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La sociocratie est un mode de gouvernance partagée qui permet à une organisation, quelle que soit sa taille, de fonctionner efficacement selon un mode auto-organisé caractérisé par des prises de décision distribuées sur l'ensemble de la structure. Son fondement moderne est issu des théories systémiques et date de 19701. La sociocratie s'appuie sur la liberté et la co-responsabilisation des acteurs. Dans une logique d'auto-organisation faisant confiance à l'humain, elle va mettre le pouvoir de l'intelligence collective au service du succès d'objectifs communs. Cette approche permet donc d’atteindre ensemble un objectif partagé, dans le respect des personnes, en préservant la diversité des points de vue et des apports de chacun, ceci en prenant appui sur des relations interpersonnelles de qualité.
La sociocratie utilise certaines techniques mises au point par son concepteur qui fondent son originalité, notamment l'élection sans candidat, et la prise de décision par consentement2. À la différence de la démocratie qui peut concerner un ensemble de personnes n'ayant aucune relation fonctionnelle entre elles, la sociocratie concerne des individus réunis par des objectifs au sein d'une organisation et qui ont donc des relations de plus grande proximité.
Conseillisme ou communisme de conseils
Définition du conseillisme ou communisme de conseils
Etymologie : du latin consilium, conseil, assemblée, avec le suffixe -isme, servant à former des mots correspondant à une attitude, un comportement, une doctrine, un dogme, une idéologie ou une théorie.
Le conseillisme ou communisme de conseils désigne une théorie ainsi qu'une pratique adoptées par différents mouvements politiques, de manières parfois contradictoires, au début du XXe siècle.
L'origine et la référence de ces mouvements se trouvent, selon les luxemburgistes (Cf. Rosa Luxemburg), dans les conseils ouvriers, de paysans ou de communes qui se sont créés en Russie ("soviets") en 1905 et en 1917, en Allemagne lors de la Révolution de 1918-1919, en Italie avec l'expérience des conseils ouvriers de Turin (1919) et en Hongrie en 1956.
Les conseils ouvriers, qui sont une forme de démocratie directe, rassemblent l'ensemble des prolétaires. Le conseillisme se réclame d'une continuité du mouvement ouvrier et se caractérise souvent par :
- un rejet des syndicats, considérés comme des organisations réformistes qui servent à canaliser les luttes sociales et non à les développer,
- le refus de participer aux élections. Seule la lutte sociale permet d'obtenir des acquis sociaux.
- l'absence de soutien aux luttes dites "de libération nationale".
Pour le conseillisme, ce sont les conseils ouvriers qui doivent diriger la révolution. Le communisme de conseils s'oppose donc au "communisme de parti" et en particulier aux conceptions de Lénine pour qui c'est le parti qui doit diriger la révolution et la société socialiste. Il rejette également les dérivés du léninisme : trotskisme, stalinisme, maoïsme, guevarisme, etc.). Ayant pour but une société sans classes, le communisme de conseils est résolument anticapitaliste.
Le conseillisme est parfois appelé "communisme de gauche".
Estonie, n° 1 du numérique
par Jean Pelletier
Nous sommes à un moment de notre histoire où tout nous questionne sur le développement (trop) rapide du numérique. Il se propage à toutes les couches de notre société. Beaucoup de dossiers restent encore en suspens. N’allons-nous pas trop vite ? Qu’en est-il de la protection et la sécurité de nos données ? Notre vie privée n’est-elle pas en train de nous échapper ? Que faire pour ceux que l’âge ou le handicap éloignent du numérique. Ne faudrait-il pas jeter un coup d’œil attentif à l’un de nos voisins, qualifié d’excellent élève du numérique ?
À l’heure de toutes ces interrogations, l’Estonie (qui n’a pris son indépendance qu’en 1991 et a adhéré à l’Union européenne en 2004) fait figure de modèle mondial en matière de numérique. Elle a été classée « société numérique la plus avancée au monde » par le magazine Wired (magazine américain spécialisé dans les nouvelles technologies). L’Estonie se révèle une précieuse source d’inspiration, particulièrement pour sa gouvernance au service des innovations.
Une société du tout numérique
Selon un autre magazine américain, Freedom House, en misant sur la citoyenneté numérique, l’entreprise virtuelle et l’éducation innovante, l’Estonie a acquis la réputation d’être un des pays les plus libres via son économie, sa presse et Internet. Certes, on peut toujours relativiser en disant qu’il s’agit d’un État minuscule de 1,3 million d’habitants. Mais sa réactivité à l’essor des technologies de l’information et l’arrivée d’Internet est extraordinaire. Le gouvernement estonien entreprend alors sa stratégie dite du « Bond du Tigre » au milieu des années 1990 en prenant appui sur un déploiement systématique des infrastructures informatiques. Le souvenir des années soviétiques empreintes de terribles lourdeurs administratives a été le catalyseur de ces réformes.
Très vite, le digital règne en maitre dans tout le pays et fait partie intégrante de sa population au quotidien dans tous les domaines publics comme privés. Qu’il s’agisse de payer ses impôts, de créer son entreprise, d’aller chercher ses médicaments, d’assurer le suivi scolaire de ses enfants… Les différents gouvernements qui se sont succédé ont vite compris l’enjeu que représentait le tout numérique pour occuper une bonne place dans le concert de nations. Le Premier ministre en estime l’impact à l’équivalent d’une économie de 2 % de PIB par an. La digitalisation de l’ensemble de l’administration correspond à une économie de papier, que nous pouvons envier, correspondant à la hauteur de plusieurs tours Eiffel.
La carte d’identité numérique a été adoptée par 98 % des Estoniens (2001). Elle est le sésame pour toutes les actions qu’ils souhaitent entreprendre :
voter en ligne, bien sûr (2005) ;
accéder aux transports en commun ;
payer leurs impôts ;
communiquer avec les écoles de leurs enfants ;
demander une subvention ;
gérer leur santé (ordonnances médicales dématérialisées) ;
1500 services sont en ligne.
Résultat garanti : moins de paperasseries, moins de bureaucratie, gain de temps.
En termes de participation des citoyens à l’action du gouvernement, il est un autre exemple : Rahvaalgatus.ee, le portail estonien d’initiative citoyenne lancé en 2016. Le peuple a ainsi la possibilité d’exprimer des propositions collectives et surtout de les soumettre au parlement… Sur une quinzaine de propositions de lois adressées par ce canal, trois ont été votées par le parlement.
Le numérique, booster de l’économie
e-Estonie, n° 1 du numérique 2Mais l’Estonie est allée encore plus loin, en créant le statut d’e-résidents (33 000 personnes) en 2014. Celui-ci est accessible à tous les étrangers. De l’autre bout de la planète, vous pouvez tranquillement créer votre propre entreprise en Estonie, la gérer et bien sûr de bénéficier de la fiscalité avantageuse du pays. Plusieurs milliers d’entreprises ont vu le jour en quelques années. Le Brexit a précipité ainsi plusieurs milliers d’entreprises britanniques vers cette solution pour rester dans le marché européen (howtostayin.eu).
Cet environnement particulièrement facilitant aux entreprises numériques hisse l’Estonie au rang de nation possédant le plus grand nombre de startups rapporté à sa population.
L’économie estonienne compte à ce jour pas moins de 8 licornes :
Skype (2005)
Taxify Bolt (2018)
Playtech (2007)
TransferWise (2015)
Pipedrive (2020)
Zego (2021)
Veriff
Enfin, la mise en œuvre du programme e-Estonia, soit une simplification réelle des démarches administratives, place l’Estonie au rang de la société digitale la plus progressive au monde.
« La petite république » qui a intégré en 2004 l’Union européenne peut s’enorgueillir d’une croissance des plus rapide de la communauté.
Du coup, ses habitants bénéficient d’une couverture de soins universelle, d’une éducation gratuite et réputée. Dans le domaine culturel, elle n’a rien à envier à la France, elle a de nombreux musées, médiathèques, théâtres. Elle a le plus grand répertoire de chansons par habitant au monde.
Elle est réputée pour son affirmation des libertés civiles, de la liberté de sa presse (selon RSF, elle est classée quatorzième dans le monde en 2020) et d’une école citoyenne classée parmi les premières d’Europe.
Tartu – capitale culturelle et intellectuelle de l’Estonie – La fontaine des amoureux
Forte de ses acquis, l’Estonie exporte son modèle dans de nombreux pays africains. C’est un continent en pleine croissance. Les dirigeants africains ont compris que le numérique était un point d’appui efficace pour leur économie, créateur d’emploi, en particulier pour la jeunesse.
L’Estonie occupait il y a une quinzaine d’années la même situation. Sa réussite exemplaire est donc un parfait sésame pour ouvrir les portes du marché africain.
La cybersécurité est de fait au centre des préoccupations des dirigeants estoniens. Ce petit pays, il y a peu encore sous influence soviétique, a connu en 2007 une cyberattaque massive qui a perturbé pendant plusieurs semaines le fonctionnement de toutes les institutions : banques, médias, administrations…
Rejoignant les préoccupations de l’OTAN en la matière, cette dernière a ouvert son centre de cybersécurité en Estonie. Le gouvernement estonien, aux fins d’éviter toutes mêmes mésaventures d’attaques par des cyberterroristes, a mis en place au Luxembourg l’équivalent d’une e-ambassade. C’est-à-dire un datacenter qui stocke la totalité des données du pays (documents d’identité, législation, impôts, retraites…). Cet ensemble bénéficie du coup des mêmes principes d’extraterritorialité qu’une ambassade classique.
Ce sujet est d’actualité, car si une invasion terrestre survenait en Estonie, un gouvernement en exil pourrait poursuivre sa gouvernance grâce à ce formidable Back-up.
Hack the crisis
Estonie
Les Estoniens encore à la pointe de la lutte pour la démocratie (Photo prise à Tallinn en juillet 2015)
Face à la pandémie actuelle, c’est encore une fois en prenant appui sur ses ressources numériques que le gouvernement estonien a fait face. Au plus haut de la crise, ce dernier lance l’idée d’un hackathon, « Hack the crisis », qui se déroulera en ligne.
Prenant appui sur la plateforme d’innovation créée par le ministère des Affaires économiques, Accelerate Estonia, et une startup spécialisée dans l’organisation d’hackathons, Garage48, l’opération est lancée.
Chaque participant est incité à mettre en avant une idée permettant de répondre aux enjeux sanitaires que pose l’épidémie et de la partager ainsi avec la communauté.
C’est un jury d’experts, privés et publics, qui choisit parmi les meilleures idées cinq lauréats. Ceux-ci sont dotés de 5 000 euros pour amorcer la réalisation de leur projet.
Dans la foulée de l’évènement, des fonds d’investissements viennent soutenir l’opération, en abondant certains des projets retenus.
1000 participants s’inscrivent en 48 heures, qui déboucheront sur une trentaine de projets.
Au final ce sont quatre de ces initiatives proposées au concours qui ont été mises en œuvre en Estonie.
Citons l’exemple de Zelos, qui a créé une plateforme intitulée Covid-help, elle met en contact les personnes âgées qui ont besoin d’une aide particulière avec un ou une volontaire. Ainsi, le système gère l’inventaire des demandes exprimées en ligne et planifie le travail des volontaires. Ce sont plus de 2000 volontaires qui se sont inscrits.
On peut ainsi explorer à l’infini la richesse et le potentiel d’innovation technologique que ce petit pays a su mettre en mouvement.
Défendre la démocratie : une sociologie engagée [e-book]
• Laurent Mucchielli [auteurs]
Format : 13,5 x 20,5 • 312 pages • ISBN : 978-2-37672-053-9 • 14.99 €
La démocratie est un être fragile et imparfait, produit d’une histoire qui n’est pas linéaire. Proclamés dans la lutte et dans le sang par les révolutions des xviiie et xixe siècles, repris par l’ONU dans une Déclaration se voulant universelle en 1948, les droits humains fondamentaux constituent depuis toujours un obstacle aux appétits insatiables de pouvoir et d’argent des puissants de ce monde.
À l’opposé des « experts » convoqués par ces puissants pour soutenir leurs projets, l’auteur défend une conception de l’intellectuel libre et désintéressé, mû seulement par les valeurs de liberté, de justice sociale et de solidarité. Dans ce livre qui est un peu un testament intellectuel, il analyse différentes formes de propagande, de corruption et de violence d’État qui gangrènent la démocratie dans les sociétés occidentales de ce début de xxie siècle.
Les textes rassemblés, écrits au cours des 25 dernières années, veulent à la fois éclairer sur la signification de conflits traversant la société française et défendre la démocratie. Qu’il s’agisse des révoltes dans les banlieues, du mouvement des Gilets Jaunes ou encore de la prise en otage des populations à l’occasion de l’épidémie de Covid, l’auteur s’efforce de redonner la parole aux dominés et de mettre au jour les techniques de manipulation et de répression mises en œuvre par les puissants pour neutraliser et discréditer toute contestation. Il montre aussi comment, à chaque crise, la panique conduit à s’en remettre très imprudemment à des pouvoirs exécutifs qui décrétent des mesures dites « exceptionnelles » tendant à se banaliser par la suite, ce qu’il appelle le Talon d’Achille de la démocratie.
Laurent Mucchielli, sociologue, est directeur de recherche au CNRS.
La démocratie populaire intégrale : une approche innovante pour donner le pouvoir au peuple
Réaliser la démocratie représente le plus grand défi de notre époque. En effet, la démocratie a toujours été pensée. Elle est le double de notre humanité qui a toujours cherché à expérimenter des formes de gouvernance. Comment répondre à ce besoin démocratique exprimé par tous les citoyens qui sont de plus en plus conscients de leur pouvoir. Et si la solution venait non des penseurs occidentaux mais bien de Chine ?
En effet, la Chine propose une nouvelle approche : la démocratie populaire intégrale. Serait-ce là la possibilité d’un système politique plus inclusif et participatif. Selon une définition récente donnée dans un communiqué de presse de PR Newswire, la "démocratie populaire intégrale" est un modèle qui permet aux citoyens de participer activement à la prise de décision à tous les niveaux, de l'échelle locale à l'échelle nationale. Dans cet article, je vais tenter d’explorer les principes clés de ce modèle et ses implications pour l'avenir de la gouvernance.
La "démocratie populaire intégrale" promeut une participation directe et active des citoyens dans le processus de prise de décision, ainsi qu'une répartition équitable du pouvoir politique et économique. Comme le souligne l’article sur le site de radio CRI,“fondée sur le système du congrès populaire, la "démocratie populaire intégrale" permet au peuple chinois de participer largement et en permanence aux activités politiques quotidiennes à tous les niveaux, y compris les élections démocratiques, la consultation politique, la prise de décision et le contrôle.”
Voici les principaux principes de la "démocratie populaire intégrale" :
La participation citoyenne : Les citoyens ont le droit et la responsabilité de participer directement et activement dans le processus de prise de décision, que ce soit par le vote, la consultation ou la délibération.
La transparence : Les décisions prises par les responsables politiques doivent être ouvertes et accessibles au public, afin de garantir que les citoyens puissent surveiller les décisions prises en leur nom.
La responsabilité : Les élus doivent rendre des comptes aux citoyens et être responsables de leurs actions, afin de garantir qu'ils agissent dans l'intérêt du peuple plutôt que dans leur propre intérêt ou celui de groupes d'intérêts particuliers.
L'égalité : La "démocratie populaire intégrale" promeut une répartition équitable du pouvoir politique et économique, de manière à garantir que tous les citoyens aient une voix égale dans les décisions qui les concernent.
La justice sociale : La "démocratie populaire intégrale" vise à réduire les inégalités sociales et économiques, en garantissant que les besoins et les intérêts des groupes marginalisés et vulnérables sont pris en compte dans le processus de prise de décision.
En somme, la "démocratie populaire intégrale" vise à mettre le pouvoir entre les mains des citoyens, afin de garantir une gouvernance plus juste, transparente et équitable.
Contrairement à la démocratie représentative traditionnelle, où les citoyens élisent des représentants pour les gouverner, la "démocratie populaire intégrale" permet aux citoyens de participer directement à la prise de décision. Cela se fait par des mécanismes tels que les assemblées citoyennes et les délibérations publiques.
La "démocratie populaire intégrale" vise à renforcer la transparence dans la gouvernance. Les décisions prises par les responsables politiques doivent être ouvertes et accessibles au public, et les citoyens doivent être en mesure de suivre les processus décisionnels de bout en bout. Cela signifie que les citoyens ont le droit de connaître les informations et les détails sur les processus de prise de décision, y compris les raisons pour lesquelles les décisions ont été prises, les alternatives envisagées et les conséquences potentielles des décisions. En outre, la "démocratie populaire intégrale" encourage les élus à rendre des comptes aux citoyens, de manière à garantir qu'ils agissent dans l'intérêt du peuple plutôt que dans leur propre intérêt ou celui de groupes d'intérêts particuliers.
En renforçant la transparence dans la gouvernance, la "démocratie populaire intégrale" vise à réduire les risques de corruption, d'abus de pouvoir et de prises de décisions injustes ou inappropriées. Les citoyens sont ainsi en mesure de surveiller les décisions prises par les responsables politiques et de s'assurer que les intérêts de la communauté sont pris en compte dans le processus de prise de décision. En fin de compte, la transparence accrue dans la gouvernance peut renforcer la confiance des citoyens dans leurs institutions et leurs dirigeants, et encourager une plus grande participation citoyenne dans la vie politique.
Sans doute devons-nous noter que la "démocratie populaire intégrale" semble être une approche prometteuse pour donner le pouvoir au peuple, cependant, elle doit relever plusieurs défis pour sa mise en œuvre. L'un des plus importants est la nécessité de garantir la participation équitable de tous les citoyens, sans exclure les groupes marginalisés ou sous-représentés. De plus, il est nécessaire de trouver un équilibre entre la participation citoyenne et la prise de décision efficace, afin de garantir que les décisions sont prises de manière éclairée et fondée sur des faits.
Nous devons ainsi conclure qu’au-delà de ces défis la "démocratie populaire intégrale" est une approche novatrice pour donner le pouvoir au peuple en permettant une participation citoyenne active, une transparence accrue et une responsabilité politique. Cette approche pourrait offrir des avantages significatifs en termes d'inclusion et de participation citoyenne. Si nous voulons bâtir un avenir plus juste et plus équitable, il est temps de considérer la "démocratie populaire intégrale". Et c'est précisément cela que la Chine propose.
Par Léa Bessis