000 personnes avec une croissance annuelle de 40 % depuis 2011. Le portage est promis à se développer car il constitue une passerelle efficace entre le monde classique du salariat et la logique de l'entrepreneur!

Six chiffres-clés pour comprendre le suicide en France
Planetoscope - Statistiques : Nombre de suicides en France
Suicide en France — Wikipédia
"Mort ou vie ?" : une ado se suicide après un sondage Instagram en Malaisie - neonmag.fr
Lien de subordination en droit du travail français — Wikipédia

Le lien de subordination est un des trois éléments caractéristiques du contrat de travail avec la fourniture d'un travail et sa contrepartie, la rémunération. C'est l'élément distinctif qui permet la distinction entre le contrat de travail et les autres contrats : contrat d'entreprise, de location, mandat, etc...

Quel que soit le type de contrat de travail, le lien de subordination existe dès qu'une personne, l'employeur, peut exercer son pouvoir de direction sur une autre personne, l'employé. Cette autorité comprend le pouvoir de donner des directives, le pouvoir d'en contrôler l'exécution et le pouvoir d'en sanctionner la mauvaise exécution. Il doit pouvoir s'exercer à tout moment mais pas nécessairement de manière étroite et ininterrompue. Il suffit donc que ce pouvoir de direction ou pouvoir de subordination soit au moins potentiel, l'employeur ayant à tout moment le pouvoir exercé ou non, de donner des ordres et de surveiller leur exécution.

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Artisanat

Du bas Moyen Age au début du XXe s., l'artisanat peut être défini comme un travail manuel exécuté avec des outils simples. L'artisan ― entrepreneur et producteur ― travaille seul ou aidé par autrui (Compagnons, apprentis) tantôt sur commande pour la clientèle locale, tantôt pour constituer un stock qu'il écoulera lui-même. Les petites entreprises, dirigées par des Maîtres, dominent. Aujourd'hui, la notion d'artisanat inclut des exploitations de taille et de technicité variables œuvrant principalement dans le domaine des produits de luxe ou d'art (Arts décoratifs), fabriquant sur demande des pièces uniques ou assurant l'entretien et la réparation d'articles industriels. L'industrie et les administrations publiques intègrent elles aussi des métiers artisanaux.

Jusque vers 1950, l'histoire de l'artisanat est restée dans l'ombre de celle des Corporations. Seuls quelques chercheurs l'ont étudiée sous l'angle économique et juridique. Ce n'est qu'à partir de 1970 que le sujet se voit envisagé dans une perspective proprement anthropologique, incluant des thèmes aussi divers que l'artisanat urbain et rural, les migrations, le compagnonnage, la vie quotidienne, les mentalités.

sommaire de l'article :

  • Origines
  • Une forme économique novatrice: l'artisanat dans la ville médiévale
  • Mesures anti-crises et réglementation des métiers
  • La formation
  • L'artisanat rural
  • Un bastion masculin
  • Rivalités entre artisans citadins et campagnards
  • XIXe et XXe siècles: la lutte pour la liberté du commerce et de l'industrie
  • L'artisanat sous le signe de l'industrialisation et des changements structurels
  • Sources et bibliographie
  • Informations complémentaires
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Révision de l'Histoire de - Les Editions du cerf

Au centre des controverses autour de la « question allemande » deux grandes interrogations sur la modernité : les systèmes totalitaires et les crimes et génocides nazis. Les événements du jour précipitent questions historiques, politiques, éthiques, voire méthodologiques qui ont été débattues ces dernières années. De nouvelles orientations de recherche et de nouvelles analyses ont enrichi les théories sur le ou les totalitarismes, les enquêtes historiques et la critique politique. Cet ouvrage fait le point sur cet héritage de notre temps et identifie les obstacles à franchir pour le réinterroger avec fécondité. Les discussions consacrées aux totalitarismes – riches aussi bien en analyses « internes » qu'en approches « comparatistes » – permettent de tirer quelques bilans fort instructifs quant aux multiples usages d'une notion qui n'a cessé de préoccuper la pensée contemporaine. Le débat sur la singularité des crimes et génocides nazis a mis en lumière les enjeux qu'implique la « mise en perspective historique » du IIIème Reich, comme l'a montré le débat des historiens allemands : « Devant l'Histoire ». Point incontournable pour la conscience européenne, Auschwitz s'inscrit, plus que jamais, au carrefour des grandes interrogations du présent.

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Exode Urbain en 2021 | Tendance de Fond ou Phénomène de Mode ?
Accéder à de nouvelles responsabilités - Vesta Team
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Maxime Verner, 21 ans, candidat pour 2012
Esprit critique : Comment ne plus se faire avoir par les films documentaires ?
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L’esprit critique est une véritable science ! Cette science porte même un nom : la zététique. Vous allez découvrir dans cet article différents types de raisonnements pouvant conduire à des conclusions erronées. Tout comme je vous expliquais qu’il est très important de vérifier les informations que vous trouvez sur Internet, aujourd’hui je vous donne quelques astuces pour décrypter les documentaires grâce à votre esprit critique.

Comment détecter le vrai du faux dans un reportage ? Quels types de mécanismes sont mis en place pour endormir votre esprit critique ? Quelles sont les méthodes qui permettent aux journalistes de transformer l’information afin de la rendre crédible ?

Vous allez découvrir 9 mécanismes très simples à mettre en place pour faire avaler n’importe quoi à n’importe qui. Après la lecture de cet article je vous promets que vous ne regarderez plus aucun documentaire de la même manière !

Prendre ses responsabilités : le secret pour changer radicalement sa vie !
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Carl Schmitt, Jünger, Heidegger : le nazisme des intellectuels
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Carte blanche. Pour le philosophe et écrivain Jean-Pierre Faye, soixante-dix ans après, il faut enfin admettre que ce sont trois grands esprits philosophiques – Heidegger, Jünger et Schmitt – qui ont fait le lit d'Hitler.

L'un des mots les plus usités dans l'après-guerre et qui, aux Etats-Unis, remplit des salles entières d'ouvrages sous ce titre, c'est "déconstruction" – et c'est le même terme en langue anglaise : deconstruction. Curieusement sa source initiale vient d'un mot allemand lui-même peu usité, employé une seule fois par le philosophe Heidegger (1889-1976) : Abbau.

Or le paradoxe, c'est que ce mot abondant et innocent en langue américaine, prend sa source chez ce philosophe allemand que nous révérions dans les années de guerre et d'après-guerre. Et pour découvrir, longtemps après la seconde guerre mondiale, qu'il a pris parti pour le IIIe Reich. Au côté du juriste Carl Schmitt (1888-1985), aujourd'hui encore enseigné – paradoxalement – comme référence en matière de droit constitutionnel de "l'Etat souverain", notamment par nos amis italiens.

Mais existe-t-il des écrits vraiment nazis de Heidegger, le philosophe auquel allait notre respect en raison de ses essais "existentiels" des années 1920 ? L'honnêteté de la lecture découvre en effet chez lui des écrits politiques marqués plus gravement encore que ceux de son ami l'écrivain et essayiste Ernst Jünger (1895-1998), l'auteur, dès 1930, de La Mobilisation totale (Die totale Mobilmachung), traduite en français et publiée chez Gallimard en 1990.

"L'ETAT TOTAL"

Ceux-ci se prolongent chez l'ami Carl Schmitt, l'idéologue de "l'Etat total", à qui Hitler devra, pour une très grande part, d'avoir reçu le pouvoir en 1933 – par l'effet même de la conférence sur le totale Staat que Schmitt donne, le 23 novembre 1932, devant les représentants de la grande industrie. Une amitié intensément politique lie alors Heidegger à Jünger et, par lui, à Carl Schmitt. C'est le triptyque des noms qui dessine un temple d'acceptation pour l'idéologie propagée par la furie hitlérienne.

Il faut lire les écrits politiques d'Heidegger en 1933-1934 pour saisir ces enjeux. Dès son "Appel aux étudiants" du 3 novembre 1933, il prononce : "Le Führer lui-même et lui seul est la réalité allemande d'aujourd'hui et de demain…" Et sa "Profession de foi en Adolf Hitler", la Bekenntnis zu Adolf Hitler en décembre 1933, décrit le Führer comme l'instant de "retourner à l'essence de l'Etre". Le Führer devient une ontologie…

Bien pire, son "Appel pour le service du travail", le 23 janvier 1934, souligne "l'empreinte préfigurée dans le Parti national-socialiste ouvrier allemand". Ce parti dont le nom est raccourci par Goebbels en Parti nazi-sozi, ou en version courte : Nazi. Il s'agira en effet des camps de travail, salués par Heidegger comme "le bienfait qui émerge du mystère vivifiant qu'est l'avenir nouveau de notre peuple"… Le délire nazi atteint son apogée.

Car au même moment surviennent d'autres camps de travail, dits "camps de concentration", qui couvrent le territoire national. Durant la seconde guerre mondiale, apparaissent en Pologne ceux qui sont nommés secrètement les camps d'extermination, les Vernichtungslager.

Or le 1er mai 1933, Heidegger et Carl Schmitt adhèrent au Parti nazi. Il faut souligner le fait que l'adhésion au parti unique est difficile dans le Reich hitlérien. Contrairement à l'Italie mussolinienne, où tout le monde prend sa carte, comme la "carte du pain". Il y aura 24 millions d'adhérents au Parti fasciste, 8 millions seulement au parti hitlérien. Le geste de l'adhésion est donc grave et contrôlé. Heidegger, dans son cours de décembre 1933 sur Héraclite…, énonce la nécessité de "l'attaque", dans le but "d'effectuer l'extermination totale".

LES CAMPS D'EXTERMINATION

Ce terme terrible va marquer les Vernichtungslager, les camps d'extermination hitlériens de 1942-1945. Surgis dans la Pologne anéantie : à Chelmno, à Belzec, Auschwitz-Birkenau, Maïdanek, Sobibor, Treblinka… Ce terme s'inscrit dans la plus terrible réalité de l'Histoire. Heidegger aura-t-il connaissance de ce qui a lieu dans les camps de Pologne ? Jünger note dans son journal ce qu'il entrevoit en 1943 à Lodz, en deçà du front de l'Est…

Mobilisation totale, Etat total, extermination totale : ces trois formules dessinent l'Europe en état de guerre. Jünger, Carl Schmitt, Heidegger prononcent en ces termes le réel le plus dangereux et la même terreur politique croissante.

Pour l'anniversaire de Jünger en 1955, tous trois se joignent dans un séminaire commun. Les trois se retrouveront dans le même volume d'idéologie et d'hommage. C'est ce jour-là, qu'Heidegger va improviser un sens nouveau pour le terme Abbau, "déconstruction". C'est le terme final qui prolonge la trilogie terrible des trois amis dans la seconde guerre mondiale.

Carl Schmitt ? Ce juriste est un ami de longue date pour Jünger, ce dont témoigne son journal posthume, comme Jünger devient l'ami intense d'Heidegger. Carl Schmitt a donc en décembre 1932 donné sa conférence décisive devant ce qui se nomme "l'Union au Long Nom", réunissant les plus grands de la grande industrie. La conférence de Schmitt devant un tel auditoire culmine dans l'exigence de fonder "l'Etat total" – Etat qui doit s'affirmer "total au sens de la qualité et de l'énergie"… Un Etat qui s'attribue "les moyens de la puissance"…

Ainsi l'Etat total est-il défini par Schmitt en opposition à l'Etat "quantitativ total", celui qui se retrouverait gonflé d'entreprises nationalisées… Au contraire, "l'Etat total en ce sens est un Etat fort… Il est total au sens de la qualité et de l'énergie, comme l'Etat fasciste se nomme "Stato totalitario"", précise Carl Schmitt, reprenant les termes du fascisme italien. Mais qui sait aujourd'hui que le mot "totalitaire" est une improvisation mussolinienne ?

Voici surgir la doctrine de Schmitt sur les "nouveaux moyens de puissance". Nous sommes le 23 novembre 1932. Dans un mois et une semaine, l'ex-chancelier von Papen, dont Schmitt est l'avocat, et dont le chancelier Schleicher a pris la place, aura préparé la "combinaison" du 30 janvier 1933. Donnant le pouvoir au caporal Hitler, méprisé et haï par le président Hindenburg, qui pourtant le nomme chancelier du Reich.

"LES MOYENS DE LA PUISSANCE"

La formule de Schmitt souligne les enjeux : "L'Etat total" est l'Etat des "moyens de puissance", et non des socialisations, il se gonfle de police, et non d'entreprises socialisées. Le totale Staat hitlérien vient prendre la relève du Stato totalitario fasciste. Car le mot "totalitär" n'est pas un terme hitlérien : il est refusé comme "trop libéral" par le juriste nazi Wilhelm Stuckart, celui dont Eichmann sera le subordonné.

Mais l'argument schmittien a convaincu l'industrie lourde. Ses membres se réuniront plus officiellement pour adresser leur "Supplique" au président du Reich Hindenburg, et finalement le convaincre de confier le pouvoir au "Chef du grand mouvement" (sans le nommer) qui jusque-là "s'est tenu à l'écart"…

Par Carl Schmitt, juriste spécialisé dans le droit d'Etat, est donc apparue cette proposition grave, dans sa conférence de novembre 1932 : c'est la figure de "l'Etat total" – cette formule dangereuse d'où va survenir le mot "totalitarisme", aujourd'hui courant, exploré plus tard par Hannah Arendt, qui va pourtant méconnaître son origine mussolinienne.

On peut sous-estimer la magie toxique de ces creuses formules. Et négliger le lien étroit entre Carl Schmitt, Heidegger et Jünger, le porteur de la mobilisation totale. Car ce triumvirat va demeurer en marge du IIIe Reich qui survient. Mais Jünger l'a annoncé, par sa formule explosive. Carl Schmitt l'énonce violemment en termes de "droit" – ou de "contre-droit"…

Et Heidegger le consacre, dans une adhésion exprimée par la référence à "l'être"… Quand dans sa "Profession de foi en Adolf Hitler", il déclare en décembre 1933 à Leipzig que le Führer vient "retourner à l'essence de l'Etre", la langue hitlérienne d'Heidegger prend la portée dérisoire d'une "science de l'Etre", d'une ontologie…

"PHILOSOPHIE DU NATIONAL-SOCIALISME"

Tel est le terrible enchaînement des langages. Le "Cours d'été" heideggerien de 1935, qui paraîtra en 1953 sous le titre "Introduction à la métaphysique", s'achève sur ces mots : "Ce qui est mis sur le marché comme philosophie du national-socialisme (…) n'a rien à voir avec la vérité interne et la grandeur de ce mouvement…" Quelle est cette "vérité interne" du nazisme pour Heidegger ? Où l'emphase d'une prétendue vérité rencontre-t-elle la fureur meurtrière ?

Elle vise un "ennemi intérieur"… Elle le nomme étrangement "l'Asiatique" – fantasme inouï, que le maréchal nazi von Reichenau précisera lourdement en 1942, félicitant le Führer de parer au "danger judéo-asiatique". Là s'annonce le massacre acharné des juifs de Russie et de l'Europe occupée.

Heidegger affirme même en 1935 que "le vrai et unique Führer fait signe dans son être vers le domaine des demi-dieux…". Qualité que souligneront les Œuvres complètes. Pour ce "demi-dieu" se prépare cette totale fureur sacrificielle ?

Ainsi les trois amis, Schmitt, Jünger, Heidegger – l'étrange trio des penseurs – contribuent au langage de ce Reich qui dévaste l'Europe de la seconde guerre mondiale. Tous trois se retrouvent donc en 1955 pour fêter l'anniversaire de l'un d'eux, Jünger. A l'occasion de cette fête, Heidegger décrira ce qu'il nomme l'Abbau, que le philosophe français Gérard Granel (1930-2000) traduira par la "déconstruction".

Cette inflation des langages débouche dans ce qu'Heidegger revendique à son compte comme "la Terreur". Cette terreur aura suscité de surcroît pour notre avenir l'arme de la destruction absolue.

Le Monde

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La psychanalyse expliquée concrètement aux manager : (Leçon 2 : La structure de la personnalité)
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2.33 La psychanalyse expliquée concrètement aux manager : (Leçon 2 : La structure de la personnalité)

Introduction

Nous nous efforcerons dans cet article de décrire les 3 instances qui ont constitué la deuxième topique proposée par Freud pour expliquer la complexité du psychisme humain. Cette typologie présente un double intérêt : celui de permettre non seulement de comprendre le fonctionnement des individus mais aussi celui des organisations. Toute organisation comme tout individu est traversé par le Désir, le Réel (Le Moi), et les Règles (Surmoi). Pour faciliter l'appropriation par le lecteur de ces concepts, l'auteur s’appuiera dans la deuxième partie de l'article, sur les concepts et les outils de l'Analyse transactionnelle fondée par Eric Berne.

Freud a décrit le psychisme comme la dynamique en jeu entre trois " parties " de la personnalité : Le ça (id)), le moi (ego) et le surmoi.

  1. Le " Ca " (id)

Le " ça ") représente les besoins et pulsion humaine fondamentale) (libido et agressivité domination). Le " ça " ne connaît pas la logique et raison. Il ne connaît ni le temps ni les valeurs. Il ne recherche que la détente. Le " ça " fonctionne d'après le principe du plaisir (éviter la douleur et atteindre le plaisir). C'est le processus primaire de la pensée : rêve, hallucinations, satisfaction d'un désir, l'objet désiré apparaissant sous forme onirique ou hallucinatoire. Ainsi on peut rêver, lorsque l'on a soif, que l'on boit à une fontaine. Les hallucinations au sujet de l'eau et de la nourriture que l'on retrouve dans les récits de naufragés sont un autre exemple de ce phénomène. Paradoxalement, on peut dire que la satisfaction du désir est la seule réalité que le " ça " reconnaisse.

Cependant, pour véritablement résoudre le problème de l'approvisionnement en eau et en nourriture, des processus de pensée plus sophistiqués fondés sur le test de la réalité (processus secondaire de pensée) sont nécessaires.
Le cerveau " reptilien " à l'arrière du crâne (le plus archaïque) ne suffit plus. Le néo-cortex frontal, l'hippocampe) (mémoire, représentations etc...) doivent être utilisés

  1. Le Moi (ego)

C'est le moi qui entretient des rapports avec la réalité. Le moi agit comme médiateur entre le monde intérieur et le monde extérieur. Il fonctionne selon le principe de réalité et utilise les processus secondaires de la pensée. La gratification immédiate est retardée, recanalisée et ne survient que si certaines conditions de l'environnement sont réunies.

Prenons un exemple très simple, dans une situation de travail : combien de fois un contremaître ayant à faire face à des exigences contradictoires réprimera-t-il son impulsion à exprimer sa colère à l'égard des supérieurs parce qu'il est conscient des conséquences d'un tel emportement ?
Le principe de réalité qui oblige au contrôle de soi ne va pas sans inconvénients.

Si l'on peut plus ou moins maîtriser son comportement, on ne contrôle pas l'émotion et ses répercussions physiologiques (accélération de la fréquence cardiaque, sécrétions hormonales : adrénaline, cortisol, tensions musculaires, etc...)
Ce gestionnaire, typiquement pris entre deux feux, enfermé dans des conflits de rôles et de valeurs, est souvent décrit dans la littérature psychosomatique comme enclin à faire des ulcères ou à souffrir plus tard de problèmes cardio-vasculaires, etc...)

Les processus du Moi englobent des fonctions telles le contrôle moteur, la cognition et la perception sensorielle.

Le Moi a une tâche exécutive car il sert de médiateur entre les demandes du " Ca " et celles du monde extérieur. Les impulsions qui sont issues du " Ca " sont contrôlées et utilisées de façon constructive.

Pour citer Freud (1932) :
"La relation du Moi avec le " Ca " peut être comparée à celle du cavalier sur sa monture. Le cheval fournit l'énergie nécessaire à la locomotion, le cavalier a le privilège de désigner le but à atteindre et de guider les mouvements du puissant animal. Toutefois en ce qui concerne le Moi et le " Ca ", le rapport est loin d'être toujours idéal et il arrive trop souvent que le cavalier soit obligé de se rendre là où il plaît à son cheval de le mener ". (p.77 v.a) (p.103 v.f).

A mesure qu'on s'est rallié davantage à la psychologie du Moi, laquelle met l'accent sur l'ampleur du fonctionnement autonome du Moi (Hartmann, 1958), ce dernier est apparu comme étant plus fort qu'on l'avait supposé à l'origine.

  1. Le Surmoi (superego)

Le troisième système de la personnalité est le Surmoi. Le Surmoi résulte de la socialisation dans la famille puis dans l'école et la société. Les parents et les enseignants transmettent valeurs, interdits et croyance à l'enfant, un sens du bien et du mal qui déterminera ses comportements dans la vie. Il n'est pas surprenant que le surmoi joue un rôle important dans la genèse des religions et soit renforcé par elles. Des sentiments de culpabilité inexplicables tirent leur origine du surmoi, indiquant que des standards passés inchangés continuent d'exister au cours de la vie adulte alors que les standards actuels sont très différents. Cette socialisation se fait par identification avec les figures parentales et autres éducateurs, c'est ainsi que se développe le Surmoi. On peut facilement observer l'imitation et l'identification dans les jeux de l'enfant.

3.1 Les deux facettes du Surmoi

On distingue dans le Surmoi deux facettes :
1- Les interdits / Les impératifs (" divers " dans la littérature anglo-saxone) : " Tu dois être fort, indépendant "
2- Le Moi idéal : les modèles parentaux que nous avons intériorisés par identification et auxquels nous essayons de ressembler.

Il n'y a pas que le Surmoi qui fait naître la culpabilité chez l'individu. Le Moi idéal peut avoir le même effet. [Le Moi idéal url:http://www.aidepsy.be/moi_ideal explique le lien mystérieux qui existe entre le leader et celui ou ceux qu'il influence

3.2 Les situations de groupe

Dans les situations de groupe, le leader devient le Moi idéal de ceux qui le suivent, remplaçant ainsi leur propre Moi idéal. A partir de ce moment, les membres du groupe s'identifient au leader et s'identifient les uns aux autres, ce processus les amenant à créer des liens entre-eux. Malheureusement, il arrive dans de telles situations qu'il y ait abdication de la responsabilité individuelle et que le processus devienne alors régressif et entraîne une fusion de la conscience du leader et de la conscience de ceux qu'il influence. Cela eut créer une ambiance où le monde se partage en " bons " et en " mauvais " et conduire à la recherche d'un ennemi, d'un bouc-émissaire ou autres phénomènes semblables. Viennent à l'esprit parmi de l'histoire récente des leaders comme Khomeini, Khadafi et Amin.

  1. L'Analyse Transactionnelle

Dans les années 70-80, importée des USA, l'analyse transactionnelle a popularisé une version simplifiée et très pédagogique de ces concepts. Inventée aux USA par Eric Berne, elle est une simplification pédagogique de ce que nous venons de voir.

Les 3 principaux états du Moi

Dans ce schéma, Eric Berne montre que le Moi de l'individu est structuré autour de 3 formes principales. L'état du Moi " Parent ", appelé " exteropsyché " , correspondant à l'intégration des normes sociales à l'intérieur du psychisme tandis que l'état du Moi Adulte, ou " néopsyché " est associé à la capacité d'analyser avec objectivité le réel et l'état du Moi " Enfant " (" archeopsyche ") renvoie à la vie émotionelle de l'individu. Le Moi adulte qui est normalement " aux commandes " peut être " contaminé ", temporairement remplacé par " les parents " (Surmoi) ou " l'enfant " (" Ca "). Nous avons périodiquement besoin de nous " lâcher ", de faire les fous et " laisser la main " à notre enfant. Une description détaillée des Etats du Moi a déjà été réalisée dans l'article " Le Moi dans tous ses états ".

Le Parent Nourricier exclusif

Il arrive parfois que les personnes pour des raisons liées à leur histoire personnelle privilégient un état du Moi au détriment d'un autre. Le Parent Nourricier exclusif explique la tendance à tout pardonner ; le Parent Normatif exclusif alimentera en permanence la tendance à émettre des jugements de valeur sur autrui.

L'Adulte exclusif

L'Adulte exclusif donnera une personne hyperrationnelle analysant sans état d'âme les situations ; l'Enfant exclusif enfermera l'individu dans une certaine immaturité.

Les 3 facettes de l'Enfant

Eric Berne met en évidence 3 manières de vivre " l'Enfant qui souterrainement n'a jamais cessé d'exister au fond de nous " (D. Vasse) :

  • L'Enfant Spontané ou Enfant libre qui permet une expression libre des émotions
  • L'Enfant Adapté rend possible l'acceptation des contraintes et des règles
  • L'Enfant Rebelle autorise la contestation des systèmes

La grille des transactions interpersonnelles : un outil pour mieux comprendre l'ambigüité de la relation managériale

L'Analyse Transactionnelle va plus loin en se centrant sur le relationnel entre la personne et les autres. Elle est particulièrement intéressante pour explorer les relations de travail, surtout si celles-ci sont difficiles. Si on prend l'exemple de la relation managériale, les échanges transactionnels devraient être d'adulte à adulte comme l'indique la figure 1.

Mais les choses ne sont pas si simples car selon le vécu du manager ou du collaborateur vis-à-vis de l'autorité, la relation peut-être troublée par la réactivation du transfert. Le transfert est la reproduction dans une situation présente d'émotions et de représentations anciennes ressenties face aux figures parentales. Chaque fois que que nous sommes confrontés à l'autorité, celui est réactivé et peut venir selon son intensité perturber la relation actuelle.

Le transfert peut être réactivée par une attitude autoritaire du manager (Parent Normatif) qui peut-être amplifiée simultanément par une attitude régressive (Enfant adapté) du collaborateur. La transaction alors tissée est profondément immature puisqu'elle se situe sur le mode Parent - Enfant, Enfant - Parent comme l'indique la figure 2.

Nous avons évoqué ici des transactions simples et complémentaires. Mais dans ce cas, elles peuvent être plus compliquées. On parle alors de transactions croisées à double fond avec un niveau formel et un niveau informel (Figure 3). Dans ce modèle, les communicants mettent en scène un niveau social apparent qui semble relever de la transaction Adulte - Adulte alors qu'en réalité, l'échange informel se fait sur le mode Parent - Enfant / Enfant - Parent.

Il faut une grande maturité personnelle pour maintenir la relation managériale sur le mode Adulte - adulte car elle est structurement ambigüe du fait des rôles sociaux attribués. Le lien hiérarchique réactive par nature les imagos parentaux.

Les 4 positions de vie

Allant encore plus loin, l'Analyse Transactionnelle définit 4 façons de vivre selon l'estime de soi et le jugement que l'on porte sur les autres à tort ou à raison. Ces positions de vie sont liées à la manière dont on se perçoit et imagine les autres. Elles sont le résultat d'une constructions imaginaires qui se sont opérées généralement dans la petite enfance à partir des interactions qui se sont déroulées entre l'enfant et ses parents. Elles ne sont pas toujours le résultat de la réalité des interactions mais surtout de la façon dont celles-ci ont été perçues. On distingue ainsi 4 positions imaginaires :

  • Une position de coopération : J'ai une bonne image de moi et une bonne image de vous. Nous pouvons donc collaborer en toute confiance. Sans une bonne estime mutuelle, la confiance n'est pas possible.
  • Une position de survalorisation personnelle : J'ai une bonne image de moi mais une mauvaise image de l'autre. Cette position névrotique est souvent une attitude défensive qui peut être en lien avec une carence narcissique. En dévalorisant l'autre, cela permet de maintenir de façon illusoire une bonne image de soi.
  • Une position de dévalorisation personnelle : J'ai une mauvaise image de moi et je survalorise l'autre. Cela peut-être lié aussi à une carence narcissique et ou à une idéalisation d'autrui.
  • Une position dépressive : J'ai une mauvaise image de moi et de l'autre. Il n'y a plus d'effet d'espérance possible. Cela indique souvent une atteinte dans l'Idéal du Moi.

Il est important de savoir que l'estime de soi ne dépend pas seulement des expériences réelles ou imaginaires de la petite enfance mais aussi de la gestion de sa vie émotionnelle actuelle. Tant que nous parvenons à poser des actes qui nous permettent de résoudre les problèmes auxquels nous sommes confrontés, les émotions se convertissent en actions. Il n'y donc pas de stase émotionnelle donc d'inhibition d'action, source, selon Henri Laborit de toutes les pathologies physiques, psychologiques et sociales. Les situations trop prolongées d'inhibition d'action peut considérablement affaiblir l'estime de soi.

Conclusion

Notre système psychique est le résultat de combinaisons complexes intégrant les éléments contradictoires qui constituent notre humanité individuelle et sociale : désirs, normes, émotions, rationalisation ; etc.... Ce processus s'opère de façon consciente et inconsciente pour donner naissance à des structures de personnalité qui conditionnent notre perception du monde. Nous explorerons à un autre moment ces différentes combinaisons appelées structure obsessionnelle, paranoïaque, schizoide, hystérique, mégalomaniaque que François Lelord et Christophe André ont contribué à vulgariser.

ARTICLE: Le ça, le Moi, le Surmoi, le Soi

J’ai le plus souvent privilégié sur ce site la publication de documents permettant une approche concrète des réalités quotidiennes concernant la communication, l’aide et la psychothérapie. Cela m’a souvent valu de nombreux émails de lecteurs se reconnaissant dans ce qui était décrit.

J’ai également choisi de proposer quelques documents plus techniques, afin d’aborder certaines données théoriques avec des précisions complémentaires. C’est le cas de cette publication consacrée aux notions de Ça, de Moi, de Surmoi et de Soi. Ce sont des mots connus de tous, utilisés depuis longtemps…mais dont les nuances s’obscurcissent devant de nombreuses explications contradictoires et surtout devant d’étonnantes inversions sémantiques. Outre une exploration des significations, ce document va permettre également de relier ces notions à l’approche maïeusthésique décrite dans l’ensemble de ce site. Naturellement ces éléments ne sont pas les seuls à considérer, comme cela a été abordé dans ma publication de mars 2005 « libido amour et autres flux » où l’on a pu également trouver le cognitivisme, le comportementalisme et le psychocorporel comme élément de synthèse maïeusthésique.

Regards sur la psyché retour

Théories et thérapies

Il est évident que le Ça, le Moi le Surmoi et le Soi ne sont pas les seuls éléments de la psychologie à considérer. Par exemple, les thérapies comportementales et cognitives ou psycho corporelles obtiennent des résultats en s’appuyant sur d’autres fondements.

Les éléments que représentent le Ça le Moi, le Surmoi et le Soi sont une façon de tourner son attention vers la psyché, en adoptant un certain point de vue. Il convient de bien avoir à l’esprit que ce n’est pas le seul possible. On peut considérer la psyché depuis plusieurs points d’observation distincts, comme on le ferait pour un objet qui peut s’observer depuis plusieurs endroits. Toutes les vues peuvent être justes, quoique différentes, et toutes contribuer à apporter un enseignement complémentaire.

Nous voyons aujourd’hui apparaître la psychothérapie Intégrative qui est une évolution majeure dans les soins psychiques puisqu’elle invite à une telle variété de perspectives.

    Dans son ouvrage « Manuel de psychothérapie brève Intégrative », John Preston, Dr en psychologie,  insiste sur la question « Mais qu’est-ce que je dois faire maintenant ? ». Evoquant ses premières séances de thérapie il dit, parlant de lui et de ses clients « Si l’un d’eux m’avait demandé d’écrire une dissertation ou de définir un concept psychologique, je m’en serai sorti brillamment. Mais mon assurance n’allait pas plus loin…  … j’ai connu des moments, durant les séances de thérapie, où je me demandais en mon for intérieur mais que dois-je faire maintenant ? » p3.

Toutes les théories ont leur importance, mais ne sont que de peu d’utilité dans la réalité d’une situation thérapeutique concrète. Le Dr Karl Jaspers, dans son ouvrage « Psychopathologie Générale » nous signalait aussi : 

    « Les tendances que nous avons à attribuer une grande importance à des considérations théoriques, exercent l’action la plus néfaste sur les connaissances intuitives et empiriques que nous arrivons à acquérir au sujet de nombreuses variétés d’anomalies psychiques. On quitte le monde des connaissances, en faveur de vaines abstractions » p328.

C’est donc en ayant cela présent à l’esprit que nous aborderons les notions de Ça, de Moi, de Surmoi et de Soi.

Si, comme pour le Dr John Preston la question qui vous préoccupe est « que dois-je faire maintenant ? » vous trouverez plus de réponses sur ce site dans ma publication d’avril 2004 « communication thérapeutique » que dans le présent document. Cependant, celui-ci apporte un éclairage intéressant sur l’habitude que nous avons de ne pas savoir distinguer les choses et les êtres, sur la fâcheuse habitude culturelle que l’on a de confondre l’objectal (qui s’occupe des objets) de l’existentiel (qui s’occupe de la vie et des individus).
Sources psychanalytiques

Les notions de Ça de Moi, de Surmoi et de Soi viennent de la psychanalyse. Les approches de psychothérapie qui en découlent, se nomment psychothérapies psychodynamiques.

Les trois premiers de ces quatre éléments (Ça, Moi et Surmoi), proviennent de ce que Freud a nommé sa « deuxième topique ». Le mot « topique » signifie « lieux » (de topologie, topographie) et désigne des lieux psychiques distincts. La première topique de Freud, que nous n’aborderons pas ici,  est : conscient, inconscient, préconscient.

Freud  nous a légué sa deuxième topique distinguant le Ça, le Moi et le Surmoi comme étant trois lieux psychiques distincts (il ne parle pas vraiment du Soi).  Nous remarquerons bien sûr que « lieux psychiques » ne signifie en aucun cas « lieux anatomiques ». C’est une sorte « d’anatomie de la psyché » qui ne peut se calquer sur l’anatomie physiologique.

Pour tout un chacun, les trois mots Ça, Moi et Surmoi,  à eux seuls ne clarifient pas grand’ chose sur les phénomènes psychiques. Même si, la plupart du temps nous les avons tous rencontrés dans un livre, un article ou une discussion, leur sens reste généralement imprécis (comme nous allons le voir, même chez certains spécialistes).

Or ils ont une signification bien déterminée et permettent vraiment de mieux comprendre la nature des phénomènes psychiques. Pour cela, il importe de regarder au-delà du cadre initial de la psychanalyse afin de considérer aussi la notion de Soi  (Jung) et d’existentiel (Carl Rogers, Rolo May, Karl Jaspers, Ludwig Biswanger). L’existentiel est ce qui a trait à l’individu, c'est-à-dire à « l’être au monde », comme se plaisent à les nommer les psychologues ou médecins cités ci-dessus.  L’ensemble de ces notions nous permettra une certaine compréhension de phénomènes se déroulant dans la psyché.

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Précisions sémantiques

« Ça » se dit das Es en allemand. En réalité, ce mot allemand est intraduisible exactement en français. Gerorg Groddek, médecin proche des milieux psychanalytiques a emprunté le mot « das Es » à Nietzsche, avant que celui-ci ne soit utilisé par Freud.

Il fut convenu de le traduire par le  mot « Ça » en français, et  par le mot « id » en anglais (venant du latin « id »). En latin, idiota   signifiait « ignorant, profane ».  A ne pas confondre avec l’étymologie grecque idios signifiant « privé, particulier », idioma « caractère propre », idiôtismos, « langage spécifique » et ayant donné l’homonyme anglais « id » qui signifie élément chromosomique portant les caractères héréditaires (Haraps Chambers 2003)

 Le titre du document de Freud : « Das Ich und das Es » (1923) a déjà été été traduit par « Le Moi et le Soi » Cela montre la confusion sémantique entre le « Ça » et le « Soi »  voir p26 dans l’ouvrage « Le Ça, le Moi et le Surmoi » TCHOU Pr Serge Lebovici p 26. Même les dictionnaires de traduction ne définissent pas clairement la différence entre le ça, le moi et le soi, que ce soit en anglais ou en allemand. Une confusion bien gênante que nous détaillerons plus loin,  pour tenter d'aborder plus précisément les différences entre ces éléments distincts de la psyché
Le Ça, une source

Il s’agit, comme son nom l’indique, de quelque chose d’indifférencié. Comme lorsque nous disons « Ça », pour nommer une chose dont nous ne connaissons pas la nature et pour laquelle nous n’avons pas de meilleurs mots qui nous viennent à l’esprit.

« Ça » désigne une source intérieure qui échappe à notre volonté et qui exerce une pression. Freud assimile le Moi à une entité physiologique « Le Moi est avant tout une entité corporelle » Le Ça le Moi et le Surmoi p101. Peut être en est il de même du Ça ? 

De son côté, Karl Jaspers parlant des phénomènes psychiques dit 

    « La localisation des différents sens sur l’écorce cérébrale, des aphasies sur l’hémisphère gauche, signifie simplement qu’il faut que ces organes soient intacts pour qu’un phénomène psychique déterminé soit possible et rien d’autre. » (Psychopathologie générale p34). 

Quoique médecin proche de la psychologie existentielle (tenant compte de l’être, de l’individu), la rigueur de son approche ne lui fait donc prendre aucun parti, si ce n’est celui de n’affirmer que ce qu’on sait… et pas au-delà. Il est en même temps ouvert aux différentes possibilités, qui permettent les hypothèses de recherche, mais rigoureux quant aux affirmations. Affirmer que la source du Ça ou du Moi est corporelle, lui paraîtrait donc une affirmation abusive, si elle prétend exclure, a priori, toute autre éventualité sans expérimentations le démontrant.

Si Freud n’a pas énoncé clairement de quelle nature est la source du Ça (peut être n’est-ce pas trouvable ?), il a cependant pointé la nature de ce qui s’en écoule : c’est la libido. Le Ça est la source de la libido. Mais la réponse est à peine plus claire si on ne clarifie pas la notion de libido !
La libido, un flux

Voici encore un mot très usité dont la signification précise est rarement clairement connue. La libido c’est l’énergie psychique. Freud y a vu essentiellement l’énergie sexuelle. Mais on néglige souvent de préciser que Freud a fait une différence précise entre la sexualité et la génitalité et cela a conduit à de nombreux contresens. La sexualité, selon lui, est l’expression de l’énergie libidinale. La génitalité, selon lui, c’est l’expression de cette énergie dans le cadre de ce que tout un chacun appelle habituellement « sexualité ». La libido ne désigne donc pas à proprement parler la sexualité, mais une énergie psychique, entre autre à l’origine de la sexualité.

D’autres psychanalystes comme Jung ont tenté de recentrer cette nuance, mais Freud et Jung n’ont su s’entendre clairement sur ce point… jusqu’à y sacrifier leur amitié. Sans doute un « petit » dérapage dogmatique !

Il semble raisonnable donc de comprendre que la libido est un flux d’énergie dont le Ça est la source. Par contre nous n’avons pas d’information sur ce qui alimente la source (d’où l’appellation « Ça ») !

Cette énergie psychique (libido) tendra à s’écouler, comme un fluide suivant la pente qu’il trouve devant lui. Le comportement des êtres humains sera influencé par cet écoulement selon qu’il sera libre, contrarié, refoulé, canalisé, empêché…etc.

Le moi retour

Précisions sémantiques

Nous trouverons : das Ich en allemand, ego en anglais, moi en français. Le mot « ego » est aussi utilisé comme synonyme du Moi en français. Mais l'anglais (et par extension le français), utilise quelque fois le mot "self "pour désigner le moi... tout en l'utilisant aussi pour désigner le soi

Le Dr D.W. Winnicott, membre de la société britannique de psychanalyse dans les années 30,  a tenté de lever l'ambiguïté en parlant de "faux self" et de "vrai self". Le faux self étant « le paraître », il  fait penser au moi. Le vrai self désignant « l'être » évoque, lui, plutôt  le soi. Selon Winnicott, le vrai self se différencie du moi en représentant plus que le moi.

En français on traduit donc parfois Self par « Soi », mais ce n'est pas forcément exact. Nous trouvons là des imprécisions sémantiques gênantes

    Pour positionner le rôle du Moi, Freud nous propose : « Le Moi traduit en action la volonté du Ça » (Le Ça le Moi et le Surmoi p101). « Si toute la force motrice qui fait se mouvoir le vaisseau est fournie par le Ça, le Moi est en quelque sorte celui qui assume la manœuvre du gouvernail, sans laquelle aucun but ne peut être atteint » p136. « Le Moi tend vers le plaisir et cherche à éviter le déplaisir » p139.  Pour Freud, le Ça est donc la source d’énergie et le Moi est le gouvernail.

    De son côté, Georg GRODDEK répète que « …ce que nous appelons Moi se comporte dans la vie d’une façon toute passive  et que nous sommes, pour se servir de son expression, vécus par des forces inconnues échappant à notre maîtrise ».  (Le Ça le Moi et le Surmoi p99).  

D’une part ce que propose Groddek est contradictoire avec l’idée de gouvernail énoncée par Freud, d’autre part, nous remarquons qu’il ne s’agit  pas vraiment ici du Moi de Freud, mais d’un Soi affaibli. Le Moi n’est donc pas l’individu proprement dit et son propos semble très clair : le Moi est un instrument de l’individu et ce dernier s’y trouve soumis. Mais cet instrument amène une intelligence que le Ça n’avait pas

Ces quelques citations nous montrent à quel point la confusion est présente, mais avec de fortes intuitions qui peinent à trouver leur expression sémantique

    Pour Patrick JUIGNET, psychanalyste chargé de cours de psychopathologie à l’université de Nice, « Le Moi a une fonction de régulation et de contrôle (on retrouve donc l’idée de gouvernail). Son rôle principal est de gérer des exigences diverses et contradictoires comme l’opposition entre pulsions et réalités… »P46 de son ouvrage « Manuel de psychopathologie psychanalytique » Presses universitaires de Grenoble

Un préalable narcissique

Le narcissisme, lui, définit une sorte de rapport de l’individu avec le Moi, ou un état de son Moi.

L’écoulement libidinal, venant du Ça, va commencer par s’écouler vers le sujet lui-même. Dans le début de l’existence, on pourrait dire, que ce flux commence à se répandre proche de sa source. C’est ce qu’on appelle la phase narcissique, dans laquelle l’individu est son propre objet de satisfaction et n’a encore que peu conscience du monde extérieur. Il dirige ainsi vers lui-même son flux libidinal.

Cette phase, naturelle au début de la vie, peut devenir pathologique : Si un adulte, se coupant du monde extérieur, revient vers lui-même de façon exclusive nous pouvons aboutir à ce qu’on appelle des états psychotiques dans lesquels nous parlerons de libido narcissique. Dans ce cas, la coupure d’avec le monde extérieur interdit les contacts réels et les psychothérapies en sont rendues plus difficiles (en particulier les approches psychanalytiques basées sur le transfert, où il est nécessaire de reconnaître un objet extérieur à soi). Jean Pierre Chartier, Dr en, psychologie et psychanalyste, nous montre par contre que les psychotiques peuvent tout de même être aidés, dans son excellent ouvrage « Guérir après Freud »

A ce stade, il n’y a pas encore vraiment de Moi. Il n’y a que de l’autosatisfaction pour venir compenser les "manques d’être" ressentis par l’individu, pour venir compenser les sensations de vide auxquelles il est confronté. L’être venant au monde a bénéficié d’une présence continue de sa mère dans le prénatal… et fait rapidement l’expérience de l’alternance de la présence et de l’absence, de la faim et de la satiété, de la chaleur et du froid…etc.

Ces manques d’être, ces vides et ces insécurités sont nécessairement compensés pour permettre une sorte de survie en attendant mieux. A ce stade l’autosatisfaction narcissique est un moyen majeur. Nous ne parlerons cependant pas encore de Moi ou d’ego. Celui-ci n’apparaît que quand la compensation s’opère en dirigeant son flux libidinal vers l’extérieur.
Incompréhension sur la narcissisation

Il est coutume de dire que l’équilibre de l’individu dépend de la qualité de son processus de narcissisation. De sorte qu’un être en difficulté d’affirmation de Soi sera vite identifié comme un individu ayant besoin de se renarcissiser.

Avant d’aller plus loin il me semble utile de rappeler sommairement le mythe de Narcisse : Narcisse est un homme très beau qui séduit involontairement toutes les femmes. Mais il se trouve qu’il est indifférent à celles-ci. L’une d’elle, la nymphe Echo,  meurt même de chagrin à cause de cette indifférence de Narcisse à son égard. Leurs sœurs demandent à Némésis (déesse dont c’était le rôle) de venger la défunte. Némésis va alors faire subir à Narcisse ce qu’il a infligé à Echo : désirer quelque chose d’inaccessible. Un jour où il va s’abreuver dans une fontaine, il voir son reflet dans l’eau. La beauté de cette image le laisse stupéfait (narcisse a donné narkê, puis narcose). Il désire passionnément cette image inaccessible, croyant que c’était un autre. Il en reste stupéfait sans manger et sans boire devant cette fontaine et en meurt. Il poussera devant celle-ci les fleurs portant son nom.

Nous ne savons généralement pas cette nuance du mythe : comme si c’était un autre. Narcisse confond sa propre image avec l’existence d’un autre. Ce n’est donc pas lui qu’il aime, mais cet autre imaginaire. Croyant voir un autre, il ne voit qu’un reflet de lui-même.

Cela définit bien que nous ne rencontrons jamais autrui quand nous projetons sur lui nos propres représentations (voir publication « les pièges de l’empathie » et surtout l’ouvrage « L’écoute thérapeutique » ESF p 45) Le mythe de narcisse reflète plus notre problématique du rapport à autrui que du rapport à soi : notre cécité à autrui nous fait prendre nos propres représentations pour l’autre lui-même… et de ce fait nous rend incapable de le rencontrer vraiment.

Cette tendance à vouloir améliorer le sort des individus en leur permettant de développer une meilleure image de soi est ambiguë. Comme nous le verrons plus loin, le Moi ne semble pas être ce qu’on est mais ce qu’on paraît. Améliorer ce qu’on paraît ne peut directement développer ce qu’on est.

    Patrick JUIGNET (cité plus haut) décide bien de différencier le Moi et le Soi, l’être et l’image de l’être. Pourtant il nous décrit le Soi, plus comme source d’illusion que comme un fondement existentiel : « Cette instance (le Soi) est centrée sur l’imago (image) de soi-même »…p46  « le Soi est source d’illusion et de méconnaissance par rapport à soi-même, car il donne une vision unitaire, fondée sur l’image de l’autre, valorisée ou dévalorisée de façon tout à fait irréaliste » p47

Je suis désolé si ces quelques lignes amènent un peu de complexité au propos. Il semble que justement ces notions ne soient jamais vraiment clairement énoncées et même parfois abordées de façon contradictoires. C’est la raison pour laquelle ces mots circulent dans le langage commun généralement sans clarifier de quoi il s’agit.

Nous retiendrons plus simplement que la narcissisation est la faculté de développer une image de soi qui, bien qu’étant illusoire, remplace le fait d’être vraiment soi-même. La narcissisation ne définit pas une affirmation de Soi, mais un manque de Soi compensé par une image à laquelle on croit. Si nous lui accordons trop d’importance celle-ci peut même nous couper du monde, dans lequel, comme Narcisse, nous mourrons, non pas de soif en face de la fontaine, mais de solitude tout en étant entouré de plein de gens.

Si le processus de narcissisation est une heureuse compensation au manque de Soi permettant de "tenir le coup" en attendant une meilleure maturation, il ne peut signifier un aboutissement. Croire que la narcissisation est une finalité c’est amener l’individu à se perdre dans ce qui n’est pas lui. C’est ce que nous faisons maladroitement quand nous complimentons quelqu’un qui se déprécie, dans l’espoir de lui remonter le moral.

    Exemple : Dans une maison de retraite, une vielle dame réalise le coloriage qu’on lui a demandé de faire. Comme elle ne semble pas satisfaite du résultat, pour l’encourager, une animatrice lui dit qu’il est très beau. Comme cette vielle dame grimace pour montrer son désaccord, l’animatrice l’encourage encore « vous avez mis vraiment de très belles couleurs ». M’approchant d’elle, je demande à la dame « ça n’a pas l’air de vous plaire ? ». Elle me répond « Non, j’étais institutrice. Les enfants faisaient mieux que moi. Regardez, j’en fous partout ». Je valide alors simplement « Dans ce cas, je comprends que vous ne l’aimiez pas ».

La première formule, quoi qu’essayant d’être bienveillante, casse le Soi déçu de la résidente. Le Moi de l’animatrice est ici contre le Soi et la conscience de la dame. La deuxième formule lui donne au contraire existence et dignité. Le Soi de l’un est alors ouvert au Soi de l’autre. En fait, il ne s’agit pas de renarcissiser, mais de permettre d’exister. Pour cela, rien ne vaut de ramener quelqu’un à la raison qui, en lui, fonde son ressenti. Faute de cela, la narcissisation peut tenir lieu de béquille, et être l’étayage d’une structure psychique fragile… mais souvent en l’abîmant un peu, hélas… parfois en la détruisant !
La naissance du Moi

Suite à un préalable narcissique, où le flux libidinal s’écoule vers soi-même, celui-ci va se diriger vers l’extérieur. Il est courant de dire en psychologie et en psychanalyse qu’il se tourne vers des objets extérieurs plutôt que vers soi-même. Par là même, nous remarquerons bien qu’il se tourne vers des « objets » et non vers des « sujets » (c’est à dire vers des choses et non vers des êtres)

Le Moi va donc être cette partie psychique de l’individu qui va tenter d’investir le monde extérieur avec son flux libidinal. Ce flux va s’éloigner de la source (c'est-à-dire du Ça) pour suivre les « pentes » qui le conduisent vers ce qui l’environne.

Ce flux libidinal, à tort identifié à une sorte de « flux d’amour », n’est autre qu’une tentative de « profiter de l’autre », on pourrait même dire « de s’en nourrir ». S’il en résulte que l’individu semble ici aimer ceux qui l’entourent, il ne fait que les aimer comme on aime un aliment. Cela peut paraître réducteur et cannibalique, mais nous verrons plus loin que cette nuance est incontournable si on veut différencier le Moi, le Soi, l’amour, la libido, la quête des objets et la rencontre des êtres, l’affectivité (qui étouffe l’autre) et la chaleur humaine (qui réchauffe l’autre)

Compte tenu de sa vulnérabilité, de ses insuffisances et de ses vides ressentis intérieurement, un individu va tenter de « remplir » ses lacunes grâce à ces « autres » qu’il trouve autour de lui et dont il se sert pour « faire le plein ». Mais ce n’est, en fait, qu’un faux plein. Il ne s’agit là que d’une compensation de ses vides qui, en réalité, ne se remplissent pas. Il en résulte une attitude égoïste (dans le sens habituel du terme) et profiteuse, où le projet est juste un avantage personnel.

L’intelligence est certainement associée au Moi. Nous prendrons soin de la différencier de la conscience qui serait plutôt associée au Soi. « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme » est une citation bien connue de Rabelais qui, même s’il ne parlait pas du Soi et du Moi avait pressenti une importante nuance. L’intellectuel « pur et dur » est donc plus sur le mode « Moi » que sur le mode « Soi »

Quand le Moi est fort, il est source de pouvoir, d’investissement énergétique (libidinal). Le Moi, c’est la malignité, l’astuce, c’est le mental dans sa version calculatrice et astucieuse. Notons que le mot « mental » vient du latin men (idée de penser). Mentis désignant l’esprit pensant, avec le verbe mentiri  qui a donné mentir. Pour les romains, mentir signifiait qu’on avait de l’esprit.

Nous comprendrons donc que l’assertivité définissant l’affirmation de soi dans le respect d’autrui est basée sur le Soi1, alors que convaincre est basé sur le Moi2 et que la confusion et l’immaturité du Soi engendrent les violences des rapports humains3

1 -voir sur ce site la publication de septembre 2001 « assertivité »
2 -voir sur ce site la publication de juin 2002 « Le danger de convaincre »
3 -voir sur ce site la publication de Juin 2003 « Apaiser violences et conflits »
Profit et manque de discernement

Ce qui caractérise le Moi est donc une attitude de profit, dont la puissance intellectuelle (quand elle existe) devient un danger pour l’environnement. Le Moi fonctionne essentiellement sur la notion d’intérêt et est incapable d’attention envers autrui. Nous noterons que l’intérêt concerne les choses et l’attention concerne les êtres.

Ce flux d’intérêt se fait avec une certaine intelligence (plus ou moins affinée en fonction des capacités intellectuelles de chacun) permettant de tirer meilleur profit possible. Cependant il s’y trouve une inconscience de l’autre en tant qu’individu. Une sorte de cécité existentielle rendant les êtres inaperçus à son regard. 

    Comme le disait Saint-Exupéry dans « Le petit prince » l’essentiel est invisible : « on ne voit bien qu’avec le cœur, l’essentiel est invisible pour les yeux » p72 « qu’il s’agisse de la maison des étoiles ou du désert, ce qui fait leur beauté est invisible » p78 (folio junior GALLIMARD 1987)

Si le Moi discerne les moyens de profiter, il n’a pas d’yeux pour discerner les êtres et les choses. L’écologie du monde et des rapports humains lui échappent donc tout à fait et lui confèrent une tendance à la prédation, plus qu’à la réelle rencontre d’autrui. IL va devoir être régulé, pour donner aux rapports humains un semblant d'humanité

    « Quant au Moi, Freud lui assigne… le difficile devoir de servir trois maîtres à la fois : le Ça, le Surmoi et le monde extérieur » (Le Ça le Moi le Surmoi p107) 

Le Surmoi sera donc l’élément complémentaire par lequel le Moi assurera sa régulation.

Le Surmoi retour

Précisions sémantiques

En allemand Über-Ich :  ce qui est au-dessus du Moi. La construction est ici la même qu’en français.

En anglais superego : ce qui est plus que le Moi. Ici il s’agit d’un élément comme le Moi, mais plus fort que lui  

ces mots, eux, ne comportent pas d'ambiguïté linguistique
Idéal du Moi (fondement du Surmoi)

Face à son environnement, l’individu ayant développé son Moi (ego), voit des attitudes et des comportements chez autrui qu’il prendra plus ou moins comme modèles d’efficacité et de performances.

D’autre part, son expérience personnelle l’amènera à choisir des modèles de comportement plus efficaces que d’autres, en fonction des punitions ou récompenses qu’ils ont suscités de la part d’autrui envers lui.

Il en résulte un idéal à atteindre pour optimiser la performance de l’écoulement d’énergie, de l’écoulement du flux libidinal vers l’extérieur. A défaut d’avoir développé une conscience d’autrui suffisante, même si c’est encore à des fins personnelles, il va néanmoins se mettre à tenir compte des autres.
Une prothèse de conscience

Le Moi va de ce fait devoir satisfaire les pulsions du Ça, tout en tenant compte du monde extérieur, ainsi que des règles exigées par le Surmoi (les 3 maîtres énoncés par Freud)

En ce sens, le Surmoi va tenir lieu de prothèse remplaçant la conscience manquante. Nous parlerons d’un outil d’étayage venant compenser un manque de Soi et de lucidité existentielle.

Le Moi avait pour tâche d’orienter le flux libidinale (gouvernail) dans le projet d’un profit maximum. Le Surmoi aura pour tâche d’éviter les débordements impulsifs du Ça, mais aussi de ménager son environnement (évitement des récifs réels ou supposés de l’égoïsme). Les motivations restent basées sur les notions de plaisir/déplaisir, mais en tenant compte des autres. Pourtant il ne s’agit là que d’un faux Soi, d’une fausse conscience qui se contente de refouler ce qui n’est pas en accord avec le modèle.
Une correction régulatrice aveugle

Cette correction du Moi suit la logique d’un modèle qui a été adopté pour compenser « les yeux qui ne voient pas ». N’ayant pas encore eu l’opportunité de développer une sensibilité suffisante à autrui et à soi-même, un individu va s’appuyer sur des modèles « tous faits » pour assurer une vie acceptable.

Les multiples corrections de comportement, qui en résulteront, seront donc aveugles car elles ne correspondront pas à la réalité des situations présentes, mais seulement à la situation antérieure prise comme modèle.

L’individu se trouvera ainsi en train de refouler, cacher, retenir, forcer, exagérer des attitudes qui ne seraient pas les siennes en l’absence de Surmoi. En même temps que cela provoque des actes « tous faits » ou des inhibitions, cela permet tout de même d’ajuster une vie sociale moins anarchique. Le Surmoi fait de l’homo sapiens sapiens le précurseur d’un homo sociabilis… mais il est encore loin d'une réelle reconnaissance d'autrui et encore moins de soi. Bien souvent le faux respect d’autrui qui en résulte est accompagné d’un déni de Soi dont les multiples refoulements amènent les douleurs psychologiques.
Débridage dangereux

Il pourrait être tentant, à ce stade de retourner vers un Moi libre où le refoulement n’existe plus. Pourtant, il convient surtout d’aller vers le développement du Soi plutôt que vers la suppression du Surmoi.

Certains praticiens en psychothérapie confondent parfois le fait de se libérer des inhibitions du Surmoi avec le fait de développer le Soi. Or il semble que ce soit un leurre de chercher à développer un plus « d’être » en revenant vers un Moi débridé. Il convient de ne pas confondre l’individuation avec l’individualisme

Pour comprendre cela clairement, il est nécessaire de différencier avec précision le Soi et de ne plus le confondre avec le Moi ou avec le Ça.

Le Soi retour

Précisions sémantiques

Sich est le pronom personnel soi. Mais en allemand le Soi se dit das Selbst.  Nous avons aussi le Dasein  désignant "l'être là" chez les psychologues existentiels, évoqué par le philosophe Martin Heidegger et qui pourrait se rapprocher de l'idée du Soi. 

OneSelf en anglais serait le bien venu à la place de self, qui est généralement utilisé. OneSelf reflèterait bien l'idée d'unique, d'individu (d'indivisibilité). 

Nous remarquerons ici la différence des mots Ich (Moi) et Selbst (Soi) en allemand, puis entre les mots ego ou self (Moi) et self ou OneSelf (qui serait bien venu pour évoquer l'idée de Soi, en anglais). Mais comme nous l'avons vu plus haut, certains auteurs utilisent le mot "self" pour désigner "plus que le moi"... d'où parfois la traduction de self par "Soi". Ce n'est pas simple!

Pour désigner Ça, Moi, Surmoi, Soi:
En allemand, nous avons :  Es, Ich, Über-Ich, Selbst 
En anglais nous avons : id, ego, superego, "self" (ou mieux, "OneSelf"  car le mot self a trop été utilisé comme synonyme d'ego).

L’expression "das Es" retient l'attention de Freud en ce qu’elle illustre l’idée développée par Groddeck, que … « …nous sommes vécus par des forces inconnues immaîtrisables ». Elle concorde aussi avec le langage spontané des patients dans des formules comme « ça a été plus fort que moi… »

    Selon Jung, dans son ouvrage Ma vie (Folio - Gallimard 1973) « le Soi est une entité surordonnée  au Moi. Le Soi embrasse non seulement la psyché consciente, mais aussi la psyché inconsciente et constitue de ce fait pour ainsi dire une personnalité plus ample, que nous sommes aussi…. » p462 
    « Je constate continuellement que le processus d’individuation est confondu avec la prise de conscience du Moi et que par conséquent celui-ci est identifié au Soi, d’où il résulte une désespérante confusion de concepts. Car, dès lors, l’individuation ne serait plus qu’égocentrisme ou auto érotisme » p457.  

    Encadré réservé à ceux que  les références linguistiques intéressent:
    voici quelques complexités sémantiques trilingues, mais aussi des complexités de concepts.

    HACHETTE LANGENSCHEIDT Dictionnaire fr/all et all/fr -HACHETTE  -Paris 1995
    Das Selbst :  le moi (le soi est ici confondu avec le moi) 
    Soi : (psych) Das Es (le soi est ici confondu avec le ça)
    Das Es : (psych) ça (juste!)
    Moi : (psych) das Ich, das Ego, das Selbst, Notre vrai soi, unser wahres Ich, Selbst 
    (donc le moi et le soi sont confondus)

    Le ROBERT ET COLLINS  Dictionnaire fr/angl et  angl/fr -ROBERT -Paris 1985 
    Self : le moi … The conscious self : le moi conscient 
    (le self est identifié au moi)

    Le ROBERT ET COLLINS  senior Dictionnaire fr/angl et  angl/fr -ROBERT  -Paris 1994
    Self : psych : le moi…. The conscious self : le moi conscient (le self est identifié au moi)
    Le moi : the self, the ego…. Notre vrai moi, Our true self (le self est identifié au moi)
    Soi : (psych.  inconscient), id (le soi est identifié au ça)
    Id : (psych).  Ça
    Ça : (psych. Inconscient), id

    Le ROBERT ET COLLINS  Dictionnaire fr/angl et  angl/fr -ROBERT  édition 2006
    Soi: self (psych= inconscient) id (le soi est identifié au ça)

    VOCABULAIRE DE LA PSYCHOLOGIE  Henri PIERON -PUF -Paris 1973
    Le ça : Structure topique de l’appareil psychique….comme équivalant de l’allemand « Es » est habituellement préféré au terme « soi » (le ça est un mot préféré, mais on peut, hélas, trouver l'utilisation du mot "soi")
    Soi : voir ça (confirmation que le ça est confondu avec le soi)
    Moi : (psych)  das Ich,  das Ego, das selbst ; notre vrai moi : unser wahres ich, Selbst (le moi est ici confondu avec "das selbst" qui signifie "soi" et qui en plus est parfois synonyme de "das Es" qui en réalité signifie "ça")
    (nous trouvons la même définition exactement que dans le dictionnaire Hachette ci-dessus)

    VOCABULAIRE DE LA PSYCHANALYSE  J. LAPLANCHE et J-B PONTALIS  -PUF -Paris 1990
    Ça : allemand das Es   anglais  the Id

    HARRAP'S SHORTER  Dictionnaire angl/fr et fr/angl -édition 2006
    Le soi: The self; (psy) the id (le soi est identifié au ça)
    Self: (psy) le moi

    LAROUSSE CHAMBERS -angl/fr et fr/angl -Paris édition 2003
    Le soi: the self
    Le moi: the ego

    LEXIQUE TRILINGUE des termes psychanalytiques (français anglais allemand)  -MASSON -1997
    Le soi: self, selbst
    Le moi: ego, Ich
    Le ça: id, Es

    GRAND DICTIONNAIRE LAROUSSE de la psychologie -LAROUSSE -Paris 1997
    Le Soi  Psychan. :  Chez M. Klein, ensemble des pulsions de la personnalité toute entière par différence avec le moi qui se réfère à la structure de la personnalité. (syn Self) Quand l’objet se divise en bon et en mauvais, il en est de même pour le soi, dont les différentes parties ainsi clivées peuvent entrer en conflit Thérap. Pour l’école de Palo Alto, le moi de l’individu en tant qu’il se caractérise par son identité et son autonomie en se dotant de valeurs et de contre-valeurs. Dans l’écosystème familial, le soi se constitue par référence au mythe familial, et selon Murray Bowen, par le processus de différenciation du soi.  Voir self. (Mélanie KLEIN parlait du "clivage d'objet", par exemple le sein de la mère qui est en même temps "bon quand il est là" et "mauvais quand il est absent" et du clivage du moi qui en résulte... mais pas du clivage du soi. Or ici le soi est associé à un discours sur le moi)
     Self Synonyme de soi.  Psychan. Vrai self/faux self. Chez DW Winnicott, distinction établie par lui concernant le développement de l’enfant (la traduction de « self » en « soi » n’a volontairement pas été effectuée dans les textes français (et nous voyons là une prudence bien venue) Pour Winnicott, le moi du nourrisson s’achemine vers un état dans lequel les exigences instinctuelles sont ressenties comme faisant partie du self (ou soi) et non de l’environnement. Winnicott établit un parallèle entre le vrais self et le faux self : il reprend en cela la distinction freudienne entre, d’une part une partie centrale du moi gouverné par les pulsions ou par ce que Freud appelle sexualité génitale et prégénitale (expression du ça)  et d’autre part une partie tournée vers l’extérieur, établissant les rapports avec le monde (expression du moi s'il s'agit de la libido, ou expression du soi s'il s'agit d'existentiel... mais ce n'est pas précisé!). Le faux self est représenté par toute l’organisation que constituent une attitude sociale polie, de bonnes manières, et une certaine réserve. Le vrai self est spontané et les évènements du monde se sont accordés à cette spontanéité, du fait de l’adaptation d’une mère suffisamment bonne. Voir soi (le soi est identifié au self)

    Nous assistons là à un ballet de glissements sémantiques où self signifie tantôt soi, tantôt ça, et nous avons la même chose en allemand où das Selbst est parfois donné par les dictionnaires bilingues comme synonyme de das Es (d'où l'ambiguïté de la traduction du titre du livre de Freud "Das Ich und des Es" par "Le moi et le soi"). Il semble que ces références ne soient pas toutes "parfaitement fiables" (ou du moins parfaitement claires), et face à ces contradictions, il nous faut pourtant bien utiliser des termes assez précis pour ne pas mélanger des notions aussi différentes que le ça, le moi et le soi. Il importe de ne pas confondre le libidinal (venant du ça et régulé par le moi, source de paraître) avec l'existentiel (venant du soi, source de construction de l'être). Au delà des conflits et débats de spécialistes (parfois de pseudo spécialistes) autour des mots, ce qui importe c'est que les notions soient clairement exprimées et que l'on s'assure de ne pas désigner un élément de la psyché à la place d'un autre... car cela fausserait  complètement les concepts psychologiques qui en découlent et même la qualité de l'aide qu'on est en mesure d'apporter aux patients en psychothérapie. 

    C'est  ce qui a conduit JUNG à dénoncer la confusion entre le moi et le soi dans la phrase déjà citée en haut de cet encadré: « Je constate continuellement que le processus d’individuation est confondu avec la prise de conscience du Moi et que par conséquent celui-ci est identifié au Soi, d’où il résulte une désespérante confusion de concepts. Car, dès lors, l’individuation ne serait plus qu’égocentrisme ou auto érotisme » (Ma vie -Folio Gallimard 1973 - p457).  

Sources et projets (intuition existentielle de Freud)

    « La tâche du Surmoi consiste aussi, en effet, à approvisionner en amour le Moi docile et méritant. Fierté, sentiment de protection et satisfaction narcissique récompensent par conséquent le Moi, bon serviteur de ses trois maîtres (Ça - Surmoi - monde extérieur) » : Freud, Moïse et le monothéisme 1939 dans Le Ça le Moi, le Surmoi Tchou p107. 

Nous voyons ici que Freud, parlant du Surmoi, annonce un prémisse de source existentielle (amour), venant en réalité du Soi, mais qu’il attribut au Surmoi. D’autre part, il met cette source existentielle sur le même plan que la narcissisation, peut être à cause d’un parti pris objectal et libidinal. L’admiration (culte de l’image) et la reconnaissance (de l’individu réel) ne semblent pas ici être différenciées. 

    Pourtant Freud nous propose dans Les névroses l’homme et ses conflits p68 « …la collaboration des patients devient un sacrifice personnel qu’il faut compenser par quelque succédané d’amour. Les efforts du médecin, son attitude de bienveillante patience doivent constituer de suffisants succédanés » 

Il donne ici des éléments qui font échos avec la qualité de présence proposée par Carl Rogers, mais sans pourtant que la dimension existentielle y soit clairement différenciée. Pourtant une telle attitude n’est possible qu’avec une réelle présence du Soi. Mais la confusion a parfois été telle que certains thérapeutes ont confondu neutralité avec froideur. C’est le résultat des imprécisions et de la difficulté à transmettre des nuances aussi subtiles.

Il semble pourtant naturellement et intuitivement que les notions de Moi et de Soi se différencient et ne puissent être confondues. C.G.Jung, dans son ouvrage « Ma vie », comme nous venons de le citer, se désole qu’on ne fasse pas clairement cette distinction.

Nous venons donc d’expliciter que le Ça est la source, que la libido est le « fluide (l’énergie) » qui s’en écoule, que le Moi essaye d’optimiser cet écoulement pour un profit maximum, que le Surmoi régule les excès d’après des modèles figés… tout cela dans quel projet ?

S’il y a à tout cela une finalité, nous pourrions tout aussi bien examiner cet ensemble des parties de la psyché, de telle façon que la source des phénomènes soit le projet final et non le départ. Oups ! Désolé pour ce moment de complexité ! Il est habituel de considérer qu’on a d’abord les causes, puis ensuite les effets. Mais on peut aussi avoir un regard inversé dans lequel l’origine est dans la finalité. C’est un peu ce qu’on rencontre quand nous avons un projet qui assure la motivation de tout le reste. On appelle cela un regard « téléolonomique », c'est-à-dire où c’est la finalité qui produit le départ grâce à un plan prédéterminé.(Téléolonomique : de nomos régulation, étude des règles, et de têle loin, télé à distance – littéralement réglé à distance.).

Depuis le début de ce document, nous avons pris l’habitude de considérer le Ça comme source libidinale. Le Soi pourrait-il être une autre source ?

Il semble raisonnable de considérer le Ça comme source libidinale et le Soi comme source existentielle. En ce sens le Ça va vers ce qui l’entoure pour s’en servir et le Soi va vers les êtres pour les rencontrer.
Les deux sources

Nous avons vu que la "libido vers Soi"  c’est le narcissisme. D’ailleurs cela s’appelle libido narcissique. Nous avons vue, que la libido allant vers l’extérieur est dite se tourner vers des « objets ». D’ailleurs nous l’appelons libido objectale. Dans ce dernier cas, les autres sont considérés comme des objets…et cela reflète parfaitement le projet du Moi qui n’est pas de rencontrer, mais de profiter.

Il convient pourtant de remarquer qu’un individu peut tout de même se tourner vers l’autre pour le rencontrer et non pour assurer un profit. Dans ce cas (où l’être qu’est l’individu est vraiment considéré), nous parlerons non plus de flux libidinal, mais de flux existentiel. Et la source de flux ne peut plus être le Ça. Nous la reconnaîtrons dans le Soi. Le Ça et le Soi étant tous deux des sources, cela peut expliquer qu’on les ait parfois confondus (comme en traduisant maladroitement « Das Ich und das Es » par le Moi et le Soi).

Ces sources de natures différentes, pour ne pas dire opposées, jouent probablement toutes deux un rôle majeur dans la maturation d’un individu. Alors que le Surmoi était une prothèse de conscience, le Soi semble être une conscience à part entière. Le premier venant temporairement supplanter le second encore en devenir (et pourtant déjà présent en tant que projet)

Un individu peine ainsi à passer de son immaturité initiale à la maturité qui fera de lui un humain à part entière. Mais le cheminement semble se réaliser de toute façon et quand un praticien en psychothérapie accompagne un individu en souffrance psychique, il se doit de comprendre ces phénomènes afin de ne pas ramener vers le Ça un patient qui tend vers une évolution du Soi. Il prendra soin de ne pas renarcissiser (de ne pas ramener vers le Moi) quelqu’un qui est en train de lâcher son ego pour développer le Soi. Il prendra soin de ne pas combattre les inhibitions engendrées par un Surmoi assurant la sécurité en attendant le développement du Soi. Un praticien en psychothérapie se devra de ne pas confondre la source existentielle et la source libidinale, car prendre l’une pour l’autre peut conduire à causer des dégâts.

Par exemple : On peut malencontreusement inviter une jeune femme à prendre de la distance avec sa mère pour se construire. On croit ici qu’il faut stopper un flux libidinal (de besoin) entre elles. Ceci est partiellement vrai, mais peut être dangereux si on ne sait pas, en même temps, qu’elles doivent remplacer le flux libidinal par un flux existentiel. C’est à dire qu’elles n’ont pas besoin d’être distantes, mais juste d’être distinctes afin de se rencontrer vraiment (et sortir des images idéalisées imago). Elles ne sortiront de la fusion qu’en devenant distinctes (et non distantes) et en permettant que le flux existentiel s’écoule librement entre elles. Si maladroitement on les invite à la distance, il n’y aura plus de flux libidinal, mais il n’y aura pas non plus de flux existentiel. Le vide qui en résultera sera source de beaucoup de douleurs engendrées par cette maladresse thérapeutique. Le domaine psy peut aussi, hélas, parfois produire des souffrances iatrogènes (iatrogène : engendrée par le soignant et n’ayant rien à voir avec la pathologie initiale du patient).
Un tout en devenir

Cette notion de « personnalité toute entière » abordée par Jung est très touchante car l’expérience clinique semble vraiment montrer cela quand on aide des personnes en psychothérapie. C’est du moins l’expérience que j’en ai avec l’approche maïeusthésique décrite sur ce site 

    Voir les publications d’avril 2004 « Communication thérapeutique » pour l’approche elle-même et de mars 2005  « Libido amour et autres flux » pour la situer parmi d’autres approches existantes)

Dans son ouvrage « Le développement de la personne » Carl ROGERS nous rapporte le cas de Mrs Oak qui semble en être l’illustration. Il rapporte les propos de sa cliente  p58 :

    « Mais vous savez, l’idée qui me vient tout le temps : c’est que tout ça c’est exactement comme si j’essayais de mettre ensemble les morceaux d’un puzzle. Pour l’instant, il me semble, je suis en train d’examiner des petits morceaux qui ne veulent vraiment pas dire grand-chose. Je les tiens simplement en main, je n’arrive même pas à voir le dessin. C’est ça l’idée qui me vient tout le temps. Et ça m’amuse parce qu’en fait je déteste les puzzles. Ça m’a toujours énervée. Mais c’est l’idée qui me vient. Je veux dire que je ramasse des petits morceaux de puzzle (ici elle joint le geste à la parole) qui n’ont absolument aucun sens, sauf de sentir que vous tenez dans la main des morceaux sans voir où il faut les mettre, mais rien qu’à les sentir comme ça, je me dis : ça va probablement aller quelque part. »…. et p59 « En même temps j’ai le sentiment d’être très objective et cependant je n’ai jamais été aussi proche de moi-même »… « …je ne suis pas en train de faire un puzzle comme quelque chose dont j’aurais vu l’image. Peut être que j’aimerai rester là à sentir simplement comment ça se  passe. Ou en tout cas que je suis en train d’apprendre quelque chose. »…. « …nous faisons des petits morceaux, nous ne sommes pas débordés, ou  hésitants, ou soucieux, ou, très intéressés quand… quand les aveugles apprennent à lire avec les doigts, le Braille… »  puis p.60 « Je suis venue pour résoudre des problèmes, et je me mets simplement à faire l’expérience de moi-même ».

Ce chapitre a malencontreusement été nommé « Expérience immédiate du Moi potentiel » alors que Mrs Oak parle ici d’une expérience du Soi potentiel. Mais peut être cela vient-il de la traduction, car C. Rogers est vraiment un thérapeute basé sur l’existentiel et la traduction du titre de son ouvrage « Counseling and psychotherapy » par « relation d’aide et psychothérapie » marque déjà une profonde déformation. « Counseling » dans le sens de « tenir conseil » ne signifie pas « relation d’aide », surtout quand on sait que « relation » signifie « relié » et  amène de l’« affectivité ». Ces nuances entre "relation", "communication" et "aide" sont largement abordées dans les documents de ce site:   « Communication thérapeutique » (avril 2004) et   « assertivité » (septembre 2001)
Constitution de la psyché

Un individu semble constitué de celui qu’il est, de tous ceux qu’il a été depuis qu’il existe… et de tous ceux dont il est issu.

Les parts de Soi ont tendance à se rassembler pour constituer l’intégrité d’un individu. Celui qu’il est, tous ceux qu’il a été et de ceux dont il est issu sont ainsi assemblés dans une structure plus ou moins stable.

Dans cette idée de structure psychique, nous retrouvons l’idée de topique du départ, une sorte de représentation spatiale comportant plusieurs éléments. 

    Il s’agit ici cependant d’une  nouvelle topique, différente de celles de Freud: celle-ci est une topique existentielle faisant intervenir plusieurs parties du Soi, alors que la deuxième topique de Freud est une topique libidinale faisant intervenir le le Moi et ses prémices. 

Ces éléments du Soi sont donc portés à s’assembler, mais les parts douloureuses tendront à être évitées. Nous aurons ainsi une pulsion qui rassemble (ce qui est intégrable) et une pulsion qui éloigne (ce qui, ayant trop souffert, n’est pas intégrable), laissant ainsi des vides, ou au moins de fractures, dans la structure.
Pulsion de vie et pulsion de survie

J’ai nommé la pulsion qui rassemble « pulsion de vie » et la pulsion qui éloigne « pulsion de survie ».

Il semblerait que la pulsion de survie consomme de l’énergie pour maintenir à distance les parts de Soi dont on ne veut pas et que la pulsion de vie tende toujours à les rapprocher, sans y investir d’énergie. Je comparerai cela à l’action de la pesanteur : Il faut de l’énergie pour envoyer quelque chose en l’air loin de soi. Il n’en faut aucune pour que ça retombe ! La pulsion de survie consomme beaucoup d’énergie pour rejeter, pour maintenir à distance. La pulsion de vie n’en consomme aucune pour rassembler, comme si une pente naturelle produisait ce phénomène de rassemblement et que l’énergie n'était investie que pour s’y opposer.

Nous avons ainsi d’un côté la libido comme réservoir à énergie (conduisant la dispersion) et de l’autre l’existentiel comme moyen d’accès à l’équilibre (conduisant l’attraction)

La psychanalyse a parlé de pulsion de vie en parlant de la libido et de pulsion de mort en parlant de ce qui désassemble. Pourtant la libido éloigne de l’autre (pas de considération pour autrui, juste attiré pour un profit). La dispersion, assimilée par la psychanalyse à Thanatos, semble mal nommée également car elle assure la survie. Maintenir à distance ce qui fait mal pour pouvoir continuer à avancer sans trop souffrir ne ressemble pas à la mort mais à une stratégie de vie : assurer la survie de ce qui reste, afin de pouvoir poursuivre son processus de maturation, ressemble à une ingénieuse stratégie qu’on ne peut assimiler à la mort. Il est néanmoins réel que la pulsion de survie aimerait faire en sorte qu’on puisse se débarrasser de ces parts de Soi douloureuses.

    Les notions de pulsion de vie et de  mort, du point de vue de Freud,  sont par exemple explicitées dans l’ouvrage Les névroses, l’homme et ses conflits (TCHOU1979) p143. « Si on se réfère à la dualité pulsionnelle Instinct de vie/Instinct de mort,  introduite précisément par Freud,  dans Au-delà du principe de plaisir, la liaison serait en rapport étroit avec Eros qui cherche à établir des unités toujours plus grandes, tandis que la déliaison serait, elle en rapport avec Thanatos, dont le but est de désintégrer les ensembles, de briser les liens »

Même si la symétrie vie/mort semble attirante pour un fondement théorique, je n’y retrouve pas mon expérience clinique. Il apparaît plutôt que la mise à distance permette d’attendre la maturation qui, ultérieurement, rendra possible l’intégration.
Pourquoi intégrer ce qui a été douloureux ?

Il est légitime de se demander pourquoi il ne faudrait pas plutôt se débarrasser de ce qui a été douloureux. En réalité, pour comprendre cela, il faut clarifier la différence qu’il y a entre ce qui est arrivé (le circonstanciel, l’événement parfois horrible) et celui qui l'a vécu (l’existentiel, l’individu de valeur toujours inestimable).

Il ne s’agit jamais de retrouver, ni d’intégrer l’événement qui s’est produit, ni de retourner dans le passé, mais de donner enfin une place d’honneur en soi, à celui que nous avons été. Pour cela il convient de ne plus mêler l’individu qui a vécu l’événement à l’événement lui-même. C’est cette confusion entre l’événementiel et l’existentiel qui rend la pulsion de survie exagérément persistante (au point de ressembler à une pulsion de mort) et nous fait vouloir oublier ce qu’on a été.

        Pourtant, quand par exemple des chaussures nous ont fait mal aux pieds au cours d’une longue marche, il importe plus de s’occuper de ses pieds que de ses chaussures. Le soin aux pieds est primordial. De la même façon il convient de s’occuper de l’être qui a vécu l’événement et surtout pas de ressasser cet événement pour se débarrasser de je ne sais quoi. Sinon, cela reviendrait à un marcheur qui manipulerait sans cesse ses chaussures (ou les jetterait) en oubliant de s’occuper de ses pieds meurtris ! Ne faisant pas la différence entre ses pieds et ses chaussures, il jetterait même les pieds avec les chaussures. Il est souhaitable de bien comprendre que l’événement est passé, alors que celui qui a souffert est toujours en nous et en attente qu’on s’occupe de lui. Or cela est impossible tant qu’on l’assimile encore à ce qui est arrivé.

Les manifestations de rejet ou de rencontre se déroulent entre les différentes parts de Soi, de la même façon qu’elles se produisent avec le monde extérieur : profit, évitement, rejet, pouvoir…. ou au contraire rencontre.

La structure psychique (topique existentielle) s’assemble ou se désassemble. Je peux ainsi me demander quel rapport j’entretiens avec ceux que j’ai été dans ma vie (et ceux dont je suis issu, mes ascendants). Est-ce que si je devais les rencontrer, je leur donnerais volontiers une place d’honneur (pour ne pas dire d’amour), ou préfèrerais-je les oublier (pour ne pas dire les détruire)?

C’est ce qui fait que pour répondre à l’interrogation du Dr John PRESTON cité au début du document « que dois-je faire maintenant ? » il s’agit souvent de permettre au sujet en consultation de réaliser une sorte de psychodrame mental, à l’aide de son imaginaire, dans lequel il  « rencontre » et « écoute » ceux qu’il a été, en prenant soin de ne pas les confondre avec ce qui est arrivé. Je ne détaillerai pas plus ce processus thérapeutique ici puisqu’il est largement développé avec de nombreux exemples concrets dans le document d’avril 2004 « Communication thérapeutique ».  

Equilibre des deux flux retour

Structure psychique, Vie et Energie

La structure psychique semble donc devoir satisfaire à deux types d’écoulements de flux : le flux libidinal et le flux existentiel, qu’on pourrait aussi qualifier de flux d’énergie pour l’un et de flux de vie pour l’autre.

Ici également il convient d’apporter une précision sémantique. Souvent nous confondons à tort les notions de "vie" avec celles "d’énergie". C’est sans doute ce qui conduit aussi à mal différencier l’existentiel et le libidinal. L’énergie  a pour étymologie le grec erg (idée de travail) et le préfixe en (dedans), energia signifiant activité et ergon travail. Nous voyons clairement que ce mot désigne le « faire ». Or quand nous parlons de vie devons nous parler de « faire » ou « d’être » ? 

    Notons que de par sa dénomination "dynamique", la psychothérapie psychodynamique "dit" s'occuper des forces et de l'énergie (libido), plus que de l'existentiel (vie). Quand Jung parle du Soi et de l'individuation, il étend donc la psychanalyse au delà du champs de la psychodynamique.

Il est courant d’évoquer les trois bases que sont « être, faire, et avoir » et vous remarquerez qu’on les énonce toujours en plaçant « être » en premier (un peu comme dans une phrase où le sujet est avant le verbe, qui est lui-même avant le complément). Si l’on éprouve le besoin de faire cette distinction c’est qu’il s’agit de nuances très différentes :

Être : L’acteur, le sujet… c’est l’individu, l’être
Faire : L’action, le procès (processus)… c’est ce que le sujet met en œuvre
Avoir : L’avoir, c’est ce qui résulte du procès et dont le sujet peut ensuite disposer. Il semble qu’Être soit la source du faire et de l’avoir et que les trois soient bien distincts. Nous pourrions énoncer que l’énergie c’est FAIRE et que la vie c’est ÊTRE.

Le flux libidinal (énergie) se trouve donc vraiment différent du flux existentiel (vie). L’un procède du monde des objets et l’autre du monde des sujets. D’ailleurs tout le discours psychanalytique dit bien que le flux libidinal va vers un objet (en parlant de l’autre vers lequel il est dirigé). Même les discours psychologiques parlent souvent de l’attention se portant sur un objet (pour nommer l’autre vers qui nous portons notre attention). Il semble vraiment que la façon de nommer les phénomènes soit plus orientée vers la notion d’objet que vers celle de sujet.

Ceci prend une nouvelle nuance avec la psychologie existentielle où l’on parle "d’individu", de "sujet", "d’être au monde", " d’être là". Nous trouvons cela avec des praticiens comme Carl Rogers, Rollo May, Ludwig Biswanger, Karl Jaspers. Certainement que ces deux types de flux (existentiel et libidinal) sont importants et il convient de ne pas les confondre, ni d’en délaisser un pour sacraliser l’autre.
L’écoulement libidinal : flux d’énergie

Avec la libido, nous avons donc un flux vers des « objets ». Ce flux est une énergie venant du Ça, gérée par le Moi et régulée par le Surmoi. Il assure la survie en jouant sur les notions de profit ou d’évitement. L’autre n’y est pas reconnu en tant qu’individu. Il n’y est qu’instrumentalisé pour un profit ou évité pour échapper à un désagrément. Ce flux ne permet pas de rencontrer vraiment autrui, ni soi même. Il a un rôle de compensateur des vides, encore présents dans la structure psychique en devenir. Chaque fois que ce flux se met en œuvre, il y a consommation d'énergie.

Ce flux permet de poursuivre la vie malgré de nombreux manques existentiels et d’avancer vers un plus de maturité au fur et à mesure des années. Des parts d’être continuent de s’assembler pendant que certaines sont évitées. La structure psychique en devenir se construit ainsi progressivement mais avec un coût énergétique (celui de l’évitement et de la compensation). Ce coût énergétique est parfois d’autant plus intense que la pulsion de vie (existentielle) pousse dans l’autre sens : rassembler ce qui est dispersé par le Moi.

L’évitement est curieusement, et heureusement, compensé par les besoins venant aussi du Moi. Combien de personnes sommes nous amenés à rencontrer dans notre vie, plus par besoin que par volonté de les fréquenter. Par exemple il peut y avoir des collègues, patrons, ou collaborateurs qu’on supporte juste parce qu’on a besoin de travailler. Grâce à ce besoin (qui ne contient aucune générosité de notre part) nous sommes alors amenés à fréquenter (et peut être découvrir) des êtres vers lesquels nous n’aurions jamais pensé aller spontanément ! Cela nous amène à rencontrer le monde… un peu plus. 

Nous avons aussi ce phénomène, quoi que beaucoup plus subtile, dans le couple. Dans l’état amoureux initial, chacun est animé par un grand besoin de l’autre. Ce besoin est aveugle à la réalité et fait se côtoyer et s’unir des individus qui, la plupart du temps ne sont pas encore capables de se rencontrer, de s’accueillir et de s’apprécier dans ce qu’ils sont vraiment (ils s’idéalisent plus qu’ils ne se rencontrent). Ce n’est que quand l’état amoureux cessera que l’amour prendra toute sa dimension : soi-même tel qu’on est, face à l’autre tel qu’il est. L’amour au départ n’est que potentiel et le besoin initial lui permettra de se réaliser ultérieurement, si la maturation fonctionne bien. Ce thème a longuement été développé sur ce site dans la publication de février 2001 « Passion »
L’écoulement existentiel : flux de vie

Avec le flux existentiel nous avons un flux vers des êtres (vers des sujets). Le flux libidinal allait vers « quelque chose » (l’autre était vu comme un objet), le flux existentiel va vers « quelqu’un » (l’autre est vu comme un individu, un être). Ce flux est un flux de vie venant du Soi et tentant de rassembler un ensemble fragmenté par les pulsions de survie.

Puisque nous parlons ici d’existentiel, d’être et d’exister, quelques précisions sémantiques sur ces termes seront les bienvenues :

    Exister : En latin nous avons ex-sistere (ex l’extérieur, sistere se tenir, être). Donc « être à l’extérieur ». Puis en grec nous avons ek à l’extérieur, sta position station, stabilité… qui a donné le mot « extase ». Littéralement, « être à l’extérieur » également. Les psychologues existentiels parleront « d’être là », d’être au monde ». Exister, c’est donc « être au dehors ». 

    Nous remarquerons que « être présent » est aussi une expression intéressante. Elle signifie que nous savons « être là », dans l’instant et dans l’espace (le fameux ici et maintenant)… mais c’est aussi  étymologiquement praesens (latin),   c’est à dire « être devant » avec prae signifiant devant. Nous avons aussi essentia : le fait d’être.

Comment exister peut il signifier « être au dehors » ? Nous connaissons tous l’expression « je suis hors de moi » à tort assimilée à « être hors de soi ». Nous pourrions la préciser en disant « être hors du Moi ». Le Moi étant du paraître, il semble possible que pour « être plus » il soit nécessaire de sortir du paraître, sortir des personnages que nous jouons, sortir des statuts et des imagos. Pour être plus Soi, être moins dans le Moi.

Il s’agit donc d’une disposition particulière de la psyché qui se « dévoile » au sens littéral du terme. D’une part le flux existentiel est, pour le Soi, une façon « d’être au monde » ; d’autre part le flux libidinal est, pour le Soi qui ne sait pas encore être au monde, une source de survie. Le Moi, est ainsi pour le Soi, une façon temporaire « de ne pas être au monde » (il tient compte du monde pour s’en servir, pas pour le rencontrer. Il ne fait que l’instrumentaliser)

Il est toujours étonnant de découvrir à quel point les mots contiennent déjà tellement de renseignements. Ils sont souvent le reflet de phénomènes psychologiques perçus sans doute inconsciemment dans chaque culture. Il semble peu probable que les mots ne soient que le fruit d'une construction intellectuelle ou d'un hasard sur lequel on se serait ensuite accordé. Quand on parle des mots comme d’un code conventionnel… on néglige un peu rapidement les trésors de pertinence qu’ils contiennent. De plus, la communication c’est 93% de non verbal… et 7% de sémantique... vu ce que chaque mot contient, l’ensemble est encore plus riche qu’on se l’imagine !

Ce flux existentiel peut s’écouler de soi vers autrui, mais en psychothérapie, il devra aussi s’écouler de soi vers les différentes parties du Soi. Vous vous souvenez que la structure psychique est constituée de trois zones : celui qu’on est, tous ceux qu’on a été et ceux dont on est issu. Il importe que le flux existentiel s’écoule librement entre ces différentes localisations de la psyché.
Une régulation inconsciente mais lucide

Quand le flux existentiel ne peut s’écouler entre deux parties du Soi (par exemple celui qu’on est et l’enfant qu’on a été), la pulsion de survie fournit l’énergie nécessaire pour la mise à distance. Elle fournit aussi des moyens de compenser le manque qui en résulte, par l’utilisation de ce qui nous entoure (les choses et les êtres). Nous trouverons ici les multiples situations libidinales du Moi, canalisées avec plus ou moins de bonheur pas le Surmoi.

Des symptômes d’inconfort (parfois certaines psychopathologies) apparaissent ultérieurement, spécialement pour interpeller sur ce manque et permettre de retrouver cette part du Soi, afin de lui accorder la place qui lui revient dans la structure psychique. Ces symptômes sont produits par le Soi tentant de restaurer son intégrité. Cette notion de symptômes « spécialement pour » et non « à cause de » est essentielle pour répondre à l’interrogation du Dr Preston « maintenant que dois-je faire ? ». 

Quand on croit que le symptôme existe à cause d’une mauvaise situation vécue, on tendra à chercher à en libérer le sujet. Quand, au contraire, on perçoit que le symptôme existe spécialement pour restaurer une part du Soi, on tendra à la retrouver et à la réhabiliter. On fera cela d’autant mieux qu’on saura différencier l’événementiel (mauvais) de l’être qui l’a vécu (toujours de grande valeur). Je ne développerai pas plus ici ces notions largement explicitées dans la publication d’avril 2004  « communication thérapeutique »
Un tout réalisé

Le Soi va vers une complétude que Jung appelait « individuation ». 

    Il dit dans Ma Vie p457 « On pourrait donc traduire le mot d’individuation par réalisation de son Soi ». Il définissait également la névrose comme un « état de désunion d’avec soi même » p459.

Cette désunion produite, puis compensée,  par le flux libidinal, trouvera médiation avec le flux existentiel , comme un flux de vie qui se rétablit entre différentes parties du Soi. Une sorte de guérison d’un « infarctus » de la psyché qui obstruait le passage du flux existentiel. 

Au départ le Moi désunit énergiquement les parts du Soi  non intégrables (énergie de répulsion).  Puis il provoque un besoin qui l'attire et l'oblige à s'approcher d'objets (énergie d'attraction) pour compenser les manques engendrés par la répulsion. Enfin le Soi produit des symptômes qui attirent l'attention vers les parts d'être à restaurer tout en remettant en cause les compensations (décompensations). Si tout se passe bien, le passage du flux existentiel est rétablit. Ce flux de vie correspond plus à une ouverture qu'à une énergie.

Objectal et Existentiel retour

Nous sommes donc en présence de deux flux de nature différente souvent mal différenciés. Ils concernent deux mondes très distincts : le monde des objets  concernant les choses (monde objectal), et le monde des sujets  concernant les individus, les êtres (monde existentiel).
Le monde des objets

Le flux libidinal est celui qui constitue l’énergie psychique et qui se projette vers l’extérieur,  non pour le rencontrer mais pour en profiter. Quand cet extérieur est sa cible, cette cible est nommée « objet ». La libido se tourne  toujours vers un « objet ». Ne dit-on pas « l’objet du désir » ou même « l’objet de notre amour ». Il est pourtant curieux  qu'en psychanalyse on parle d’amour objectal pour dire que la libido s’est tournée vers quelqu’un. Vu que dans ce type d'attraction l’autre est considéré comme un objet, le mot « amour » trouve ici une curieuse utilisation. 

La psychanalyse peine à désigner autrui comme un "sujet". Pourtant, Patrick JUIGNET, dans son manuel de psychopathologie psychanalytique p541, donne la précision suivante: 

    "Nous distinguerons fermement l'objet, élément de la structure psychique, du référent objectal, la personne concrète à laquelle le sujet s'adresse". 

Ce qui est appelé objet n'est donc plus ici ce qui est extérieur à soi, mais la représentation intérieure qu'on s'en fait. Il est donc clair que le flux libidinal va alors vers l' image qu'on a de l'autre (image qui est un objet, une représentation qu'on a en nous), et non vers l'autre lui-même (qui est un sujet, qui est une présence extérieure à nous). Cela aurait pu nous apporter un début de réponse, 

Cependant, Patrick JUIGNET, dans son ouvrage, n'évoque généralement pas l'autre en terme de sujet.  Il y explique clairement que le développement narcissique et le développement objectal se poursuivent en parallèle, en même temps que s'opèrent des phases structurantes p68-83. Il nous précise même qu'à la dernière phase  de la psychogénèse de l'enfant (phase de reprise et d'achèvement de l'adolescence) , le référent objectal est perçu comme un sujet qui possède une altérité vraie (p80).  Mais il considère le Soi comme "source d'illusion et de méconnaissance de soi-même" p47. Même s'il reconnaît au Soi son rôle d'unification et de synthèse (individuation), il l'estime construit avant tout par des ressemblances à autrui, s'inspirant plus de l'image des autres que d'une intuition de celui qu'on est. Il le réduit donc ainsi à une "photo" bâtie sur les "objets environnants (imagos)" et il n'y est jamais question du Soi en tant qu'individu, en tant que sujet (comme nous l'avons lu plus haut dans l'exemple de Mrs Oaks avec Carl ROGERS). 

Nous remarquons ici, encore une fois, qu'il s'agit donc avant tout d'une théorie s'appuyant essentiellement sur la notion "d'objet" et d'énergie (libido) et où celle de "sujet" et de vie (existentiel) sont absentes. Curieusement,  dans la notion de flux libidinal dirigé vers l'extérieur (objets)  nous ne voyons alors en fait qu'un flux dirigé vers des représentions intérieures de ce qui nous entoure. Comme si la libido objectale n'était qu'une variante de la libido narcissique, mais au lieu de se diriger vers une représentation de soi, elle se dirige vers une représentation d'autrui...  dans le deux cas  ce ne sont que des représentations qu'on a en soi. L'autre (le référent objectal) n'est pas rencontré vraiment, pas plus que soi-même (celui qu'on est). A ce titre, nous prendrons soin également de différencier, dans le rapport avec soi-même, "s'admirer" et "s'aimer". Le premier est narcissisme libidinal, alors que le second est individuation existentielle. Comme le souligne Jung dans une phrase déjà citée plus haut:

    « Je constate continuellement que le processus d’individuation est confondu avec la prise de conscience du Moi et que par conséquent celui-ci est identifié au Soi, d’où il résulte une désespérante confusion de concepts. Car, dès lors, l’individuation ne serait plus qu’égocentrisme ou auto érotisme » Ma vie p 457

La notion de sujet et d'objet doit donc être clairement précisée. En réalité,  pour un objet on a de l’intérêt, alors que pour un être on a de l’amour ou, plus simplement, de l’attention. Il est toujours étonnant de trouver ces imprécisions sémantiques qui sont autant de sources de confusion.

Le monde des objets concerne le relationnel. La notion de relation est souvent confondue à tort avec celle de communication2 . Au point même qu’on pense souvent qu’être relationnel est plus chaleureux qu’être communiquant. Pourtant la relation relie, attache, génère de l’affectivité, ne nous fait que projeter sur l’autre ce que nous imaginons…. Elle ne s’occupe que de l’information pour en profiter ou pour la combattre. Les relations conflictuelles, amoureuses, professionnelles… sont des genres différents d'une même propension à privilégier l’objet par rapport au sujet. Bien sûr nous y trouvons toute la dimension libidinale.

C’est sur ce registre que se dérouleront le fait de convaincre, d’imposer, de posséder, de dominer, de manipuler ou de fuir. Je ne développerai pas trop en détails ces notions de relation et communication longuement explicitées sur ce site dans la publication de septembre 20012 

    1 - Manuel de psychopathologie psychanalytique – Patrick Juignet  Presse Universitaires de Grenoble – 2001
    2 - voir sur ce site la publication de septembre 2001  "Assertivité"

Le monde des sujets

Le flux existentiel est celui qui constitue la vie, et qui s’écoule vers l’extérieur pour rencontrer et non pour profiter. De la même manière il peut se tourner vers l’intérieur,  vers des parts du Soi, mais de façon non narcissique. Le narcissisme, c'était le flux libidinal vers le Moi, dans le projet de compensations de manques de Soi, par autosatisfaction, alors qu'ici il s'agit du flux existentiel vers le Soi dans le projet d'individuation, de plénitude (remplir ses vides et non plus les compenser). Nous prendrons soin de bien différencier le flux libidinal vers le Moi, qui donne le narcissisme et le flux existentiel vers le Soi qui donne l'individuation.

Le projet, ici, est alors de rétablir, la circulation existentielle entre différentes parts du Soi, entre lesquelles elle avait été interrompue. Une façon de « rassembler ses esprits », une façon de se rencontrer et surtout pas de s’utiliser ou de s’admirer à des fins d’autoprofit ou de compensations.

Si la notion d’amour objectal n’avait pas plus de sens que de parler des « coins du cercles » (les mots ne vont vraiment pas ensemble), celle d’amour existentiel prend tout son sens. Par contre on ne pourra pas parler d’intérêt existentiel, puisque le mot « intérêt » est réservé aux choses.

    On peut se demander s’il est nécessaire d’être aussi pointilleux sur le langage ? Il est certain qu’il vaut mieux de la considération avec de mauvais mots, que de la manipulation avec des mots exacts ! Rien n’est pire que l’habileté intellectuelle au service de la manipulation.

    Pourtant, pour énoncer des idées précises, l’emploi de mots inexacts amène des confusions. C’est un peu comme pour un outil de bricolage. Par exemple peu importe le tournevis pour une vis standard. Mais quand il s’agit de resserrer ses branches de lunettes, il faut un outil approprié. Nous trouverons aussi des vis cruciformes… et de différentes tailles ! Sans l’outil adapté on abîme soit la vis soit l’outil. Il en va de même des mots. Quand ils sont inexacts, nous risquons d’abîmer les idées que nous essayons d’échanger quand celles-ci comportent de subtiles nuances. Nous arrivons aussi à abîmer les mots à force de mal les utiliser.

Dans cette zone existentielle,  il ne s’agit plus d’objets (ni extérieurs, ni intérieurs), mais de sujets, d’individus, d’êtres. Le quelque chose y est toujours moins important que le quelqu’un. 

Ce sera le monde de la communication où les interlocuteurs comptent plus que les propos. L’état d’ouverture, fait que l’information y passe mieux, alors que, paradoxalement, celle-ci est mise au second plan par rapport aux interlocuteurs. Cela s’explique simplement par le fait que, pour que l’autre nous entende, il faut d’abord qu’il existe, et que pour qu’il existe, il doit d’abord à nos yeux, plus compter que les choses.

Cet énoncé qui semble une évidence se trouve aussi dans les soins psychologiques : qu’est ce qui mobilise l’attention du thérapeute ? Est-ce l’objet pathologique à guérir ? Est-ce le sujet souffrant de cette pathologie à rencontrer et entendre ? Tout est là. Quel est l’axe de notre attention ? L’être ou la morbidité ? 

    Karl JASPERS nous interpelle sur le fait que si les buts sont clairs dans la médecine somatique, il en va tout autrement quand on aborde les soins psychiques : « Mais aussitôt que nous voulons agir sur l’âme de l’homme, la clarté du but disparaît. Nous devons même nous demander consciemment, lorsque nous voulons éviter de prendre des dispositions confuses ou indifférentes : Qu’est-ce que nous voulons vraiment atteindre ? » (Psychopathologie générale p518)

    Jean-pierre Chartier, cité au début de ce document nous propose : « Mais plus encore, en faisant des symptômes névrotiques, non plus un stigmate de je ne sais quelle dégénérescence nerveuse, mais un message énigmatique adressé à l’autre et du délire une tentative de guérison fondée à l’origine sur un élément de réalité, Freud positionne la maladie au cœur de la psyché, comme un langage qui cherche à dire la vérité de l’être » Guérir après Freud p 29 et « Doit-on traiter les symptômes d’une maladie mentale hypothétique ou soigner quelqu’un qui souffre de sa psyché ? »p30

Ces notions sont détaillées sur ce site dans la publication d’avril 2004 « communication thérapeutique »
Situations concrètes de la vie, 
entre le Moi et le Soi

Nous rencontrons dans notre vie quotidienne de nombreuses situations où les échanges sont les résultats du Moi ou du Soi. Le plus souvent nous trouverons le Moi de l’un combattre le Soi de l’autre. D’autres fois ce sera le Moi de l’un qui combat le Moi de l’autre. D’autres fois encore le Moi de l’un utilisera (pour son profit) le Moi ou le Soi de l’autre. Enfin, dans des situations plus rares, le Soi de l’un s’adresse au Soi de l’autre 

Exemples de débuts de situations:

    Le Moi de l’un contre le Soi de l’autre (le plus fréquent)

    -Quand un enfant pleure et qu’on le prend dans ses bras pour le calmer, c’est du pouvoir contre son ressenti. Notre flux libidinal s’oppose à son expression. Il s’agit d’un pouvoir de notre Moi contre l’expression du Soi de l’enfant.

    -Quand notre conjoint rentre du travail en nous parlant d’un conflit qui l’a blessé avec un collègue : si nous lui disons « ne t’en fais pas, il ne vaut même pas la peine que tu penses à lui ». Comme pour l’enfant, notre Moi s’oppose au vécu du Soi de notre conjoint.

    -Quand un malade ne veut pas prendre ses médicaments et que le médecin lui explique pour quelle raison il devrait les prendre, ce dernier utilise le pouvoir de son Moi pour affaiblir le Soi du patient.

    -Quand un enseignant explique à un élève qu’il peut mieux faire, il utilise son Moi contre le Soi de l’enfant qui éprouve une difficulté.

    -Quand une personne âgée se plaint qu’on ne s’occupe pas d’elle, qu’on ne vient pas assez vite et  qu’un soignant lui répond « Je n’ai pas pu venir plus tôt parce que nous devions finir de préparer les médicaments », nous avons le Moi et l’intellect du soignant qui vient éviter le vécu du Soi du patient.

    -Quand une personne se plaint d’être fatiguée et qu’on lui dit « tu n’as qu’à te reposer un peu ou dormir plus », notre Moi envoie un flux d’énergie contre l’expression du vécu de son Soi.

    -Quand un thérapeute dit à son client qui ne dit pas certaines choses, ou ne se laisse pas aller dans les émotions « vous avez encore des résistances », il oppose le pouvoir de son Moi à la raison intime du Soi de son patient.

    -Quand un thérapeute dit à sa patiente « vous serez bien obligée de devenir adulte quand vous n’aurez plus votre mère », par le pouvoir de son Moi, il détruit le Soi de la mère et celui de sa patiente ainsi que le flux existentiel qui devrait pouvoir s’écouler entre elles. Or, une telle situation chez la patiente, marque souvent plus le fait d’avoir manqué sa mère que d’en être trop proche.

    -Quand une femme dit « je me sens un peu vieillir. Ça m’angoisse ! » et que sa meilleure copine lui dit avec un ton d’indignation « Mais pourquoi dis-tu ça. Tu es superbe ! », elle oppose l’énergie de son Moi à l’expression du Soi de son amie.

    -Dans un couple, l’épouse disant à son mari lorsque le deuxième enfant quitte la maison pour aller suivre ses études : « tu sais, c’est vraiment difficile de voir les enfants qui partent de la maison. Ça me laisse un sentiment douloureux » Il lui répond « ce n’était pas si terrible quand le premier est parti. Et puis il faut bien qu’il fassent leur vie » Le Soi de l’une est invité à se taire par le Moi de l’autre

    Le Moi de l’un contre le Moi de l’autre (assez fréquent aussi)

    Quand un enfant reproche à son père « tu ne m’écoutes jamais » et que celui-ci répond « de toute façon tu n’es jamais là », c’est une bataille de leurs deux Moi

    « Je trouve que tu pourrais faire un effort » reproche le premier. « Tu n’as qu’à le faire toi-même répond le second ». C’est aussi une bataille entre les Moi

    Un professeur dit à un élève « vous ne faites jamais d’effort ». L’élève répond  « ce n’est pas ça, monsieur, mais le devoir était trop long » Le Moi de l’un argumente contre le Moi de l’autre.

    Le parent d’un malade dit au soignant « vous pourriez vous occuper un peu mieux de lui, il ne mange pas assez ». Le soignant répond « mais vous savez, nous faisons tout ce qu’il y a à faire, il ne faut pas vous inquiéter comme ça » le Soi du parent étant inquiet, il utilise son Moi pour attaquer le soignant qui utilise le sien pour se défendre

    Dans une réunion, une personne attaque son collègue « sur ce dossier tu aurais pu être plus précis, je n’ai eu que des ennuis avec le client » et le collègue lui objecte « Bien sûr c’est facile à critiquer, on voit bien que ce n’est pas toi qui a dû te débattre avec tous ces chiffres » Le Soi de l’un ayant été embarrassé, il utilise son Moi pour combattre l’autre, qui lui-même se défend avec son Moi. Les deux Soi s’ignorent mutuellement.

    Le Surmoi de l’un et les deux Soi cachés.

    Quand nous aimerions aller au cinéma et que nous n’y allons pas pour ne pas ennuyer notre conjoint qui n’aime pas ça, notre Surmoi adapte notre Moi pour satisfaire à celui de notre conjoint. Aucun des deux Soi n’existe ni n’est rencontré.

    L’un aimerait bien dire à l’autre que la musique qu’il écoute le gène. Mais il se tait pour ne pas recevoir en retour un reproche. Juste après, à table il lui dit « tu pourrais finir ton assiette, pourquoi tu en laisses tout le temps ». Le Surmoi a contenu la première remarque pour éviter un reproche. Mais le Moi a débordé à table juste après.

    Le Soi qui tente d’émerger

    Quand un adolescent nous explique qu’on ne le comprend pas, il revendique la construction et l’existence de son Soi. Souvent il n’est invité qu’à l’élaboration de son Moi (plus de lutte) ou de son Surmoi (apprendre à s’écraser un peu) ou les deux à la fois : « Bien sûr qu’on t’entend. On n’entend même que toi. Tu râles tout le temps »

    « Je me rends compte que j’hésite souvent à donner mon avis et à te dire ce que je ressens » dit finalement une femme à son compagnon après quinze années de vie commune. Lui : « Mais tu sais j’essaye de t’écouter au mieux. Je crois que je ne t’ai jamais empêché de dire ce que tu avais à dire ». Elle : « Justement, là, tu vois je ne sens pas que tu m’entends ». Il ajoute « je ne vois pas ce que je peux faire de plus ». Chacun revendique son ressenti à l’autre. Mais chacun n’étant pas prêt, le Soi ne reçoit pas, ni d’un côté, ni de l’autre. Il se contente de revendiquer son ressenti et l’envoi par l’intermédiaire du Moi comme une objection.

    Le Soi de l’un qui s’adresse au Soi de l’autre

    Quand un jeune dit « je ne sais pas si je trouverais du travail. C’est vraiment difficile en ce moment » et qu’il s’entend reformuler « Tu es vraiment très inquiet ? » nous avons là un Soi qui reconnaît et valide l’expression du Soi de l’autre.

    L’un exprime sa colère « je n’en peux plus de toutes ces histoires », l’autre lui reformule « c’est insupportable à ce point ? » C’est aussi une validation du Soi

    L’un dit « J’ai vraiment été très heureux de ce que tu as fait ». L’autre reformule « Ça a vraiment été très agréable pour toi ? ». Il se voit répondre que oui et ajoute. « Tu sais c’était vraiment avec plaisir ». Nous avons ici un échange simple ou chacun exprime son vécu sans effacer celui de l’autre.

    Pour comprendre cette expression du Soi, vous pouvez lire les exemples de la publication de novembre 2002  « reformulation »

Rôle du Moi et du Soi dans l’exemple d’une situation phobique

Une personne ayant failli se noyer il y a dix ans a une phobie de l’eau depuis deux années. La phobie est donc apparue, alors que la situation antérieure ne semblait pas avoir laissé de trace pendant 8 années. Le Moi a su être assez fort pour mettre durablement de côté cette circonstance douloureuse (personnalité forte).  Puis la phobie est finalement apparue afin de retrouver la part manquante du Soi (spécialement pour cette réhabilitation).

Mécanismes préalables :

La mise à distance de la part de Soi qui a vécu la noyade avait été réalisée par le Moi (pulsion de survie). Par contre, le fait de la garder dans l’inconscient (et non de l’éradiquer) avait été accomplie par le Soi afin de ne pas la perdre, en attendant une opportunité de réhabilitation.

A l’occasion d’une baisse d’énergie (moment de faiblesse du Moi, fragilisation de la personnalité), le Soi peut enfin faire émerger le symptôme phobique qui sera le moyen par lequel on pourra revenir à cette part manquante.

Le projet global (perspicace, mais patient) est celui du Soi, qui tend à retrouver son intégrité afin de permettre une meilleure qualité d’individuation. Pendant ce temps, le Moi s’y oppose en tentant d’offrir un confort optimum par l’oubli  (identifié à tort à la pulsion de mort, alors que c’est plutôt une pulsion de survie). Mais le Moi a besoin d’énergie alors que le Soi n’en utilise aucune. La lutte est donc inégale car tôt ou tard le Soi aura une opportunité, lors d’un effondrement énergétique (libidinal)

Il peut y avoir plusieurs « décompensations » puis « recompensations »…. jusqu’au moment où :

Moment thérapeutique :

Le sujet arrivera à faire la différence entre les circonstances effrayantes (noyade) et celui qu’il était dans cette circonstance (l’individu qu’il était à ce moment). Il n’y a une peur d’y retourner que tant qu’on croit qu’il faut y retourner… En fait il ne s’agit pas de retourner au moment de la noyade, et encore moins de la revivre, mais juste de rencontrer celui qu’il était et qui a vécu cela afin de l’entendre, le soutenir, le reconnaître dans son vécu et de lui donner sa place dans la structure psychique.

Notions de Moi et de Soi hors des concepts psychodynamiques

De nombreuses souffrances psychologiques correspondent souvent au schéma ci-dessus (y compris en dehors des situations phobiques). La source ne vient donc pas forcément de l’enfance. Le ça, le Moi et le Surmoi, n’y concernent pas non plus systématiquement les étapes infantiles envisagées dans la psychodynamique.

Une situation psychothérapique se concrétisera plus souvent sur un schéma analogue au cas ci-dessus, que sur celui d’une étude de la sexualité infantile.
Psychothérapie et psychodynamique

Généralement les données de la psychanalyse appliquées à la psychothérapie conduisent à tenir compte des quatre éléments de la psyché que sont le ça, le Moi, le Surmoi et le Soi. Le plus souvent seuls les trois premiers éléments sont évoqués et quand le quatrième est présent, sa différenciation reste confuse. De plus, ils sont abordés avec, en toile de fond, l’idée de sexualité infantile et des stades du développement correspondants. Mais ceux-ci nous sont de peu d’utilité pour l’accompagnement d’un sujet en souffrance psychique et risquent même de laisser le praticien face à son client, avec cette question du Dr Preston « que dois-je faire maintenant ? ».

Ces stades sont, le « stade oral » (vers 17 mois), le « stade annal » (jusqu’à 4 ans), le « stade phallique » (jusqu’à 7 ans), suivis d’une « période de latence »  (jusqu’à 12 ans) précédant le « stade génital » (à partir de 12 ans). Les développements définis par la psychodynamique placent vers 3 à 5 ans le complexe de castration et le complexe d’Œdipe  pour les garçons ainsi que l’envie de pénis pour les filles. Le complexe d’Œdipe chez les filles étant plutôt identifié vers 12 ans.

Je ne prendrai donc pas la peine de détailler ici ces éléments. J’ai choisi d’utiliser dans ce document les notions de ça, de Moi, de Surmoi et de Soi de telle façon qu’elles puissent avoir directement une utilité en psychothérapie ou en compréhension de soi, afin de comprendre les enjeux à l’œuvre dans la psyché. Mettre l’accent sur la cohabitation des mécanismes libidinaux et des mécanismes existentiels m’est apparue, ici, plus important.

En effet, les stades de développement cités ci-dessus sont intéressants du point de vue de l’étude théorique des phases d’évolution d’un individu, mais l’expérience clinique m’a montré qu’ils n’apportent pas d’éclairage pour l’efficacité d’une psychothérapie dans laquelle le sujet a besoin d’une aide immédiate. Ce document n’apportant pas d’éléments sur ces stades du développement, j’invite le lecteur qui chercherait ce type d’information à se tourner vers un site  traitant principalement de la psychanalyse ou de la psychodynamique.

Que ce soit en tenant compte de ces notions, ou hors du champs de celles-ci, le lecteur qui souaite plus de détails au sujet de la psychopatholgie et de la psychothérapie peut lire la publication d'avril 2008: "Psychopathologie" et, pour des nuances particulirement innovantes en ce domaine, la publication de décembre 2008 "Le positionnement du praticien dans l'aide et la psychothérapie"
Synthèse

Pour reprendre l’ensemble de ce qui a été évoqué dans mon document, vous trouverez en annexe un tableau mettant en face de chacun des 4 éléments constituant la psyché, ce qu’il induit d’attitudes, de réactions, de comportements, d’ouverture, de fermeture…etc. Vous trouverez dans ce tableau des mots renvoyant à de nombreuses notions développées dans d’autres documents de ce site.

Une 2e annexe reprend les évolutions simultanées du Moi (ego)  et du Soi (individuation) sur le cours d'une vie. Ceci permet de bien visualiser le rapport entre l'évolution du paraître et celle de l'être (du libidinal et de l'existentiel)

Thierry TOURNEBISE
"La grande révolution du travail aura lieu hors du salariat". Entretien avec Denis Pennel (2/2)ManpowerGroup
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ENTRETIEN. Le salariat aurait-il fait son temps ? Souvent considéré comme le Graal de la stabilité de l'emploi dans un monde instable, le salariat pourrait bien être en train de vivre ses derniers instants. Selon Denis Pennel, une chose est sûre : la révolution du travail n'aura pas lieu là où on l'attend.

Pennel1Alors que l'économie mondiale se stabilise, la crise de l'emploi continue d'occuper le devant de la scène. Pourtant, pour Denis Pennel, directeur général de la Ciett et auteur de Travailler pour soi (2013), derrière cet aspect conjoncturel, une révolution structurelle du travail est en train de bousculer les usages. Rencontre à l'occasion de la publication du rapport annuel de la Ciett, confédération mondiale des agences d'emploi privées.

Le thème de votre livre de 2013, Travailler pour soi (Seuil – 2013) parlait de cette révolution du travail hors-salariat. Comment se manifeste-t-elle aujourd’hui ? Vous avez notamment dit: "Nous vivons moins une crise de l’emploi qu’une révolution du travail."

Bien sûr, nos politiques sont là pour gérer la mauvaise conjoncture de l’emploi qui fait sans cesse la une des journaux. Cette dimension conjoncturelle du chômage, il faut la gérer. Mais il ne faut pas que cela éclipse une dimension plus structurelle : nous vivons une vraie révolution du travail ! La façon de travailler n’est plus la même qu’il y 10 ou 20 ans et même au sein de la relation salariale, nous avons assisté à une profonde dé-standardisation et à une diversification de la façon de travailler.

"Cette dimension conjoncturelle du chômage, il faut la gérer. Mais il ne faut pas que cela éclipse une dimension plus structurelle : nous vivons une révolution du travail !"

Aujourd’hui, même un CDI ne veut plus dire un emploi à vie : un tiers est rompu au bout d’un an ! La moitié des salariés travaille déjà le samedi, et un tiers le dimanche. Pour une majorité de personnes, la « journée type » du travailleur salarié de la période fordiste, du lundi au vendredi de 9H à 17h, ça ne veut strictement plus rien dire ! Que ce soit à travers le développement des temps partiels, des équipes de nuit et du travail le week-end, les choses changent - et malheureusement, tout le monde ne s’en rend pas compte !

  • Vous semblez dire que cette révolution du travail n’est pas toujours perçue dans toute son ampleur.

Travailler pour soiEn France, nous avons un vrai problème de représentation du marché du travail, en particulier chez les politiques. Les politiques, et les Français en général, aiment se représenter le travail comme quelque chose de très standardisé : d’un côté, le paradis du CDI, de l’autre côté, ce qu’on appelle à tort "l’emploi précaire" où l’on range tout ce qui n’est pas CDI à temps plein, en relation directe avec un employeur. Cette vision est fausse car elle est périmée ! La réalité est aujourd’hui bien plus complexe : au sein même du salariat, il y a une dé-standardisation et une diversification des formes d’emploi et il y a clairement un développement des formes d’emploi en CDD, intérim et autres. Aujourd’hui, il faut l’admettre : la grande révolution du travail aura lieu hors du salariat !

  • En quoi consiste cette révolution du travail si elle ne touche pas le salariat ?

Disons que les choses s’inversent : on voit des indépendants qui n’ont qu’un seul client, et qui sont de facto dans une relation de subordination. Inversement, il y a de plus en plus de salariés qui sont dans une relation d’autonomie et de responsabilité où on leur laisse de plus en plus les mains libres pour faire le travail, ce sont de véritables « salariés sans patron ». Est-ce encore une relation salariale ? C’est une hybridation.

"Ce n’est pas le CDI qui est le Graal, et les autres formes d’emploi qui sont à ranger dans la case 'précaire'. C’est tout le monde du travail qui se complexifie."

Le ministre François Rebsamen a déclaré que, finalement, la relation de subordination n’était peut-être plus la base d’une relation salariale, et tout le monde s’est offusqué. Selon moi, il a raison : ce n’est plus la subordination qui est la base pour juger de l’existence d’une relation salariale, ou non. Les frontières entre travail indépendant et travail salarié sont devenues poreuses et confuses. C’est tout le monde du travail qui se complexifie, qui se diversifie… Voilà la révolution du marché du travail aujourd’hui. Ce n’est pas le CDI qui est le Graal, et les autres formes d’emploi qui sont à ranger dans la case "précaire".

  • Une évolution, certes, mais dans quelle direction ?

De plus en plus, nous allons tendre vers la multi-activité. Pour expliquer cette tendance, j’aime citer cette phrase : mon père a travaillé toute sa vie dans la même entreprise. Moi, j’aurai eu sept emplois différents au cours de ma carrière. Nos enfants vont avoir sept emplois, mais en même temps ! Ils auront plusieurs sources de revenus : par exemple un travail salarié à temps partiel, une activité indépendante, type cours du soir et une activité commerciale occasionnelle sur e-Bay ou sur Airbnb…. C’est ça, la multi-activité.

  • Une révolution de l’activité, donc, mais aussi… de l’inactivité ?

Tout à fait. Aujourd’hui, emploi et travail sont de plus en plus déconnectés : vous pouvez avoir des activités professionnelles variées sans pour autant avoir un emploi. Cela va plus loin, car l’emploi est aussi de plus en plus déconnecté… du revenu.

"Mon père a travaillé toute sa vie dans la même entreprise. Moi, j’aurai eu sept emplois différents au cours de ma carrière. Nos enfants vont avoir sept emplois, mais en même temps !"

Récemment, une étude de l’Insee montrait que les revenus liés au travail ne représentaient que 45% du total des ressources financières des ménages. Le reste des revenus provient des prestations sociales (25%), transferts sociaux en nature (éducation, santé) pour 23%, revenus du capital (intérêts, dividendes, rendement de biens immobiliers) pour 9%.… Ainsi, comme vous le faites remarquer, cela pose la question du chômage : est-ce que vous êtes chômeur parce que vous n’avez pas de travail ou parce que vous avez, tout simplement, d’autres sources de revenus ?

  • Cette déconnexion concerne-t-elle les nouvelles formes de travail collaboratif et gratuit ?

Oui, c’est un sujet qui monte. Cela passe par exemple par le crowdfunding ou encore les hackathons où les participants ne sont pas payés alors qu’ils travaillent sur des projets communs. Cela se ressent aussi du côté des entreprises, car on demande de plus en plus à l’usager de faire une partie du travail : vous, en tant que client, vous vous acquittez d’un travail non rémunéré quand, par exemple, vous imprimez votre billets de train, ce qui était autrefois du ressort du guichetier de la SNCF ! Autre exemple : Wikipédia fonctionne de façon très performante et a été entièrement conçu bénévolement. Une chose est sûre : le travail gratuit va devoir être identifié et reconnu à l’avenir.

"Savez-vous que l’année dernière, plus de 17 millions de personnes ont réussi à trouver un emploi permanent à travers les services privés des agences d’emploi ?"

Et au sommet de cette tendance, certains parlent même d’un Revenu minimal d’activité pour tous, qui serait la concrétisation dernière de cette tendance de déconnexion entre travail et revenu.

  • Dans ce contexte complexe, êtes vous optimiste sur le rôle de votre secteur sur le marché de l’emploi ?

Je suis très optimiste quant à l’avenir des agences d’emplois privés, tant en matière d’intérim que de nouveaux services (outplacement, RPO…). Avec le rapport 2014 de la Ciett, nous constatons que les entreprises prennent de plus en plus conscience que le recrutement, c’est un métier et que cela demande des compétences très spécifiques. Dans cette ère d’hyper spécialisation, avoir des RH dans l’entreprise, qu’il faut former et faire évoluer, est souvent trop complexe, et parfois inefficace. Ainsi, de la même manière qu’elles peuvent faire appel à des prestataires pour gérer leurs comptes financiers, elles se rendent compte que les ressources humaines peuvent à leur tour être externalisées.

Au final, le RPO est un marché en explosion avec un chiffre d’affaire annuel de 4 milliards de dollars. Et les taux de croissance sont très significatifs ! Pour les agences d’emplois dans leur ensemble, c’est un moyen de valoriser toute l’étendue des activités et de montrer qu’elles ont un vrai rôle à jouer dans l’accompagnement vers l’emploi. Savez-vous que l’année dernière, plus de 17 millions de personnes ont réussi à trouver un emploi permanent à travers les services privés des agences d’emplois ? Notre secteur est là pour accompagner le changement lié à l’émergence d’un nouveau monde du travail !

Va-t-on vers la fin du salariat ?
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Oui on parle d’une mutation, d’une révolution, d’une transformation en fait du travail tel qu’on l’a connu depuis la fin du XIXème siècle et l’invention du salariat. On a longtemps cru, malgré la crise, que la salariat était l’avenir du travail, la forme la plus civilisée, la plus aboutie, la plus conforme à une certaine idée du progrès social. On voyait d’ailleurs chaque année le nombre de salariés progresser dans les statistiques, notamment grâce au développement économique rapide de larges régions du monde, en Asie par exemple. Le salariat, c’est encore, une vision venue de l’ère industrielle, et une réalité sécurisée du contrat du travail, sous la forme d’un CDI avec des garanties et des protections sociales qui lui sont attachés, en matière de santé ou de retraite par exemple. Et bien, c’est cette réalité-là qui est mise en question aujourd’hui, par le rapport passionnant que vous évoquiez. Ce rapport, intitulé Les modalités d’emploi en pleine mutation , nous montre qu’en dépit de son essor dans certaines régions du monde, l’emploi salarié ne représente que la moitié de l’emploi total dans le monde aujourd’hui.

  • Mais par quoi, par quels types de contrats sont remplacés les emplois salariés ?

"Nos chiffres, disent les experts de l’OIT, révèlent un monde du travail de plus en diversifié ". Ce travail diversifié, c’est quoi, il révèle en fait deux réalités assez contradictoires : d’un côté, il y a une tendance nette, aussi en raison de la crise, à la précarisation du travail et des contrats, un temps partiels subis, la multiplication de contrats courts, voire très courts et la progression de ce qu’on peut appeler le travail informel. Mais de l’autre coté, il y a aussi, une réalité émergente qui n’est plus vraiment subie, mais choisie elle, avec le développement fulgurant des auto-entrepreneurs par exemple, dans les pays occidentaux, et notamment en France où près d’un million de personnes vivent déjà cette réalité. Un salarié français sur trois n’est pas en CDI, et plus de deux millions d’hommes ou de femmes exercent plusieurs activités, salariés ou non salariés.

  • Quels sont les défis, Vincent, de cette mutation du travail ?

Ces défis sont multiples : tout notre système social repose encore largement sur des parcours traditionnels, avec une très faible mobilité et une continuité de statut. Et du coup, ces nouvelles formes de travail, comme le travail indépendant, sont moins protégées, notamment en matière de retraite. C’est donc tout un système qu’il nous faut repenser. Le développement des carrières protéiformes, l’individualisation très forte du travail, vont nous pousser à inventer de nouvelles formes de sécurisation des parcours professionnels, avec des droits nouveaux, notamment en matière de formation. Ça serait vraiment bien que responsables politiques et les partenaires sociaux commencent à s’en occuper. Parce que dans les années qui viennent, très vite, le travail va changer comme jamais depuis la dernière révolution industrielle.

Suicide et tentative de suicides : données nationales et régionales
Il y a-t-il vraiment eu un suicide par heure en France ? – Libération

Il y a-t-il vraiment eu un suicide par heure en France ?
publié le 12 février 2018 à 15h46

Question posée par gibert le 12/02/2018

Bonjour,

Vous souhaitez savoir s'il y a vraiment l'équivalent d'un suicide par heure en France.

La semaine dernière, plusieurs médias (dont Libération) ont rapporté les principaux chiffres du troisième rapport de l'Observatoire National du Suicide, publié le 5 février 2018. On peut y lire:

En France métropolitaine, en 2014, 8 885 décès par suicide ont été enregistrés par le Centre d'épidémiologie sur les causes médicales de décès de l'Inserm (CépiDcInserm), soit près de 24 décès par jour. On compte ainsi un suicide toutes les heures. Toutefois, ce chiffre sous-estimerait de 10 % les décès par suicide, portant ce nombre à près de 10000.

Dans le rapport, l'estimation est précisée à 9773 décès. En prenant en compte ces deux données (8 885 ou 9773 décès par suicide), on arrive à un nombre de suicide par jour variant entre 24,3 et 26,8. Soit plus d'un par heure.

  • Le nombre de suicides enregistrés est descendu sous la barre des 10 000

Dans son premier rapport, l'Observatoire du suicide relevait 10 367 décès en 2011. Le deuxième rapport comptait 9 715 décès par suicide enregistrés. Ces données sont issues du Centre d'épidémiologie sur les causes médicales de décès (CépiDc), un laboratoire de l'institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). Sur son site, on peut trouver le nombre de décès par cause. Check News a regroupé le nombre de décès enregistrés en tant que suicide dans le graphique suivant:

On remarque donc que le nombre de suicide enregistrés est passé sous la barre des 10 000 en France à partir de 2012. En ce qui concerne le taux de mortalité par suicide, c'est à dire le nombre de suicides pour 100 000 habitants, le rapport publié en février 2018 note qu'il est également en baisse. En 2014, il était de 14,9 contre 23,5 en 2003.

  • Les hommes se suicident trois fois plus que les femmes.

Au sujet du profil des suicidés, l'Observatoire national du suicide note:

Le nombre de décès par suicide est nettement plus élevé chez les hommes que chez les femmes (respectivement 6 661 et 2 224), de même que le taux de décès standardisé par âge2 (respectivement 23,1 et 6,8 décès pour 100000 habitants, soit un taux trois fois supérieur chez les hommes).

Le taux de décès par suicide augmente fortement avec l'âge, surtout chez les hommes. En 2014, il s'élève à 7,5 décès pour 100000 hommes âgés de 15 à 24 ans et à 59,4 après 74 ans. Cependant, la part du suicide dans la mortalité générale est nettement plus élevée chez les jeunes des deux sexes que chez les personnes âgées : entre 15 et 24 ans, le suicide représente 16,2 % du total des décès, soit la deuxième cause de mortalité après les accidents de la circulation; à partir de 75 ans, le suicide représente moins de 1 % du total des décès.

Cordialement,

Jacques Pezet

Élu, maire, préfet, procureur - Brigade DICRIM
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Il est de la responsabilité des autorités de garantir des conditions minimales de sécurité pérennes et d’approvisionnement pour chaque citoyen et à chaque citoyen d’y veiller.
Responsabilités des maires et préfets sur les risques alimentaires

Étant donné l’absence de plan communal de sauvegarde (PCS) et DICRIM intégrant les risques majeurs alimentaires, la sensibilisation des populations n’est pas faite à ce sujet.

Pourtant, en cas de dommages et de troubles à l’ordre public résultants de ruptures de chaînes d’approvisionnement et de stocks alimentaires (2 à 3 jours de stock dans les magasins) et donc de rupture du continuum sécurité défense, les maires et préfets qui ne sauraient faire face aux violences seraient potentiellement coupables à l’article 121-3 du Code Pénal pour manquement à une obligation de prudence ou de sécurité.

L’information à la population sur les risques majeurs est cruciale. La vérification que cette information a été bien assimilée par les citoyens est également importante. Ces deux actions participent du continuum sécurité défense.

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Date: 10 août 2021Author: Police & Réalités

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Les nazis, le QI et la bonté

Si le quotient intellectuel joue un rôle important dans notre destin, il ne garantit en rien les valeurs morales d'un individu, sa bonté ou son altruisme.

La mesure de l'intelligence est un sujet éminemment politique et passionnel depuis longtemps. On imagine que l'Allemagne du IIIe Reich en était fanatique. En réalité, les tests de quotient intellectuel (QI) y étaient quasiment interdits. Les dirigeants hitlériens craignaient que les juifs ne se servent de bons résultats aux tests pour accroître leur pouvoir et légitimer leur influence, notamment dans les domaines scientifique et universitaire. Deux auteurs allemands, F. Becker et E. Jaensch, expliquaient, en 1938, que la mesure de l'intelligence serait un instrument de la "juiverie" pour fortifier son hégémonie. Staline bloqua pour sa part les travaux d'Alexander Luria sur les capacités intellectuelles pour éviter que les "bourgeois" s'en servent comme outil politique.

Le QI, tabou de l'extrême gauche à l'extrême droite

En France, Pierre Bourdieu, notamment, dans un article intitulé "Le racisme de l'intelligence", expliqua également qu'il fallait refuser la mesure de l'intelligence et bloquer les études sur l'origine des différences de capacités cognitives. Selon lui, les résultats de ces études permettraient à la classe dominante de justifier ses privilèges du fait de ses meilleures capacités intellectuelles. Le QI est donc un vieux tabou de l'extrême gauche à l'extrême droite !

Fils de juifs émigrés d'Autriche, Gustave M. Gilbert devient psychologue militaire au cours de la Seconde Guerre mondiale. Germanophone, il est envoyé à Nuremberg en 1945 et officie en tant que psychologue de la prison pour les détenus jugés comme criminels de guerre. Il devint le confident de Wilhelm Keitel, Hermann Göring, Joachim von Ribbentrop... en passant sous silence dans un premier temps le fait qu'il était juif. La plupart des bourreaux nazis refusèrent de lui parler quand il leur avoua la "vérité".

Gilbert participa au procès de Nuremberg en tant que psychologue en chef de l'armée américaine. Il publiera son expérience dans Nuremberg Diary, en 1947, dans lequel il raconte en détail ses entretiens avec les nazis en s'affranchissant du secret professionnel, lequel concerne aussi les psychologues et interdit normalement de révéler le contenu des entretiens. On a d'ailleurs reproché à Gilbert de traiter les criminels de guerre mis à sa disposition comme des souris de laboratoire.
Rien à voir avec les valeurs morales

Lors de ce procès, les psychologues ont pu mesurer le QI de tous les tortionnaires nazis, à l'exception de Hitler, Himmler et Goebbels, qui s'étaient suicidés (Göring a été testé avant son suicide, survenu au cours du procès, dans sa cellule). Tous avaient des QI supérieurs à la moyenne et beaucoup étaient surdoués, ce qui bouleversa les psychologues américains. Gilbert rappelle à cette occasion que le QI n'est qu'une évaluation de "l'efficience mécanique de l'esprit, et n'a rien à voir avec le caractère et les valeurs morales". Les chefs nazis étaient, pour la plupart, très intelligents, ce qui les a rendus encore plus dangereux. Le QI prédit relativement bien de multiples aspects de notre vie sociale, professionnelle et intellectuelle, à quelques exceptions près.

Les grands joueurs d'échecs, par exemple, ont en moyenne des QI relativement modestes. L'influence du QI sur la sécurité routière se révèle choquante : les hauts QI ont trois fois moins d'accidents mortels de la route (50 pour 10 000 conducteurs) que les bas QI (147 pour 10 000) ! Ce qui est logique : la chercheuse Linda Gottfredson fait remarquer qu'un haut QI est associé à de bons réflexes et à une bonne capacité d'anticipation des risques...

Café Histoire : Les intellectuels SS dans l'appareil nazi - YouTube
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«Les nazis étaient souvent lettrés et savants» - Le Temps
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«Les nazis étaient souvent lettrés et savants»
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Entretien

Spécialiste de la période nazie, le Français Johann Chapoutot est l’une des figures phares du Festival Histoire et Cité qui commence ce mercredi à Genève. Il décrit les fondements culturels parfois sophistiqués d’un système monstrueux

Mais comment fait-il, le docteur Wilhelm Bayer, pour ne pas ciller devant les juges? La charge est accablante: on l’accuse, lui et dix-sept collègues, de la mort de 56 enfants entre 1939 et 1945, à l’hôpital de Hambourg. Imperturbable, il explique que les victimes étaient si diminuées qu’elles n’étaient pas tout à fait des êtres humains. Et qu’au nom de la vitalité de la race, il fallait «éliminer ces vies indignes d’être vécues». Platon ou Sénèque ne pensaient pas autrement, assène-t-il encore.

Cette scène, classique, sidérante toujours, ouvre La Loi du sang, penser et agir en nazi, radioscopie magistrale de la culture hitlérienne, des normes au nom desquelles des centaines de milliers de docteurs Bayer, têtes bien faites, ont agi entre 1933 et 1945. Son auteur, Johann Chapoutot, est l’hôte de marque du Festival Histoire et Cité, qui s’ouvre ce mercredi à Genève. Le Français montre comment universitaires, médecins, savants, juristes ont épousé le nazisme, corps et âme. Certains se sont peut-être sentis embrigadés. La plupart ont communié dans une vision biologique, nationaliste et raciste du monde, en toute bonne foi.

Le docteur Bayer, qui bénéficiera en 1949 d’un non-lieu, avait le choix, suggère Johann Chapoutot, spécialiste de la culture nazie qui donnera ce jeudi une conférence sur la naissance de l’individu libre dans l’Allemagne de la fin du XIXe. Cet exposé s’inscrit dans une édition du festival consacrée à la question de la liberté, justement, celle que proclament les révoltés de la place Tahrir, celle qui anime Martin Luther King et Malcolm X dans leur lutte pour les droits civiques. A l’aube du XXe siècle, les sujets de Guillaume II prennent leur envol sur le tremplin de l’individualité, dans une angoisse inavouée qui nourrira peut-être, après le choc de 14-18, le fantasme d’une communauté sans mélange.

Le Temps: Quel est l’homme nouveau que les nazis veulent imposer?

Johann Chapoutot: Il n’est pas nouveau, justement. Leur modèle est le Germain, archétype du courage, de la vitalité, un guerrier, mais pas un belliciste, qui évolue en parfaite harmonie avec la nature. Les nazis s’inscrivent dans un mouvement banal, qui est le retour au paradis perdu. Il faut revenir à l’archaïque, à ce Germain dont les Grecs et les Romains portent l’héritage. Et pour cela, il faut mettre fin à l’aliénation que font subir au peuple allemand le christianisme, le judaïsme, les Lumières, le communisme, tous ces courants universalistes.

Pourquoi ce rejet de l’universalisme?

Parce qu’il a contribué à dissoudre la race germanique, porté d’abord par les baïonnettes de l’armée française après la Révolution de 1789 jusqu’au traumatisme de la bataille d’Iéna en 1806. Les nazis se réclament du particularisme de la race, ils estiment que chaque race produit une morale et un droit valables pour elle. Dans cette vision, les Juifs sont considérés comme un agent ennemi qui a créé le christianisme pour abattre le peuple germanique et imposer leur doctrine des deux mondes, selon laquelle la vie terrestre est une épreuve, en vue d’un accomplissement ultérieur. Le Germain originel est heureux ici-bas. Les idéologues nazis prétendent ainsi que christianisme et judaïsme ont dénaturé l’humanité. Eux, ils prétendent réenchanter le monde.

Naturisme, défense des animaux, végétarisme, danse à ciel ouvert: les nazis recyclent des pratiques propres aux communautés utopistes du début du XXe siècle, celles qui font de Monte Verita, au bord du lac Majeur, le foyer d’un renouveau. Comment expliquer cette continuité?

La Kulturkritik est un mouvement hétérogène, qui appelle à changer son mode de vie et de pensée comme à Monte Verita, à contester une industrialisation aliénante, etc. Ce mouvement est traversé par des courants divers, communistes, spiritualistes, nationalistes et racistes aussi, comme toute cette mouvance pour qui le retour à la nature doit être un retour à la race.

Le nazisme en tant que culture serait donc une synthèse du temps?

Le nazisme n’est pas un ovni par rapport à l’époque. Quand on se penche sur ses fondements, on est frappé par la banalité de sa vision du monde: l’idée du paradis perdu est une rengaine rousseauiste, l’antisémitisme est une constante européenne, l’idée de sursaut national est en vogue… Tout cela n’a rien de proprement allemand. Ce qui l’est, en revanche, c’est l’obsession de l’espace vital, qui est une conséquence de la révolution démographique que le pays a connue. Entre 1870 et 1914, la population a crû de 27 millions, d’où cette angoisse d’être un «peuple sans espace».

En vous lisant, on est effaré par le nombre d’intelligences qui servent l’idéologie nazie. N’y a-t-il pas une part d’opportunisme, malgré tout?

Elle est faible. On doit faire à tous ces intellectuels le crédit de la sincérité. Ils ne se déclarent pas nazis pour la galerie. Il suffit de lire les journaux intimes et les correspondances pour saisir qu’ils sont convaincus. Les idées auxquelles ils adhèrent, ils les professaient avant 1933 et ils les défendront après la guerre encore. Le général Otto Ohlendorf, par exemple, responsable de la mort de dizaines de milliers de Juifs, dira que le nazisme a répondu à la crise morale qui a été la sienne dans les années 1920. Comme avec le docteur Bayer, on est dans l’idéologie pure et dure.

Qu’avez-vous découvert que vous n’imaginiez pas en épluchant pendant des années des milliers de documents?

Comme ces crimes en chaîne dépassent l’entendement, on a tendance à penser qu’on a affaire à une clique de fous ou de barbares. Or, plus vous allez de l’avant, plus vous réalisez que ce sont souvent des personnes très aimables, bons pères de famille, bons maris, amis des bêtes, végétariens parfois. Le nazisme n’a rien d’exotique, il participe de notre culture, il puise dans nos humanités, latine et hellénique, et il interroge notre humanité.

Quelle conclusion en tirer alors?

Le nazisme n’était pas une fatalité, malgré un contexte qui le favorisait. Ces gens ont fait un choix, ils n’ont pas été emportés par une mécanique. Il y a des Allemands qui ont fait d’autres choix.

Est-ce qu’au vu des crispations nationalistes, du repli identitaire, un avatar du nazisme est imaginable?

Non, je ne le pense pas. D’une part, le nazisme s’enracine dans la Grande Guerre et l’humiliation de la défaite. Sa violence est justifiée par celle des tranchées. D’autre part, l’extrême droite contemporaine, même raciste, ne peut s’appuyer sur aucun fondement intellectuel et scientifique. Dans la première partie du XXe siècle, le racisme est un concept heuristique reconnu dans les sciences humaines et naturelles. Des linguistes, des biologistes, des anthropologues fondent leurs recherches sur cette vision. C’est aujourd’hui impensable.

La Loi du sang, penser et agir en nazi, Gallimard, 570 p.

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Comment le surmoi nous protège | Psychologies.com
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Les médias s’en gargarisent, le langage courant tout autant, sans que personne sache ce qu’est vraiment le surmoi. Retour en cinq temps sur cette instance psychique, qui regroupe nos interdits intérieurs et détermine notre aptitude à vivre avec les autres.

Nicolas Sarkozy n’en aurait pas. François Hollande en aurait trop. Celui de Jean-Luc Mélenchon serait « sévère ». Sorti comme un diable de sa boîte, le concept de surmoi a largement alimenté les discours des analystes et des politologues pendant la campagne électorale pour la présidentielle. Mais de quoi cette notion clé est-elle le nom ? S’agit-il, comme nous avons tendance à le résumer hâtivement, de « notre gendarme intérieur » ? C’est un tout petit peu plus compliqué, d’autant que la pensée et la définition de Sigmund Freud, qui l’a découvert, ont évolué au fil du temps. Quelques explications pour mieux comprendre le fonctionnement de notre psychisme.

Le surmoi, notre morale intérieure ?

Le surmoi est une instance psychique, dont l’existence a des implications dans notre vie quotidienne. Avant d’utiliser le terme de surmoi et de le définir précisément, Freud en a esquissé les contours en parlant de « conscience morale » des individus. Au fil du temps, de l’observation de ses patients et de sa pratique clinique, le psychanalyste autrichien a affiné sa réflexion. Le surmoi est à l’origine de nos interdictions internes et nous empêche d’assouvir nos pulsions sans tenir compte d’autrui. Il détermine, à ce titre, « notre aptitude à vivre avec les autres », affirme la psychanalyste Félicie Nayrou. Il s’imprègne à la fois des interdits universels – l’inceste, le cannibalisme… –, des interdits culturels propres à chaque civilisation – la nudité, les rituels alimentaires, religieux… – et des interdits parentaux. Impossible aussi de penser le surmoi sans ses deux acolytes que sont le ça et le moi.

Selon Freud, le surmoi est « sorti du ça, domine le moi et représente les inhibitions de la pulsion caractéristiques de l’homme ». Ça, moi et surmoi, ces trois instances définies par le psychanalyste structurent le psychisme de l’être humain. Le ça regroupe les pulsions de vie et de mort qui se combattent secrètement, inconsciemment, en nous. C’est le lieu de l’archaïsme, de la passion primitive que nous éprouvons pour notre père ou notre mère. Le moi est la partie « raisonnée », « rationnelle », organisée du ça. Il est sa projection dans le monde réel. Il comporte une partie inconsciente, mais met de l’ordre dans les pulsions en les adaptant à la réalité. Le surmoi, comme son nom l’indique, surplombe le moi. Il interdit les désirs venus du ça et, dit Freud, « présente les rapports les plus intimes et les plus étroits avec l’héritage archaïque de l’individu ». Le psychanalyste voit dans le surmoi et le ça des puissances clés de notre « monde intérieur ». C’est de ces rapports harmonieux ou pas entre les trois instances psychiques que découlent les équilibres et les déséquilibres humains.

Le surmoi, inné ou acquis ?

Le surmoi est acquis, il se construit avec le temps. Il est « l’héritier du complexe d’OEdipe », explique encore Freud. Le psychanalyste Vincent Estellon précise qu’il « s’érige sur l’interdit de l’inceste, celui de se rapprocher sexuellement de sa mère, de sa petite soeur ou de son frère. Il permet ainsi de mener à bien un travail de différenciations générationnelle et sexuelle : nous comprenons qu’un enfant et un adulte ce n’est pas la même chose, qu’un homme et une femme, non plus ». Ce premier tabou est d’abord formulé par les parents ou par ceux qui en font office. Ce sont eux qui vont faire exister ce « non » fondamental. Puis le socle de censure se solidifie. Les interdits imposés par les adultes sont petit à petit intégrés et intériorisés. Le poids à porter peut être lourd, car, détaille le psychanalyste Marie-Jean Sauret, « notre surmoi est le descendant du surmoi de nos parents ». En clair, nous transportons avec nous l’ensemble des interdits inconsciemment véhiculés dans et par notre famille.

Le surmoi, un bon juge ?

Tout dépend de l’histoire familiale, personnelle de chacun, et de la manière dont l’enfant puis l’adulte l’incorpore. Il n’est ni bon ni mauvais, il est juste notre loi intérieure. S’il régule nos rapports avec notre environnement, il peut aussi avoir des effets dévastateurs sur le psychisme quand il s’est mal construit. Selon Freud, chez les névrosés, le surmoi est susceptible d’engendrer la culpabilité, de les inhiber, de les torturer et de les tourmenter. Il alimente la dépréciation de soi chez les mélancoliques (ou chez les dépressifs), le sentiment d’angoisse chez les obsessionnels. Bref, il peut devenir une entité féroce transformant en bourreau de soi-même, réprimant des désirs qui ont été intériorisés comme étant interdits. À l’exemple de cette jeune fille qui se scarifie pour se punir de la transformation de son corps à la puberté et du fait qu’il devienne désirable. Ou de ce célibataire qui enchaîne les histoires sans lendemain sous l’emprise de l’alcool pour être sûr de rester seul. « Ce que veulent les humains, c’est aimer et se faire aimer, analyse Vincent Estellon. Dans ce dernier cas, un surmoi cruel vient intimer l’ordre d’échouer : le vrai partenaire, c’est le verre. L’alcool vient remplacer l’affect recherché, peut-être parce que se maintenir dans l’échec permet de protéger un parent, un frère, une soeur ou quelqu’un que l’on a passionnément aimé. »

Quelle est la fonction du surmoi ?

Le surmoi définit les limites indispensables à l’équilibre affectif et psychique. Il fait office de rempart salutaire contre les poussées pulsionnelles qui nous agitent dès la naissance. Celles-ci sont de deux ordres, détaille Freud : pulsions de vie (éros) et pulsions de mort (thanatos). Les premières relèvent de l’amour, de la sexualité, de tout ce qui nous remue ; les secondes ont trait à la tentation de la destruction et en même temps à la conservation, au désir que rien ne bouge. Nous oscillons en permanence entre ces deux grandes tendances, qui, si elles ne sont pas disciplinées, nous mènent au chaos. Félicie Nayrou est convaincue qu’« un surmoi de bonne qualité joue un rôle protecteur. Il se constitue peu à peu par les limitations à la toute-puissance de l’enfant qui lui permettent d’être en relation avec l’autre. C’est à la phase oedipienne, vers 4 ou 5 ans, que cette instance est vraiment constituée – l’accalmie pulsionnelle donnant l’occasion à l’enfant d’apprendre. Et, plus tard, à l’adolescence, elle aide à négocier la poussée sexuelle, à ne pas être submergé par elle, à ne pas commettre d’actes agressifs pour obtenir satisfaction ». Ce surmoi de « bonne qualité » permet, d’après la psychanalyste, de « substituer à la jouissance instantanée de la décharge pulsionnelle les bénéfices de la culture, les avantages de la sublimation, le détournement de l’énergie sexuelle vers la créativité artistique, la réflexion intellectuelle ».

Le surmoi est-il changeant ?

Heureusement ! Marie-Jean Sauret raconte : « Parfois, des patients me disent qu’ils vont partir très loin de leurs parents pour enfin pouvoir leur échapper. Mais ils ne se rendent pas compte que “grâce” à leur surmoi, ils emportent papa-maman partout avec eux ! Dans la psychanalyse, nous tentons précisément de faire bouger les lignes quand elles emprisonnent et suscitent trop de souffrances. » Même si le surmoi hérité de nos parents est pétri d’interdits nocifs, même s’il s’est construit sur les ruines d’un complexe d’Œdipe mal ou pas résolu – nous continuons à aimer papa ou maman tout en nous détestant pour cela –, la situation n’est jamais désespérée. Le surmoi bouge. Il interagit avec l’environnement extérieur. « Il est dynamique, rassure Vincent Estellon. Il se nourrit des identifications successives et complètement inconscientes à des êtres que nous admirons, idéalisons : un oncle, une tante, une grand-mère, puis un camarade de sport, de travail, un professeur de piano, de philosophie, un nouvel amour… » Nous nous imprégnons de leurs traits et nous nous approprions aussi leurs limites. Ce qui peut nous permettre de tracer de nouvelles frontières intimes, moins destructrices et culpabilisantes.

surmoi, ideal du moi: instance psychique, structure psychologique de l'inconscient (Freud).

Précisions :

    "Moi", "Surmoi" et "Idéal du Moi" sont des concepts Freudiens;

Instances (rappel) :

- Systèmes, parties de l'appareil psychique d'après la conception Freudienne.

- Il y a ainsi 3 parties ou instances qui sont le Moi, le ça et le Surmoi. L'instance première est le ça. En sont issus dans un premier temps le Moi, formé grâce au contact avec la réalité extérieure, puis le Surmoi introjecté par le Moi qui fait se retourner l'énergie pulsionnelle contre lui-même. A la rencontre du ça et du Surmoi (ainsi que son "pendant" plus élaboré qu'est l'Idéal du Moi) se trouve le Moi.

ça : intérêts pulsionnels.

Surmoi : intérêts extérieurs.

Idéal du Moi : intérêts narcissiques.

Moi : intérêts de la totalité de la personne.

Introduction à la deuxième topique

Dans la théorie psychanalytique, la première topique définit trois systèmes: l'Inconscient, le Préconscient et le Conscient ayant chacun sa fonction et son type de processus. Sigmund Freud aborde dans une deuxième topique les rapports entre les 3 instances que sont le ça (pôle pulsionnel), le Moi (intérêt de la totalité de la personne, raison + narcissisme) et le Surmoi (agent critique, intériorisation des interdits et des exigences).

Pour expliquer l'ensemble des processus mentaux, Sigmund Freud en viendra à rajouter l'Idéal du Moi (modèle de référence très investi narcissiquement, et que la personne espère égaler). Il pourra alors décrire les principaux phénomènes psychiques en termes de conflits. La deuxième topique révèle mieux la façon dont le sujet se construit, et se perçoit. Dans l'ambivalence par exemple, il y a un conflit créé par la dualité pulsionnelle à l'intérieur d'un même système, le ça. L'Oedipe est un conflit qui oppose le ça et le Surmoi. La sublimation quant à elle permet à la fois la satisfaction du Moi et la satisfaction des revendications pulsionnelles du ça... etc.

Description dynamique de l'appareil psychique réunissant les 2 topiques

Émergence du Surmoi (au stade phallique, vers 4 ans)

Avec la résolution du conflit Oedipien, une partie de la personnalité de l'enfant va assumer les interdits du parricide et de l'inceste, ainsi que l'identification au parent du même sexe que lui. C'est le Surmoi, héritier de l'Oedipe. C'est l'intériorisation des interdits et des exigences parentales et sociales, le censeur du futur adulte. Une fois formé, le Surmoi va remplacer les parents dans la vie sociale. Il rentrera continuellement en conflit avec les pulsions, et entraînera la culpabilité.

Le Surmoi est l'instance refoulante, le support de tous les interdits et des contraintes sociales et culturelles. Son activité est partiellement inconsciente. Héritier du complexe d'Oedipe, il se constitue par intériorisation des exigences et interdits parentaux. L'enfant renonce au désir incestueux grâce à la fonction séparatrice du père, puis la découverte des règles sociales sous la pression de l'instance refoulante: le Surmoi.

Psychopathologie

    Le Surmoi du pervers est resté au stade pré-Oedipien, c'est à dire qu'il retient le sujet au niveau des interdits du stade anal (ou oral) mais n'a pas de loi de type social. Car les lois sociales naissent de la confrontation Oedipienne;

    Le Surmoi du névrosé est par-contre plus tyrannique, plus culpabilisant. Le névrosé fantasme là où le pervers agit;

    ... etc.

Émergence de l'idéal du Moi

C'est un modèle auquel le sujet cherche à se conformer, résultat de l'identification aux parents idéalisés. L'idéal du Moi est une instance qui accompagne le processus de socialisation, tout au long de la formation de la personnalité. C'est aussi le substitut de la toute-puissance de l'enfant (de "je peux tout" à "je voudrais tout pouvoir") pour la construction de son Moi. Le Moi se compare et se construit par rapport à un idéal, à une référence permettant au sujet de se dépasser. Cet idéal personnel se forme progressivement au cours de l'enfance par identification aux personnes proches (souvent les parents) aimées et admirées. Cette instance psychique est consécutive à l'identification Oedipienne, et relève du symbolique.

Ne pas confondre avec le "Moi idéal", qui n'est pas le substitut mais l'idéal d'une toute-puissance narcissique, avec identification à des personnages fabuleux ou prestigieux. Le Moi idéal ne propose pas de modèle accessible pour le processus de socialisation. C'est le Moi qu'on se construit dans le stade du miroir, celui qui relève de l'imaginaire.

INCONSCIENT

ÇA / MOI / SURMOI / IDÉAL DU MOI

Idéal du Moi: "tu dois", "tu devrais".

Surmoi: "tu ne dois pas". Ce sont les interdits, la loi, les limites...

CONSCIENT
Moi: pôle défensif de la personnalité construit avec les exigences du ça et les interdits du Surmoi face au réel.

INCONSCIENT
ça: pôle pulsionnel. Besoin de satisfaire immédiatement les pulsions. Principe de plaisir.

Le Surmoi et l'agressivité

L'agressivité du ça a été progressivement transformée par le Moi en Surmoi. L'origine de l'agressivité est pulsionnelle. Elle est la résultante d'un mécanisme de défense du Moi: la projection de la pulsion de mort sur le mauvais Objet. Elle est liée par la libido pour la préservation du Moi (sexualité, reproduction, défense du territoire, emprise sur le monde, affirmation de soi...). Elle est sublimée, déplacée. Elle contribue, au sortir de l'Oedipe, à la formation du Surmoi.

Avant l'Oedipe, l'agressivité s'exprimait à travers la projection, le clivage... Après l'Oedipe elle sera sublimée et s'exprimera en partie sous le contrôle du Surmoi.

Le Surmoi et l'angoisse

L'angoisse est liée à la pulsion. Un excès de tension crée une surcharge d'énergie qui ne peut se libérer et provoque l'angoisse. L'angoisse est secondaire à la non-utilisation de l'énergie.

    1ère théorie Freudienne: l'angoisse est liée à une perte de la représentation;

    2ème théorie Freudienne: l'angoisse est le résultat d'un conflit entre le ça et le Surmoi, le ça et le Moi ou le Surmoi et le Moi. C'est le Moi qui vit l'angoisse, comme un signal d'alarme émit par lui face à un désir incompatible. L'angoisse a une fonction d'auto- conservation.

Le rôle du Surmoi dans les mécanismes de défense

Les mécanismes de défense sont des processus élaborés par le Moi sous la pression du Surmoi et de la réalité extérieure, et permettant de lutter contre l'angoisse. Ces mécanismes psychiques préservent le Moi et le protègent aussi des exigences pulsionnelles du ça. Mais ce dont le Moi se protège en priorité, c'est de l'angoisse.

Par exemple, une représentation inconsciente va être incompatible avec les exigences du Surmoi. Cette représentation inconsciente du ça apporte du plaisir mais provoque aussi du déplaisir. Le Moi, pour se défendre contre cette représentation, va utiliser divers procédés que l'on réunit sous le terme de "mécanismes de défense du Moi".

Le Conscient accède à l'inconscient comme les organes des sens accèdent à la réalité extérieure. Il y a eu constitution d'un "grenier" où sont engrangées toutes les informations vécues. L'individu peut faire appel à un moment précis à ces vécus. Ces faits sont dits "refoulés". Le refoulement est un mécanisme de défense. Tout ce qui est refoulé devient inconscient mais l'inconscient n'est pas constitué que de cela. Il y a aussi des contenus innés qui ne sont jamais passés par la conscience. L'inconscient obéit aux processus primaires que sont le déplacement (changement d'Objet) et la condensation (plusieurs Objets en un). Ces deux processus primaires obéissent au principe de plaisir. Les désirs sont mobiles et essaient de s'extérioriser, provoquant le refoulement.

Le refoulement est un filtre incité par le Surmoi et opéré par le Moi. Le symptôme est le produit du refoulement qui consiste en un retour du refoulé sur le plan somatique. Il sert à échapper à l'angoisse. Il est le substitut d'une satisfaction pulsionnelle qui n'a pas eu lieu. Ce qui aurait du être plaisir devient déplaisir.

Le destin définition philosophique. Faut-il croire au destin ?
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Le destin : définition philosophique et spirituelle. Sommes-nous soumis à un destin ? Faut-il croire au destin ? Peut-on forcer le destin ?

Dans la mythologie grecque, les Moires (ou les Parques chez les Romains) étaient les trois divinités du destin, à savoir Clotho, Lachésis et Atropos. Filles d’Ananké, déesse de la Nécessité, elles tissent le fil de la vie, le déroulent et le coupent. La production du destin est donc associée au travail de filage.

Se poser la question du destin, c’est s’interroger sur la vie elle-même, et plus précisément sur sa direction et son sens.

En général, le destin renvoie à une force supérieure qui détermine les événements de notre vie, selon un schéma difficile à connaître et à changer.

Le destin serait donc par nature inéluctable : toute tentative de le contourner serait illusoire. Le destin est alors synonyme de sort, de fatalité. Mais ça n’est pas la seule manière d’aborder le destin.

Tentons d’aborder le mécanisme du destin et sa définition philosophique.

Lire aussi notre article : Le devenir en philosophie : définition et implications.
Le destin : définition philosophique.

Définition : Le destin est l’avenir d’un être humain ou d’un groupe humain. Le destin renvoie aussi aux forces qui œuvrent à ce qui fera demain : instance supérieure, causes naturelles, hasard…

Ainsi, selon les cas, le destin est :

connu (“je sais que c’est mon destin”),
ou au contraire inconnaissable (que va-t-il m’arriver ?),
inéluctable (fatalité),
ou au contraire évitable grâce à la volonté de l’individu lui-même (libre-arbitre).

La mécanique du destin.

L’être humain a toujours cherché à connaître la mécanique du destin.

Il le voit :

soit comme une force supérieure, inconnue et mystérieuse, décidant par sa propre volonté et de manière arbitraire du cours des choses et des existences. Cette force est, selon les différentes croyances : le “destin” lui-même, Dieu, Satan, les astres ou encore des entités spirituelles luttant entre elles,
soit comme le résultat du hasard : le destin serait la rencontre de différentes circonstances, événements et coïncidences. L’individu serait plus ou moins chanceux selon que son destin lui est favorable ou défavorable,
soit comme le fruit de la décision libre de l’individu, selon son jugement intime et ses choix,
soit comme un enchaînement logique de causes : chaque individu serait le résultat d’un ensemble de causes et d’influences (la génétique, les prédispositions, l’éducation, l’héritage social et culturel, le vécu, la psychologie, les relations, etc) : ces causes expliqueraient et détermineraient directement le destin de chacun.

Cette dernière vision, “déterministe”, semble a priori la plus raisonnable. Elle permet d’écarter les superstitions et invite à comprendre les causes profondes de ce que nous sommes, en évacuant la peur et le jugement.

Mais la compréhension de soi-même et du monde ne sera jamais suffisante pour prévoir l’avenir et prendre son destin en main, sachant que le “hasard” peut provoquer à tout moment un événement inattendu, bouleversant tout ce qui semblait compris ou acquis.

D’autre part, rien ne prouve l’existence d’une force supérieure qui régirait l’évolution du monde dans son ensemble. Mais rien ne prouve non plus son absence…
Le destin : définition en religion et en philosophie.

Voici quelques approches du destin en religion et en philosophie :

Les stoïciens ont développé une vision déterministe voire fataliste de l’Univers, affirmant que le destin serait une succession de causes produisant des conséquences inéluctables. Ainsi, “toute chose arrive selon le destin”,
Dans le bouddhisme et l’hindouisme, le karma désigne l’enchaînement causes-conséquences des actes qu’un être non-éveillé a accompli durant sa vie et au cours de toutes ses vies antérieures, et qui déterminent sa destinée,
Dans l’Islam, le destin est présent sous la forme d’un fatalisme, tout événement étant inconditionnellement fixé par la volonté de Dieu,
Depuis saint Thomas d’Aquin, le catholicisme est dominé par le principe du libre-arbitre, c’est-à-dire la capacité de l’individu à décider du cours de sa vie,
Enfin, le protestantisme, en particulier le calvinisme, s’est développé sur l’idée que Dieu aurait prédestiné à l’avance certains individus à la béatitude, et d’autres à la damnation.

Faut-il croire au destin ? Peut-on s’écarter de son destin ?

L’homme moderne a l’impression d’être libre de son destin, oubliant qu’il est le résultat d’un grand nombre d’événements et de causes passées, dont il n’est en réalité pas conscient.

En effet, chaque individu est le résultat d’un enchaînement causal : il semble donc impossible de s’écarter de son destin pour la simple et bonne raison qu’il est impossible d’agir sur ses causes. Le libre-arbitre ne serait donc qu’une illusion, tous mes choix étant déterminés entre autres par mon éducation, ma culture, ma personnalité, mes gènes ou ma psychologie.

Pourtant, ce serait oublier que l’individu est aussi, pour une part, la cause de lui-même. Par le mécanisme de la conscience, l’être humain a la possibilité de prendre du recul par rapport à ce qu’il est. Il peut tenter de mieux comprendre son fonctionnement intime, se libérant ainsi de ses préjugés et de ses réflexes psychologiques.

L’analyse des causes est donc un chemin d’épanouissement et d’acceptation, en ce sens qu’il permet de se réconcilier avec soi-même et avec son histoire. Il ne s’agit pas de nier son destin ou de le rejeter, mais plutôt de le comprendre et de l’accepter.

Et si on laissait faire le destin ? Voir notre article sur le non-agir de la philosophie taoïste.
Le progrès : destin de l’humanité ?

En conclusion, tout individu est le résultat d’un enchaînement causal qu’il est difficile de dépasser, même en en faisant l’analyse détaillée. Mais l’individu est libre d’accepter son destin, et si tel est le cas, il ne le percevra plus comme un problème ou un danger.

Le vrai destin de l’être humain ne serait-il pas de progresser sur le chemin d’une meilleure connaissance de lui-même, des autres et du monde ? Lire notre article sur la loi du progrès.

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Pablo Servigne nous parle de l'entraide | Cap sur l'écovolontariat
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Pablo Servigne se définit comme collapsologue et chercheur in(Terre)dépendant. Ingénieur agronome et docteur en biologie, il est connu pour avoir écrit avec Raphaël Stevens « Comment tout peut s’effondrer, petit manuel de collapsologie à l’usage des générations présentes». Un ouvrage synthétisant les travaux de plusieurs chercheurs, qui envisage très sérieusement l’effondrement de notre civilisation dans un futur proche. Les auteurs y démontrent que le réchauffement climatique, le pic pétrolier, la raréfaction des énergies fossiles, le système financier hors sol, la mondialisation et la consommation sont autant d’ingrédients d’un monde complexe et interconnecté nous exposant à un effondrement systémique mondial. Une première dans l’histoire de l’humanité.

En même temps qu’il prenait conscience que la trajectoire de notre civilisation n’était pas viable, Pablo Servigne s’interrogeait sur le bouleversement que ce message, difficile à accepter, provoquait. Très vite, c’est alors posée la question du comment vivre avec ces mauvaises nouvelles. Les crises à venir vont-elles provoquer la guerre, un monde sans pitié à la Mad Max ? Ou, au contraire, vont-elles faire resurgir l’altruisme et la solidarité ?

Depuis l’écriture de « Comment tout peut s’effondrer », en 2015, Pablo Servigne a co-écrit d’autres ouvrages permettant d’apporter matière à réflexion sur le monde de demain : « Une autre fin du monde est possible » sorti en octobre 2018 et « L’entraide l’autre loi de la jungle » publié en 2017.

C’est pour nous parler de ce dernier ouvrage, que ce chercheur passionné par le thème de l’entraide était invité au salon Marjolaine, vendredi 9 novembre 2018.
Plongée au coeur de l’entraide

Pablo Servigne commence sa conférence en évoquant le buzz de certaines vidéos Yutube où des animaux s’entraident, parfois entre différentes espèces. Puis il ajoute : « Ce qui me fascine c’est de voir qu’on est fasciné par ces vidéos. » Notre imaginaire est plutôt habitué aux images du plus fort qui mange le plus faible. « On parle de la loi de la jungle comme d’un monde sans pitié. Or, avec Gauthier Chapelle, nous avons fait un tour d’horizon des recherches en cours, et nous avons trouvé de l’entraide à de nombreux niveaux ».
Au fil du discours de Pablo Servigne, le public découvre un monde tel que nous ne l’imaginions pas, tout du moins pour le néophyte. La forêt n’est plus un lieu de compétition à la recherche de la lumière, mais un système d’échanges et de coopération où les arbres les plus robustes alimentent en sucres des espèces plus faibles. La coopération avec les bactéries est également primordiale. Il existe des bactéries qui transforment l’azote contenu dans l’atmosphère en nitrates (Ndlr : comprenez engrais par nitrates). Ces mêmes bactéries trouvent refuge dans des racines. « Nous ne disons pas que la compétition n’existe pas, mais que l’altruisme est partout », souligne Pablo Servigne. Et de continuer « C’est merveilleux ce que l’on a découvert, cela a bouleversé notre façon de voir le monde. Depuis 3,8 milliards d’années, l’entraide est partout, tout le temps. »
Et l’être humain dans tout ça ?

« Déjà, le fait de nommer la nature montre que l’on en est séparé », explique Pablo Servigne. Pourtant nos liens aux autres espèces n’est plus à prouver, à commencer par notre interdépendance avec les bactéries. Nous hébergeons 100 000 milliards de micro-organismes sans lesquels nous ne pouvons pas vivre. « Nous sommes notre corps plus les bactéries », précise Pablo Servigne. Parmi les différentes espèces, homo sapiens sapiens est la plus sociable. « L’humain est au stade de l’ultra socialité. Nous sommes devenus sociable car bébé, nous sommes très vulnérables et dépendants d’un clan sans lequel nous ne survivons pas. » La solidarité humaine se glisse partout, même si nous l’avons perdu de vue. La Sécurité Sociale en est une forme, par exemple.
L’entraide dans les catastrophes

Des études ont démontré que le « chacun pour soi » en cas de catastrophe n’était qu’un mythe.
En 2005, lors de l’ouragan Katrina à la Nouvelle Orléans, le chef de la police a fait croire qu’il y avait des meurtres et des pillages pour favoriser l’envoie de policiers sur les lieux. Plus tard, ce chef de la police a avoué qu’il avait menti et les témoignes ont montré qu’il y avait eu beaucoup de solidarité entre les gens. Le premier réflexe en cas de catastrophe c’est l’entraide. « Les pénuries et les milieux hostiles favoriseraient l’entraide », souligne Pablo Servigne en insistant sur le fait que ceux qui survivent sont ceux qui coopèrent le plus et non le plus fort.
Pourquoi la population a cru le policier ? Parce que nous avons été élevés dans le mythe d’une loi naturelle sans concession où seuls les plus forts survivent.
Un monde de bisounours ?

Pablo Servigne nous décrirait-il un monde bisounours ?
Malheureusement, les êtres peuvent s’entraider pour faire la guerre. Et si l’entraide est le premier réflexe dans une catastrophe, c’est dans un second temps que la violence peut s’installer.
Alors, qu’est-ce qui va déterminer l’émergence de la violence ou de la solidarité ?
Cette question, complexe, n’a pas de réponse figée. Toutefois, le co-auteur de « L’entraide l’autre loi de la jungle » propose des pistes de réflexion notamment sur la puissance des histoires que les êtres humains se racontent sur leur propre destinée.
Il invite à repenser notre façon de voir le monde et les récits que les sociétés se racontent. « Notre imaginaire peut provoquer la violence comme l’entraide. » Dans une culture de l’égoïsme avec comme mythe celui de la loi du plus fort, vous allez vous méfier de votre voisin. Vous allez peut-être construire un mur. Le voisin, vous voyant ainsi agir, va également construire son mur.
Pour Pablo Servigne, il faudrait changer d’imaginaire, se raconter une autre histoire, différente de celle d’un monde compétitif et sans pitié, afin de mieux vivre les tempêtes à venir. « Nous avons deux jambes, celle de l’entraide et celle de la compétition. Le problème, c’est que la première est complètement atrophiée. Il est temps de redevenir compétent en altruisme et solidarité. Il existe trois ingrédients indispensables pour maintenir l’entraide dans un groupe :
– Le sentiment de sécurité ;
– Le sentiment d’égalité et d’équité. L’inégalité est hautement toxique.
– Le sentiment de confiance : L’entraide produit de l’entraide. »

Cette conférence, qui a débuté sur la coopération entre espèces dans une forêt, s’est terminée sur des sujets sociaux comme la toxicité d’une société inégalitaire. A la fin, un auditeur a posé la question suivante : « Et la politique dans tout ça ? Vous n’en parlez pas ? »
« Effectivement, la question politique est centrale dans ce sujet. Ça va venir… », a conclu Pablo Servigne.

Bibliographie
« Comment tout peut s’effondrer. Petit manuel de collapsologie à l’usage des générations présentes : de Pablo Servigne et Raphael Stevens. 2015
– « L’entraide l’autre loi de la jungle » de Pablo Servigne et Gauthier Chapelle. 2017
– « Une autre fin du monde est possible » de Pablo Servigne Gauthier Chapelle et Raphael Stevens. 2018

L’entraide et la coopération bien présentes dans la nature
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Comme le champignon et l'algue forment ensemble le lichen, et que le lichen, à son tour, s'accroche aux rochers et aux troncs, la mésange et la sittelle collaborent également pour se nourrir en forêt et se déplacer en toute sécurité. Selon Michel Leboeuf, biologiste, il est faux de croire que la loi de jungle se résume à la compétition entre espèces. Au micro de Catherine Perrin, il donne d'autres exemples d'entraide profitable entre espèces.

La coopération fait plus pour l’évolution que la compétition
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La coopération fait plus pour l’évolution que la compétition

Et si l’homme n’était pas un loup pour l’homme ? Et si la loi du plus fort n’était pas la loi de l’évolution ? Et si l’entraide en était le vrai moteur ? Voilà quelques-unes des questions auxquelles répond « L’Entraide », le livre majeur du penseur anarchiste russe Pierre Kropotkine.

L’entraide, facteur d’évolution. Avec un titre pareil, on pourrait s’attendre à un bouquin ennuyeux comme la pluie, réservé aux personnes qui connaissent par cœur le nom des plantes et des animaux en latin. Pourtant, ce livre de Pierre Kropotkine, prince russe, géographe et théoricien de l’anarchisme, est un livre accessible, stimulant et combatif.

Paru en 1902, il vient tordre le cou à la pensée, majoritaire à son époque (et toujours aujourd’hui), selon laquelle le règne animal est une arène où il faut vaincre ou mourir, une jungle où la seule règle qui compte est la loi du plus fort. Kropotkine ne nie pas l’existence de la compétition, notamment entre les espèces, mais contrairement aux darwinistes, il lui dénie son caractère systématique et son rôle central dans l’évolution.

Et il multiplie les exemples pour étayer sa position : des fourmis qui partagent la nourriture à demi digérée à tout membre qui en fait la demande ; des chevaux qui, pendant le blizzard, se collent les uns aux autres pour se protéger du froid ; des pélicans qui, chaque jour, parcourent 45 km pour aller nourrir un des leurs aveugle ; des abeilles qui, grâce au travail en commun, « multiplient leurs forces individuelles [et…] parviennent à un niveau de bien-être et de sécurité qu’aucun animal isolé ne peut atteindre ». Partout ou presque où Kropotkine a pu jeter son regard, il y a trouvé de la coopération. Même des animaux aussi belliqueux que les rats s’entraident pour piller nos garde-manger et nourrissent leurs malades, écrit-il.

S’appuyant sur ses observations et lectures scientifiques, Kropotkine affirme que l’entraide assure aux animaux une meilleure protection contre les ennemis, une meilleure efficacité dans la recherche de nourriture et une plus grande longévité. Attribuer le progrès à la lutte du chacun contre tous, analyse-t-il, est une grossière erreur. La coopération a fait bien plus pour le développement de l’intelligence que les combats, qui laissaient les espèces affaiblies et ne leur laissaient que peu de chance de survie et encore moins d’évolution positive.
Une contre-histoire de l’humanité

Partant du constat (erroné) que la compétition est dominante dans le règne animal, la plupart des intellectuels de cette époque ont décidé d’en faire une loi naturelle chez les humains, justifiant ainsi les inégalités et la pauvreté. Refusant cette fable, qu’on appelle « darwinisme social », Kropotkine nous livre une contre-histoire de l’humanité. Pas celle des grands hommes et de leurs luttes pour le pouvoir et le prestige, mais celle des masses de paysans, de nomades et de prolétaires qui luttent ensemble pour faire face aux différents défis posés par l’existence. Dans ce livre, il nous raconte l’histoire de ceux dont se fiche l’Histoire. Et ça fait un bien fou.

Qu’il parle du « communisme primitif » des tribus préhistoriques, des communes villageoises, des cités médiévales et de leurs puissantes guildes ou des associations de travailleurs, il décrit avec simplicité des pratiques d’entraide aussi répandues chez nos aïeux que méconnues aujourd’hui. Le travail collectif, la propriété commune des terres et le fait que rien ne pouvait se décider sans l’accord de l’assemblée étaient des caractéristiques partagées par la plupart des sociétés qu’il évoque. On découvre les trésors d’ingéniosités inventés depuis des millénaires pour lutter contre les inégalités et faire que les conflits ne dégénèrent pas en règlements de comptes violents, voire en guerre. Greniers communs, ventes groupées, caisses d’entraide pour la maladie ou les grèves, jurys populaires et droit coutumier… On y apprend comment, avant la Sécurité sociale, le Code civil et les supermarchés, les humains s’organisaient pour faire face à la nature hostile mais aussi pour « se protéger des habiles et des forts ».

Et l’entraide dont parle Kropotkine ne se limite pas à quelques individus isolés mais à des groupements de familles, de villages, de tribus rassemblées en confédération de parfois plusieurs dizaines de milliers de membres. L’humanité qu’il décrit a confiance en sa capacité d’autodétermination. Ou plutôt avait confiance. Car, si les communautés humaines se sont longtemps méfiées des petits chefs, Kropotkine estime que le travail de sape de l’Église et de certains intellectuels ont eu petit à petit raison de notre goût pour l’insoumission et l’autogestion. « Bientôt aucune autorité ne fut trouvée excessive […]. Pour avoir eu trop de confiance dans le gouvernement, les citoyens ont cessé d’avoir confiance en eux. »
La colonisation de nos imaginaires

Ce livre est plein de surprises et d’apprentissages, abondamment sourcé, et plaisant à lire. Un siècle après sa sortie, il garde toute sa pertinence, d’un point de vue scientifique mais aussi politique (comme l’explique le très bon livre de Renaud Garcia sur le sujet). Dans la préface, Pablo Servigne (coauteur d’un ouvrage qui prolonge le travail commencé par L’Entraide), fait remarquer que les travaux de Kropotkine ont été jusqu’à récemment ignorés par les scientifiques et commencent seulement à être pris au sérieux. Pas trop tôt ! Car ce vieux bouquin nous est utile pour tenter de résoudre un des paradoxes de notre époque : le capitalisme réussit l’exploit de nous apparaître à la fois détestable et nuisible, mais… indépassable. Nos imaginaires sont tellement colonisés que l’on peine à imaginer un monde sans État, sans flic, sans actionnaire, sans salariat et sans banque.

Le savant russe nous rappelle que nous n’avons pas toujours été les êtres de calcul, cupides et soumis que nous sommes aujourd’hui. Sans nier que l’histoire humaine est aussi faite de violences et de dominations, il nous donne à voir une humanité partageuse, inventive et rebelle. Il prouve ainsi que le capitalisme et l’État ne sont ni naturels ni éternels et que d’autres formes d’organisation, basées sur l’entraide et l’autogestion, sont possibles. À nous maintenant de les faire (re)vivre.

Collectif, coopération, empathie : la face cachée de la nature | Espace Mendès France : culture & médiation scientifiques
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« La Loi de la Jungle », nous connaissons tous le sens de cette maxime. Dans la nature la loi c’est le primat du fort sur le faible. La théorie de la sélection naturelle de Darwin fut rapidement, et de nombreuses fois dévoyée afin de justifier l’égoïsme, la violence, et de terribles théories et pratiques telles que le darwinisme social ou l’eugénisme. De son vivant, Darwin tenta de s’opposer aux réinterprétations de sa théorie de la « survie du plus apte » mais rien n’y fit. Aujourd’hui, comme au milieu du XIXe siècle, notre vision de la nature demeure ce miroir qui nous confirme que vivre c’est lutter les uns contre les autres.
À travers la présentation de nombreux exemples au sein des mondes animal et végétal, une autre image de la nature se dessine, loin des poncifs éculés de la Loi de la Jungle. Ainsi des bactéries aux grands singes, en passant par les crevettes et les fourmis, nous verrons que l’entraide, la coopération et l’existence des groupes solidaires sont aussi des aspects majeurs de la vie sur Terre, et de son évolution.
Les avancées en biologie et en zoologie comportementale nous permettront de commencer à dévoiler ce continent inconnu qui se dresse devant nous : l’intelligence et l’émotion animale. Ces découvertes récentes nous obligent à repenser les différences entre l’Homme et l’animal pour mieux les effacer et ainsi mieux appréhender l’évolution et l’existence de nos propres émotions et de notre intelligence singulière au sein du règne animal.
Cette vision actualisée de la biologie, du comportement animal et des relations au sein et entre les espèces permet d’éclairer d’une lumière nouvelle nos pratiques sociales, économiques et politiques. Si la « loi de la Jungle » ne rime pas uniquement avec compétition, mais aussi avec altruisme, alors que penser de nos sociétés actuelles ? Aujourd’hui de nombreuses personnalités tentent d’interpeller les politiques comme le grand public sur la nécessité de cultiver et de valoriser l’altruisme dans une société toujours plus concurrentielle.

Thème : faire soi-même
L’autogestion, une organisation du travail comme une autre ? | Territoires innovants en Économie sociale et solidaire liaison et transferts
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L’autogestion, une organisation du travail comme une autre ?

Quand on parle d’autogestion au travail, on imagine fréquemment un discours très militant, des débats à n’en plus finir, des prises de décisions épuisantes… bref, quelque chose de peu efficace quand on veut gérer un organisme ou une entreprise et être viable économiquement. Pourtant, l’autogestion pose des questions importantes sur notre rapport au travail et sur la démocratisation de l’économie. De nombreuses organisations, qu’elles soient des entreprises privées, des organismes à but non lucratif (OBNL) ou des coopératives, s’intéressent de près à ce mode d’organisation. Pour les fins de rédaction de ce billet, des entrevues ont été réalisées avec le Réseau COOP et des organisations qui mettent en pratique l’autogestion : Caligram, Niska et Percolab.

  • Qu’est-ce que l’autogestion ?

L’autogestion, au sens littéral, c’est la « gestion par soi-même ». Historiquement, de nombreuses ressources naturelles étaient autogérées.

Pour ne citer que l’une des plus connues, les terres agricoles anglaises étaient gérées collectivement par et pour les paysans jusqu’au XVe siècle. Le mouvement des enclosures y a mis fin en privatisant et en clôturant les parcelles de terre au profit d’une agriculture intensive.

L’autogestion est définie par Cyrille Ferraton comme le fait de donner aux travailleurs la gestion de la production et la répartition de la richesse[1]. Pour Victor Fay, elle « implique la disparition des distinctions entre dirigeants et dirigés, donc la possibilité pour les individus de s’organiser collectivement tant dans la vie sociale que dans l’appareil productif[2]. »

Pour Nathalie Fereira[3], « l’autogestion est avant tout un concept économique et social, c’est-à-dire un mode de gestion et surtout une forme d’organisation du travail engendrée par les crises du système capitaliste […] Les principes sur lesquels elle repose sont essentiellement la démocratie dans les prises de décisions, l’autonomie de gestion et la primauté des travailleurs sur le capital dans la répartition des revenus. »

À travers ces définitions, on observe la proximité entre autogestion et économie sociale. Historiquement, une partie du mouvement de l’économie sociale et solidaire s’y est d’ailleurs identifié. Les entreprises autogérées partagent avec l’économie sociale une proposition de démocratisation de la société qui dépasse la sphère politique et s’applique aux sphères économique et entrepreneuriale.

  • Gouvernance démocratique et autogestion

Il faut distinguer la gouvernance et la gestion. La gouvernance renvoie aux mécanismes de prises de décision concernant la vision et les grandes orientations. En économie sociale, la gouvernance démocratique est l’une des valeurs fondatrices et elle peut interpeler différentes parties prenantes (travailleurs, producteurs, utilisateurs, consommateurs, membres de soutien, etc.). La gestion, quant à elle, se concentre davantage sur la mise en place de ces décisions et sur l’organisation du travail. Elle fait référence principalement aux travailleurs. L’autogestion c’est donc de pouvoir décider de l’organisation du travail. Ceci ne signifie pas nécessairement qu’il n’y aura pas de division du travail

Bien qu’il s’agisse de deux choses distinctes, la gouvernance peut orienter le modèle de gestion. Les « bonnes pratiques » en économie sociale mettent souvent de l’avant des outils et des conseils pour une gestion participative ou aplanie. Toutefois, il est possible de respecter le principe de gouvernance démocratique sans que les travailleurs participent à cette gouvernance et vice-versa. Des principes d’autogestion ou de gestion participative peuvent être instaurés sans que les travailleurs soient impliqués dans la gouvernance, voire que celle-ci ne soit pas démocratique.

  • L’autogestion ici et ailleurs

    Dans certains pays, l’autogestion est étroitement liée à l’économie sociale. C’est le cas notamment au Brésil où le Secrétariat national d’économie solidaire (SENAES) intègre l’autogestion dans sa définition des initiatives économiques[4].

En Argentine, dans un contexte de crise économique, des travailleurs se sont auto-organisés pour reprendre les rênes des entreprises et ainsi éviter une fermeture brutale. Les premiers cas sont survenus au début des années 90 et ne cessent de croître. En 2016, on dénombrait 367 entreprises argentines récupérées comptant près de 16 000 travailleurs[5]. Dans ce cas, la volonté de s’émanciper de structures hiérarchiques n’était pas la première motivation des travailleurs, davantage engagés dans la préservation de leur emploi.

Au Québec, économie sociale et autogestion semblent moins interdépendantes. Les coopératives de travail se rapprochent de ces entreprises autogérées par leur finalité de créer ou de maintenir du travail pour leurs membres. Néanmoins, leur mode de gestion n’est pas nécessairement celui de l’autogestion, bien qu’elles y soient souvent plus sensibles.

Certains collectifs s’inspirent et mettent en pratique l’autogestion, c’est notamment le cas du Bâtiment 7 qui l’intègre dans sa mission : « Autogérer une propriété collective enracinée dans l’histoire populaire du quartier […] Pratiquer un mode de gestion démocratique horizontal et inclusif.[6] »

  • Des motivations à plusieurs niveaux

L’autogestion au Québec semble faire partie des concepts à la mode. Des réseaux et des acteurs de l’accompagnement de l’économie sociale, comme le Réseau COOP[7], observent qu’il y a davantage d’organisations favorables à la mise en place de l’autogestion. Comment expliquer ce regain d’intérêt ? Il peut s’expliquer de deux points de vue : celui des travailleurs et celui des organisations.

  • Les motivations des travailleurs
    Certaines motivations énoncées par les personnes rencontrées sont directement liées à l’organisation du travail : « je voulais être dans un environnement de travail horizontal où je pourrais participer et apporter ma contribution à tous les aspects, planification, idéation… » « J’aspirais à plus de liberté et d’autonomie dans mon travail. »

Pour certains travailleurs, les motivations sont aussi politiques. Lors des entrevues, plusieurs ont insisté sur l’importance de s’émanciper d’une socialisation qui met de l’avant une société hiérarchisée. Ils estiment que nous sommes conditionnés dans des rapports dominants dominés, où il y a toujours une autorité à qui il faut se soumettre. Les personnes rencontrées ne veulent pas être cantonnées à un rôle d’exécutant, mais avoir la possibilité de participer à l’ensemble des activités. Elles souhaitent sortir d’un sentiment d’aliénation issu de la division excessive du travail pour retrouver un certain pouvoir sur le réel. La notion d’épanouissement au travail est également très présente dans leur discours et elles ont à cœur de créer des espaces où chaque personne peut être pleinement elle-même.

  • Les motivations des entreprises
    Souvent, les organisations qui s’orientent vers ce modèle font le pari de l’intelligence collective. Pour elles, 1 + 1 = 3, c’est-à-dire que les membres de l’équipe de travail s’enrichissent mutuellement de leurs idées et réflexions pour arriver à des solutions qui n’apparaissaient pas d’emblée alors qu’ils y pensaient seuls.

L’innovation est également mise à l’honneur dans les organisations autogérées puisqu’il y a un espace de liberté dans lequel chaque personne peut proposer et mettre en œuvre des projets. Cela va à l’encontre des modèles plus traditionnels où la mise en place d’une idée est plus encadrée et soumise à certaines validations.

  • Un processus très cadré

« L’absence de hiérarchie, ce n’est pas l’absence de structure, ce n’est pas le laissez-faire. »

Il y a probablement autant de modèles d’autogestion que d’organisations qui la pratiquent. Il n’y a pas un mode d’emploi universel qui serait la recette gagnante, mais une multitude d’expériences et d’écrits.

La majorité des organisations rencontrées se sont inspirées de modèles existants qu’elles ont repris à leur manière. Toutes les entreprises rencontrées insistent sur l’importance de s’inscrire dans une perspective d’essai-erreur et d’accepter une certaine forme d’inconfort. Plusieurs indiquent que l’absence de patron est perturbante au début et demande une bonne dose d’autoresponsabilisation. « On ne peut plus vraiment se plaindre ! », « Plutôt que de chercher une approbation, il faut chercher du soutien ». Véritable apprentissage individuel et collectif, l’auto-organisation n’est pas un long fleuve tranquille !

  • Exemples de pratiques mises en place

Chaque organisation développe un mode de fonctionnement et adopte des pratiques qui lui ressemblent. En voici quelques exemples.

  • Une répartition des rôles en collectif
    Chez Percolab, après avoir identifié toutes les fonctions à assumer dans l’entreprise, aussi bien stratégiques que fonctionnelles, l’équipe a défini une trentaine de rôles. « C’est une façon de rendre explicite ce qui se fait implicitement ». Les travailleurs se sont collectivement réparti les rôles, mais ce n’est pas figé. De nouveaux rôles peuvent être créés et leur répartition peut évoluer.

  • Une prise de décision rapide, basée sur la confiance et la transparence
    Chez Caligram, il y a une heure de réunion d’équipe par semaine pour gérer l’opérationnel. Les décisions sont prises dans le pôle concerné (souvent 2 personnes), sans consulter toute l’équipe. Il y a une grande transparence et la réunion d’équipe permet d’avoir une vision d’ensemble de ce qui se passe dans l’entreprise. Les travailleurs font confiance aux personnes concernées pour prendre les décisions dans l’intérêt de la coopérative.

  • Un ordre du jour coconstruit à l’aide de couleurs
    Chez Niska, l’ordre du jour des réunions d’équipe se fait le matin même, avec trois feuilles de couleurs. Le bleu est utilisé pour les sujets liés à la gouvernance, le jaune pour la stratégie et le rouge pour le « qui fait quoi ». Lors de la réunion, des drapeaux de couleurs matérialisent ces différents points. Le duo qui anime le point consacré à une couleur n’est pas celui qui en a l’expertise. « Un des défis de l’autogestion est de ne pas faire porter ses urgences sur le collectif. L’urgence est souvent par rapport à l’individu ».

Des défis sont encore à relever et une grande vigilance est nécessaire pour identifier les pouvoirs informels qui ont tendance à revenir subrepticement. Cependant, le bilan dressé par les personnes rencontrées est positif. Ils bénéficient d’un espace de liberté leur permettant de développer leur plein potentiel et de s’impliquer dans la vie de l’organisation.

  • En conclusion

À travers ces exemples, on observe que l’autogestion, assez loin des visions caricaturales qu’on lui attribue fréquemment, fonctionne efficacement dans plusieurs organisations. Si l’intérêt croît autour de son application, l’accès à l’information et à la documentation des pratiques semble encore insuffisant.

L’autogestion porte un projet de démocratisation de l’économie en (ré) conciliant le rôle de travailleur avec celui de citoyen. Mais pour poursuivre cette démocratisation, il faut penser à inclure d’autres parties prenantes comme les utilisateurs et les consommateurs. Ce type d’inclusion se retrouve souvent dans l’économie sociale avec la représentation de différentes catégories de membres dans la gouvernance. On ne peut, par ailleurs, repenser profondément les modes de gestion de nos richesses sans questionner les modes de propriété qui sont souvent à l’origine du pouvoir de décision. L’autogestion n’est donc pas la (seule) solution à tous les maux de notre société, mais elle fait probablement partie de l’équation. Les fondements de l’économie sociale et le mouvement des communs sont également porteurs de propositions en ce sens.

Un grand merci aux personnes rencontrées en entrevue :

Solen Martin-Déry, Étienne Després et Émile Plourde-Lavoie pour Caligram;
Matthieu Piegay pour Niska et Accolades;
Cédric Jamet, Elizabeth Hunt et toute l’équipe pour Percolab;
Isabel Faubert-Mailloux pour le Réseau Coop.

Je tiens également à remercier Marie J. Bouchard pour sa relecture attentive et ses précieux conseils ainsi que le comité de relecture du TIESS pour leurs orientations et suggestions.

Et, enfin, merci à Solen Martin-Dery pour sa collaboration aux illustrations.

Par Julia Cahour
Illustrations de Solen Martin-Déry et Julia Cahour

Le syndrome de Stockholm

Un hold-up à Stockholm

Stockholm qui a donné son nom à un syndrome psychologique Durant l'été 1973, un hold-up qui a lieu à Stockholm va mal tourner. Les braqueurs sont obligés de prendre en otage plusieurs employés qu'ils vont séquestrer durant plusieurs jours. Les négociations aboutiront finalement à la libération des otages.

  • Une étrange réaction des otages

C'est la réaction des otages qui donne son nom au syndrome de Stockholm. Alors que leur vie a été sérieusement menacée par les bandits, ils vont s'interposer entre les truands et les forces de l'ordre, puis, une fois libérés, prendre leur défense en refusant de témoigner contre eux, et iront même les voir en prison comme s'il s'était agi d'amis!

Le syndrome de Stockholm a pu être ainsi observé à de nombreuses reprises, et filmé parfois dans des situations où, lors d'une prise d'otage violente et dangereuse, les otages, devant la caméra d'une équipe de télévision elle-même prise en otage, s'en prennent verbalement aux policiers. Ils soulignent avec sincérité et colère à quel point les forces de l'ordre, intervenant et négociant pourtant pour les libérer, sont à l'origine de ce qui leur arrive et incapables de comprendre les arguments des preneurs d'otages (s'ils sont pris en otage, c'est finalement de la faute des policiers!).

  • Le paradoxe du syndrome de Stockholm

Le syndrome de Stockholm décrit donc une situation, fondamentalement paradoxale, où les agressés vont développer des sentiments de sympathie, d'affection, voire d'amour, de fraternité, de grande compréhension vis-à-vis de leurs agresseurs. Il y a souvent adhésion à la cause des agresseurs.

Les sentiments vis-à-vis des forces de l'ordre sont à l'inverse hostiles: les difficultés liées à leur libération vient d'eux !

  • Analyse psychologique du syndrome de Stockholm

Le syndrome de Stockholm correspond à un aménagement psychologique d'une situation hautement stressante, dans laquelle la vie de l'agressé (otage, victime) est en danger. L'apaisement de leur angoisse est trouvée dans l'identification à l'agresseur.

La durée de la prise d'otage, son caractère argumenté (il y a 'une cause' à défendre par les preneurs d'otages) sont des paramètres qui entrent en compte pour expliquer la mise en place d'un syndrome de Stockholm.

Souvent, après une prise d'otages, vous pourrez constater que les otages sont soigneusement mis à l'écart, parfois pendant plusieurs jours, dans un lieu tenu secret, pour une 'reprise en main' et éviter le développement du syndrome de Stockholm

Syndrome de Stockholm : c'est quoi, symptômes, s'en sortir
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On en entend parler dans les faits divers, dans les films ou les séries. Le syndrome de Stockholm est un mécanisme psychologique qui se traduit par un lien d'attachement voire d'amour de la part d'une victime vis-à-vis de son agresseur. Comment le reconnaître ? L'expliquer dans un couple ? S'en sortir ? Réponses de notre psychologue Aline Nativel Id Hammou.

Terme souvent employé dans des faits divers ou décrit dans des films, le syndrome de Stockholm est un mécanisme psychologique étrange et paradoxal, qui se manifeste par un lien d'attachement entre une victime et son agresseur, tissé lors d'une situation de danger extrême (prise d'otage, agression sexuelle...). Quelle est la définition exacte de ce syndrome ? Quels sont les symptômes ? Comment l'expliquer ? Quelles sont les solutions pour s'en sortir ? Quels sont les exemples célèbres ? Les films ou séries qui en parlent ? Explications d'Aline Nativel Id Hammou, psychologue clinicienne.
Définition : c'est quoi le syndrome de Stockholm ?

Le syndrome de Stockholm correspond à un contexte très particulier et ne doit pas être utilisé à tort. Il caractérise le processus psychologique dans lequel une victime éprouve de la sympathie voire de l'affection pour son agresseur, qui peut persister au-delà de l'agression. Ce syndrome a été décrit pour la première fois à la suite d'un braquage commis à Stockholm en Suède en 1973 par deux évadés de prison qui ont pris en otage quatre employés de la banque. Après six jours de négociation, les ravisseurs ont libéré leurs otages, mais ces derniers ont refusé de témoigner contre les braqueurs. Ils semblaient avoir développé une sympathie ou une compassion pour leurs ravisseurs. L'une des victimes a pris l'habitude de rendre visite à l'un des ses agresseurs en prison et a même vécu une relation amoureuse avec lui. "Normalement, on emploie le terme de syndrome de Stockholm lorsqu'il y a un réel danger de mort. Toutefois, par extension, on peut utiliser le syndrome de Stockholm pour décrire une situation de tension et de violence (physique ou morale) qui implique un rapport de dominant/dominé (crime sexuel, prise d'otage, discrimination, maltraitance, négligence, harcèlement, chantage affectif) d'une longue durée et/ou répétitive dans le couple, la famille ou au travail par exemple", indique Aline Nativel Id Hammou.

► Le syndrome de Stockholm est utilisé par les professionnels de santé pour décrire certains comportements dans des situations précises (prise d'otage, kidnapping, agressions, rapports incestueux...), mais ce n'est pas un diagnostic formel. Il n'apparaît pas dans le DSM-5, l'outil de référence international qui répertorie les pathologies de la santé mentale et les troubles du comportement.
Quel est l'inverse du syndrome de Stockholm ?

Le phénomène inverse du syndrome de Stockholm est le syndrome de Lima. Il s'agit d'une processus psychologique où des ravisseurs éprouvent de l'empathie pour leurs otages et développent des relations d'ordre amical ou amoureux avec l'un ou plusieurs d'entre eux. Ce syndrome a été décrit pour la première fois lors d'un fait divers qui s'est déroulé en 1996 dans la ville de Lima au Pérou. Lors de la prise de l'ambassade du Japon, les ravisseurs ont noué des liens avec leurs prisonniers et les ont relâchés un à un, renonçant à les exécuter.

Tout le monde peut, dans un contexte de stress intense, extrême et inédit, développer un syndrome de Stockholm. "Les femmes en sont plus souvent victimes car elles sont davantage exposées à ce type d'agressions", précise notre interlocutrice. Le syndrome de Stockholm se caractérise par :

La création d'un lien d'attachement, d'empathie positive, de compréhension réciproque voire d'amour entre la victime et son agresseur, qui se développe de manière inconsciente et involontaire. "Il s'agit d'une relation exceptionnelle ou extraordinaire au sens propre, ce qui provoque une incompréhension de la part d'autrui, précise notre experte. Ce lien d'attachement est d'autant plus fort qu'il n'y a aucun moyen de s'en extraire, de s'évader ou de s'en sortir sans conséquences graves impactant sa vie psychique et physique. L'agresseur peut être perçu comme en souffrance, voire bienveillant et sincère". 
Un sentiment d'impuissance extrême de la part de la victime, qui provoque une mise de côté de soi pour survivre. 
Une blessure réelle pouvant être activée à n'importe quel moment par l'impulsivité de son agresseur. 
Une dépendance totale mise en place par l'agresseur entraînant une perte d'autonomie de la victime. "L'agresseur est le seul à pouvoir répondre aux besoins primaires de la victime, ce qui provoque de la gratitude d'être encore en vie et une soumission totale", détaille-t-elle. 
Après l'agression : la naissance d'une hostilité de la victime envers les forces de l'ordre. Il est fréquent que la victime se range du côté de son ravisseur et qu'elle refuse de témoigner ou de porter plainte contre lui. "La victime est dans l'incapacité la plus totale de trahir son agresseur et a tendance à minimiser l'agression, voire à justifier ses actes ("au fond, il n'était pas si mauvais", "il m'a plutôt bien traitée", "je le comprends et je sais pourquoi il a agi comme ça"...), soit par loyauté, soit par peur des représailles, soit par peur de perdre le lien d'attachement avec son agresseur", ajoute notre interlocutrice.  
Pas ou très peu de contact avec l'extérieur (et souvent pas assez qualitatif et quantitatif pour avoir un impact positif sur la situation vécue)

Cause : comment expliquer le syndrome de Stockholm ?

Dans une situation extrême, notre pensée psychique peut complètement se réorganiser pour faire face au danger.

Lors d'une situation d'extrême danger, marquée par une forte promiscuité, "peut apparaître chez la victime un mécanisme d'adaptation au profil de l'agresseur qui lui permet de survivre face à ce danger et mieux préserver son intégrité physique et psychologique. Il s'agit d'une stratégie de défense qui aide à réduire son niveau d'anxiété extrême, provoqué par le choc émotionnel, la stupéfaction de la violence de la situation. Il y a aussi un effet miroir, une sorte de mimétisme par lequel la victime va tout faire pour rester en vie même si elle doit adopter un comportement contraire à sa personnalité, à ses valeurs ou à sa philosophie. Autrement dit, dans ce genre de situation extrême, notre pensée psychique peut complètement se réorganiser pour faire face au danger et nous permettre de continuer à vivre, quitte à renoncer à son identité", détaille notre interlocutrice. Malgré les différences de profil entre l'agresseur et sa victime, une identification mutuelle peut se produire. En s'identifiant le plus possible à son agresseur et en étant intimement convaincu(e) qu'il n'est pas capable de "tuer son semblable", notre angoisse de mort est apaisée. Cela peut également faire écho à "l'attirance du contraire", autrement dit, plus l'agresseur paraît inaccessible, plus il a de la valeur et plus il fascine. "Le syndrome de Stockholm est une réaction psychologique qui peut toucher n'importe quel type de personnalité face à une perte de repères totale pouvant entraîner une mort imminente", tient à préciser Aline Nativel Id Hammou.

Syndrome de Stockholm dans le couple : dans quel cas ?

Il ne faut pas abuser de cette dénomination. "Le syndrome de Stockholm est généralement employé lorsqu'il y a un danger de mort et quand la victime et son bourreau ne se connaissent pas. Dans certains cas, on peut l'utiliser pour décrire le comportement d'une victime dans une situation de tension et de violence extrême, qui dure un certain temps ou qui se répète", rétablit notre interlocutrice. Au sein d'un couple, on peut éventuellement parler du syndrome de Stockholm quand il y a une vraie emprise de la part du dominant sur le dominé, ce qui provoque une peur si intense que la victime craint pour sa vie (comportements pervers récurrents, violences verbales et physiques, harcèlement psychologique...)
Comment s'en sortir ou en guérir ?

Se reconstruire après un syndrome de Stockholm est extrêmement long. "Ce temps de reconstruction et de déconditionnement est cependant variable selon le contexte et la durée de la période de violence". Plusieurs étapes sont nécessaires pour se reconstruire :

► Phase de rupture totale du lien. Il faut d'abord rompre tout lien avec son agresseur, au moins au début, pour se libérer de son emprise. La victime peut avoir une envie irrépressible de retourner voir son agresseur, mais ce n'est pas conseillé. Malgré tout, dans certains cas et dans un second temps, il pourra être utile de le rencontrer pour oser lui dire certaines choses et extérioriser ses souffrances pour en faire le deuil.

► Phase de prise de conscience et de désidéalisation. La reconstruction passe par un réveil de la mémoire émotionnelle : il peut être intéressant de voir des photos de son agresseur, de se rendre sur le lieu de l'agression, de participer à des reconstitutions pour amorcer le deuil. "Cela va permettre de reconnaître le caractère très toxique de la relation et de réduire progressivement l'admiration ressentie pour son agresseur", précise notre interlocutrice.

► Phase thérapeutique. Un suivi médico-psycho-social (médecin, psychologue, assistante sociale, intervenant social à domicile, séjour en structure d'hébergement...) est indispensable pour se reconstruire et retrouver une estime de soi. "Très souvent, la victime se sentira idiote, honteuse voire responsable de la situation lors de sa prise de conscience", prévient Aline Nativel Id Hammou. L'accompagnement psychologique peut être complété par un accompagnement somatique (médicaments) "car le corps, lui aussi, a subi la violence (sécrétion très intense de cortisol dans l'organisme)".

► Se faire accompagner au quotidien, par son entourage (famille, amis) qui ne doit ni être dans l'agacement, ni dans le jugement, mais aussi à travers des groupes de paroles ou des ateliers de gestion de la vie quotidienne. Il ne faut pas non plus hésiter à intégrer une association de victimes pour témoigner, lire des ouvrages sur la thématique de l'emprise psychologique ou relationnelle.
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► L'écriture thérapeutique. Il peut être aussi bénéfique d'écrire ce que l'on a vécu et ressenti pour se sentir acteur/actrice du processus, extérioriser ses souffrances dues à l'événement traumatique, prendre de la distance et ancrer de nouvelles pensées, plus positives. Concrètement, l'écriture thérapeutique peut se pratiquer de façon individuelle selon un rituel d'écriture propre à chacun ou de manière encadrée, lors d'ateliers d'écriture thérapeutique menés par des psychologues, psychothérapeutes, personnes formées en art-thérapie, des coachs ou écrivains spécialisés en développement personnel ou en psychologie positive...

Seuls 8% des français sont heureux d’aller au travail tous les matins - HR Voice - Toute l'actu RH
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  • 45% des français recommanderaient leur entreprise à des proches pour y travailler
  • Seuls 36% des français sont toujours, ou “souvent” heureux d’aller au travail le matin.
  • 61% des français comptent rester dans leur entreprise dans les deux années à venir, et 19% cherchent à partir.
  • 29% des travailleurs français se sentent souvent trop stressés au travail

Qualtrics, entreprise spécialisée dans les données de gestion d’expérience, dévoile aujourd’hui les résultats d’une étude menée auprès d’un panel d’employés français, de tous âges, tous niveaux de poste et tous secteurs, pour comprendre leurs motivations, leurs sources de stress, leur rapport à leurs entreprises et aussi, les manières d’apprécier davantage leur position. Pour Qualtrics, le principal critère de réussite d’une entreprise, est un écart minimal entre l’expérience perçue par les salariés et l’expérience que l’entreprise pense offrir. Des collaborateurs heureux recommandent l’entreprise, y travaillent avec plaisir et sont impliqués et loyaux. Une bonne expérience salariale débouche souvent à une bonne expérience client et donc, à une meilleure réputation de l’entreprise.

C’est donc pour apporter les premiers éléments d’enseignement aux employeurs français que Qualtrics a réalisé son étude Pulse en septembre 2018. Les technologies avancées de Qualtrics, StatsiQ, ont permis de croiser les résultats pour obtenir des informations détaillées.

Des salariés qui n’associent pas “bonheur” avec “travail”.

Lorsque l’on pose la question aux travailleurs français s’ils sont contents de se lever le matin pour aller au travail, seuls 36% d’entre eux répondent qu’ils le sont “tout le temps” ou “assez souvent”. Si l’on se cantonne uniquement à ceux “toujours” contents d’aller au travail le matin, on tombe à seulement 8%. Ces chiffres sont à relativiser toutefois avec le scepticisme à la française, car lorsque l’on demande aux salariés s’ils aiment le poste qu’ils occupent actuellement, plus de la moitié des répondants s’estiment “très satisfaits”, ou “plutôt satisfaits”.

Ces chiffres bien qu’éloquents peuvent parfois être difficiles à mettre en perspective par un manager qui souhaiterait ensuite améliorer la perception de ses employés. Qualtrics a ainsi voulu aller plus loin pour essayer d’apporter des éléments de réponse et d’orientation sur lesquels un employeur peut influer. Ainsi par exemple, des pistes de réponse peuvent se trouver dans l’équilibre entre la vie personnelle et la vie professionnelle. Un taux sur lequel l’employeur peut influer à travers des discussions construites dans l’allègement des tâches, dans l’embauche de nouveaux membres etc. En France, près de 22% des travailleurs interrogés ne sont pas satisfaits de leur équilibre. L’étude montre que 93% des employés qui estiment travailler dans une société respectueuse de l’équilibre en la vie professionnelle et la vie personnelle souhaitent y rester plusieurs années. 60% des employés estimant que leur entreprise ne se préoccupe pas de cet équilibre prévoient, eux, de s’en aller.

Les français veulent plus de reconnaissance et d’intérêt pour leur travail.

L’étude montre à travers plusieurs réponses que les français sont en fait en quête de reconnaissance, de perspectives d’évolution, et surtout, d’un intérêt, de faire des activités auxquelles ils croient. S’il est difficile de transformer complètement le poste de tous les employés, il est toutefois possible, par le biais d’un questionnaire, d’envisager des ateliers, des groupes transverses, des formations ou même des brainstormings entre différentes personnes, pour impliquer tout le monde différemment.

Il est également possible par exemple d’impliquer toute l’équipe sur des projets habituellement réservés aux “séniors”. Un junior invité à participer à l’élaboration d’une campagne dont il devra mesurer les résultats donnera plus d’intérêt au travail, et ainsi améliorera son enthousiasme dans l’élaboration du rapport de retombées.

Les chiffres donnent en tous cas matière à réflexion aux employeurs. Près de 42% des salariés interrogés estiment ainsi que leur employeur ne leur donne jamais, ou rarement l’opportunité d’innover. A contrario, seuls 26% des salariés interrogés estiment avoir des perspectives d’évolution dans leur emploi. Enfin, 32% des personnes interrogées estiment ne jamais ou très rarement obtenir de reconnaissance lorsque leur travail est bien fait.

Pour Qualtrics, augmenter cette part liée à la reconnaissance fait partie des actions simples à mettre en œuvre par les managers pour améliorer le bonheur au travail des employés. Un employé heureux est un employé qui a envie de travailler et la qualité de son travail en sera automatiquement impactée.

Les jeunes générations sont moins fidèles et plus en demande de questionnaires de satisfaction.

Près d’un Millénial sur deux (55%) projette de rester dans l’entreprise qui l’emploie actuellement.

L’expérience management a de beaux jours devant elle. En effet, les jeunes générations de travailleurs attendent une politique d’échanges et de sondages réguliers. Ils souhaitent être écoutés et tendent à être plus regardants quant aux efforts réalisés en interne pour répondre à leurs requêtes. Le turn-over n’est pas une fatalité et les nouveaux travailleurs ne sont pas nécessairement plus frivoles que les anciens.

Des solutions et un accompagnement pour implémenter l’experience management (XM)

Qualtrics offre des solutions technologiques qui permettent aux entreprises, de manière très simple, de créer des sondages en ligne de manière intégralement personnalisée, ainsi que de stocker et traiter les réponses aisément. Au-delà des technologies, la société fournit également l’accompagnement pour initier le changement dès la prise de décision de l’entreprise suite à l’analyse des réponses reçues. Les technologies Qualtrics permettent aussi de faire ressortir les principaux insights, grâce à iQ, dopé à l’intelligence artificielle, pour guider et orienter vers des pistes d’améliorations.

De cette étude, les solutions Qualtrics ont pu tirer les enseignements suivants :

62% des personnes qui indiquent avoir confiance dans leurs équipes dirigeantes sont aussi extrêmement heureux dans leur travail.
62% des salariés qui sont systématiquement félicités pour leur bon travail sont heureux dans leur emploi.
73% des personnes ayant des opportunités de prendre des initiatives et aller au-delà de leurs tâches répétitives sont heureux à leur poste. Seuls 24% des personnes sans opportunités le sont.
94% des employés ayant des perspectives d’évolution dans leur entreprise disent qu’elles souhaitent y rester. Seuls 32% des personnes sans perspectives d’évolution souhaitent garder leur emploi actuel.

Finement analysés, ces chiffres deviennent significatifs. Les technologies Qualtrics permettent ainsi aux employeurs d’avoir des pistes d’actions concrètes pour améliorer les conditions de travail de leurs salariés.

Peu de Français sont satisfaits de leur job
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Près de la moitié des salariés (48,4%) considèrent leur travail satisfaisant mais sans plus, selon un sondage réalisé par l'institut GFK pour le site d'offres d'emploi Monster.fr consulté par Le Parisien-Aujourd'hui en France . Le pourcentage monte même à 51,6% chez les 18-24 ans et 60% chez les seniors de 50 à 64 ans.

Pire, 8,8% des ouvriers, employés et cadres français n'aiment pas du tout, voire détestent leur job. Ils sont 14,5% chez les 18-24 ans.

En revanche, 11,5%des salariés français adorent tellement leur emploi qu'ils seraient prêts à travailler gratuitement. Ils sont même 13,1% dans la catégorie des 35-49 ans.

Mal être au travail - Pourquoi les Français sont-ils malheureux? | Monster.fr
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Les sondages sur le bien être au travail qui font mal

Ce n’est pas la joie chez les salariés français. Les études et autres sondages se bousculent pour le prouver. En 2017, le cabinet de recrutement Robert Half publiait une étude sur les salariés les plus heureux au monde. Résultat : les Français arrivent tout en bas du classement. Le baromètre national du Bonheur au travail révélait lui, que 23% des actifs étaient très satisfaits dans leur travail contre 18% de très insatisfaits. Plus inquiétant, 13% seraient prêts à basculer vers le mal être professionnel.

Bonheur et travail : quels sont les mécanismes pour être heureux au travail ?

Selon la Fabrique Spinoza, le think tank économique et politique, il existe 12 composantes qui contribuent au bien être des salariés et qui, manifestement ne remplissent pas les critères de satisfactions des salariés : les conditions de travail, la gouvernance, la relation à la vie privée, l’éthique et les valeurs, le management, les relations sociales, la nature du travail, la formation et les perspectives, l’organisation du travail, la rémunération et avantages, la relation au temps et la sécurité de l’emploi.

Pourquoi les Français sont malheureux au travail ?

La réponse facile serait de dire que les Français se plaignent de tout et de rien et surtout du salaire. Faux car si l’on se penche sur les statistiques de la DARES sur les conditions de travail des salariés français parus début 2018, les plus « heureux » seraient des ouvriers ou des personnes issues d’une immigration récente qui sont légèrement moins bien payés que la moyenne (1753 euros net contre 1877 euros). La question du bonheur au travail est donc bien plus complexe que la rémunération (même si elle en fait partie). Et si aujourd’hui, selon le think tank, le premier indice de satisfaction est d’avoir un bon ami au travail, cela prouve qu’il y a de nombreuses failles à combler pour rendre un salarié heureux. Car la sentence est sans appel : 51% des salariés se disent stressés, fatigués. 26% s’ennuient, et 44% ne trouvent plus de sens à leur travail (le fameux brown-out).

Quels sont donc les facteurs qui expliquent ce divorce entre les Français et le travail ?

  1. Le manque de reconnaissance

C’est l’élément majeur de ce désenchantement et un moteur de démotivation. Le manque de reconnaissance est aussi un problème bien français car culturellement, on a tendance à punir plutôt à qu’à encourager. Sans parler de certains managers qui pensent à tort, que féliciter un salarié équivaut à une augmentation de salaire ou une promotion. Et il ne faut pas posséder un BAC +10 pour comprendre qu’un employé encouragé est un employé heureux et donc performant.

  1. Les mauvaises conditions de travail

On pense évidemment à la pénibilité au travail qui concerne les salariés exposés au travail à la chaine, à des conditions difficiles, des agents dangereux, à la manutention des charges lourdes etc. L’exemple des professionnels de la santé est cependant frappant : ils subissent des contraintes liés aux horaires de nuit, au travail du week-end avec des emplois émotionnellement très lourds puisqu’ils sont quotidiennement à proximité de la maladie et de la mort. A noter que les salariés qui ont le sentiment de ne pas pouvoir faire un travail de qualité travaillent dans des structures de taille importante (de 250 à 500 salariés et plus) et concernent principalement les secteurs de l’administration publique, l’enseignement, la santé humaine et l’action sociale.

  1. La relation avec la hiérarchie

Elle est primordiale et en corrélation directe avec le bien être au travail. Plus la relation avec la hiérarchie est bonne, plus les conflits auront un faible impact sur le bonheur au travail. L’inverse est tout aussi vrai. Statistiquement, selon la DARES, les salariés exposés aux tensions hiérarchiques travaillent dans des entreprises de 500 salariés ou plus, des lieux où il est difficile de conserver une dimension humaine et où la mission des ressources humaines est d’autant plus essentielle. À noter que le climat social est plus calme dans les entreprises de 1 à 9 salariés, il est à l’inverse très tendu dans les structures de 500 salariés et plus.

  1. Une charge de travail trop importante

Selon la Fabrique Spinoza, 24% des sondés sont au bord du burn-out. La crise de 2008 a nécessité des décisions radicales au sein de nombreuses entreprises. Des arbitrages qui n’ont plus nécessairement lieu d’être aujourd’hui mais qui n’empêchent pas une politique de réductions de postes face à une charge de travail accrue. Les salariés concernés travaillent dans des entreprises avec 500 salariés et plus, notamment dans l’administration publique, l’enseignement, la santé humaine et l’action sociale mais aussi dans les industries extractives, énergie, eau, gestion des déchets et dépollution.

Insatisfaction au travail: sortir de l'exception française | Institut Montaigne
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Les Français sont plus insatisfaits de leur emploi que leurs pairs européens et comptent parmi les plus stressés au monde alors que, selon de nombreux indicateurs, les conditions de travail sont en apparence favorables aux salariés. La faiblesse du dialogue au sein des entreprises ainsi que le manque de mobilité et la rigidité de notre droit du travail sont générateurs de stress pour les salariés.

82% des salariés français souhaitent se reconvertir, selon Monster - Le Monde Informatique

Les résultats d'une enquête publiée par le spécialiste de la gestion de carrière en ligne Monster, montrent que plus d'un salarié européen sur deux envisage de réorienter sa carrière.

Selon l'une des dernières enquêtes conduite par Monster, spécialiste de la gestion de carrière en ligne, plus d'un salarié européen sur deux envisagent la possibilité de changer complètement de carrière. C'est en France que la proportion de personnes souhaitant réorienter leur parcours est la plus élevée : dans l'Hexagone, 82% des salariés interrogés se déclarent en effet prêts à changer de voie, à plus ou moins long terme, alors qu'ils ne sont que 8 % à être satisfaits de leur carrière actuelle. Une proportion équivalente d'Espagnols se déclare également tentée par une reconversion, tandis qu'en Finlande, 70% des salariés étudient la possibilité de réorienter leur parcours. Ces résultats montrent qu'à travers l'Europe entière, les salariés expriment une insatisfaction diffuse à propos de leur carrière. Bon nombre d'entre eux cherchent à explorer de nouvelles voies pour améliorer leurs conditions et leur style de travail. Preuve que les entreprises doivent travailler aux opportunités de développement professionnel de leurs collaborateurs, pour générer leur engagement et les fidéliser

Les salariés français sont les plus désengagés et insatisfaits au monde
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La dernière étude internationale réalisée par Steelcase en partenariat avec Ipsos s’est penchée sur le lien entre l’implication des employés et la perception de leur environnement de travail. Elle conclut que non seulement l’environnement de travail a une influence sur la productivité des employés, mais également qu’il façonne leurs comportements et même leurs convictions. Steelcase invite donc les entreprises à intégrer l’espace de travail dans leur stratégie globale pour augmenter l’implication de leurs salariés.

Les 5 grands enseignements de l’étude Steelcase

L’implication des employés a été scrutée dans 17 pays et Steelcase a interrogé 12 480 participants. L’étude révèle qu’un tiers des effectifs – soit 37% – des 17 plus grandes économies au monde sont désengagés ! L’entreprise spécialisée dans le mobilier de bureau et aménagement d’espaces de travail a en tiré 5 enseignements :

L’engagement est corrélé à la satisfaction vis-à-vis de l’espace: seuls 13% des travailleurs dans le monde sont à la fois fortement engagés et très satisfaits de leur environnement. Et inversement : 11% sont en effet très insatisfaits de leurs bureaux et fortement désengagés. Aussi, la transformation de l’environnement physique et matériel peut être un outil efficace que les entreprises peuvent intégrer dans une stratégie d’amélioration globale des niveaux d’engagement.
Les employés engagés ont plus de contrôle sur leur expérience professionnelle: Steelcase constate que les employés engagés se distinguent des autres par un plus grand degré de contrôle, non seulement sur leur lieu de travail mais également sur la méthode. Ils ont la responsabilité d’avoir de « l’intimité » quand ils le souhaitent : ils peuvent choisir où et comment travailler, et gérer leurs besoins d’intimité pour se concentrer ou travailler en équipe sans être interrompu. Ils sont ainsi responsabilisés par le fonctionnement de l’entreprise et par les espaces mis à leur disposition dans l’entreprise.
Les équipements fixes sont deux fois plus répandus que les équipements mobiles: ce qui contraint d’une certaine manière la majorité des employés à être présents au bureau. Les pratiques de travail restent traditionnelles montrent une certaine difficulté à suivre le rythme des évolutions technologiques pour les entreprises. Cela pénalise certains métiers et certaines méthodes de travail qui nécessitent plus de collaboration, d’interaction et de partage d’informations que les autres.
Les modes de travail traditionnels persistent: près de deux tiers (60%) des employés déclarent travailler dans des espaces traditionnels, c’est à dire des bureaux privatifs partagés ou individuels.

Le contexte culturel influence les niveaux d’engagement : les employés les plus fortement engagés se trouvent généralement dans les économies émergentes tandis que les moins engagés sont ceux des marchés plus développés. Sur les 17 pays étudiés, la France est la dernière du classement avec le plus faible taux d’engagement et de satisfaction des salariés (5%). A contrario, l’Inde présente le plus fort taux d’engagement et de satisfaction (28%).

En France, le modèle traditionnel perdure

En France, la plupart des entreprises disposent de bureaux traditionnels, mêlant à quasi égalité espaces constitués de bureaux individuels et lieux mêlant open space et bureaux privatifs. L’accès aux espaces partagés est inégal : il est satisfaisant sur le plan des salles de réunions (68% en France/70% dans le monde) ou de pause (cafétaria, restaurants, zones de détente), mais l’est moins que dans le reste du monde concernant les espaces de travail privatifs (45% en France/53% dans le monde) ou les installations sportives (12% vs 22%).

Les entreprises contribuent à faire perdurer le modèle traditionnel : les employeurs français sont ceux qui fournissent le moins d’ordinateurs portables et de téléphones mobiles à leurs employés. Conséquence ou non : les employés français sont ceux qui travaillent le moins en dehors de l’entreprise. Cela entretient la séparation entre travail et vie privée, importante dans la culture française.

Pourtant, les employés français considèrent leur qualité de vie au travail comme la plus basse de n’importe quel pays de cette étude et jugent sévèrement les environnements physiques et la culture d’entreprise. Ils déplorent un manque de contrôle sur des aspects clés de leur expérience professionnelle et des niveaux de stress élevés.
En Inde, le bureau est un refuge

En Inde, le schéma est à peu près le même qu’en France : les espaces de travail sont généralement constitués de bureaux privatifs et fermés pour le travail individuel, combinés à des espaces partagés. 70% des employés occupent ce genre d’espaces. Mais là-bas, avoir un espace à soi, même petit et modeste, est un signal d’appartenance et d’importance : cela pourrait expliquer le haut niveau général de satisfaction vis-à-vis de l’espace selon Steelcase.

L’Inde est l’un des pays les plus densément peuplés de la planète : face à l’agitation générale des rues, des maisons et des espaces publics, on peut aisément comprendre pourquoi le bureau privatif représente un havre de paix. 73% des Indiens disent ainsi que leurs environnements de travail leur permettent de se sentir détendus et calmes, un taux supérieur à la plupart des autres pays. De plus, les entreprises locales semblent suffisamment pourvues en espaces partagés – salles de réunion, des cafétérias ou des zones de restauration – et les employés indiens sont ceux qui ont l’accès le plus important à des installations sportives (43 % contre 22% internationalement et contre seulement 12% en France).

Enfin, cette perception extrêmement positive des espaces de travail qu’ont les employés indiens – bien que leurs espaces de travail ne soient pas nécessairement meilleurs qu’ailleurs – est sans aucun doute influencée par les conditions relativement modestes dans lesquelles ils vivent. Ainsi, à l’un et l’autre bout du monde, les uns sont de plus en plus insatisfaits et les autres se contentent de peu…

En quoi la fin du salariat va bouleverser nos sociétés? - Challenges
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A l’occasion de la sortie de Sociétal 2016 (Eyrolles 25 euros), revue de l’Institut de l’entreprise, l’économiste Jean-Marc Daniel qui a dirigé l’ouvrage explique les grands enjeux de la révolution numérique qui bouleverse des pans entiers de l’économie dont l’organisation du salariat. Il vient par ailleurs de publier Valls, Macron: le socialisme de l'excellence à la française (François Bourin 20 euros).

On annonce la mort du salariat. Est-ce une réalité ou un mirage?

Il est vrai que pour l’instant, plus de 90% des travailleurs français sont des salariés. Mais d’ici à 50 ans, nous allons nous retrouver avec 50% de travailleurs indépendants. Le temps où des armées d’ouvriers se lèvent tôt pour aller pointer dans une usine est révolu. Aujourd’hui, le capitalisme 2, 3 puis n point zéro se caractérise par la multi-activité où la figure de l’autoentrepreneur est centrale. Il faut réfléchir à ce qu'est la relation salariale à l'aune de cette société. Il est devenu nécessaire d'assouplir le contrat de travail né pendant l'ère industrielle.

Quelles sont les caractéristiques de cette société post-salariat?

La France du Bon Coin et de Blablacar annonce à plus long terme une redéfinition profonde des relations sociales autour de la généralisation de la négociation. Par exemple, jadis une personne aidait par simple générosité son voisin à déménager ou à monter un meuble Ikea. Aujourd’hui, avec des plateformes comme Le Bon Coin, il peut monnayer son service. Nous allons vers un renforcement des relations contractuelles au détriment des relations hiérarchiques qui caractérisent la société du salariat. Autrement dit, demain il sera plus facile de trouver un client qu’un emploi.

L’enjeu à venir n’est-il pas l’adaptation du code du travail?

Oui, tout à fait. Le droit social s’est développé sous l’ère de la société industrielle. Mais aujourd’hui avec les bouleversements de l’économie numérique, il apparaît un peu désuet. Surtout, il ne répond plus au besoin des salariés free-lance qui, eux, ne sont pas protégés par les articles du code du travail. Le grand débat est donc d’attacher des droits à la personne et non aux contrats de travail.

Vous annoncez également la mort de la sécurité sociale?

La fin programmée d’une société régie uniquement par le salariat et le contrat de travail va engendrer la mort de la sécurité sociale telle qu’elle est aujourd’hui. En effet, comment financer une protection sociale basée sur les cotisations sociales des salariés? Il va être nécessaire de réorganiser les transferts de solidarité. Le revenu universel peut être une solution. La Finlande est d’ailleurs en train de réfléchir à cela.

Comment expliquer les réticences liées à des plateformes comme Uber?

Il y a cette vision que la nouvelle économie du numérique va engendrer de grandes destructions d’emploi et qu'une partie non négligeable de personne va se retrouver au chômage. Or, je crois au contraire que l’emploi crée de l’emploi. Vous savez en 1812, Lord Byron, dans une déclaration à la Chambre des communes, déclarait que les machines représentaient un danger pour l’humanité parce qu’elles allaient détruire des emplois. C’était le temps des luddites, ces bandes d’ouvriers du textile qui mettaient à sac des usines. On assiste en France à la résurgence de ce phénomène dans certain secteur de l’économie où des acteurs sont menacés par l’arrivée de nouveaux entrants.

En quoi la société numérique est-elle une société de concurrence quasi pure et parfaite?

Il faut se souvenir du commissaire-priseur Walrassien, du nom de l'économiste français du 19ème siècle. Cet être mythique de la pensée économique informe en temps réel le consommateur de la possibilité de trouver mieux et moins cher que dans le magasin où il est. Joseph Schumpeter (père du concept de destruction créatrice de la valeur) l'avait critiqué sévèrement en jugeant l'idée intéressante sur le plan intellectuel mais trop éloignée de la réalité. Or, aujourd'hui le commissaire-priseur Walrassien existe grâce aux smartphones et aux nouvelles technologies de l'information. Nous vivons dans une société de concurrence quasi pure et parfaite qui libère le consommateur et met la pression sur le producteur obligé de se réorganiser.

Évolution du travail : non, il n’y a pas de révolution | Contrepoints
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Le recul du salariat est présenté comme une transformation du travail. Mais peut-être le salariat n’était-il qu’une parenthèse ?

Par Vladimir Vodarevski.

Des sociétés comme UBER, ou d’autres qui mettent en relation clients et prestataire indépendant sont présentées comme révolutionnant le monde du travail. En effet, ces nouveaux modes de mise en relation n’entrent pas dans le modèle du salariat. Le recul de celui-ci est présenté comme une transformation du travail. Cependant, il s’agit là d’une confusion entre la nature et la forme du travail. Le salariat n’est pas l’unique forme du travail. Il n’est majoritaire que depuis relativement peu de temps à l’échelle de l’histoire humaine.

  • Avant le salariat

Le salariat s’est développé avec la révolution industrielle. En France, ce développement a vraiment été lancé au cours du 19ème siècle. Auparavant, des formes de louage de travail existaient. Dans les campagnes notamment, lieu de vie de la plupart de la population, des ouvriers agricoles, soit ne vivaient que de cette activité, soit en complément car ils n’obtenaient pas suffisamment de ressources de leur propre terre ou de leurs animaux. En ville, on trouvait les domestiques, les compagnons, des hommes de peine s’acquittant de diverses tâches.

Cette forme de travail n’était pas valorisée. Elle était le lot du bas de la société. Les compagnons formaient certes une élite, mais le but était de s’installer comme maître au sein d’une corporation. Rester compagnon était vécu comme un échec.

À partir du milieu du 19ème siècle en France, le salariat est devenu majoritaire au sein de la population active. Cependant, son adoption était somme toute plutôt lente, et la révolution industrielle n’empêchait pas le maintien ou le développement d’autres formes de travail. L’artisanat s’est développé. Des gens pouvaient passer dans les campagnes pour des travaux, comme les rémouleurs. Il y avait des couturières. De petits commerces se développaient. Dans les romans qui se situent avant la deuxième guerre mondiale on peut voir des exemples de personnages qui créent ou reprennent un tout petit commerce : minuscule crémerie, minuscule mercerie. Il y avait les marchands des quatre saisons avec leurs petites charrettes.

Parmi les formes de travail, on peut aussi citer l’exemple du textile. D’abord les pièces étaient tissées à domicile à la main, à la demande de négociants. Puis, au 19ème siècle, les canuts travaillent pour les négociants. Ce sont des sortes de TPE dirions nous aujourd’hui, qui exécutent les commandes des négociants, sans créer leurs propres modèles. Tout à fait la situation de certains indépendants qui dépendent en fait d’un donneur d’ordre.

Enfin, il y a une porosité entre l’état d’ouvrier et d’artisan. L’artisan peut être un ancien ouvrier. Et un artisan peut devenir ouvrier.

  • La victoire du salariat

Le salariat s’est développé plus rapidement après la Seconde Guerre mondiale. On passe de 62% en 1936 à 89% en 1997 (rappelons que la France est passée au-dessus de 50% de salariés après le milieu du 19ème siècle). Le taux d’emploi non salarié baisse à 10,8% en 2008. Les indépendants se retrouvent aujourd’hui au sein du secteur des services et du bâtiment.

On remarque que le salariat a suivi le développement de la production manufacturière d’abord, laquelle se faisait en usine. Les activités indépendantes ont perduré dans l’artisanat, qui n’est pas une production industrielle. Il a aussi perduré dans le petit commerce. On peut supposer que le développement des chaînes a développé le salariat dans ce secteur.

Mais le travail indépendant se retrouve dans les services. Un mouvement d’externalisation des services s’est produit. Les entreprises de production, ou de commerce, se délestent de la comptabilité, du ménage, et d’autres tâches. Les métiers de services peuvent se faire plus facilement en indépendant. Le métier de graphiste par exemple.

  • La forme suit le fond

On constate que la forme du travail est liée à ce qui est produit. Autrefois le commerce était beaucoup l’apanage de l’indépendant. Aujourd’hui c’est le service. La production manufacturée est encore l’apanage du salariat. Mais va-t-il y avoir une évolution ?

Soulignons aussi qu’il y a parfois des points communs entre le salariat et le travail indépendant. Ainsi, selon William Bridges, dans le livre La Conquête du Travail (1995), chaque individu doit se comporter comme une entreprise, une me inc. Nous devons chacun investir dans le développement de compétences, les vendre sur le marché, évoluer.

C’est la conception du travail en tant que service. Certains ont plusieurs contrats de travail avec des entreprises différentes. D’autres travaillent en indépendant en plus de leur travail. Et d’autres encore travaillent au noir, en indépendant non déclaré donc, en plus de leur travail.

On constate donc que le salariat est une forme de travail. Il peut dépendre de ce qui est produit, production industrielle ou artisanale, biens ou service. La frontière entre salariat et travail indépendant n’est par ailleurs pas nette. Surtout, le travail indépendant n’est pas une chose nouvelle dans le monde issu de la révolution industrielle. De même que le cumul d’une activité salariée et d’une activité indépendante. Le considérer comme une nouveauté, une preuve d’un nouveau modèle, n’est pas logique.

  • Tout travail n’est pas salariat

Le problème se situe en fait dans le mélange entre la forme et la nature du travail. Le salariat est une forme du travail. Ce qu’on appelle travail est par nature une vente de service, consistant en une force de travail, une compétence. Cependant, en économie, et surtout en sociologie, on veut le démarquer de la vente de service. Et on a fait du salariat le travail, tout en ayant des difficultés à appréhender le travail indépendant.

Le pire est que nous sommes formés à être des salariés. Consciemment et inconsciemment, puisque le salariat a été érigé en norme, avec sa version privilégiée qui est l’embauche à vie dans la même entité, entreprise, administration publique ou autre organisme. Cela ne nous prépare pas à être acteur de notre vie, à faire des choix, à entretenir nos compétences ou à en développer de nouvelles. À être entrepreneur. Ce qui a toujours été une nécessité. Aujourd’hui, ceux qui ont été formés à être évolutifs, ou qui ont choisi, consciemment ou par hasard, la bonne formation, sont avantagés. Les nouvelles générations sont obligées de s’adapter, face au fossé entre la formation, à la fois l’éducation et le savoir inconscient distribués par la société, et le monde réel.

Il n’y a donc pas vraiment de révolution du travail. Les technologies de l’information et de la communication permettent le développement de formes de travail qui existaient déjà. Le salariat a peut-être été une parenthèse. Mais c’est là un développement ultérieur de la réflexion.

Le salariat a vécu
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Le salariat, un astre mort ? Il continue de nous éclairer et de nous rassurer mais son cycle de vie se termine. Il suffit pour s'en convaincre de retracer l'actualité sociale de ces derniers mois : les plans de départ volontaires et les plans de licenciements se multiplient dans un marché qui n'offre que peu de perspectives de retour à l'emploi traditionnel, autrement dit, qui impose à chacun de réinventer son emploi, ou plutôt d'inventer son activité.
Car la nuance entre « emploi » et « activité » est de taille désormais : « le salariat, c'est une forme marchande de l'activité. Pour certains aujourd'hui, par un renversement des valeurs, c'est devenu un simple moyen d'accès à des droits sociaux et il n'appelle pas plus d'investissement que cela. Le salariat va, de plus en plus, être confronté à la concurrence de l'activité », prédit Jean-Pierre Gaudard, dans « la fin du salariat » qui vient de paraître chez François Bourin Editeur. Et de raconter qu'il peut comme expert échanger avec des pairs sur Internet, rédiger son blog, écrire une fiche sur Wikipédia, aider un projet associatif tout en vendant par ailleurs les mêmes compétences en tant que free lance ou salarié d'une entreprise.
Selon ce spécialiste des questions économiques et industrielles, ancien rédacteur en chef à l'Usine Nouvelle, « le travail sous sa forme salariale, n'occupe plus du tout l'espace économique et social, encore moins l'imaginaire, sauf pour les plus démunis, les moins bien formés, les moins aptes à affronter l'incertitude et les aléas de notre société».

  • Le pacte "protection contre subordination" a vécu

Depuis deux siècles, la révolution industrielle a imposé le modèle salarial. Mais la crise de l'emploi alliée à un profond changement de société et des mentalités, à de nouvelles exigences de compétitivité, aux révolutions technologiques, a progressivement modifié notre rapport au travail. Et avec lui tout le modèle social, entraînant dans sa chute le salariat.
« C'est la fin d'une organisation sociale qui a modelé la société industrielle depuis le XIXème siècle. Le salariat s'est imposé grâce à l'essor de la révolution industrielle. Les droits qu'il a fait naître sont indissociables de l'idéal politique démocratique. Mais ces droits étaient collectifs, à vocation universelle, avant que les droits de chaque individu ne supplantent dans l'imaginaire collectif les droits de l'homme. Ce n'est pas seulement l'emploi à vie qui disparaît. Le pacte social entre patrons et salariés, qui reposait sur l'échange « protection contre subordination » a vécu. Les structures hiérarchiques sont discréditées, le pouvoir et l'autonomie des individus prennent le dessus », poursuit Jean-Pierre Gaudard.
Ce constat, on l'observe tous les jours : derrière l'essor du télétravail, du recours massif à la sous-traitance, du succès croissant de l'auto-entrepreneuriat, c'est l'individualisation qui dicte sa loi, au travers de laquelle on ne compte plus que sur son réseau Facebook et Linkedin et où il n'est plus rare de croiser plusieurs jobs. C'est la nouvelle économie du « free lance » promise selon Jean-Pierre Gaudard à un bel avenir et dont les seniors sont « l'armée de réserve » et les élites intellectuels, actifs urbains, le c?ur du réacteur. Ceux que le professeur américain Richard Florida désigne sous le nom de « classe créative » : scientifiques, enseignants, intellectuels, designers, professionnels du droit, de la finance. Les bac +, ferment de la société de la connaissance, qui sont en train redéfinir le rapport au travail, entre coopération intermittente et succession de projets ponctuels. « Cette auto-organisation constitue un tournant majeur après des siècles de croyance dans une autorité hiérarchique, le patron, l'entreprise, l'Etat, les syndicats, plus généralement toutes les institutions ».

  • Un modèle plus contraignant qu'innovant

Revers de la médaille, ces « liens faibles », dont parle Jean-Pierre Gaudard, créés par ces nouvelles formes de travail, impliquent aussi des engagements faibles : « Google gère ses employés comme des lignes dans un tableau Excel. En retour les recruteurs constatent que les candidats sont moins motivés et ne font que se tester sur le marché »
Rien d'étonnant dans ces conditions qu'il soit devenu difficile de mobiliser les troupes dans les entreprises. D'autant que celles-ci se sont également tournées vers un mode projet et privilégient allègement des coûts et vision à court terme. « Les aspirations à l'autonomie de l'individu, qui jouent un rôle moteur dans la fin de la société salariale sont, d'une certaine manière, la résurgence de cette contestation du contrôle total qu'a imposé le modèle industriel et qu'il ne peut plus justifier à partir du moment où sa contrepartie, assurer une sécurité de l'emploi, n'existe plus ». Ainsi le salarié s'est-il individualisé au prix d'un effort colossal d'adaptation permanente, créant un hiatus entre autonomie et système salarial. La responsabilisation n'ayant pas suivi au sein des entreprises, le modèle du travail salarié est apparu plus contraignant qu'innovant, ne permettant pas à l'individu de « se réaliser ».
Résultat : le salariat répond de plus en plus mal aux attentes des actifs, surtout les jeunes « Y » prêt à changer d'emploi dès qu'il ne leur convient plus. « Il semble que, pour une bonne partie de la société, à commencer par les catégories les plus instruites et cette fameuse « classe créative », l'aspiration à l'autonomie soit plus forte que les inconforts de la précarité », estime Jean-Pierre Gaudard. Vrai pour les mieux armés, beaucoup moins sûr pour ceux qui rencontrent une difficulté quelconque dans un moment de leur vie (divorce, maladie, deuil) et les moins diplômés.
D'ailleurs, si toutes les catégories sociales sont affectées par l'effritement de la société salariale, elles ne le sont pas de manière homogène. Apparaît dès lors une concurrence des « egos » et le retour du « travail à la tâche ». « Peut-être que l'avenir appartient aux slashers s'interroge Jean-Pierre Gaudard ? Cet anglicisme désigne ceux qui cumulent plusieurs activités : graphiste/céramiste, journaliste/producteur, coach/consultant ... « Les slashers incarnent une vision transformée du monde du travail, ayant intégré la précarité comme mode d'emploi et ne rêvant plus de salaires mirobolants mais juste les conditions d'une vie épanouie ». Faute d'avoir su garder cet élan de solidarité qui faisait le charme du salariat, les entreprises, en ne misant que sur la « gestion des talents », ont sacrifié sur l'autel du retour sur investissement rapide les valeurs de cohésion du travail salarié. Leur conception essentiellement utilitariste de leurs salariés corrélée à la montée des désirs des individus, à la nécessité de faire face aux aléas de l'économie, et à sa « vitualisation » signent le délitement du salariat. « C'est de notre capacité à faire revivre les vraies solidarités de proximité, de redonner leur légitimité aux communautés, que dépend l'avenir », en conclut Jean-Pierre Gaudard.

Une histoire du salariat, de 1789 à nos jours
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Depuis plusieurs années maintenant, la fin du salariat – voire du travail – est un sujet à la mode, que ce soit dans les pages des magazines « grand public » ou par la voix d’économistes. Tous n’ont pourtant pas, a priori, de sympathies particulières pour Karl Marx, qui appelait, dans son ouvrage Salaire, prix et plus-value publié en 1865, les travailleurs à « inscrire sur leur drapeau le mot d’ordre révolutionnaire : « Abolition du salariat » ». D’où cet étrange paradoxe. Lors de son congrès confédéral de 1995, la CGT a, un siècle après sa création et alors que « l’hiver de la colère » battait son plein, adopté un nouvel article premier de ses statuts qui renonçait à son objectif de « disparition du salariat et du patronat », pour celui de combattre « l’exploitation capitaliste et toutes les formes d’exploitation du salariat ».

Bien évidemment, ce paradoxe n’est qu’apparent. Les premiers s’extasient devant les promesses « libératrices » – de profits – de l’économie numérique et de l’ubérisation du code du travail, tandis que la CGT entend défendre et étendre les droits collectifs et individuels des travailleurs, tout en reconnaissant la lutte des classes. Pour autant, ce paradoxe d’actualité a le mérite de nous interroger sur le salariat.

Qu’est-ce que le salariat ? Le dictionnaire Trésor de la langue française informatisée lui donne une double définition : soit le « mode de rémunération du travail par le salaire ; état, condition de salarié », soit « l’ensemble des travailleurs salariés », avec pour antonyme le patronat. D’emblée, observons que le salariat est un statut économique et juridique, dont il est possible de retracer l’histoire, mais aussi un concept politique.

L’histoire du salariat a fait l’objet de multiples travaux universitaires, avec des approches différentes : juridique, sociologique ou encore anthropologique. Elle n’est pas exempte de polémiques ou de divergences qu’il ne s’agit pas de résumer ici, mais dont il faut avoir conscience.

Robert Castel, dans son ouvrage Les Métamorphoses de la question sociale paru en 1995, fait débuter son histoire du salariat au Moyen-âge. Il recense ainsi onze formes de salariat ou de semi-salariat préindustriel qui ne réunissent pas encore toutes les caractéristiques du rapport salarial, à savoir « la possibilité de circonscrire l’ensemble de la population active, un dénombrement rigoureux des différents types d’emploi et la clarification de catégories ambiguës d’emploi comme le travail à domicile et les travaux agricoles, une délimitation ferme des temps d’activité opposés aux périodes d’inactivité, le comptage précis du temps de travail. » Ainsi énoncées, ces caractéristiques témoignent que le salariat ne se limite pas au versement d’une rétribution contre la réalisation d’un travail, mais que ses implications sont bien plus profondes. Pour sa part, Claude Didry estime que l’émergence du salariat est plus tardive et qu’il faut se garder d’identifier ces différentes formes comme autant de « traces », « d’embryons » du rapport salarial moderne.

Le louage d’ouvrage

La Révolution française est souvent réduite au triomphe de la bourgeoisie sur l’ordre féodal ainsi que sur les ouvriers, qui furent privés de leur droit de se coaliser et de faire grève par le décret d’Allarde de mars 1791 et par la loi Le Chapelier de juin 1791. La Révolution française a aussi été le point de départ d’une mutation conduisant à la construction d’un statut juridique contractuel pour le travail. Celui-ci est formalisé dans le Code civil adopté sous le Premier Empire en 1804 sous le terme de « louage d’ouvrage », défini par l’article 1710 : « Le louage d’ouvrage est un contrat par lequel l’une des parties s’engage à faire quelque chose pour l’autre, moyennant un prix convenu entre elles. » Relevons ici que la condition ouvrière entre dans le droit commun applicable à l’ensemble des citoyens, ce qui est une forme de reconnaissance.

Le cadre juridique du « louage d’ouvrage » est précisé par les articles 1779 à 1799 qui distingue trois grandes catégories : le louage dit « de services » qui concerne le travail domestique, le louage « des voituriers par eau et par terre » et le louage « des entrepreneurs d’ouvrage par devis et marché ». Cette dernière catégorie différencie quatre groupes : les « propriétaires », c’est-à-dire les clients ; les « architectes ou maîtres », c’est-à-dire les négociants qui livrent un ouvrage à un client et à l’égard duquel sa responsabilité est engagée ; les « entrepreneurs, maçons, charpentiers et ouvriers » ; les « personnes » employées par les précédents. Le premier groupe commande un ouvrage au second, qui lui soumet un devis. Une fois celui-ci accepté, le second confie la réalisation complète ou partielle de l’ouvrage au troisième, qui emploie éventuellement le quatrième groupe.

Trois remarques découlent de ce qui précède.

Tout d’abord, il faut reconnaître, avec Claude Didry, que la situation ne peut se résumer à une « dichotomie simple entre ouvriers et patrons, présupposant l’existence d’un travail subordonné par nature. » En effet, les différents groupes distingués témoignent de l’existence d’un groupe ouvrier fragmenté et hétérogène, un « monde ouvrier aux multiples visages » pour reprendre l’expression de Gérard Noiriel, entre le chef d’atelier (entrepreneur d’ouvrages à façon), le contremaître, l’ouvrier à façon, les apprentis et les compagnons. Les conflits au sein du groupe ouvrier sont ainsi très nombreux, même si des valeurs communes comme l’attachement à la République contribuent à les souder. Le prolétariat d’usine, qui travaille pour la grande industrie, progresse peu. Ainsi, on en recense, avec Gérard Noiriel, 400 000 en 1789, 1,2 million en 1848, 3 millions (et 3,4 millions d’ouvriers agricoles) en 1881. Une majorité se trouve dans le textile, suivi par le bâtiment et la métallurgie. Il faut noter la place importante qu’y tiennent les femmes, les enfants et les étrangers. Numériquement peu important, ce prolétariat d’usine subit des conditions de travail terribles et des salaires insuffisants. Mais il ne faut pas imaginer que la situation soit meilleure pour le travailleur à domicile ou l’artisan !

L’affrontement se dessine plutôt avec les négociants et les commerçants, ceux-ci relevant d’un droit d’exception fixé par le Code du commerce adopté en 1807.

La conflictualité sociale tend à se focaliser sur la définition du prix de l’ouvrage. La dimension collective n’en n’est pas absente, par la jurisprudence devant les conseils de prud’hommes dont le premier est constitué à Lyon en 1806, par la définition d’usages reconnus par les différents acteurs de la profession et éventuellement inscrits dans des règlements, par l’existence de séries appelées « mercuriales » publiées par certaines municipalités.
Les dérives du louage d’ouvrage

La Révolution industrielle, tardive en France, ne bouleverse pas radicalement l’organisation de la production. Que ce soit dans le textile, industrie dominante à la fin du XIXe siècle ou dans les installations industrielles les plus importantes, comme la sidérurgie, le louage d’ouvrage est pratiqué, et les dérives sont monnaie courante.

En effet, le louage d’ouvrage peut prendre la forme du « marchandage » ou du « tâcheronnat » : un preneur d’ouvrage se charge, à la suite d’une convention avec un entrepreneur principal et moyennant un certain prix, d’une portion de travail qu’il fait exécuter par des ouvriers de son choix qu’il rétribue d’après les accords qu’il forme avec eux. Le preneur d’ouvrage est donc un ouvrier vis-à-vis de l’entreprise et un entrepreneur vis-à-vis des ouvriers qu’il emploie. Son intérêt est de baisser les prix, pour être compétitif, tout en rognant sur la part reversé aux ouvriers, afin de conserver son bénéfice.

L’expression la plus violente du marchandage est celle du sweating-system, une forme de cascade de sous-traitance frappant les femmes, les immigrés et les enfants travaillant à domicile, en particulier dans le secteur de la mode, de la confection et du jouet. Ces pratiques ont connu une large diffusion en France et dans le monde et peuvent, selon Pauline Barraud de Lagerie se définir de la manière suivante : « un lieu de production caractérisé par de mauvaises conditions de travail (salaire de misère, temps de travail excessif, environnement insalubre) et inscrit dans une chaîne de sous-traitance ».

Ces pratiques sont vivement dénoncée par les ouvriers, tant pour la misère qu’elle engendre que contre le principe d’une entr’exploitation ouvrière, mais son interdiction par un décret de mars 1848 reste sans effet jusqu’à la fin des années 1890. Deux événements y mettent un terme. Les décrets Millerand d’août 1899 impose, dans le cadre des marchés publics, le paiement d’un « salaire normal » fondé sur les mercuriales et sur le rappel de l’interdiction du marchandage. De son côté, la Cour de cassation finit par préciser la portée du décret de 1848 dans un arrêt célèbre le 31 janvier 1901.
Le contrat de travail

Cette dénonciation des dérives du louage d’ouvrage est, selon Claude Didry, au cœur de l’œuvre législative dans laquelle se lance les députés socialistes à la toute fin du XIXe siècle : Millerand, Jaurès, Groussier ou encore Viviani. Cette œuvre est confortée par la création de l’Office du travail, ancêtre du ministère du Travail, en 1891.

Une proposition de code du travail est ainsi soumise en 1898 à la Chambre, avant d’aboutir à son adoption par le Sénat entre 1910 et 1927. Cette proposition, rédigée par Groussier entre 1896 et 1898, est plus qu’une simple compilation des textes existants aux yeux de Claude Didry. La création du « contrat de travail » permet de « dépasser la segmentation des activités productives en une multitude d’ouvrages, pour cerner l’ensemble de ceux qui, en contribuant à la réalisation d’une marchandise ou, plus largement d’un produit, se trouvent liés par un contrat de travail à celui que l’on va nommer employeur. » Cette création s’accompagne de la reconnaissance progressive de la subordination du salarié à l’employeur, subordination technique dans un premier temps, puis subordination économique et enfin subordination juridique à partir de 1931.

Ce contrat de travail « dessine les contours d’un monde du travail qui, manifestement, dépasse ceux du monde ouvrier », dans la mesure où celui-ci se définit comme « le contrat par lequel une personne s’engage à travailler pour une autre qui s’oblige à lui payer un salaire calculé, soit à raison de la durée de son travail, soit à proportion de la quantité ou de la qualité de l’ouvrage accompli, soit d’après tout autre base arrêtée entre l’employeur et l’employé. »

En parallèle s’ouvre une réflexion sur la portée de la convention collective (la première convention au sens contemporain du terme a été signée à Arras en 1891) et même si la loi n’est finalement adoptée qu’en 1919, cette réflexion aboutit à orienter la négociation vers la création de normes collectives s’appliquant aux contrats individuels. Les lois sur la prud’homie de 1905 et 1907 accompagnent enfin ce mouvement, en élargissant son champ de compétence à l’ensemble des industries et à l’ensemble des salariés, (employés et chefs d’atelier compris), ainsi que les femmes.

La Première Guerre mondiale joue un rôle catalyseur dans ce processus et conduit à une première généralisation du contrat de travail, à la reconnaissance des délégués d’atelier dans les établissements œuvrant à la Défense nationale et à l’institution de commissions mixtes. Parmi ces dernières, celle de la Seine fut particulièrement active. À l’occasion d’une décision en 1917, elle détermina une forme spécifique de rémunération, en découpant le salaire en trois éléments : Un salaire de base ou « d’affûtage » pour un temps de travail donné ; un système de primes récompensant les ouvriers dépassant le rendement moyen ; un prime de cherté de vie, calculée en fonction du coût de la vie observé. Une telle forme de rémunération s’éloigne considérablement des pratiques du marchandage. Désormais les travailleurs sont individuellement liés à l’entreprise, sur la base d’un contrat de travail. En parallèle, le sweating-system est remis en cause par l’adoption de la loi du 10 juillet 1915 qui prévoit la responsabilité du commanditaire et la rémunération à l’heure et non plus aux pièces.
Les classifications

La poussée révolutionnaire qui agite la France et l’Europe entre 1917 et 1920 achève l’implantation du salariat, avec l’adoption d’une première législation sur la durée du travail et la reconnaissance des conventions collectives. Ainsi, la négociation ouverte en 1919 sur l’application de la journée de travail de huit heures dans la métallurgie recense deux types d’ouvriers, les manœuvres et les professionnels, les seconds se subdivisant en 91 catégories réparties en sept branches industrielles.

Ce premier accord national de classification dans la métallurgie tombe rapidement en désuétude, là encore faute de pouvoir contraindre le patronat à le respecter. Malgré tout, il sert de repère aux salariés durant l’entre-deux-guerres.

En 1936, la victoire électorale de la gauche et les puissantes grèves qui l’accompagnent obligent le patronat à accepter des règles collectives et à renoncer à son « droit de discuter en tête-à-tête avec chacun de ses ouvriers », comme le rappelle Léon Blum, lors du procès de Riom en 1942. Des milliers de conventions collectives sont signés et parmi elles, le 12 juin, celle de la métallurgie de la région parisienne. Les métallos CGT n’ont pas voulu bouleverser la hiérarchie salariale, mais retranscrire les pratiques existantes sur le terrain, tout en corrigeant les abus flagrants et en imposant des salaires horaires minima garantis. S’ils obtiennent que les catégories et les hiérarchies proposées soient inscrites dans l’accord de classifications, en revanche, ils ne parviennent pas à imposer totalement les niveaux de salaires revendiqués. Au final, la classification se présente sous la forme d’une longue liste des métiers auxquels correspond un salaire.

À la Libération, les salaires restent au cœur des revendications, dans un contexte où les pénuries alimentent une inflation galopante. L’État conserve le monopole de fixation des salaires et opère une remise en ordre des salaires. Cela prend la forme d’arrêtés et de décisions du ministre du Travail, Alexandre Parodi jusqu’en octobre 1945 puis Ambroise Croizat de novembre 1945 à décembre 1946 et de janvier à mai 1947. Ces textes définissent, après consultation des syndicats et du patronat, le champ d’application (une industrie, une branche professionnelle), une hiérarchie salariale fondée sur le métier pratiqué et le niveau d’apprentissage (la qualification) et déterminent enfin, pour chaque échelon, une fourchette dans laquelle doit s’inscrire le salaire moyen.

Le premier arrêté, du 11 avril 1945, concerne la métallurgie. On remarque d’emblée la filiation avec la grille établie en 1936 pour les métallos de la région parisienne et que l’enjeu est d’élever le niveau des salaires et de relever les maxima. Malgré tout, la logique des abattements, c’est-à-dire la réduction des salaires pour les jeunes, les femmes ou selon la zone géographique, n’est pas tout de suite remise en cause.

La loi de février 1950 acte le retour à la liberté de négociation des salaires, sans que les nombreuses conventions collectives territoriales n’abandonnent les grilles Parodi et Croizat. Bien au contraire, la FTM-CGT milite pour y intégrer les évolutions techniques et les défendre contre les tentatives de l’UIMM de réduire le rôle des classifications dans la détermination des salaires.

Les lendemains de la Seconde Guerre mondiale voit également la naissance du statut de la fonction publique avec l’adoption de la loi du 19 octobre 1946. Parmi les garanties offertes, il faut relever le recrutement par la voie du concours, qui garantit une certaine égalité entre les postulants, la reconnaissance du grade (dont le fonctionnaire est titulaire et dont il ne peut être privé sans des raisons précises et argumentées) et de l’emploi (le poste effectivement occupée par le fonctionnaire et qui doit correspondre à son grade), le principe d’un déroulement de carrière par l’ancienneté, le concours et l’appréciation hiérarchique. Ces garanties ont constitué un point de repères pour les salariés, y compris dans le secteur privé, comme en témoigne la lutte pour la reconnaissance de la qualification.
La généralisation du salariat

La première moitié du XXe siècle est marquée par l’émergence de la société salariale, c’est-à-dire par la généralisation progressive du salariat à la quasi-totalité de la population active. Le taux de salariat passe de moins de 50 % de la population active en 1830 à 62 % en 1936 et près de 90 % au début des années 2000.

La structure du salariat évolue lentement jusqu’aux lendemains de la Seconde Guerre mondiale. Les deux décennies suivantes sont toutes autres et sont le théâtre de profondes mutations. Tout d’abord, l’exode rural s’accélère brutalement. Entre 1955 et 1975, le secteur agricole perd 40 % de ses exploitants et 70 % de ses salariés, au point que la population agricole représente moins de 10 % de la population active en 1975.

Ensuite, le groupe ouvrier atteint son apogée en 1954, et représente alors 61 % des salariés. En chiffre absolu, le maximum est atteint en 1975. Mais l’extension des services publics et le développement des sciences et techniques entraînent un accroissement massif des professions libérales, des ingénieurs, cadres, techniciens et agents de maîtrise, ainsi que des employés. En parallèle, le groupe ouvrier connaît des évolutions. En 1954, les ouvriers qualifiés et les contremaîtres représentent 46 % du groupe, devant les manœuvres et les ouvriers spécialisés (41,5 %). Vingt ans plus tard, les seconds représentent 55 %, avec une implantation bien différente : grande industrie en province (automobile, électronique, électroménager), principalement des femmes, des immigrés et des jeunes sans qualifications.

Le statut salarial correspond donc à un statut juridique, le contrat de travail, qui comporte la reconnaissance de la subordination juridique du salarié ainsi que des droits individuels. Mais il comprend également une dimension collective importante, puisque ce statut ouvre la porte au rattachement du salarié à un ensemble de droits collectifs découlant du droit du travail et du droit conventionnel.

Trois éléments consolident ce statut.

Tout d’abord, la création d’un salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) en 1950, remplacé par le salaire minimum interprofessionnelle de croissance (SMIC) en 1970. Ce dernier est indexé sur le taux d’inflation et le taux de croissance économique. Cette mesure est essentiel, car, selon Robert Castel, « elles définissent et donnent un statut légal aux conditions minimales d’accès à la condition salariale. » Le salarié a l’assurance de percevoir une partie des fruits du développement économique, confirmant que le salaire n’est pas qu’un mode de rétribution économique.

Le second élément est la mise en œuvre de la mensualisation entre 1969 et 1978. Celle-ci met fin à la coexistence dans les entreprises de deux statuts, celui des ouvriers « horaires » payés à la quinzaine et celui des employés, techniciens, dessinateurs et agents de maîtrise payés au mois. Il ne s’agit pas que d’une harmonisation du calendrier des paies, une douzaine de différences existant entre les deux statuts. Ainsi, les « horaires » ne percevaient pas de primes d’ancienneté, touchaient une indemnité moindre lors du départ en retraite ou du licenciement et bénéficiaient d’une prise en charge moins favorable de la maladie, de l’accident ou de la maternité.

Le troisième élément est celui des classifications. Les grèves de mai-juin 1968 ont contraint l’UIMM à engager des négociations sur leur refonte. Sur ce sujet, le congrès fédéral de 1971 impulse la revendication d’une grille unique de classification, dans le cadre de sa bataille pour l’obtention d’une convention collective nationale de la métallurgie. Un accord est finalement signé le 21 juillet 1975, sans la CGT. Cette nouvelle grille rompt avec la logique des « listes de métiers » des grilles Parodi et Croizat, en instituant une nouvelle technique de classification, par « critères classant », après évaluation des postes. Le rôle primordial obtenu par les directions d’entreprise dans la décision de classement est contrebalancé par la reconnaissance des qualifications (les diplômes) de l’individu.

Malgré ce dernier point, la CGT juge l’accord insuffisant : la grille ne sert qu’à déterminer des minimas régionaux, sans référence au SMIC ; l’absence d’échelle mobile des salaires ne garantit pas le pouvoir d’achat ; les agents de maîtrise ne sont pas reconnus ; les ingénieurs et cadres sont exclus et leur grille est intégrée à la convention collective nationale de 1972 ; le déroulement automatique de carrière n’est pas prévu.

Parmi les droits attachés au salariat, ceux relatifs à la protection sociale ne doivent pas être ignorés. La mise en œuvre de la sécurité sociale, par les ordonnances de 1945, s’inscrit dans une histoire plus longue : régime de l’indemnisation des accidents du travail (1898), puis des maladies professionnelles (1919), création d’un régime général de retraites (1910), des premières assurances sociales (1928-1930). Mais, en 1945, le tournant est plus profond. Il s’agit d’un plan général, complet visant à garantir quatre risques sociaux : maladie, vieillesse, famille et accidents du travail. La logique est celle de la solidarité (entre les générations, entre les biens-portants et les malades, entre les plus riches et les plus modestes) et de redistribution.

Ce salaire « indirect », socialisé, représente rapidement près d’un quart des revenus salariaux. Cette part, issue de la valeur ajoutée produite par la force de travail, échappe aux logiques du marché et du profit et représente un filet de sécurité, tout d’abord pour les salariés, puis rapidement pour toute la population (75 % de la population est couverte en 1975, 99,2 % en 1984).
Les attaques

Les années soixante sont le point de départ d’une remise au cause du statut salarial. L’ouverture des marchés (création de la Communauté économique européenne en 1958), l’impératif de compétitivité, la concentration du capital industriel et bancaire dans le cadre de la planification, l’abaissement des coûts de production, restructurations de branches complètes de l’économie (textile, mines, sidérurgie, machine-outil, construction navale, etc.), généralisation de la sous-traitance, entrainent la mise en place de mesures destinées au chômage (création de l’UNEDIC pour indemniser le chômage en 1958-1959, financement des préretraites avec la création du Fonds national de l’emploi en 1963, apparition de l’ANPE pour le placement des chômeurs en 1967) et des premières formes de flexibilisation : loi sur les licenciements (1973), encadrement de l’intérim (1972), apparition des contrats à durée déterminée (1978).

Cette remise en cause se poursuit jusqu’à nos jours, tant pour démanteler la protection sociale et son financement, que pour offrir au patronat les moyens de contourner des droits collectifs et individuels jugés « trop contraignants » : élargissement des possibilités de recours au CDD (1985, 1986, 1990 projets avortés de contrat d’insertion professionnelle (CIP) en 1994 et de contrat première embauche en 2006, création du statut d’auto-entrepreneur en 2008, mise en place de la rupture conventionnelle la même année, apparition des contrats de chantier et des contrats de projet ou de mission pour les ingénieurs et cadres…

Résultat, depuis 2000, le taux de salariat a légèrement reculé, avec la progression de l’emploi indépendant, tandis que la flexibilité et la précarité, subies par la jeunesse et les sans-emplois, est érigée en objectif des projets gouvernementaux et du patronat, UIMM en tête avec son « nouveau dispositif conventionnel ».

Pour autant, le salariat reste majoritairement dominé par le contrat de travail à durée indéterminée, sans que cela ne protège de la dégradation des conditions de travail ou des ruptures brutales. Il reste également un point de repère essentiel pour les travailleurs placés hors-salariat par les attaques les plus récentes, à l’image des conducteurs VTC ou des livreurs à vélo qui portent, parmi leurs revendications, la reconnaissance d’un contrat de travail et non d’une simple relation commerciale. L’obtention de la requalification permet d’obtenir le bénéfice de disposition relevant du droit du travail comme les congés payés, le SMIC, la mutuelle obligatoire d’entreprise, les arrêts maladie, le respect des durées maximales de travail et droit au repos ou encore les indemnités de licenciement.

En guise de conclusion, on peut noter que le salariat est une construction juridique dont l’impact économique et social est extrêmement important sur la société. Le syndicalisme a accompagné son développement sur deux fronts : le premier pour améliorer le statut de salarié en obtenant des droits collectifs et individuels permettant de soustraire, pour partie, le salarié à l’arbitraire patronal. Le second a été de suivre, parfois avec un temps de retard, l’évolution du salariat, de sa structure et de sa répartition géographique et professionnelle. Ces deux fronts, indissociables, sont toujours ouverts plus d’un siècle après la naissance du syndicalisme et le contenu des attaques patronales et gouvernementales sur les droits collectifs et individuels des salariés ces deux dernières décennies témoignent que les possédants ne renoncent jamais. À nous de poursuivre le combat !

Ces employés qui refusent les responsabilités - Capital.fr
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Accepter de prendre ses responsabilités dans la vie.
Recovered Economic History: “Everyone but an idiot knows that the lower classes must be kept poor, or they will never be industrious” - By Yasha Levine - The eXiled

Recovered Economic History: “Everyone but an idiot knows that the lower classes must be kept poor, or they will never be industrious”

Our popular economic wisdom says that capitalism equals freedom and free societies, right? Well, if you ever suspected that the logic is full of shit, then I’d recommend checking a book called The Invention of Capitalism, written by an economic historian named Michael Perelmen, who’s been exiled to Chico State, a redneck college in rural California, for his lack of freemarket friendliness. And Perelman has been putting his time in exile to damn good use, digging deep into the works and correspondence of Adam Smith and his contemporaries to write a history of the creation of capitalism that goes beyond superficial The Wealth of Nations fairy tale and straight to the source, allowing you to read the early capitalists, economists, philosophers, clergymen and statesmen in their own words. And it ain’t pretty.

Les intellectuels SS dans l’appareil nazi - Café Histoire
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Juristes, économistes, linguistes, philosophes ou historiens, ils ont été nombreux, ces intellectuels allemands, éduqués, cultivés, à choisir de s’engager au sein des organes de répression du Troisième Reich. Ils ont théorisé et planifié l’élimination de vingt millions d’individus de race prétendument « inférieure ». Comment et pourquoi ces personnes « éduquées », ces intellectuels, ont-ils pu glisser vers l’innommable, alors qu’ils étaient censés posséder les clés de compréhension de cette idéologique destructrice qu’était le nazisme ?

C’est à ces questions – et aux vôtres – que l’historien Christian INGRAO, spécialiste du nazisme et du phénomène guerrier, est venu répondre pour la seconde fois !

La faute des intellectuels allemands
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La faute des intellectuels allemands (Par Jacques de Saint Victor Publié le 25/09/2013 à 16:11)

Le rôle joué par les universitaires dans la machine nazie fut important. Hitler et les professeurs, document écrit en 1946 par Max Weinreich, le prouve.

Ce livre est un document historique. Il a été écrit en 1946 par un spécialiste de la culture yiddish pour essayer de comprendre le rôle joué par les universitaires dans la machine nazie. On sort de sa lecture avec un effroi constructif: la pensée, elle aussi, peut tuer. Les constructions théoriques des professeurs allemands ont «fourni les idées et les techniques qui ont conduit à un massacre sans précédent et l'ont légitimé».

Max Weinreich insiste en effet sur cette fonction de légitimation. Il démontre que les auteurs nazis de la première heure n'avaient pas un corpus intellectuel suffisant. Les élucubrations de Mein Kampf ou les écrits de Rosenberg n'étaient pas tenus en grande estime par les Allemands cultivés. Même Les Protocoles des Sages de Sion, antérieurs au nazisme, étaient l'objet de railleries, rappelle Weinreich, qui fut témoin de ce mépris d'avant-guerre. Le nazisme eut donc besoin d'une légitimité académique.

Une légitimité

Aussi, ce sont des professeurs pour beaucoup aujourd'hui oubliés qui, en se ralliant au régime, lui donnèrent à partir de 1933 une forte légitimité. Les nazis firent d'ailleurs très attention à ceux qu'ils nommaient comme recteurs; aussi le cas Heidegger est-il sans appel.

Pourtant, la lecture de Weinreich montre que le philosophe, en raison du langage abscons propre à sa discipline, n'avait pas le poids que la polémique philosophique lui a donné depuis quelques décennies. «Il formule sa pensée dans le langage scientifique auquel il est accoutumé», souligne Weinreich, pour en limiter l'impact.

En revanche, l'impact des juristes comme Carl Schmitt fut bien plus important. Ce brillant professeur de droit savait écrire. Son style précis et accessible lui a permis de toucher les Allemands. Sa fameuse dialectique de «l'ami/ennemi» joua ainsi un rôle central dans «le processus de nazification», prétend Weinreich. L'essai de ce dernier, très aisé à lire, représente, comme le dira sir Martin Gilbert, «un réquisitoire sans appel contre l'élite intellectuelle allemande». Il est à relire aujourd'hui pour saisir la puissance oubliée des idées. Bonnes ou mauvaises.