686 liens privés
En 1770, quand les britanniques posent le pied en Australie, les Aborigènes sont ses seuls occupants. Débute alors pour eux un calvaire de deux siècles dont leur peuple va ressortir meurtri et quasiment anéanti.
Pas de troupeaux, pas de champs labourés, pas de fermes. Quand James Cook débarque à Botany Bay, en Australie, en 1770, il applique ses propres critères pour déterminer que cette terre n’appartient à personne (Terra nullius). Dans son journal, l’explorateur britannique décrit les Aborigènes – qui sont entre 300 000 et 1 million sur cet immense territoire (quatorze fois la France !) – comme une « nation errante, sans agriculture ni industrie ». Il estime donc qu’il peut légitimement prendre possession de cette terre au nom de la couronne britannique, pour laquelle il effectue une mission cartographique.
Ce que Cook n’a pas voulu voir, c’est que les Aborigènes possèdent une connaissance très avancée de la nature et ont des techniques de gestion des ressources bien différentes de celles des Européens. Ils protègent les jeunes pousses et les bébés animaux, prélèvent uniquement les quantités de nourriture qu’ils peuvent consommer. Au-delà, le lien à la terre est constitutif de leur identité : chaque lieu est sacré et porte la trace des ancêtres qui y ont vécu.
L’expansion des colons déclenchent des conflits
Le darwinisme en toile de fond
Les colons blancs s’approprient d’immenses domaines
En 1834, le peuple nyungar lutte farouchement contre l’installation de colons dans la fertile vallée du fleuve Murray. Le gouverneur James Stirling, accompagné de 11 soldats, 5 policiers et de nombreux chiens, décide d’y mettre bon ordre et attaque par surprise au petit matin. En une heure, 80 Aborigènes sont tués, soit la moitié de la tribu. Du côté des Blancs, seuls sont à déplorer un blessé et une chute de cheval. De tels massacres jalonnent l’histoire de la colonisation australienne. Face à un rapport de force aussi inégal, les Aborigènes, qui ne veulent pas quitter les sites sacrés qu’ils ont le devoir de protéger et d’honorer, sont contraints de travailler dans les ranchs.
Jusque dans les années 1960, beaucoup ne recevront pour tout salaire que de la nourriture, du tabac ou des vêtements. Des familles aborigènes se mettent aussi à l’agriculture. Mais leurs fermes sont souvent confisquées par le gouvernement ou par des colons voisins qui voient d’un très mauvais oeil l’émancipation de cette main-d’oeuvre gratuite.
1851 : la ruée vers l’or
En 1851, coup de théâtre ! De l’or est découvert en Nouvelle-Galles du Sud et dans le Victoria. L’Australie devient un eldorado. En 1860, on dénombre 1,2 million de colons. Dans le Nord-Ouest, des Blancs observent que des jeunes Aborigènes plongent et rapportent des perles. Ils décident d’exploiter cette ressource.
Des hommes de main partent capturer des enfants et adolescents dans le désert, au lasso. Dès le lever du jour, des petites embarcations les emmènent en mer. Ils vont jusqu’à 10 mètres de profondeur pour ramasser les précieuses perles. Ils risquent leur vie à chaque plongée, sont battus s’ils ne sont pas performants. La plupart ne tiennent pas deux ans, ceux qui survivent gardent des séquelles à vie. Dans tous les cas, ils ne sont pas payés.
« Assimiler la race »
Parallèlement, des milliers d’Aborigènes sont déplacés de façon autoritaire dans des missions où il leur est interdit de pratiquer leurs rites, de chasser, de se marier sans autorisation. Les viols de femmes aborigènes sont monnaie courante. Quand les Blancs voient le nombre de métis augmenter, ils décident d’enlever ceux qu’ils jugent suffisamment clairs de peau à leurs mères pour les placer dans des orphelinats ou au service de familles de colons. Il s’agit de préserver la part d’hérédité blanche, d’« assimiler la race ». De 1885 à 1967, entre 70 000 et 100 000 enfants vont subir ce terrible sort, soit entre 30 et 50% des enfants aborigènes.
Ces fonctionnaires sont convaincus d’agir pour le bien de l’enfant et d’aller dans le sens du progrès, comme l’inspecteur James Idell, qui écrit en 1905 : « L’enfant métis est intellectuellement supérieur à l’Aborigène. C’est le devoir de l’Etat de lui donner une chance d’avoir une vie meilleure que celle de sa mère. Je n’hésite pas une seconde à séparer un enfant métis de sa mère. Passé les premiers chagrins, elles oublient très vite leur progéniture » (extrait du rapport du gouvernement australien Bringing Them Home de 1997). Les enfants enlevés à leurs familles sont éduqués dans la honte de leur culture. On leur donne un nouveau nom. On leur fait croire que leurs parents ne veulent plus les voir, les ont abandonnés. Aux parents, on raconte que leur enfant refuse de les rencontrer.
Des essais nucléaires dans le désert
Dans les années 1950, au désastre humain s’ajoute le désastre écologique. Les Britanniques testent leur arme nucléaire dans le désert australien. Le 15 octobre 1953, une bombe de dix kilotonnes explose à Emu. Le nuage radioactif s’élève à 4 500 mètres d’altitude et se déplace ensuite au-dessus du continent. Des centaines d’autres essais suivront. Les Aborigènes voient maintenant leurs terres irradiées.
Un début de reconnaissance
Malgré ces décennies d’oppression, les Aborigènes ne désarment pas. Dans les années 1960, ils s’approprient les techniques du militantisme occidental pour faire entendre au monde leur principale revendication : le droit à la terre. En 1967, ils obtiennent une première grande avancée : un référendum leur accorde les mêmes droits que les autres Australiens.
En 1992, la Haute Cour reconnaît que les Aborigènes occupaient les terres avant l’arrivée des colons. La même année, le Premier ministre Paul Keating s’exprime ainsi : « C’est nous qui avons dépossédé les Aborigènes. Nous avons pris leurs terres traditionnelles et brisé leur mode de vie. Nous avons apporté un désastre. »
Chronologie :
– 40 000 Des chasseurs-cueilleurs arrivent en Australie.
Avril 1770 James Cook débarque dans le sud-est de l’île.
26 janv.1788 La couronne britannique fonde une colonie pénitentiaire dans la baie de Sydney.
1851 Ruée vers l’or. De 400000, le nombre de colons grimpe à 1,2million en 1860 et 1,6million en 1870.
1er janv. 1901 Sous le nom de Commonwealth of Australia, les colonies prennent leur indépendance par rapport au Royaume-Uni.
1967 La discrimination contre les Aborigènes dans la Constitution est abolie.
1992 Annulation du principe de Terra nullius (terre sans maître) en vigueur depuis Cook.
13 fév. 2008 Le gouvernement australien présente des excuses officielles aux peuples aborigènes.
Rares sont les opposants à la colonisation jusqu’au milieu du XXe siècle. A part les royalistes et la droite nationaliste qui préféreraient que l’armée se concentre sur sa revanche contre la Prusse, toute la classe politique chante les louanges de l’« œuvre de civilisation »…
La conquête coloniale s’inscrit dans la continuité du mouvement de « régénération » initié par la Révolution française. La nation n’a-t-elle pas d’abord civilisé par l’éducation les enfants bretons, basques et occitans? C’est maintenant au-delà de ses frontières qu’elle doit diffuser ses valeurs.
« Notre nouvelle conquête est chose heureuse et grande. C’est la civilisation qui marche contre la barbarie. C’est un peuple éclairé qui va trouver un peuple dans la nuit. »
Victor Hugo, en 1841, au général Bugeaud, alors en pleine « pacification » de l’Algérie.
- Assurer l’essor économique
- La hiérarchie des races
« Le Nègre est à peu près un homme comme les autres. Mais il faudra de longues années d’effort pour qu’il arrive à valoir les peuples blancs qui se sont emparés de sa patrie. »
Un manuel scolaire de géographie de 1926.
- Favoriser la paix sociale
Traumatisées par la Commune de Paris et inquiets de l’essor du mouvement socialiste, les élites espèrent que la colonisation permettra de fédérer le peuple autour d’un projet commun.
« La colonisation en grand est une nécessité politique tout à fait de premier ordre. Une nation qui ne colonise pas est irrévocablement vouée au socialisme, à la guerre du riche et du pauvre. »
Le philosophe Ernest Renan, en 1871, dans La Réforme intellectuelle et morale de la France.
- Briller dans le concert des nations
Les hommes politiques de la fin du XIXe siècle sont convaincus de l’importance cruciale de l’entreprise coloniale pour le destin de la France alors engagée dans une compétition féroce avec les autres puissances européennes.
« Pour reprendre véritablement le rang qui lui appartient dans le monde, la France se doit de ne pas accepter le repliement sur elle-même. C’est par l’expansion, par le rayonnement dans la vie du dehors, par la place qu’on prend dans la vie générale de l’humanité que les nations persistent et qu’elles durent ».
Le républicain Léon Gambetta en 1872.
Pendant plus de deux siècles, quatre millions d’esclaves ont peuplé des terres françaises. Deux millions d’entre eux sont nés en Afrique et ont été transportés par des navires négriers dans les colonies, les deux autres millions y sont nés. Il existe des histoires de la colonisation française, des histoires de chaque colonie, des histoires générales de la traite, mais il n’existait aucune histoire de l’esclavage français, dans l’ensemble des colonies françaises (Guadeloupe, Martinique, Réunion, Guyane, Saint-Domingue…), sur toute la période coloniale. Le livre de Frédéric Régent, grâce au renouvellement de l’historiographie sur le fonctionnement des sociétés esclavagistes françaises, comble un vide et permet de répondre à de nombreuses questions : Pourquoi des Français ont-ils été amenés à devenir des esclavagistes ? Pourquoi ont-ils choisi de recourir à la traite négrière ? Comment les notions de Blancs et de Noirs ont-elles été inventées ? Quel bénéfice la France tire-t-elle de l’économie esclavagiste ? Quelles sont les limites à l’exploitation des esclaves ? Pourquoi la France rétablit-elle l’esclavage après l’avoir aboli ? Quel rôle jouent respectivement les esclaves et les abolitionnistes dans le processus d’émancipation ? Un ouvrage essentiel, au coeur d’une nouvelle approche de l’histoire de France.
La France et ses esclaves
Interview parue dans la revue Enjeux, n°199, mai 2008
(via potomitan)
La journée commémorative du souvenir de l’esclavage et de son abolition (10 mai) est une bonne occasion pour revenir sur le livre consacré à l’esclavage de Frédéric Régent qui enseigne à l’Université des Antilles et de la Guyane.
Voici un ouvrage qui présente de façon claire et efficace, en même temps avec une rare précision les acquis les plus récents de l’historiographie de la colonisation française et du fonctionnement des sociétés esclavagistes dans les colonies.
Le refus des explications simplistes, des idées reçues, n’est pas le moindre es mérites de ce travail sur un sujet fortement marqué par des enjeux de mémoire.
Refusant de verser dans le registre de l’émotion ou de l’indignation, l’auteur nous livre une analyse complète et rigoureuse, souvent subtile qui ne recule jamais devant la description de réalités sociales bien plus complexes qu’on ne le croit souvent.
Bref, une synthèse magistrale, première en son genre à embrasser ces deux siècles, des premières installations de colons au décret du 27 avril 1848, durant lesquels des terres françaises portèrent quatre millions d’esclaves. Nous remercions l’auteur d’avoir bien voulu éclairer quelques uns des aspects principaux de son livre en répondant à nos questions.
Fabrice Giovanazzi : Comment la France en vient-elle à choisir l’esclavage et à subventionner la traite négrière pour exploiter ses colonies?
Frédéric Régent: De 1628 à 1642, des marins français capturent des esclaves sur les bateaux négriers étrangers et les introduisent dans les colonies françaises. Des colons français achètent également des esclaves aux navires négriers étrangers. La traite négrière est légalisée par le roi de France Louis XIII en 1642. Hostile au départ, il se laisse convaincre par le fait que la traite négrière lui est présentée comme le meilleur moyen de christianiser les Africains. Son successeur Louis XIV encourage la traite négrière en donnant une subvention pour chaque esclave introduit dans les colonies en 1672. Le commerce des esclaves sera ainsi subventionné jusqu’en 1793. Si dans un premier temps, la monarchie française a encouragé un peuplement français des colonies, très rapidement, elle se rend compte de son échec. Les Français ont du mal à survivre car ils sont davantage victimes des maladies tropicales que les Africains. De plus, avec le développement de la production sucrière, il est plus rentable pour les propriétaires de plantation d’acheter des esclaves que de payer le voyage de serviteurs français, travaillant gratuitement pendant trois ans. La monarchie française se rend compte que la prospérité des îles passe par le développement de l’esclavage. Elle encourage donc la traite négrière, puis codifie l’esclavage avec l’Edit de mars 1685, un des textes fondamentaux du Code Noir. C’est donc la recherche du plus grand profit qui entraîne le choix de l’esclavage et de la traite négrière par la monarchie française, nonobstant toute attitude humanitariste.
Dans ton livre tu mets beaucoup l’accent sur les rapports sociaux très complexes qui s’établissent dans les sociétés coloniales…
En effet, les rapports entre maîtres et esclaves sont très complexes. L’esclavage c’est d’abord un régime de violence. Fouets, chaînes, cachots, mutilations, humiliations font partie de l’arsenal de la terreur dont disposent les maîtres pour dominer les esclaves, souvent 10 fois plus nombreux qu’eux. L’esclave est le bien mobilier de son maître qui peut le vendre, le louer, l’échanger, le donner et aussi l’affranchir. Si le maître ne possède pas le droit de vie et de mort sur son esclave, il est rarement condamné lorsqu’il le tue. L’esclave réduit à l’état de bien mobilier est tout de même baptisé. C’est donc que les maîtres lui reconnaissent une âme. L’Église enseigne la soumission des esclaves à leurs propriétaires. Les colons sont d’ailleurs tout à fait conscients de traiter inhumainement des êtres humains, mais ils considèrent que ces êtres humains sont d’une nature différente. Ce qui ne les empêche pas d’ailleurs d’avoir très fréquemment des relations sexuelles avec des femmes esclaves. Il faut préciser que les Français qui vivent dans les colonies sont dans une proportion écrasante des hommes. Entre 1635 et 1715, les départs de La Rochelle pour les colonies françaises des Antilles font état de 40 femmes sur 6.200 engagés, soit une femme pour 154 hommes. De nombreux colons fréquentent et parfois se marient avec des femmes esclaves amérindiennes, africaines, malgaches ou indiennes. En se mariant avec leur maître ces femmes et leurs enfants deviennent libres. Dans le recensement de la Réunion en 1690, 67% des couples (29 sur 43) sont composés d’un homme français et d’une femme malgache ou indienne. Même lorsqu’elles sont extraconjugales (lorsque le maître est marié avec une femme d’origine européenne fréquente des femmes de couleur), ces relations aboutissent fréquemment à des affranchissements. Certains maîtres gratifient de la liberté les esclaves dont ils ont apprécié le comportement et le travail. Ces esclaves affranchis et leurs descendants forment la catégorie des libres de couleur, eux-mêmes propriétaires d’esclaves. A la fin du XVIIIe siècle, les libres de couleur possèdent environ 20% des esclaves à Saint-Domingue et 5% en Guadeloupe. La quasi-totalité des propriétaires d’esclaves de la Réunion ont une ancestralité mêlée d’Européens, de Malgaches et d’Indiennes.
L’abolition de l’esclavage en 1848, après le précédent avorté de la Révolution française, est à mettre à l’honneur de la IIe République. Tu montres cependant que « le mouvement d’émancipation des esclaves est un processus de longue durée ». Peux-tu nous en dire plus sur ce qui y contribue ?
La première abolition de l’esclavage en 1794 est loin d’être un échec complet. En effet, sur les 600.000 esclaves (Saint-Domingue, Guadeloupe, Guyane) qui bénéficient de l’émancipation, 500.000 (ceux de Saint-Domingue) restent libres. Le rétablissement de l’esclavage est donc partiel. L’exemple de Saint-Domingue qui devient indépendant sous le nom d’Haïti en 1804 entraîne des départs d’esclaves des colonies restées françaises (Guadeloupe, Martinique) vers ce nouvel état. C’est surtout l’abolition de l’esclavage dans les colonies britanniques appliquée à partir du 1er janvier 1834 qui va entraîner de forts mouvements de désertions d’esclaves des colonies françaises vers les îles voisines connaissant la liberté.
En France, des abolitionnistes comme Schœlcher exigent l’abolition immédiate de l’esclavage. Ils ne l’obtiennent qu’à la chute de la Monarchie de Juillet en 1848. Le 27 avril 1848, l’esclavage est aboli dans les colonies françaises. Il faut noter que par deux fois la République abolit l’esclavage, le 4 février 1794 et le 27 avril 1848. Nous pouvons nous étonner de l’écart entre la proclamation de la Première République, le 22 septembre 1792 et la première abolition, 16 mois plus tard. Ce délai s’explique par le fait que les Républicains sont au départ favorable à une abolition immédiate de la traite, mais graduelle en ce qui concerne l’esclavage. D’autre part, Saint-Domingue est alors secouée par une grande insurrection d’esclaves instrumentalisée au départ par les royalistes de l’île et Robespierre considère cette révolte comme une seconde «Vendée». Les Républicains refusent alors de récompenser par la liberté, des esclaves qu’ils croient insurgés contre eux. Lorsqu’en août 1793, l’envoyé de la République Sonthonax abolit l’esclavage à Saint-Domingue, pour rallier les esclaves, à la cause de la République ce qu’il parvient à faire, les Républicains de Paris proclament l’abolition. Le processus d’abolition est lent et combine à la fois l’action des esclaves et des philanthropes. D’ailleurs, les esclaves se nourrissent des écrits abolitionnistes pour comploter ou se révolter de la fin du XVIIIe siècle à 1848.
Alors que sur ce sujet de l’esclavage et de sa mémoire, les polémiques se sont déchaînées ces dernières années, sans toujours hésiter devant l’instrumentalisation, comment situes-tu ton travail et ta réflexion par rapport à ce débat qui a resurgi ces dernières années sur le passé esclavagiste de la France? Dans ce cadre, quel est l’intérêt du 10 mai, « journée commémorative du souvenir de l’esclavage et de son abolition »?
Je situe d’abord mon travail sur le terrain de l’histoire. Les faits historiques déplaisent toujours à ceux qui veulent les instrumentaliser. La connaissance historique évolue sans cesse, il ne peut donc y avoir de mémoire figée des événements du passé. La monarchie française a été esclavagiste. Plutôt que de parler de passé esclavagiste de la France, je préfère évoquer le passé esclavagiste de certaines élites économiques françaises que l’on peut aujourd’hui identifier. En effet, le système esclavagiste crée des entreprises de négoce à échelle internationale. Il participe au développement même de l’esprit du capitalisme au XVIIIe siècle. Il rend indispensable la consommation croissante de denrées non vitales (café, tabac, cacao) produites aux dépens du sang et de la sueur des esclaves, alors que la majorité de la population du royaume n’a pas toujours en quantité suffisante l’aliment de base qu’est le pain. Ce mode de production et de commercialisation est rentable pour quelques milliers de propriétaires de grandes habitations et quelques centaines de négociants. Des deux côtés des océans, ce système profite à des élites aux dépens des masses populaires qu’elles soient serviles, paysannes ou ouvrières. L’approvisionnement en sucre, café, tabac, denrées consommées essentiellement par les élites de la société, se fait au prix du sang et de la sueur des esclaves. Le maintien des colonies esclavagiste nécessite un puissant soutien militaire et financier, payé par le sang et les impôts du petit peuple. Ce dernier est de plus en plus écrasé d’impôts dans les campagnes, exploité dans les manufactures et enrôlés souvent de force dans l’armée ou sur les navires de guerre dans les ports. Le petit peuple du royaume de France paye le prix fort des guerres très coûteuses (guerre de Sept Ans et Guerre d’Indépendance américaine) qui permettent la conservation des colonies esclavagistes La dette publique, creusée par ces conflits, oblige bientôt le roi de France a convoqué les Etats Généraux à la fin de 1788 ce qui débouche sur la Révolution française.
Il y a donc une histoire partagée de la souffrance et de l’exploitation des masses populaires. C’est cette histoire là qui devrait être portée à la connaissance de tous et nourrir la mémoire de ce crime contre l’humanité qui n’a profité qu’à un petit nombre. Jusqu’à aujourd’hui, les commémorations du 10 mai n’ont pas été à la hauteur des enjeux historiques de l’esclavage. Jusqu’à maintenant, les représentants de l’État se sont contentés de célébrer quelques abolitionnistes et de verser une petite larme compassionnée sur le triste sort des esclaves. Il ne s’agit pas de culpabiliser l’ensemble du des Français ce qui serait historiquement faux ou de dire aux descendants d’esclaves oubliez tout, on repart sur des bases nouvelles. Ce qui est nécessaire, c’est un véritable enseignement de la question de l’esclavage dans toute sa complexité. Par ailleurs, la mémoire de l’esclavage dérange parfois, car elle constitue une condamnation sans appel d’une des premières formes de mondialisation capitaliste qu’a été le commerce triangulaire. Cette première phase de globalisation ne s’est pas développée uniquement sur les bases d’une hiérarchie raciale (les noirs=esclaves). Certes, elle a contribué au développement de stéréotypes et d’idéologies racistes, mais elle a provoqué l’enrichissement des catégories sociales aisées en Europe, en Afrique et en Amérique. Il est étonnant de constater que la traite et l’esclavage ne sont souvent questionnés que sous l’angle de la question raciale et non dans ses aspects économiques et financiers. Aujourd’hui encore, les discriminations sont bien plus souvent sociales que raciales. La discrimination raciale étant souvent le fruit de la représentation sociale que l’on se fait de l’autre.
Propos recueillis par Fabrice Giovanazzi.
Les causes de l'expansion coloniale européenne, les processus de colonisation et les résistances qu'ils rencontrent.
Comment et pourquoi, l' Europe étend-elle sa domination politique et territoriale ?
I Les motifs de l'expansion coloniale.
a) La pression démographique.
La forte croissance de la population européenne rend nécessaire l' émigration . 1 M de migrants européens au début du 20 ° s. Les colonies absorbent donc une partie de cette émigration.
b) Des motifs économiques.
Les puissances impérialistes recherchent des produits bruts agricoles et des matières premières.
Cela permet également d'écouler les surplus de production. Il s'agit de trouver des débouchés . Cf grande dépression de 1873-1896.
c) Des raisons politiques.
Volonté d' affirmer une puissance et un prestige. En France, c' est une façon de redorer le blason après la défaite face aux prussiens en 1871.
d) Les prétendue raisons morales.
Un prétexte moral Les européens se croient investis d ' une mission civilisatrice. Convaincus de la supériorité de la race blanche, ils s'attribuent
le devoir de faire progresser les races inférieures. Rudyard Kipling " Fardeau de l'homme blanc "
Il s'agit également pour les Européens d'évangéliser des peuples considérés comme primitifs.
e) Des intérêts stratégiques.
Les tensions restent fortes entre puissances européennes. Après la défaite face aux prussiens la France reste un temps isolée d'un point de vue diplomatique. Les conquêtes coloniales permettent de renforcer la puissance militaire française.
Conclusion: Les motifs de l' expansion coloniale sont nombreux .Les intérêts économiques et politiques européens sont privilégiés ;les devoirs de civilisation et d' évangélisation servent de prétexte.
f) le débat colonial en France.
Il y a en particulier vers 1880 un débat entre " colonistes " et " anticolonistes ".
Les " colonistes " sont souvent des r épublicains modérés et des r épublicains radicaux qui mettent en avant l'intérêt commercial et les motivations humanitaires. Parmi eux figurent Gambetta, Ferry. Eugène Etienne est à l'origine de la création au parlement d'un groupe qualifié de parti colonial.
Les " anticolonistes " dénoncent l'argument raciste de la colonisation, son coût financier (Clemenceau (radical), Jaurès (socialiste)). Certains considèrent que sur le plan géopolitique la priorité nationale doit être la reconquête de la ligne bleu des Vosges ( récupérer l'Alsace et la Moselle). On peut citer le nationaliste Barrès.
Jules Ferry (1832-1893): Avocat, journaliste, Jules Ferry est un républicain sincère. En 1868, il publie une célèbre brochure : Les contes fantastiques d'Haussmann. Membre du gouvernement de la Défense Nationale après le 4 septembre 1870 et maire de paris, il organise le rationnement. Devenu de ce fait impopulaire, "Ferry la Famine" doit quitter la ville au moment de la Commune en 1871. Député des Vosges à partir de 1876, il est l'un des chefs des "opportunistes" et l'un des "pères de la IIIème République". Ministre de l'Instruction Publique de 1879 à 1883, Président du Conseil de 1880 à 1881 et de 1883 à 1885, il joue en effet un rôle essentiel dans l'adoption des grandes lois républicaines, notamment en matière d'instruction. Il fait voter l'obligation, la gratuité et la laïcité de l'enseignement primaire, créée l'enseignement secondaire des jeunes filles et réorganise l'enseignement supérieur. Il engage la France dans une politique d'expansion : la Tunisie, Madagascar, le Congo, le Soudan et le Tonkin passent sous protectorat français. En 1885, il est renversé par les adversaires de sa politique coloniale à cause d'un échec en Indochine et il compte parmi ses adversaires les plus acharnés Georges Clemenceau. Surnommé "le Tonkinois", il échappe de justesse à un attentat en 1887 et il est battu aux élections de 1889 par un candidat boulangiste. Il ne peut par la suite revenir au premier plan, bien qu'il soit élu Président du Sénat en 1893.
Impérialisme : Volonté politique d 'un État d' en dominer un autre de différentes façons (impérialisme culturel, économique , militaire )
II les conquêtes coloniales .
a) 1850-1870 époque des initiatives individuelles .
colonie : territoire placé sous la souveraineté d'un autre état.
La colonisation est relativement lente. Elle est liée pour beaucoup à des initiatives isolées (explorateurs, missionnaires, commerçants )
Ex : Livingstone David, explorateur écossais , né à Blantyre ( 1313-1873 ). Missionnaire protestant, il inaugura, en 1849 une série de voyages en Afrique centrale et australe. Il recherche également les sources du Nil. C'est un adversaire décidé de l' esclavagisme.
Stanley John Rowlands : Journaliste britannique au service du New York Herald. Il fut envoyé en Afrique à la recherche de Livingstone qu'il retrouve en 1871.
Savorgnan de Brazza (1852-1905)
France : conquête de l'Algérie à partir de 1830 (prise d'Alger)
Progression en Afrique noire : Sénégal
1853 . La Nouvelle-Calédonie est annexée .
G-B : Fin de la conquête de l' Inde en 1857
Réseaux de comptoirs complété sur les côtes d` Afrique occidentale
Développement des colonies de peuplement : Canada , Australie , Nouvelle -Zélande, Afrique du Sud.
Comptoir : établissement de commerce d' une nation en pays étranger.
b)1870-1914 : La fièvre coloniale
Les conquêtes de la France et de l' Angleterre se poursuivent
E n Méditerranée Fr. Protectorat sur le Maroc et la Tunisie.
G-B Occupe l'Égypte
En Afrique : Fr. Constitution de deux ensembles. L'AOF en 1895, l'AEF en 1908.
G-B: Kenya, Soudan.
En Asie : Fr. Indochine .
De nouveaux pays entrent dans la course aux colonies.
Belgique :. Etat libre du Congo. Souverain Léopold II.
Allemagne : Implantée au Cameroun ,au Togo et au Tanganyika
Italie : Libye , elle ne parvient pas à conquérir l' Éthiopie .
Russie en Sibérie
Pays-Bas : En Indonésie
États non- Européens : E-U 1898 La victoire américaine sur l'Espagne lui permet d' annexer Puerto Rico et de
contrôler Cuba, Domination sur Hawaï ,Contrôle des Philippines
Le Japon: en 1895, la Chine est vaincue. L'île de Formose, la Corée et la Mandchourie seront ensuite annexées.
c) les limites du processus de colonisation.
Des rivalités :
Les crises entre puissances coloniales se multiplient malgré la tenue de la conférence de Berlin 1885 qui réglemente le partage de l' Afrique. Ex Fachoda. En 1898, une colonne militaire française commandée par le capitaine Marchand prend Fachoda au Soudan et refuse de céder la place au général britannique Kitchener. Les tensions sont vives. Un ultimatum Britannique oblige les français à abandonner la place. La France et le Royaume-Uni furent an bord de la déclaration de guerre.
1905 Conflit Russo-japonais : Première victoire d'une puissance non européenne.
Des résistances :
Elles sont manifestes dès la première phase de la colonisation. Le général Britannique Mac Carthy envoyé par la reine Victoria vers 1847 pour imposer sa domination sur la Gold Coast en fit les frais. Il fut décapité par les Ashanti qui contrôlaient l'or de l'Afrique de l'ouest.
Samory Touré chef malinké du Niger : 1882, première confrontation avec les français.1898, il est capturé. Déporté au Gabon , il y meurt en 1900.
Behanzin, roi du Dahomey. Attaque Cotonou en 1889.Obtient une rente annuelle de 20000 francs. Trahi , il est capturé et déporté en Algérie.
Abd el Kader ,après s'être opposé à la colonisation française en Algérie, meurt en exil à Damas en 1883.
A Madagascar, les résistances précédent la domination et perdurent après la mise en place de la tutelle française. A partir de 1895, débute la révolte des menalamba (toges rouges) qui coloraient leurs vêtements de terre rouge pour passer inaperçus. En 1913 est créé une société secrète : vy vato sakelita - fer pierre ramification (VVS). Elle à pour modèle de souveraineté et de développement le japon. La répression par Gallieni des mouvements de résistance de l’île fait entre 100 000 et 700 000 morts sur une population totale de 3 millions de personnes.
Conclusion : Les origines de la colonisation sont multiples. Elle est justifiée en Europe par des arguments économiques, démographiques, stratégiques et prétendument moraux. L'expansion coloniale est particulièrement forte à partir de 1880. Mais elle connaît tout de même des résistances et des oppositions.
Bibliographie :
Comité scientifique international pour la rédaction d’une Histoire générale de l’Afrique (Unesco), Histoire générale de l’Afrique, VII L’Afrique sous la domination coloniale, 1989
Dernière mise à jour : 03/12.
«L’éducation occidentale est un péché»
Nigeria: Des jeunes filles mineures sont enlevées et contraintes à se convertir à l’islam
Maiduguri, 23 juillet 2013 (Apic) La communauté chrétienne du nord du Nigeria est alarmée par un phénomène qui tend à se répandre : des jeunes filles mineures sont enlevées et contraintes à se convertir à l’islam. La secte islamiste Boko Haram serait mêlée à ces enlèvements, rapporte le 23 juillet 2013 l’agence missionnaire vaticane Fides. Boko Haram multiplie par ailleurs les attaques contre les écoles qui enseignent «l’éducation occidentale».
Des jeunes filles mineures sont enlevées et retenues dans les maisons d’émirs ou de responsables religieux radicaux, parfois liés au groupe Boko Haram, relate la Northern Christian Association of Nigeria (CAN), préoccupée par la croissance rapide de ce phénomène. L’association indique suivre cinq cas à la demande des familles des jeunes filles enlevées. Mais « lorsque l’on signale un cas de ce genre à la police, les agents répondent qu’ils ne peuvent rien y faire. Nous croyons parfois qu’ils sont complices » explique Daniel Babayi, secrétaire de la CAN.
Les chrétiens du nord du Nigeria sont victimes du groupe militant islamique Boko Haram, qui vise à instaurer un Etat islamique. Dans le cadre d’une campagne terroriste qui dure depuis des mois, de nombreuses églises ont été attaquées et des fidèles chrétiens tués. Selon un certain nombre des déclarations publiques, Boko Haram a affirmé que « enlever des femmes chrétiennes fait partie des nouveaux efforts visant à frapper les chrétiens et à les contraindre à quitter le nord ».
«L’éducation occidentale est péché»
Les écoles constituent l’un des objectifs primaires du groupe. Au début du mois de juillet, plus de 40 personnes, en majorité des élèves, ont été tuées dans le cadre d’une attaque perpétrée contre un collège dans l’Etat de Yobe. Lors d’une autre attaque récente, le dortoir d’un institut a été incendié alors que les enfants dormaient, ceux qui cherchaient à s’enfuir ayant été tués.
Boko Haram signifie «l’éducation occidentale est péché» et le responsable de la secte, Abubakar Shekau, a demandé publiquement à ce que les attaques contre les écoles «qui enseignent l’éducation occidentale» se multiplient. Afin de réagir à la guerre déclenchée par Boko Haram contre la nation, les Etats nigérians de Borno, Yobe et Adamawa, dans lesquels les militants représentent la menace la plus forte, se trouvent en état d’urgence depuis deux mois. (apic/fides/cw)
© Agence de presse internationale catholique (apic), 23.07.2013
Les droits de l’ensemble des textes sont déposés à l’agence apic-kipa, repris, à partir du 1er janvier 2015, par le Centre catholique des médias Cath-Info. Toute diffusion de texte est payante. L’enregistrement sur d’autres bases de données est interdit.
Objectif
L’objectif de ce cours est d’étudier l’histoire économique du monde dans la longue durée, en essayant d’intégrer les multiples dimensions de la réalité économique. Il s’agit non seulement de comprendre les facteurs essentiels expliquant l’apparition puis l’essor – aux trois niveaux : national, relations internationales, mondial – du capitalisme mais aussi de s’intéresser à d’autres systèmes économiques qui peuvent être proches ou très différents du mode de production capitaliste. Un aspect important du cours consistera donc à ne pas considérer seulement l’Europe et les Etats-Unis (même si ces économies sont des références essentielles) mais aussi les autres continents.
Plan
•9/09 :
•1 L’Europe au XVIIIe siècle. Dynamiques et transformation de l’économie.
•2 L’Asie, un développement sans croissance (XVe-mi XIXe) ?
•
•23/09 :
•2 L’Asie, un développement sans croissance (XVe-mi XIXe) ? (suite)
•3 Le non développement de l’Afrique XVIIIe-XIXe
•4 Les mécanismes de la croissance (Europe-Etats-Unis) au XIXe siècle
•
•30/09 :
•5 Les mécanismes de la croissance (Europe-Etats-Unis) au XIXe siècle (suite)
•6 Relations économiques internationales et colonisation au XIXème siècle
•
•7/10 :
•7 L’affirmation d’un capitalisme national (1920-1980) (1) La Crise de 1929 (1919-1933)
•8 L’affirmation d’un capitalisme national (1920-1980) (2) Le « New Deal Order » (1933-1980)
•
•21/10 :
•9 L’affirmation d’un capitalisme national (1920-1980) (2) Le « New Deal Order » (1933-1980) (suite)
•10 Une économie planifiée : l’URSS (1913-1989)
• Une économie totalitaire : l’Allemagne nazie (1933-1945)
•
•4/11 :
•11 Du post-fordisme à la troisième Révolution industrielle (depuis 1980)
•12 Economie, finances et mondialisation (fin XXe-début XXIe siècle)
Le document que je transpose ici sur mon blog, devait être adressé en février dernier à tous les chefs de corps des bases et régiments militaires de France directement par des citoyens. Pour différentes raisons, cela n'a pu se faire mais une opération similaire se prépare. La lettre qui sera adressée aux chefs de corps sera globalement similaires dans son contenu, quoi qu'actualisée au vu du contexte du moment. Dans l'attente, ses contributeurs n'ont pas un mot à changer ou à retirer de ce texte, qui appelle nos armées à une salutaire réaction contre notre oligarchie.
A l'ensemble des officiers militaires français,
Nous vous adressons ce message comme nous le faisons auprès de tous les officiers militaires qu’il nous est possible de contacter. Nous souhaitons vous faire part de notre volonté de mettre un terme à plus de quarante années de reniement démocratique, social, diplomatique et militaire de la France.
Nous ne prétendons pas être en capacité de consulter les Français avec les pleins moyens de l’État pour légitimer le fait que nous agissions avec la conscience aiguë de servir le peuple et plus largement la France dans tout ce que nous entreprenons. Les préjugés ayant la vie dure, nous tenons à d’emblée vous faire savoir que nous ne sommes ni un groupuscule anarchiste pas plus qu’un groupement idéologique particulier. Nous avons conscience des réalités présentes et de la nécessité d’État à faire perdurer. C'est pour cette raison même que nous veillons à concourir à la défaisance d’une représentation politique que nous considérons illégitime et extrêmement malveillante contre nos intérêts nationaux.
Il faudrait des centaines de pages pour récapituler les trahisons subies par le peuple ces dernières décennies. Nous prendrons cependant bien soin de restreindre notre réquisitoire à des considérations qui doivent légitimement vous intéresser au premier chef en tant que militaire au service de la France. Cependant, il convient de repréciser le cadre général qui définissait jusque-là la mission de nos armées, en commençant par un bref retour sur l’année 1966 où le Général de Gaulle avertissait nos alliés de l’époque, que la France se retirait du commandement intégré de l’OTAN. Situation qui nous permettait de conserver un lien avec les Etats-membres de ce traité, sans toutefois nous obliger à nous inscrire dans des conflits nuisibles aux intérêts bien compris de la France, ni nous astreindre à développer des armes et munitions en vertu de normes réglementaires prédéfinies par une puissance étrangère. Rappelons à ce stade que les plus grands conflits militaires dans lesquels la France s’est enlisée, ont toujours été des guerres opposant des coalitions d’État, là où la très indépendante Suisse a toujours su se ménager une relative tranquillité militaire et diplomatique durant les derniers siècles. Ce pays n’est ni dans l’UE, ni dans l’OTAN. Durant les deux dernières guerres mondiales, la Suisse est restée très sagement neutre et indéfectiblement indépendante. La fédération helvétique reste à ce jour l’État le plus démocratique et serein sur son économie contrairement à tous les États enfermés dans l’Union européenne. Ce que nos médias se gardent bien de rappeler.
En 1968, le Général de Gaulle précisait définitivement son intransigeance sur le caractère sacré de notre indépendance nationale, cela en édictant que de sa préservation en toutes circonstances, découlait pour notre armée la garantie de n’agir que dans l’intérêt de la nation, sauf si notre secours est réclamé par un pays tiers et que le parlement autorise le déploiement de nos troupes et matériels en ce sens.
Aussi lorsque le premier Président de la Vème République, le 27 janvier 1968 devant les membres de l’institut des hautes études militaires de Paris, expliquait que notre dissuasion nucléaire devait être comprise comme une stratégie de défense « tout azimuts », il considérait bien que ce type d’armement s’inscrivait dans une stratégie plus globale concernant l’usage qui est fait de nos moyens militaires :
« Je voudrais profiter de mon passage ici pour traiter de la stratégie qu’on a dit tout azimuts, dont on a parlé ces derniers temps. Nous faisons oui, un armement atomique. C’est un armement complètement nouveau, qui implique une refonte militaire et une refonte de puissance, sans comparaison avec tout ce que l’on a pu connaître auparavant. C’est une affaire de longue haleine. On ne le fait pas pour demain, mais pour des générations, dans un système de défense et de dissuasion complètement nouveau. Et dans ce long espace de temps, qui peut dire ce que sera l’évolution du Monde ? Dans 20 ans, qui gouvernera les États-Unis et avec quel système ? Qui gouvernera l’URSS ? L’Allemagne ? Le Japon ? … et la Chine ? Qui peut dire ce qui se passera en Amérique du Sud et en Afrique ? Personne sans aucun doute. En fonction de toutes ces incertitudes, nous faisons notre armement nucléaire. Et ce n’est pas la première fois dans notre histoire qu’il en est ainsi ! Vauban, en son époque, a fortifié toutes les frontières de la France, les Pyrénées, les Alpes, nos ports et même la Belgique. Nous sommes allés partout, nous avons fait la guerre partout, nous sommes entrés à Madrid, Berlin et Moscou. Nous avons fait la guerre en Europe, en Orient, en Amérique, en Asie. Il n’y a pas de raison que cette stratégie qui de tout temps nous a protégé contre tout, ne se perpétue pas. Par définition même, notre armement atomique doit être tout azimuts. Il faut que vous le sachiez, que vous le voyiez et que vos études et votre état d’esprit s’y habituent ».
A l’heur où nous sommes les obligés des États-Unis d’Amérique et d’une autre façon, ceux de l’Allemagne, nous vous demandons si vous avez le sentiment que notre indépendance nationale autant que notre stratégie de défense dite « tout azimuts » est bel et bien respectée par notre représentation politique ?
Puisqu’il semble que la trahison soit devenue un acte aussi ordinaire et acceptable, il nous semble toutefois que dresser une liste non exhaustive des forfaitures et renoncements de nos dirigeants, pourrait peut-être éclairer sur l’abandon de notre pays qui est en cours. Le même type d’abandon qui avait prévalu lorsque le parlement capitulait face à l’Allemagne en 1940 et remettait les pleins pouvoirs à Philippe Pétain.
Nous ne prendrons appui que sur des questions militaires et diplomatiques les plus récentes pour en témoigner, tout en notant que le seul fait même d’être sous la tutelle de l’UE, de l’euro et de l’OTAN, est en soi un ensemble d'atteintes considérables et intolérables à notre souveraineté ainsi qu’à notre indépendance nationale.
Le 5 Juin 2014, un article du journal « Le Monde » nous alertait que M. Obama, président d’une puissance paraît-il « alliée » de la France, souhaitait que nous suspendions (annulions) la vente de navires de type "Mistral" à la Russie. Outre les énormes capitaux engagés dans ce contrat, les milliers d’emplois dont il était question, ou encore les considérations diplomatiques sous-jacentes, cette vente avait été négociée moyennant des transferts technologiques, notamment sur des équipements radars dont la France avait la seule maîtrise technologique. Cette vente sera donc annulée par M. Hollande, ce qui outre porter gravement atteinte à nos relations diplomatiques avec une puissance alliée de deux guerres – et parfaitement fiable et utile à nos intérêts soit dit en passant – a permis à cette dernière de finalement jouir de l’acquisition de brevets et données qui ne pouvaient être concédés par la France que sous condition que la transaction soit honorée par les deux parties. A-t-on entendu un seul responsable militaire de haut rang s’indigner de la situation ? Sommes-nous les vassaux des Américains ou sommes-nous souverains sur nos affaires diplomatiques, militaires et commerciales ? N’y a-t-il pas des intérêts fondamentaux que nous nous devons de préserver ?
Poursuivons, avec la guerre subie par la Syrie. D’abord rappelons que nombre de terroristes ayant tué des centaines de nos compatriotes sur notre territoire se sont AGUERRIS EN SYRIE. Ce qui n’a pas empêché François Hollande, mais aussi par l’entremise du Secrétariat Général de Défense et de Sécurité Nationale, son Ministre des Finances de l’époque Emmanuel Macron, d’autoriser la livraison d’armes de guerre à des « rebelles » qui combattaient le gouvernement légitime syrien. M. Fabius, alors Ministre des Affaires étrangères, n’hésitait pas à dire à l’époque que le front Al Nosra faisait « du bon boulot » en Syrie. Nous nous permettons d’insister et le rappeler : des citoyens français ont été tués sur notre sol par des combattants que la France a soutenus et armés en Syrie. Cela relève du financement du terrorisme d’une part au sens de l’article 421-2-2 du Code Pénal, mais aussi purement et simplement de la haute trahison ! Y a-t-il eu un officier de haut rang pour s’indigner de ces « prises de décisions » par des politiciens félons ? Non, la grande muette est restée imperturbablement silencieuse. Y compris lorsque M. Hollande, puis plus tard M. Macron, en réponse à de pseudo-attentats chimiques attribués au gouvernement syrien sans même que des autorités internationales aient eu le temps d’investiguer et rendre un rapport d’enquête établissant de telles conclusions, ont engagé nos forces navales et aériennes dans une série de bombardements sur le territoire syrien. Non seulement ces opérations militaires violaient expressément notre constitution, mais aussi l'article 2 de la Charte de l’ONU ou encore l'article 8 bis des Statuts de Rome sur l’établissement de la Cour pénale internationale, qui dispose que :
Aux fins du présent statut, on entend par « crime d'agression », la planification, la préparation, le lancement ou l’exécution par une personne effectivement en mesure de contrôler ou de diriger l’action politique ou militaire d’un État, d’un acte d’agression qui, par sa nature, sa gravité et son ampleur, constitue une violation manifeste de la Charte des Nations Unies
Ajoutons sur cette affaire calamiteuse, que nombre de nos missiles ont été interceptées par les défenses anti-aériennes syrienne et russe. Etait-il nécessaire que la Russie puisse confirmer être capable d’abattre nos missiles en plein vol, ou du strict point de vue tactique, il aurait été plus sage qu’elle continue d’ignorer nos vulnérabilités dans ce domaine ? Quand des politiciens pour des raisons idéologiques, électoralistes ou d’asservissement à des intérêts étrangers, fragilisent notre armée de toutes les façons possibles, il devrait être une réaction immunitaire de nos soldats et officiers que de rappeler qui détient réellement le monopole de la violence légitime en France. Et ce ne sont certainement pas quelques bourgeois encravatés qui assujettissent notre peuple depuis quelques salons parisiens, qui détiennent et exercent concrètement ce pouvoir des armes.
Poursuivons encore, car nous nous rapprochons de l’objet et de la conclusion de ce courrier. Malgré les incantations angéliques de nos politiciens, il n’y a pas, il n’y a jamais eu, et IL N’Y AURA JAMAIS « d’amitié franco-allemande ». Les Américains comme les Allemands ont des considérations parfaitement anglo-saxonnes quant au regard qu'ils portent sur la France. Du fait que nous représentons une puissance diplomatique et économique pouvant contrarier leurs propres desseins sur le monde, il s’agit pour l'Allemagne et pour les États-Unis de nous affaiblir par des prises de contrôle de notre outil industriel stratégique (Nexter, Alstom, etc), ou encore en jouant de la propension à trahir de nos politiciens s’agissant des alignements diplomatiques attendus. D’ores et déjà, veuillez expliquer aux sous-mariniers français qu’en cas de conflit futur avec les USA, les données relatives au bruit de cavitation et à la vitesse de nos SNA et SNLE ne sont plus inconnus des Américains. Pensez-vous que nous sommes condamnés à rester les vassaux des Américains pour les prochains millénaires à venir, ou il paraît plus sensé pour un militaire de considérer que les menaces peuvent survenir de partout ? Comme si ces vulnérabilités n’étaient point suffisantes, depuis le 22 Janvier 2020, nous avons cédé à l’Allemagne des pans entiers de notre indépendance militaire et diplomatique. Cela en acceptant que nos politiques extérieures soient subordonnées aux considérations allemandes en vertu du Traité d’Aix la Chapelle ; en leur octroyant gratuitement une place conjointe au Conseil de Sécurité de l’ONU ; et acceptant que des ministres allemands puissent venir directement au sein même des plus hautes instances de l’État, participer à des réunions ministérielles concernant nos propres affaires intérieures. Depuis la collaboration sous le Régime de Vichy, jamais nous n’avions été aussi loin dans notre asservissement à l’Allemagne !
Cette dernière d’ailleurs, ne cache désormais plus sa volonté de voir la France partager son outil de dissuasion nucléaire avec elle, et M. Macron, tel « un cabri », n’a pu s’empêcher de faire un discours le 7 février dernier à l’École de guerre à Paris, avalisant cette requête allemande portée par le député Johann Wadephul :
« Je souhaite que se développe un dialogue stratégique avec nos partenaires européens qui y sont prêts sur le rôle de la dissuasion nucléaire française dans notre sécurité collective »
Combien d’officiers ont rappelé au TRAÎTRE Emmanuel Macron, que la stratégie de défense de la France, et en particulier sur le plan nucléaire, est « tout azimuts » et que nous avons eu par le passé suffisamment de guerres avec l’Allemagne, pour qu’il n’y ait absolument rien à négocier à ce sujet ?
Nous ne fabriquons plus nos fusils et munitions et sommes totalement dépendants d’une production industrielle délocalisée hors de France, pour fournir à nos armées les moyens matériels d’assurer leurs missions. Mais en cas de conflit ouvert au sein même de l’espace européen où le jeu des alliances serait renversé, croyez-vous qu’il serait encore temps de se poser la question de restaurer notre indépendance industrielle et technologique ? Non, il sera bien évidemment trop tard. On n’ouvre pas des usines sur un claquement de doigt. Gouverner, c’est prévoir dit l’adage. Et ceux qui usurpent leurs fonctions au sein même de l’appareil d’État, n’ont nullement ce principe conducteur dans leur logique de gestion du pays. Si ce n’est pour négocier avec des pays tiers la cession de nos actifs les plus stratégiques.
Or, puisque aucun d’entre nous pas plus que le reste de nos compatriotes, ne souhaite que la France subisse un jour une nouvelle guerre, et pire encore, qu’elle soit dans l’incapacité de compter sur ses propres ressources au point de nous conduire sur les sentiers d’une défaite largement prévisible, nous exigeons de l’ensemble de nos officiers qu’ils cessent de se taire face à cette situation gravissime. L’unique moyen de nous préserver de la guerre outre une diplomatie de paix, c’est encore et toujours le fait de disposer de la puissance nécessaire pour réfréner toutes volonté belliciste de n’importe quel État-tiers sur notre pays.
Il vous apparaîtra sans doute étrange que vous soyez saisis par des citoyens qui dans leurs aspirations premières, souhaitent instaurer une réelle démocratie en France, notamment par la rédaction et le vote d’une nouvelle constitution. Des doux rêveurs ! Des utopistes ! Des anarchistes ! Voilà ce que l’on pourrait imaginer à notre propos. Si bien sûr notre mouvement est hétéroclite dans sa composition, nous ne nous revendiquons d’aucune idéologie politique particulière. Nous estimons simplement que si la Suisse peut se permettre le luxe d’être un État développé, bien portant économiquement, parfaitement indépendant et démocratique de surcroît, la France ne peut pas faire moins.
Nous ne prétendons pas abolir l’ensemble de nos institutions les plus essentielles ni être inconscients de la marche de l’État. Nous souhaitons juste que le citoyen qui n’a ni influence ni richesse particulière à faire valoir, puisse lui aussi disposer du droit de légiférer et voter les lois, voire révoquer nos dirigeants lorsqu’ils nous trahissent. Cela ne signifie nullement fragiliser l’État ou affaiblir notre structure diplomatique et militaire. Vous avez sans doute comme beaucoup d’entre nous des enfants à qui vous allez léguer un pays qui pourra être au choix, un régime totalitaire s’étant progressivement installé sur fond de lâcheté de la majorité du peuple mais aussi d’un très grand nombre de fonctionnaires et militaires qui avaient les moyens d’entraver les desseins politiques les plus malveillants de notre oligarchie ; ou un État démocratique et social dans lequel il fera bon vivre.
Aucun putsch n’est nécessaire pour établir une démocratie, mais il va de soi qu’aucune révolution ne peut se faire sans le soutien actif ou plus passif des armées d’un pays. C’est une règle indépassable : toutes les révolutions obligent au « Grand Soir » venu, les armées d’une nation à se prononcer. Or vous n’êtes pas sans savoir que depuis le 17 novembre 2018, la France est entrée de plein pied dans une crise politique durable et dont nous n’avons pas encore atteint le paroxysme, quand bien même la dictature sanitaire en cours a de quoi nourrir toujours plus notre colère. Viendra un jour où nous renverserons notre oligarchie. Peut-être dans le sang s’il n’est plus possible d’utiliser d’autres recours.
Nous réclamons à ce titre le soutien de nos armées envers le peuple qu’elles ont la charge de protéger. Aucun militaire n’est subordonné au gouvernement. Tous sont soumis au commandement de la nation toute entière. Et M. Macron n’est nullement légitime pour être l’intercesseur entre le peuple et nos armées. La place des traîtres à la patrie est en prison ! On les fusillait même au sortir de la seconde guerre mondiale.
Aussi cette lettre doit être comprise autant comme une mise en garde qu’un appel à prendre position. Rien ne vous empêche de transmettre un tel courrier à votre hiérarchie pour lui signifier que vous ne savez pas comment y répondre. Cette même hiérarchie qui par principe, continuera de faire remonter jusqu’à l’État-major notre requête puisque personne ne dispose du grade nécessaire pour répondre à notre mise en demeure. Ce courrier qui sera distribué aux plus grand nombre d’officiers ayant à charge d’administrer des régiments et bases militaires, ne pourra de toute façon être ignoré de l’Armée toute entière, nous y veillerons.
Aussi nous espérons que notre adresse saura toucher votre sensibilité de soldat au service de la nation, car c’est avec toute l’expression de notre respect pour votre engagement pour la France, que nous vous la communiquons.
Dans l’espoir qu’il se trouve encore des hommes d’honneur pour savoir dire « non » lorsque les principes les plus élémentaires sont bafoués,
Représentations courantes des autochtones
Autochtones, Diversité et médias, Stéréotypes
Cent ans de westerns et de documentaires ont formé l’idée que le public se fait des autochtones, du vieux sage (Little Big Man) à l’ivrogne (Tom Sawyer), du fidèle sous-fifre (Le pacte des loups, The Lone Ranger) à la princesse indienne (Pocahontas). Autant d’images qui se sont imprimées de manière indélébile dans la conscience des Nord-Américains.
La version hollywoodienne de la « Conquête de l’Ouest » s’est longtemps appuyée exclusivement sur le thème de féroces tribus indiennes qu’il fallait asservir ou anéantir. «En outre, dit le dramaturge Drew Hayden Taylor, de la nation Ojibwa, « les vrais » Indiens » ont été très longtemps absents des plateaux de tournage. Leurs rôles étaient tenus par des Italiens ou des Espagnols à la peau assez basanée pour ne pas avoir besoin de maquillage ». D’ailleurs, il y a quelques années, c’est à l’acteur philippin Lou Diamond Philips que l’on a demandé d’incarner un Inuit dans le film Agaguk.
Cette représentation de personnages autochtones, dépeints tantôt comme primitifs, violents et sournois, tantôt comme passifs et soumis, s’est répandue dans les émissions télévisuelles et dans la production littéraire, que ce soit dans les romans ou les bandes dessinées. Elle est devenue le confortable canevas de référence de la plupart des Occidentaux chaque fois qu’il était question de peuples autochtones, alors même que très peu d’entre eux avaient l’occasion d’en rencontrer dans la réalité. Même si les anciens westerns se déroulaient rarement au Canada, les stéréotypes qu’ils ont véhiculés ont traversé les frontières.
« Il faudra attendre la seconde moitié du XXe siècle avant que les producteurs de cinéma en viennent à l’idée qu’il existait toujours des communautés autochtones et qu’elles pouvaient mener des vies intéressantes, dit Drew Hayden Taylor. Ce n’est qu’alors que des films comme Pow Wow Highway, Dance Me Outside ou Phoenix, Arizona ont commencé à dresser un portrait nouveau et contemporain des autochtones, même si ce portrait restait encore romancé. » Au Québec, c’est sans doute le cinéaste et documentariste Arthur Lamothe qui a joué le rôle de pionnier en réalisant de 1973 à 1983 La chronique des Indiens du Nord-Est et du Québec, une série de 13 documentaires dans laquelle il donnait la parole aux autochtones. Sa carrière, par la suite, est émaillée de nombreux films et projets ayant pour objectif de documenter la vie quotidienne et les luttes des Premières Nations, plus particulièrement des Innus.
Dans les années 1980 et 1990, la Société Radio-Canada a fourni un réel effort pour améliorer l’image qu’elle donnait des autochtones dans ses séries télévisées. Dans Spirit Bay, Sur la côte du Pacifique, Au nord du 60e et The Rez, des membres des Premières Nations interprètent des personnages inspirés de la vie réelle de leurs communautés qui ont un vrai métier et vivent dans un endroit précis. Au nord du 60e et Sur la côte du Pacifique ont attiré un public nombreux, aussi bien autochtone que non-autochtone. À partir des années 2000 et avec le développement de la consultation des nouvelles sur Internet, Radio-Canada a consacré des dossiers spéciaux abordant différents thèmes sur les peuples autochtones : les pensionnats indiens, les jeunes autochtones ou les revendications territoriales font partie de ces capsules.
Aux États-Unis, la télévision a été plus lente à répondre à la critique. Sauf dans les nouvelles et les documentaires, les visages autochtones étaient presque entièrement absents du petit écran et, jusqu’à tout récemment, presque rien n’avait été fait pour améliorer la situation. À la fin des années 1990, l’American Indian Registry for the Performing Arts in Los Angeles a publié un annuaire de comédiens professionnels d’origine amérindienne et, en 2001, après avoir reconnu que « les Amérindiens étaient pratiquement invisibles à la télévision », CBS et NBC ont organisé des spectacles promotionnels dans les grandes villes américaines pour enrichir leurs répertoires de comédiens amérindiens.
De la fausse représentation, d’une manière ou d’une autre
L’avènement du « politiquement correct » et des efforts véritablement sincères ont contrebalancé certaines formes ouvertes ou subtiles de racisme à la télévision et au cinéma, mais beaucoup de traces demeurent des anciens stéréotypes. Voici les pièges les plus courants.
Visions romancées
La princesse indienne, le grand guerrier et le bon sauvage ont fait rêver des générations de non-autochtones.
La princesse indienne
C’est une jeune beauté qui, gagnée aux valeurs de l’Homme blanc, abandonne généralement son groupe pour épouser le héros et l’aider à civiliser ses frères encore sauvages. « C’est un concept purement européen, écrit Joseph Riverwind, un Américain d’origine amérindienne. La notion de royauté est étrangère à nos communautés. Nous n’avons ni rois, ni reines, ni princesses. » Gail Guthrie Valaskakis, ancienne directrice de recherche à la fondation autochtone de Guérison du Canada, le confirmait. En 2000, elle a organisé, en collaboration avec Marilyn Burgess, une exposition intitulée Indian Princesses and Cowgirls – Stereotypes from the Frontier, qui retrace les multiples utilisations du mythe de la princesse indienne aussi bien dans des peintures romantiques évoquant un « Nouveau Monde à la beauté exotique et dangereuse » que sur de banales étiquettes de conserves de fruits ou de boîtes de cigares. Ces figures féminines, disait Gail Valaskakis, ne ressemblent en rien aux femmes « fortes, compétentes, au discours articulé » avec lesquelles j’ai grandi sur une réserve du Wisconsin. Ces propos sont cependant à nuancer puisque certains événements culturels autochtones comme les pow-wow tendent à valoriser cette image de la princesse. Ainsi, des jeunes femmes sont élues princesses du pow-wow en raison de leur attachement aux valeurs traditionnelles de respect, de partage et de solidarité. Cette image de la princesse ne renvoie pas à une vision romancée et stéréotypée, mais bien à une volonté d’inverser une tendance : le modèle de la jeunesse a été pendant longtemps celui de la destruction de soi, du vandalisme et de la consommation de drogues et d’alcool. Aujourd’hui, les modèles ont changé : on honore quelqu’un pour sa réussite, ses succès et son engagement dans la défense des valeurs de son groupe.
Le grand guerrier
Effrayant de férocité, menace pour la société civilisée, le grand guerrier indien est probablement un des stéréotypes les plus largement utilisés dans l’histoire du cinéma. Quand, torse nu, il brandit sa lance, il incarne la quintessence d’une sauvagerie bouillonnante de rage, le symbole des terribles obstacles que les « civilisateurs » de l’Ouest doivent courageusement surmonter. On en retrouve plus récemment une nouvelle incarnation, romantique et érotisée, celle du guerrier fort et silencieux, « vêtu du strict minimum et à la recherche d’une femme blanche à ravir », comme le fait remarquer le journaliste Paul Gessell. Un exemple récent de ce phénomène est personnifié dans le personnage Jacob Black du saga littéraire et filmique Twilight. Jacob est un membre des Quileute qui, en tant que loup-garou, représente le stéréotype du grand guerrier de manière littérale.
L’image du grand guerrier apparaît sous de multiples formes et dans les endroits les plus surprenants. Dans son exposition de photos intitulée Scouting For Indians, 1992-2000, Jeff Thomas, de la Réserve des six nations, en Ontario, dévoile ces guerriers indiens retrouvés aussi bien sur des statues et monuments historiques que sur les armoiries de banques et d’immeubles à bureaux d’Ottawa ou sur la couverture de livres récents. Le but de Jeff Thomas était de mettre en évidence par ses photos « la diabolisation et l’érotisation » souvent inconscientes des Indiens. Au Québec, c’est le Mohawk Flynt Eagle qui a joué dans plusieurs productions cinématographiques récentes qui cristallise cette image de guerrier.
Le bon sauvage
Le désir de réparer les torts passés a contribué à populariser un autre vieux stéréotype romantique, le mythe du bon sauvage. Hissé sur un piédestal d’impossible bonté, inatteignable par une société blanche irrémédiablement contaminée, le bon sauvage, généralement en étroite communication spirituelle avec la terre, qualifié par l’universitaire américain Rennard Strickland de « premier écologiste », flotte dans un nuage de mysticisme et n’attache aucune valeur aux possessions matérielles. Ce vernis romantique n’épargne même pas le très populaire Cœur de tonnerre. « À en croire ce film, dit Gary Farmer, un acteur canadien de la nation Cayuga, il suffit de réunir une demi-douzaine d’autochtones dans une pièce pour obtenir aussitôt une prophétie ou une vision. »
Déformations historiques
Gary Farmer cite le film canadien à succès Robe noire, qui raconte la quête d’un missionnaire jésuite parti sauver l’âme des Hurons (que l’on appelle aujourd’hui Hurons-Wendats), comme un exemple typique de ces reconstitutions historiques vues sous l’angle des Blancs qui irritent particulièrement les autochtones. « Robe noire, dit-il, omet un élément clé. Il ne fait jamais mention des cinq siècles de paix entre les six nations de la Confédération iroquoise. Les Hurons étaient les premiers à considérer la dévastation provoquée par l’alcool des Blancs comme une décadence qu’il fallait extirper radicalement. Et les Iroquois ont averti ceux d’entre eux encore épargnés par le fléau de partir avant qu’ils viennent nettoyer la place. » D’après Gary Farmer, cet aspect de la question n’a jamais été expliqué et la véritable histoire de ce conflit pourtant classique entre peuples autochtones et non-autochtones n’a ainsi jamais été abordée.
Les producteurs de films et de séries télévisées ne se gênent pas pour prendre des libertés avec l’histoire lorsque certains détails risquent de gâcher leur scénario. Et c’est particulièrement vrai de leur représentation de la vie autochtone, où ils se sont octroyé tous les droits dans la description des mœurs, costumes, mode de vie, croyances spirituelles et cérémonies. Cette vision réductrice du patrimoine et de la diversité culturelle, dont le public est généralement inconscient, est considérée par les critiques à la fois comme le symptôme du problème (le manque de sérieux accordé à la culture autochtone) et l’occasion de perpétuer des stéréotypes particulièrement graves.
D’après le critique Ward Churchill, ce qu’on peut voir dans bien des films « correspond approximativement au résultat qu’obtiendrait un réalisateur qui habillerait un prêtre catholique du costume d’un pasteur protestant et le coifferait de la calotte d’un rabbin pour lui faire dire la messe devant le pentagone d’un culte satanique, sous prétexte que ces symboles matériels tirés de diverses croyances spirituelles augmentent l’intérêt visuel ».
Stéréotypes par omission
La plupart des films où apparaissent des autochtones se passent durant une période d’une cinquantaine d’années, à cheval sur la moitié du XIXe siècle. Où étaient les Premières Nations avant l’arrivée de l’Homme blanc ? Où sont-elles maintenant ? Apparemment, elles n’ont pas survécu au passage à l’ère moderne.
Dans Stereotyping Indians by Omission, on nous fait remarquer que les Indiens sont « le seul peuple à être représenté beaucoup plus souvent dans des films historiques que contemporains ». « Comment expliquer, continue-t-il, que malgré l’importante communauté autochtone de Chicago on ne voie jamais un seul Indien recevoir des soins dans la série Urgences ? Et où sont passées les infirmières autochtones, une profession pourtant particulièrement populaire chez les femmes indiennes ? »
D’ailleurs, le stéréotype par omission le plus flagrant dans les films et les séries télévisées concerne les femmes autochtones. Elles n’y sont que rarement présentes et, quand elles le sont, c’est sous l’aspect de « sauvages sexuelles » impossibles à dompter, qui doivent donc être dégradées avant d’être conquises. L’Office national du film du Canada s’est attaqué, en 1986, à cette amnésie culturelle en produisant une mini-série en quatre épisodes intitulée Daughters of the Country, dont le but était de « rouvrir les livres d’histoire » et de raconter l’évolution du peuple métis à travers la vie de quatre femmes à la forte personnalité. Malgré ces efforts, le femmes autochtones continuent d’être sous-représentées dans les médias.
Personnages sans épaisseur
L’aspect peut-être le plus destructeur de la représentation des autochtones au cinéma et à la télévision vient du manque de caractère et de personnalité des personnages qu’ils incarnent. Il s’agit la plupart du temps de rôles de soutien ou de figuration qui ont rarement l’occasion de parler ou d’exprimer une véritable personnalité. Et le peu qu’ils en révèlent n’existe que dans le contexte de leur interaction avec les Blancs. Les autochtones sont rarement représentés comme ayant des forces et des faiblesses individuelles ou montrés en train d’agir en fonction de leurs valeurs et jugements personnels.
Il n’est également jamais permis aux autochtones de raconter leur propre histoire. La plupart des intrigues sont racontées du point de vue des Blancs, des Européens. Une technique couramment employée par Hollywood pour rattacher des valeurs européennes à une histoire autochtone est d’y insérer un personnage blanc qui fait office de narrateur (Danse avec les loups, Cœur de tonnerre). Sous prétexte d’accorder un traitement favorable à l’autochtone, on le prive de sa voix.
Le problème sous-jacent
De nombreux universitaires soutiennent que la façon dont Hollywood représente les autochtones repose sur des raisons beaucoup plus profondes que le simple désir d’attirer un maximum d’auditoire.
Dans American Indians: Goodbye Tonto, J. R. Edwards affirme que les autochtones ont rempli la mission qui leur était assignée dans la société américaine, que « la résistance indienne a servi à nourrir les mythes de gloire et de conquête, de droit divin de l’Amérique à la conquête ». Et il existe encore une école de pensée pour qui les stéréotypes de l’Indien et du « Far West » doivent être préservés dans la société moderne. « Des gens ont avantage à ce que les Américains continuent d’ignorer… ce que les Américains d’origine européenne leur ont fait », écrit Wendy Rose dans un article pour le New Yorker, intitulé « Who Gets to Tell Their Stories ? »
Ward Churchill est lui aussi persuadé que les mythes et stéréotypes élaborés autour des autochtones ne sont pas dus au hasard. Selon lui, ils servent à justifier l’élimination des tribus indiennes et de leurs cultures par une société plus « avancée » au nom du progrès et exigent par là même l’effacement des réalisations et de l’humanité même des vaincus : « La déshumanisation, la destruction ou l’appropriation de l’identité de l’autre, la subordination politique et la colonisation sur le plan matériel font partie intégrante du processus commun impérialiste. La signification des stéréotypes hollywoodiens de l’Amérindien ne peut se comprendre pleinement que dans un tel contexte. »
Robert Harding est professeur de travail social et de services à la personne à la University of the Fraser Valley en Colombie-Britannique, au Canada, et un spécialiste des questions touchant aux autochtones et aux médias. Il a présenté ses conclusions sur la manière parfois controversée dont les autochtones sont traités dans les médias canadiens. Dans une conférence intitulée « Analyse comparative de la couverture des questions relatives aux autochtones canadiens dans les grands journaux et dans la presse autochtone », M. Harding a présenté les résultats de travaux de recherche effectués entre 1996 et 2002 sur les Stó:lo, une communauté des Premières Nations qui habite le littoral du Pacifique canadien, près de la frontière américaine. Il a analysé 90 articles d’information publiés dans certains journaux canadiens, soit The Vancouver Sun, The Province et The Globe and Mail. Pour cette recherche, deux questions ont été adressées : Comment les médias présentent-ils les autochtones ? Quels sont les thèmes récurrents de la couverture des autochtones dans les médias ?
Les recherches démontrent que les autochtones sont le plus souvent présentés comme de nobles écologistes, des guerriers importuns ou des victimes politiques. Pour réfuter ces idées fausses, il suggère notamment de diffuser davantage d’information sur la réalité autochtone, d’améliorer la formation des communicateurs, d’impliquer les autochtones dans les processus de changement et d’utiliser les médias internationaux pour influer sur les affaires locales. Devant l’Association des journalistes, le professeur Harding a présenté aux journalistes costaricains une analyse raffinée des peuples autochtones du Canada ainsi que ses conclusions sur la façon dont ils sont traités dans les médias canadiens. Son analyse de l’expérience canadienne a servi de mise en garde contre la présentation stéréotypée des peuples autochtones par les médias des autres pays.
Mais c’est sans aucun doute le cinéaste cri Neil Diamond qui pose le regard le plus perspicace, sur la relation entre Hollywood et les autochtones. Son documentaire Hollywood et les Indiens (2010) a gagné plusieurs prix en s’attaquant aux représentations des autochtones dans les films d’Hollywood. Par l’entremise de nombreuses entrevues avec des réalisateurs tels que Clint Eastwood et des extraits de films tous pertinents, Neil Diamond nous entraîne sur les routes de l’Amérique, explore la façon dont le mythe de l› « Injun » a modelé notre compréhension et notre incompréhension des autochtones. Parmi les célébrités figurant dans Hollywood et les Indiens, mentionnons Robbie Robertson, musicien et compositeur de bandes sonores d’origine juive et mohawk (Raging Bull, Casino, Gangs of New York), l’acteur cherokee Wes Studi (Le dernier des Mohicans, Geronimo), les cinéastes Jim Jarmusch (Dead Man) et Chris Eyre (Phoenix, Arizona) et les acteurs autochtones acclamés Graham Greene (Danse avec les loups, Cœur de tonnerre) et Adam Beach (Phoenix, Arizona ; Mémoires de nos pères de Clint Eastwood). Neil Diamond s’est aussi rendu dans le Nord, à Igloolik, ville isolée du Nunavut comptant 1500 habitants, où il a interviewé Zacharias Kunuk, réalisateur du film Atanarjuat, la légende de l’homme rapide, lauréat de la Caméra d’or.
Dans cet article, nous mettons en avant 10 preuves de la surdélinquance des individus d'origine étrangère. Le lien délinquance-immigration est clair.